Il n’est pas seul , non plus que le
Dragon de l’Apocalypse. Comme celui-
ci est accompagné de la première et de
la seconde Bête . et des Rois ou Génies
malfaisans, qui donnent à la Bête leur
force et leur puissance, pour combattre
l’Agneau , (i) Ahriman, citez les Perses
, pénétrant dans le Ciel, sous la
forme du serpent, pour combattre Ormusd
, et pour corrompre la Lumière ,
v paroîtsussi accompagné desDews ou
'des Génies malfaisans, qui tiennent de sa
nature , et qui concourent à ses opérations.
-On trouve en effet,dans cette théologie
, une distribution de l’Univers,
dont foutes les parties sont soumises à
l ’action de bons et.de mauvais Génies,
subordonnés eux-mêmes aiix deux premiers
Principes , auxquels ils sont attachés.
Plutarque, dans le passage que
nous avons déjà cité plus haut (a),donne
à Ormusd 24 Génies familiers , et
autant à Ahriman; lesquels en se mêlant
forment le mélange des biens et des
maux de la nature, et en se contrariant
, forment des chocs et des combats
qui, après bien des eliets variés ,
Se terminent par le triomphe complet
d Ormusd. Comme Ormusd a ses Anges
ou Amchaspands , Ahriman a ses
Dews et ses Paris ; et les uns et les
autres sont exécuteurs des volontés des
deux premiers Chefs ou Principes ennemis,
Dieu et le Diable. Ce sont nos
Anges de Lumière et nos Anges de ténèbres.
Comme on voit dans l’Apocalypse (3),
que l’Agneau a ses élus , ses serviteurs,
qui verront sa face , porteront son
nom sur le front, et qui régneront avec
îu i, dans les siècles des siècles, élus
que l’Auteur de l’Apocalypse appelle
le Peuple de Dieu, marqué de son
Sceau», et dont l’Agneau, qui est au
(1) A p ocal. c. 17. v . 13.
(2) De Isid. p. 370.
(3) C. 12. y. 3 .4 . et 5. c .2 1 . v . 3. c. 14» v . 4,
c. 7. v .2 7 .
(4) Zend. A ve st. T . 2. p. ^ 5,
milieu du Trône , est porteur , pareillement
Ormusd a aussi son peuple,qui
sera sans fin , au rétablissement des
«corps (4) , pendant le cours perpétuel
des êtres , tandis qu’à cette même époque
, le Peuple d’Ahriman disparoîtra
comme nous voyons dansl’A-pocalypse;
que(5)ceuxquiont adoré laBêteet por-
té son caractère sont jetés dans l’étau»
de feu et de soufre. Ce sont absolument
les mêmes idées tliéologiques, communes
aux adorateurs de Mithra et. de Christ;
ces derniers, ainsi que les Juifs , ayant
presque tout emprunté des Mages. En
conséquence nous suivrons les principes
théologiques de Zoroastre, commettant
les seuls qui puissent jeter de la lumière
sur une matière aussi obscure.
Le Zénd Avesta ( 6 ) nous apprend,
que l’étoeaété donné à Ormusd et à Pé-
thiarê Ahriman. Ormusd , élevé au-
dessus de tout, qui sait tout, et qui est
pur , étoit dans la Lumière du Monde.
Ce trône de lumière, ce lieu habité par
Ormusd , est la Lumière, première. Or-
musda étédansle temps;ilest, et Usera
toujours. C’est le caractère d’existence
perpétuelle, que prend le Dieulii-
mineux fie PApôcalypse. Il est celui qui
étoit, qui est, et quisera, (j)V^4/phad
l’Oméga, le commencement et la finjee-
lui qui est vivant dans les siècles des
siècles , dont le visage étoit aussi brïlpj
Jant, que le soleil dans sa force j et qui
est semblable à Ormusd au milieu des
sept Amchaspands.
Ahriman, existant aussi par le temps
(8), étoit dans les ténèbres premières. 11
étoitseul aumilïeu d’elles,lui qui est.appelé
le méchant;il a toujours été mauvais,
Ces deux principes, cachés dans
l’excèsdu bien et du mal, et sans bornes;
parurent et se mêlèrent, ensemble, les
jieux quüàs habitoient étoient aussi
(il) Apocalyp. c. 20. v . i5. et 21. v . 3.
(6) Zerid. Àve st, T. 2. p.343.
{7) C. 1. v. 8. et V.18.
(8) Zend; Avest. T . 2. 344.
sans bornes , savoir celui du grand Or-
musd, qui estapjpelé Lumière première ;
eitcelui du méchant, qui se nomme Ténèbres
premières.
Nous voyons pareillement dans l’Apocalypse
( f ) , que le Dieu vainqueur,
qu’accompagne l’Agneau , habite une
ville qu’il remplit de sa clarté , taudis
que son ennemi habite l’abyme, d’où sort
l’épaisse fumée qui obscurcit le Soleil,
et un Royaume tout ténébreux. L’un
est le Dieu de lumière , et l’autre le
Prince des ténèbres, dans la théologie
des Chrétiens.
Chacun de ces Principes (2) a donné
ce qui existe ; c’est-à-dire la masse des
biens et des maux de la nature, qui
forment cette totalité, laquelle ne peut
partir d’une seule source, comme le pen-
soient les Perses. Suivant leurs Docteurs
(3), le bien et le mal, le vice et la vertu
sont sortis du mélange de la Lumière
avec les ténèbres, sans lequel le
monde actuel n’auroit jamais existé.
Ce mélange doit subsister , jusqu’à ce
! que le bien et le mal'retournent à leurs
j Principes , et rentrent daps leur monde.
| Aibuféda ajoute,.que le bienetlemal(4),
la justice et. l’injustice sont nés de ce
[ mélange de la lumière et des ténèbres ;
I et que ce mélange subsistera, jusqu’à ce
que la. Lumière ait vaincu les ténèbres,
après.: quoi elle rentrera toute pure et
toute entière dans son monde y et les
ténèbres retourneront de même dans le
fleur. C’est ce que nous voyons ici dans
1 l’Apocalypse. Après que l’Agneau a
triomphé, aidédu Génie lumineux qui
i monte le cheval blanc , une ville nou-
Ivelle, brillante de clarté reçoit dans
json sein les amis de la Lumière, taudis
| que les Chefs des ténèbres’, le Dragon
I et la Bête sont précipités dans i’abyme
obscur, qu’ils habitaient primitivement.
| les Anciens en général, et les Chré_
I (>) Ap. c. 21. v . 11. et 23. c. 20. y . 3. c. 9.
I v 2. C. 10. V. 10.
(2) Zend. Avest. p. 345;.
I S Hyde , p. i6*i.
tiens mêmes, aussi bien que les Juifs, dïs-
tinguoient, comme nous le faisons encore
aujourd’hui, quand nous parlons,
comme le vulgaire , entre les régions
supérieures et les régions inférieures de-
l’Univers, et plaçoient. la Divinité ai*
plus haut étage du monde, au scinde
la Lumière Ethérée. Là tout étoit censé
pur , spirituel et tranquille ; tout
étoit bien et Lumière. La matière au
contraire, comme la lie de la-substance
universelle , est entraînée par son poids
au fond de l’espace. C’est là qu’étoif située
la terre profonde des ténèbres-,
qu’on pouvoit- appeler Chaos et Tar-
tare, dans le style des Poètes , et l’A-
byme, dans celui de l’Ecriture (5). On
distïnguoit donc une terre de Lumière ,
et une terre des ténè'bres , habitées par
chacun -des Principes opposés , et par
les Génies et les âmes qui s’attachent à
ces principes. Dans les Fables Grecques,
les Titans, et les Géans qui ont attaqué
le dieu delà Lumière, Jupiter, Junon
ou le Soleil peint avec les attributs de
l’Agneau, sont précipités dans l’abyme,
et dans les antres les plus profonds de la
terre,donl: les flancs ténébreux les a voient
enfantés. Les ténèbres et la matière, qui
avoient été leur berceau, devenoient
aussi leur tombeau , et Jupiter vailiqueur
les enchaînoit dans les gouffres
duTartare. Chacun des Rivaux , après
la victoire, étoit rendu à sa terre- et à
son monde; Jupiter à la Lumière, et
les Géans aux ténèbres. Ces- idée»,
comme l’observe Plutarque (6), étoient
la base de toutes les Fables sacrées ,
débitées dans les mystères. Dieu, dit
Lactanee (75, voulantfbrmerlerrioncle,
qui devoit être composé de choses tout-
à-fait contraires , commença par former
deux sources de ces mêmes choses,
lesquelles sont dans une opposition et
dans une guerre continuelle; savoir deux
(4) Apud. Pcôk. p. 143.
(5) Bausohr. T . 1. p. 5o8.
(6) D e liit’. p. 369.
(7) Luct. Instit. ij 2.- c. 9.
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