C H A P I T R E T R E I Z I E ME .
F . n suivant la série des aspects, que
nous présente le Ciel Astrologique , au
moment où leSoleil arrive à l’Equinoxe
de prinl emps,au lever de laVierge Céleste,
accompagnée du Vaisseau qui se lève
à son midi , et de la tête du Dragon
qui la suit au nord , nous appercevons
au couchant, sur les bords de la mer ,
déjà emportée dans les flots , au-dessus
desquels elle élève encore la télé ,
la grande Constellation de la Baleine
, placée sous le Bélier et les
Poissons. Cette Constellation monstrueuse
, appelée par Aratus (. i ) le
grand monstre,fut figurée diversement
dans différens siècles chez différens
peuples; et il panât, qu’en général on
a i u envie d’y peindre un monstre marin,
d’une espèce quelconque , pourvu
qu’elle fût monstrueuse. Aussi a-t-elie
porté différens noms , tels que ceux de
Draco , Léo ,, Ursus marinus ét Par-
dus , comme on peut le voir dans
Blaeii (2) Bayer , dans son Urano-
metrie (3) dit, que les astérismes de
cette Constellation semblent demander
plutôt qu’on y peigne le Dragon marin,
que la Baleine; et que plusieurs Sphères
anciennes et plusieurs monumens anti.
ques,trouvés à Rome, lui donnent cette
figure.Tht onlui donne le nom générique
de bêle féroce (4). Les Hébreux et
les Arabes l’appellentjle Lion-marin (5 ).
C’est peut-être le fameux Dragon',"gàr-
d:en de la Tors ai d’or, dout nous av ons
parlé dans la fabie desArgonautes, etqui
étoitné des mêmes parens que l’Hydre
et le Dragon du Pôle. Ces differentes
dénominations du monstre placé sous
séries ont été réunies dans le monstre
marin", que nous présente l’auteur de
l’Apocaly pse, au commencement de ce
13e. chapitre. L’auteur y voit du côté de
la mer, conséquemment au bord occidental
, au couchant , une bête qui
avoit sept têtes et dix cornes, et sur
ses cornes dix diadèmes , et sur ses
têtes des noms de blasphème. « Cette
» bête étoit semblable à un Léopard (6);
» ses pieds étoient comme des p:eds
d’ours ; sa gueule comme la gueule
» d’un Lion, et le Dragon lui donna sa
» force et sa puissance ». On voit, que
cet animal monstrueux est un composé
des différens monstres marins , que les
Sphères anciennesont peints sous Anes,
et désignés sous le nom générique de
Celé , gros poisson du genre nions-
treux des Cétacés. C’étoit un animal
qui tenoit du Dragon , de l’Ours, du
Lion et du Léopard , suivant le génie
des peintxes, et qui n’àvoit peut-être
été ainsi peint, qu’afin de rendre plus
effrayant le monstre, auquel on sup-
posoit 'qu’avoit été exposée Andromède.
Racine s’est étudié également à
composer des parties du Taureau , et
du Dragon le monstre marin , dont la
vue effraya les chevaux d’Hipçolpte.
Ce monstre,qui apparut du côté delà
mer, est absolument le même que 1rs
Sphères anciennes placent dans le premier
décan d'Ari.es , sous le nom de
P ied s eoe mari. Sa queue se lève avec
*dries : voilà pourquoi la Sphère P«“
sique dit Cauda piscis ex mari, ind&t
( 1 ) A ra tu s , v . 629.
(2) Cæsi. CcH. Astroii.p. 225.Sloffler. g. 14.
(3) B a y e r , Tab. 36.
{4) TUvou , p. 144.
( 5) K i r k e r , T . 2. p. 1. p. 199.
Nabod. Elem. Aslrol. p. 207. {6) A p ocalyp. c. 13. v, 2.
vipetto
tiperos in felle. La preuve que c’est
elle, ql,e désigne cette Sphère , c’est
due la poitrine et la tête de la Baleine
achèvent de se lever avec les derniers
degrés d'A n e s ; car' elle monte
à reculon ; et la Sphère place au
dernier décan , pectus piscis cùm cavité
ejus ; ce qui ne convient qu’à la
Baleine. Ce poisson qui sort de la mer,
et qui a le caractère de-la vipère, est
bicu semblable à ce monstre, qui sort
de la mer dans l’Apocalypse , et auquel
le Dragon donne sa puissance.
D’ailleurs tous deux étoient fils des mêmes
parens, et le coucher de l‘un et
de l’autre se fait en même temps.
Le Prophète Ju if, appelé Daniel,
au lieu de faire un animal composé de
ces quatre animaux différens, Dragon ,
Lion, Ours, Léopard , en a au contraire
fait quatre animaux différens,
et en cela il a dû s’écarter du texte
astrologique, que Jean et lui ont copié.
Mais l’un et l’autre ont évidemment
puisé aux mêmes sources ; et les
quatre animaux de Daniel , et l’animal
aux quatre formes de l’Apocalypse
sont absolument la même chose.
Voici ce que dit Jean (1) : « Je vis s’é-
«lever de la mer une bête , qui avoit
«sept têtes et dix,cornes , et sur ses
i » cornes dix diadèmes. Cette bête étoit
» semblable à un Léopard ; ses pieds
» étoient comme les pieds d’un Ours ;
«sa gueule, comme celle du Lion; et
» le Dragon lui donna sa force et sa
« puissance ».
Voici ce que dit Daniel. (2) « Je vis
» quatre grandes bêtes fort différentes,
«qui s’éievoient hors de la mer. La
j «première étoit comme un Lion. La
«seconde ressembloit à un Ours. La
1 «troisième à un Léopard ; et la qua-
j ” trième étoit terrible et extraordinai-
» rement forte. Elle avoix dix cornés».
(1) Ibid. c. 13. v.
(2) Daniel, c. 7. v . 3.
(3) Apocalyp. ibid. 0. 13. v . 3. c. '17. v . 12.
Relig. Unie. Tome LU,
N’est-ce pas évidemment ce Dragon
effrayant , qui donne sa force et sa
puissances la bêteà dixeornes, qui a une
gueule de Lion, des pieds d’Ours, et qui
ressembloitaussi au Léopard? Il paroîf,
que l’un a désigné séparément les Constellations,
qui se lient avec la Baleine,
dans leur aspect ; tandis que l’autre ,
suivant le génie Egyptien, ena composé
un seul animal monstrueux. La queue
de la- Baleine se couche au lever du
Lion, et au coucher du Dragon; elle se
lève au coucher du Loup , appelé
P ardus cirez les Hébreux, et avec le
passage au méridien inférieur de la
grande Ourse. Ces quatre aspects ont
été séparés par Daniel, et unis par
Jean ; mais c’est l’Astrologie qui a
fourni le type des quatre animaux ,
et de l’animal monstrueux, composé des
quatre de Daniel.
Pour achever de nous convaincre de l’identité
, il est à propos d’observer , que
dans l’Apocalypse elle â une tête blessée
(3) ; que les dix cornes désignent desRois,
qui donnent à la bête leur force et leur
puissance, qui doivent combattre contre
l’Agneau, et que l’Agneau doit vaincre.
Elle a une bouche qui blasphème.
Dans Daniel (4) , des cornes sont aussi
arrachées à la bête. Elle avoit aussi
une bouche qui blasphémoit. Il est dit
dans l’Apocalypse , qu’il lui fut donné
le pouvoir de faire la guerre aux Saints,
et de les vaincre ; et qu’elle n’ouvroit
la bouche que pour blasphémer contra
Dieu (5 ).
Il est dit pareillement, dans Daniel,
c. 7. v. 2i , que cette corne fit la guerre
■ contre les Saints , et avoit l’avantage
sur eux , jusqu’à ce que l’ancien des
jours parût. Que les dix cornes sont dix
Rois , ( c. 7. v.) dont l’un parlera insolemment
contre le Très-Haut., et exercera
sa puissance jusqu’à un temps ,
v . 2-20.
(4) Daniel , c. 7. v . 8. V.,2.20.
(5) Apocalyp. c. 13. V. 7 -