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j j mitre terre avoient disparu , et la
j j 11er n’étoit plus.
» Et moi Jean (1), je vis la ville
s) Sainte , la nouvelle Jérusalem , qui
» venant de Dieu descendoit du Ciel,
»parée comme une épouse , qui se
j j pare pour son époux». Et j’entendis
( 2 ) une grande voix , qui venoit
du trône , et qui disoit : “ Voici leTa-
j j bernacle de Dieu avec les hommes ,
» et il demeurera avec eux : ils seront
sou peuple , et Dieu, demeurant lui-
» meme au milieu d’eux , sera leur
» Dieu »,
» Dieu essuyera toutes les larmes de
j j leurs yeux , et la mort 11e sera plus.
» Il n’y aura plus ni pleurs , ni cris ,
j j ni afflictions , parce que le premier
j j état sera passé. Je vais faire toutes
j j choses nouvelles , dit celui qui est
j j assis sur le trône (3I ».
Voilà donc l’homme établi dans un
nouvel ordre de choses, different du premier,
durant lequelil avoit été soumis à
l’empire des ténèbres et du mal, qui
n’auront plus lieu dans ce monde , où
règne le seul Ormusd , principe de
Lumière et de bien. Cette opinion philosophique
est absolument celle des
Mages , si on en croit Théopompe ,
çité par Plutarque ( 4 ) , dont nous
avons plus haut rapporté le passage.
Nous avons vu, que les Mages , après
avoir fait la description des combats
ét des victoires alternatives d’Ormusd
et'd’Abriman, terminées par la défaite
entière de ce dernier, supposent qu’Or-
imisd vainqueur établira les hommes
dans un état de félicité éternelle.
Qu’Ahriman, après avoir fait beaucoup
de ravage dans le monde , sera entièrement
détruit et disparoîtra pour
tou jours ; que la terre changera de
face ; qu’elle ne présentera plus aucunes
inégalités , et qu’elle sera habitée
(1) Ibid. v. a, . <
(a) Ibid. v. 3,
(3; Ibid, v, 4,
par une génération d’hommes parfai-
tement*heureux , qui ne formeront
qu’un même peuple, qu’une seule ville
et qui parleront une seule langue. Qu’ils
ne connoîtront aucun besoin , et que
leurs corps, tout lumière, ne projetteront
aucune ombre..Ce sont bien là les
tableaux, que nous a présentés l’Apo-'
calypse dansles chapitres précédens, et
que l’auteur achève de nous offrir dans
ces deux derniers, à la suite de la description
de ces combats , et de la défaite
du mauvais Principe , et de la
victoire du Dieu Lumineux , qui a
terrassé son redoutable rival, l'ancien
Serpent , et qui a pris place sur le
grand trône blanc , devant qui la terre
ancienne et le Ciel s’enfuirent.
On retrouve la même opinion Philosophique
consacrée dans un Poème
Mystagogique des habitans du Nord,
connu sous le nom de Voluspa , et qui,
plusqu’aucunautre ouvrage, ressemble
à l’Apocalypse par son.obscurité et la
monstruosité de ses tableaux. C’est une
Prophétesse qui parle, et qui , jetantim
coup d’oeil sur les Sphères (S), lesquelles
roulent autour qjfun profond centré,
nous-peint le débrouillement du Chaos,
le choc des deux principes , leurs
combats, leurs victoires, et la défaite
du mauvais , qui combat aussi sous la
forme de l’horrible Serpent, que le
Dieu Thor, àtêtedeBoeuf, défait enfui.
Après quoi l’ancien monde est détruit,
et fait place à uu nouveau monde, peu-
pléd’habitansheureux, absorbés au seia
ae la Lumière.
A la suite de plusieurs combats, dont
nous ne donnerons point ici le détail,
et dans lesquels il est aisé de recon-
noître les combats d’Ahriman et de
ses Génies contre Ormusd , désigné
sous le nom d’Odin dans cette Cosmogonie,
011 lit au verset 5 r. ces mots,
(4) De Isid. p. 370.
Vplusp. v, 1 et «5,
Alors
R E L I G I O N U N I V E R S E L L E , * 9 7
«Alors le Dieu T ho r , fils d’Odin,'
»attaque et tue l’énorme Serpent; et
,, l’univers est vide de combattons et
„de héros (O. :
„ Le Soleil s’éteint ( 2 ) , la terre
„ se dissout dans la mer. Les étoiles
» perdent leur éclat. La: flamme dé-
„ volante atteint toutes les bornes de
„ la création et s’élance vers le Ciel.
„ Mais du sein des flots , ( 3 ) çlit
» la Prophétesse , je vois sortir, une
„ nouvelle terre habillée de verdure.
j> Les Ases (c) s’assemblent sur PI-
» da (qi Ils parlent de la destruction
» des. forteresses célestes. Us parlent de
„ grandes choses , dont Odin parloit
„ autrefois j j .
Là dans l’herbe on trouve éparses
ses tablettes d’or (5 ); Elles apparte-
noient au Père des Dieux et à sa postérité.
I c i on voit des moissons (6) mûres ,
qu’on n’avoit pas semées. Le maldispa-
roît dans le Cirque d’Odin.
A Gimlé ( au Ciel ) je vois une demeure
couverte d’or (y), et plus brillante
que le Soleil ; là habitent des
peuples vertueux, et leur bonheur n’aura
jamais de fin.
Voilà bien encore la doctrine des
Mages et celle de l’Apocalypse , que
nous retrouvons chez les Scandinaves.
La même succession de l’ancien et du
nouvel ordre des choses y est bien marquée.
Le mauvais Principe y prend également
la forme du Serpent. Chez les
Perses , c’est Mithra monté snrunTau-
reau ; chez les Scandinave? , c’est Thor,
dont le char est attelé de Boeufs, et
qui porte la massue à la tête de boeuf,
ÿ '1 triomphent du mauvais prineipe, du
oerpent ÀhrimaD. Dans l Apocalyuse,
Je vainqueur triomphe sous le symbole
de l’Agneau ; ce qui prouve que les
( 0 Ibid. v. 5 r.
(2 *) Ibicï, v. 52.
f31 Ibid, y. 53.
(L Ibid. y. Sj .
(5) Ibid. v. 55.
Relig. Unit/. Tome II I ,
deux premières Cosmogonies appartiennent
à des temps plus anciens ;
mais toutes nous ramènent anx contrées
septentrionales de TÀsie , dans
l’Asie mineure, l’Arménie et la Perse,
où le culte .Mithriaque et la Théologie
des deux Principes furent la Religion
dominante, i l paroît même, que
ces idées n’ont pu. naître que dans le
nord , et que c’est delà qu’elles ont été
portées en Egypte, où on les retrouve
dans la guerre des deux Principes Osiris
et Typhon , qui, comme Ormusd et
Ahnman, à qui ils répondent , sont
vainqueurs et vaincus successivement,
jusqu’à ce qu’enfin Typhon soit enchaîné.
Ils dévoient en conséquence
faire la base des mystères d’Isis , et
pareillemment aussi de ceux de Gérés
, en Grèce, qui en furent une copie.
Aussi ,1e Serpent figuroit-il dans les
mystères de Cérès, et dans ceux de
Bacchus , qui n’est que l’ Osiris des ‘
Egyptiens , comme Hérodote et les
Grecs l’ont reconnu eux-mêmes. Et
dans ces deux initiations le grand voeu
des initiés , comme nous Pavons dit
plus haut, étoit d’être affranchis du
cercle de la génération; (8), et de passer
dans le lieu de repos , qui les m.et-
troit hors des atteintes du mal, et les
rendoit à la vie bienheureuse; Ces idées
furent de toutes les Théologies , et remontaient
, comme dit Plutarque, à la
plus haute antiquité ; on n’en connaissent
point. l’auteur. Elles faisoient
la base des mystères et des ; sacrifices,
tant des Grec? , que des Barbares , et
se lioient au dogme de la Providence,
que les Légiste teurset les Prêtres a voient
cherché à établir (9).; Elles étqient des
dogmes de fo i, sur lesquels on he se
permettent au mu doute, et qu’il eût
été difficile d’eifacer, dit Plutarque,
(6) Ibid. v . 56. ,
(7) Tbid. v . 58. '
(8) Procl. in Tim. I. 5. p. 33Q.
(9) Piut. de Isid. p. 369., ,