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n’étoient pas difficiles à faire : qu’on
peut avec un globe céleste en faire pour
•tous les âges de la grande période de
2 5 ,ooo ans, c’est-à-dire, pour tous les
siècles, sans avoir besoin pour cela d’inspiration.
Inutilement encore invoquerait - on
le témoignage des historiens , qui en
parlent, ou qu’on a lait parler , (pp)
tel que Josephe. Outre que cet historien
écrivoit près de cent ans après le
temps où l’on fait vivre Christ, tous les
savans conviennent aujourd’hui , que
le passage, où il est question de Christ,
a été interpolé par une pieuse fraude ,
et qu’iln’est pas de J oséphe. Quant a Tacite
, lequel près de cent vingt ans après
la mort deCnristnous parle cluehef de la
secte orientale des Chrétiens , qui s’étoit
établie à Rome avec les Isiaques, avec
les mystères de la déesse de Phrygie, etc,
il dit ce qu’en disoient les Chrétiens ,
sans s’être donné la peine .de faire des
recherches et un examen critique d’une
chose, qui ne l’intéressoit guères , et
qui ne pou voit entrer dans le plan de
son histoire. Il semble n’avoir en vue,
que'de donner l’étymologie de la dénomination
des Chrétiens, sectateurs
d’un certain Christ , dit-il, qu’on débitait
avoir été mis à mort, sous Poncer
Pilate. Tacite par-là ne prouve pas plus
l’existence historique de Christ, qu’il
n’eût prouvé celle d’Osiris, si ayant à parler
de ce Dieu Egyptien, il eût dit qu’on
assurait qu’il avoit régné en Egypte, et
qu’il avoit été tué par Typhon son frère.
Il est arrivé à Tacite, à-peu-prtsce qui
arriverait à un historien Fiançais, qui
par occasion aurait à parler d’une secte
Indienne, laquelle depuis plus de cent
ans se serait établie en France, d’abord
très-obscurément , et qui cent ans après
commencerait à être plus connue et
persécutée , s’ il nous disoit qu’ils s’appellent
Bramines , du nom d’un certain
Brama., qui a , dit-on, vécu dans
î ’Iride. N6ûs~ garantirait-il pour cela
l’existencç de Brama ? Il faudrait, que
Tacite eût fait des recherches lesplus
exactes sur la vérité de l’existence de
Christ, sur sa mort sous Ponce-Pilate'
ce que n’a jamais eu intention de faire
Tacite. La question était, trop peu im-
portante pour lui. Il a dit ce qu’on di.
soit à Rome, d’après le témoignage des
Chrétiens , et rien de plus. II n’a jamais
prétendu s’err rendre garant. Si
cette existence eût été si indubitable,
on n’auroit pas vu dans le même temps
des.savans, qui examinoient de près
la question , puisqu’ils attaquoient le
culte des Chrétiens , leur dire , que ce
prétendu, Christ, qu’ils adoroient, étoit
le Soleil , comme nous l’avons vu dans
Tertullien, et comme nous avons prouvé,
qu’effectivement ils adoroient le Soleil
sous ce nom , et qu’eux mêmes alors
ignoraient la nature du culte, qu’on
avoit apporté de Judée à Rome, sous
le nom de culte de Christ.
Nous pourrions suivre encore plus
loin le système des rapprochemens et
des ressemblances, èt faire voir, que les
Chrétiens n’ont rien qui soit à eux exclusivement
, non-seulement dans leurs
mystères , ni dans leur théologie, mais
même dans leurs pratiques religieuses,
dans leurs cérémonies ,• et jusques dans
leurs fêtes. C’est un ouvrage particulier
à faire sur cet objet, et que je laisserai
faire à d’autres, à moins qu’une surabondance
de loisir ne me permette de
m’occuper de cette seconde manière de
démontrer la nature de leur religion, et
sa conformité avec les religions les plus
anciennes ; démonstration dont la
question présente sur l’origine de leur
religion n’a plus besoin. Je me bornerai
à un seul échantillon des erreurs grossières
où ils sont sur la nature des lûtes
qu’ils célèbrent, qui sont encore toutes
payennes, et qui appartiennent à l’ancien
culte du Soleil ,et à celui des Génies
qui forrrten t Son cortège.
Les anciens honoraient Bacchus ,
sous le nom de Dionysios : c’étoitaoj1
vrai nom chez les Grecs. On avoit
imaginé différentes aventures tragiques,
ipar lesquelles ce Dieu finissoit sa vie.
Tantôt on l’avoit coupé en morceaux
I p0ur Je faire cuire : tantôt il avoit été mis
jala broche. En Egypte on célébrait sa
mort, sous le nom de mort d’Osiris,
let une tête de Papyrus, abandonnée aux
flots du N il, alioit en porter la triste
nouvelle à Biblos , comme nous l’avons
vu dans Lucien.Il étoit regardé comme
i]ë premier Instituteur de la Religion
et des mystères , ainsi qu’Eleuthère qui
[les établit, suivant Hygin (i). On lui
donne à lui-même cette épithète , qui
en latin est traduite par L ib e r , nom
le plus ordinaire de Bacchus chez les
I Latins. On célébrait en son honneur
[deux fêtes principales , les unes au
[printemps, les autres au commence-
[ment de l’automne, {qq) Les premières
Ise célébroientà la vilie , et s’appeloient
Vürbana : celles d’automne hors la ville
Iet à la campagne : on les appeloit
\Rustica. (2) On y ajouta ensuite un
■ jour de fête par flatterie , en honneur
IdeDémétrius, roi de Macédoine: on ap-
lyA&cetteïèteFestumDemeirii, comme
ion peut le voir dans Plutarque (3). Ce
Iprince tenoit sa cour à Pella, près du
■ Golfe de Thessaloniqne : on en a fait
■ tout bonnement un martyr de Thessa-
Bonique , en 303.
I On donnoit aussi à Dionysos son
■ nom oriental deBacchos, on Bacchus;
■ on en a fait un martyr d’Orient ^sons
Be nom de St. Bacchus , martyrisé en
■ Orient, l’an 302, précisément au même
■ temps, que St. Démétrins en Macé-
P?ine; Les fêtes d’automne de Bacchus,
Bj “près ce que nous avons dit, dévoient
■ donc être annoncées dans le Calendrier
■ fayen Je cette manière : Festum
■ ûtj'om'su J Eleuiherii, Rusticum. Nos
■ P-nS a/ eux ont tout bonnement traduit ;
Bd ^s C s Denis, de St. Eleuthere et
■ e St. Rustique , ses compagnons. Us
G) Hygin. Fi,b. 225. mm Corsini, j f e , Attic. T . 2 p. 336. T . ï]
ont lu au jour précédent Festurtl D e -
melrii : ils- ont mis la veille dans leur
Calendrier, fête’de St. Démétrius, martyr
de Thessà'lonique, et la surveille,
fête de St. Bacchus ; ensorte J que si on
lit le Bref, ou le Calendrier, dont se
servent encore nos Prêtres , on y Verra
le 7 octobre fest. S. B acchi, le 8 festum
S. Demetrii, et le 9 , fest. s. s . ,
Dionysii, Eléutherii et Rustici.
Nous avons vu dans nôtre chapitre
sur Bacchus et dans l’explication du
Po'ëme de Nonnus, que les conquêtes et
les voyages de ce héros se términoient
par ses amours avec ^4.lira , ou avec
le vent doux personnifié dans lepoëme.
Eh bien ! deux jours avant la fête du
martyr de Bacchus on fête Ste. Aure
et Ste. Placide. Cette fête tombe la
surveille de celle de St. Bacchus , et le
lendemain de celle de St. Denis l’Aréo-
pagite, c’est-à-dire, le 5 d’octobre.*
Cet accord entre nos fêtes , et celles
du Calendrier Athénien , au mêtne
temps de l’année , seroit bien étonnant,
si ce n’étoit pas la même chose.
Rien n’est incroyable dans une société
d’hommes, qui font profession de
tout croire sans examen, et où une seule
réflexion -critique est un sacrilège.
C’est ainsi, que de la formule de
voeux formés par les anciens pour le bonheur
des autres et pour le sien , et dans
laquelle on souhaitait pérpetuam feli-
citatem, les Chrétiens ont imaginé dans
leurs litaniesuueinvocationà Ste. Perpétue
et à Ste. Félicité, qu’ils ne séparent
pas plus l’une de l’autre , que ne les sépare
la formule perpetuam felicitatem.
C’est, à-pen-près de même , mais moins
par ignorance, que par une suite du Génie
allégorique, qui personnifioit tout,
que les anciens Romains personnifièrent
les voeux de bonne année, dont
les souhaits renfermoient ces mots :
QuodJ’austum f e l ix que s i t , formule
(3) Plut. Vita Demetrii Corsini. ( ibid. )
T . i . p. 39. T . 3. p. 323.