
 
        
         
		C’étoit au commencement des semailles,  
 auxquelles  Proserpine  présidoit, au lever  
 du  Taureau  et  des  Pleïades, qui,  
 dans  le  calendrier  rural, fixoient  cette  
 époque  importante  (1).  Diodore  de Sicile  
 (2) nous dit  aussi, que la recherche  
 de  Cérès  se  célébroit  au temps des  semailles. 
 Théon unit dans  leurs aspects la Couronne  
 boréale, et la queue du Taureau,  
 ou  les  Pleïades  (3) ,   et  il  fait  lever  
 la  moitié  de  la  Couronne  avec  la  Balance. 
 Peu de jours auparavant,  laCouronne  
 précédoit le char du Soleil, etfixoit, par  
 son  lever  Héliaque,  le passage  de  cet  
 astre  dans  les  signes  inférieurs (4) , et  
 le commencement  du  règne  de  la  nuit  
 et  de  l’empire de Pluton.  Elle étoit donc  
 alors  comme  le génie  des  signes  inférieurs  
 , auxquels  elle présidoit  conjointement  
 avec  le Serpent.  Voilà pourquoi  
 elle  éloit regardée  comme  la lleine. du  
 Tartare, ou  de  l’Hémisphère inférieur,  
 et  de  nos  Antipodes :  aussi  Macrobe  
 dit-il :  Physici  ,  ternz  superius  Hemis-  
 phaerium  ,   citjils  partent  incolimus  ,  
 Veneris  appellatione  coluemnt  :  infe-  
 rius  vero  Hemispharium  terra  Proserpinam  
 vocaverunt.  Ergo apud Assyrios  
 sive Phanices,   lugens inaucitùr Venus,  
 quod sol annuo gressu  , p e r  duodecim  
 signùrum  ordinem  pergens  ,  partent  
 quoque  Hemispharii  inferioris  ingre-  
 ditur,   quia  de  duodecim  signis  Zo-  
 diacï  ,  se x   superiora  ,   s e x   inferiora  
 censentur ; et  chm  est in  inferibribus  ,  
 et  ideo  breviores  dies  fa c it   ,  lugere  
 creditur  Dea  ,  tanquam  sole  raptu  
 mords  temporalis  a  Proserpind reten-  
 to  (S).  Voilà pourquoi  Proserpine por-  
 toit  le  nom  de  Juno  inféra.  On  sait  
 également  ,  que  l’oracle  de.  Claros  
 donne  le  titre, de! Jupiter  inferus ,  ou  
 A’A d é s,  au Soleil, lorsqu’il parcourt les 1 2 3 
 (1)  Theon, p. .x35. 
 (2)  I  Sic.  1.  5 . 
 (3)  Theon,  p.  169. 
 44)  Columell. 1.  n, c . l ,p :  431. 
 *5)  Macrob.  Sat.  1.  i ,   c.  a i . 
 signes  inférieurs.  Ainsi  l’union  de  la  
 Couronne avec le Soleil, lorsqu’il passe  
 dans le“règne inférieur,et qu’il vaéchauf-  
 ferle côté du Pôle qui est sous  nos pieds  
 est aussi naturelle, que celle de Proserpine  
 avec  le  Roi du Tartare ; car par Pluton  
 l’on  doit  entendre  le Soleil,  peint avec  
 les  formes  d’Ophiuchus et  de  son  Serpent  
 ,  comme  nous  l’avons  prouvé ci-  
 dessus. 
 Dans le calendrier rural,  cette constellation  
 détermirioit  le  temps  des  semailles, 
  auxquelles  elle  présidoit, et on  
 l’invoquoit comme  le  génie  dépositaire  
 de la  force  germinatrice , qui  se  développe  
 dans le  sein  de  la terre.  Ce rap,  
 port  à la terre et à la végétation obscure,  
 qui  s’opère  alors  dans  son  sein  ,  lui  
 fit donner l’épithète de  Chtonia,  ou de  
 Terrestre  ,  qui  lui étoit commune avec  
 Pluton :  Genitabilem  et alendo  aptum  
 spiritum  Stoïci  de  sacris  dispictando  
 Dionysum nominant.  Cererem  vero  
 et Proserpinam  spiritum  p e r  terram et  
 frugespermeantem  (6). Cicéron,en parlant  
 de  ceux  qui  définissoient  leurs  
 Dieux  d’une  manière  incomplète  ,  en  
 ne considérant qu’un attributparticulier,  
 et  une  de  leurs  fonctions  principales,  
 nous  dit  :  Pluto  Proserpinam  rapuit,  
 quae Usçeetfovti gracè  nominatut,   quant  
 jrugumsemen  esse volunt (7). Porphyre  
 nous  en  donne  une  idée  encore  plus  
 juste  :  Proserpina  omnium  e x   semen-  
 te  nascentium  p  rases  (8).  Augustin  
 , nous  développant les idées Théologiques  
 des anciens sur Proserpine , nous  
 dit d’après Varron (9 )   :  In Cereris sacris  
 pradicantur  ilia  Eleusinia  ,   que  apui  
 Athenienses  nobilissima  fuerunt,  f   
 quibus  Varro  nihîl  interpretatur, nisi  
 quôd attinet  ad frumentum  ,   quod Ce-  
 res  invenit,   et Proserpinam  quant  /**■   
 piente  Orco prodidit  ,   et  hanc  ipsam  
 dicit  signijicare  foecunditatem  senti- 
 (6)  Cicer.  de  Nat,  Deor.  1.  a ,  c.  -6. 
 (7)  Cicer.  ibid. 
 8)  Porphyr.  de Ant. Nyinpb. 
 9)  August.  de  Ciy. D e i,  1.  7. 
 gum  .  .  .  D ic it  deindè  multa  in  epus-  
 MSterus  tradi,,  qutt  nisi ad frumenti  
 invendonem  non  pertineant.  Il  dit  
 a ille u r s ,  Proserpina-m  Deamexistima-  
 ramfrumenlis  germinantibus ;  et  dans  
 jiix autre endroit :  Ëam  esse  terra infer.  
 dorent partent :  deux  traditions, qui  se  
 concilient  dans notre Théorie. 
 E u s è b e   donne aussi une  explication,  
 fort  approchante  de  la nôtre  (1).  Pro-  
 ;  serpina seminum virtus est,: Pluto  vero  
 Sol,  qui  tempore  hyemis  remotiorem  
 I  jrtundipartem perlustrat.  Idcirco  rap-  
 I  (ant  ab eo  Proserpinam,  dicunt,  quanti  
 Ceres  sub terrâ latentem quæritat. Çj'eit  
 bien là notre système  ,  qui fait de Pluton  
 le Soleil  peint  avec  les  attributs  de  la  
 constellation ,  dans laquelle, le Soleil se  
 trouve en  automne, et qui par  son coucher  
 , accompagné  de  celui de  la  Couronne  
 ,  fixe  l’époque,  où  il  va éclairer  
 l’hémisphère inférieur  ,  lesrégions aus-:  
 traies et le Pôle.  Quem sub pedibus Styx  
 atra  videt manesque profundi  ( 1 ) . 
 Proserpine,qui, par son lever Héliaque,  
 déterminoit  le  passage  du  Soleil  aux  
 régions australes,et à l’Hémisphère inférieur, 
  déterminoit .six mois après,par son  
 lever  du  soir,,  le  retour  de  cet  astre  
 vers nos régions, lorsque l’astre du jour  
 ramenoit la  lumière  dans  nos  climats.  
 Ovide  fixe ce  lever (3) g au huit des Ides  
 de Mars , quatorze  jours ,  ou une demi-  
 lunaison, avant l’arrivée du Soleil àu Bélier. 
   Alors la  Couronne présidoit à l’Hémisphère  
 supérieur  ,  ou  Boréal,  règne  
 de la lumière, et fixoit les moissons Ègypr  
 tiennes, qui se  font  à cette époque. Delà  
 cette  fable, qui  suppose  qu’elle  étoit  
 six mois  aux  Enfers ,  et  ,six  mois  dans  
 le Ciel,  avec .Cérès  sa mère.  Il  devoit  
 donc y  avoir  deux fêtes de Proserpine ',  
 1 une  au Printemps, Vautre en automne;.  
 Aussi  l’Empereur  Julien  les  distingue  
 )flSU (4) î IÇt  d  appelle les  unes celles dn  
 Belier, et les  autres celles de la Balance. 
 (1) Euseh,  Præp. Ev.,1.  3. 
 Ù) Virg. Georg,. 1.  1, .YihjQx.i ir:oÔ 
 (3)  Oyid.  1,  3 ,.V .  439.  C il  >  ) 
 Sanè mysterià  bis  tri  konorem  Çerêris  
 Athenienses  célébrant.  Primum pdrva  
 ilia mysterià citni S ol AriétemperVàdit ;  
 majora cîim in Chélis vetsatur.  Il ajoute,  
 que  ces  dernières  étoient  des fêtes  lugubres, 
  dé deuil, d’âbëtintenoe. Plutarque  
 en  dit autant,  et Phomutus,  Opposant  
 entré  elles  ces  fêtés  s  dit à-péu-près  la  
 même chose :  Proserpinam omnium abs-  
 tirientiâ Cotant, ffàrn jejunabarit in  ho•  
 noreln  Cereris  ;  . Nam  qmini  aliqïtan-  
 do revfrumentaria penuriam  immitteret  
 Dea ,pbsl senientem propriis itsibus de-  
 traxerïtht qüiddarrt , ut sèminahdi tem-  
 pôte festum Dèa  cèlèbrarent.  A t  verno  
 tempéré Ded viren tem herbarh cuih lusu  
 etgaudio sacrhjvcant,   ■ Videntes illam  vi-  
 gorem  immiûére'  sègeti  e t  abundantia  
 spem protèndere,  Salluste le Philosophe  
 opposé  aiissi  les  fêtes  lugubres  d’automne  
 , célébrées? en honneur de Cérès ,  
 aux  fêtes agréables du printemps. 
 Les habitans  de  l’Ile de Naxe avoient  
 également deux fêtes  d’Ariadne  ,  l’une  
 en  Septembre  ,  qui  étoit  une  fête  de  
 deuil ,  et l’autre gaie, vraisemblablement  
 celle  du  printemps (5).  Or,  l’Ariadne  
 des habitans  de Naxe  est la Proserpine  
 des Grecs,  et les  fêtes célébrées  dans le  
 même  temps  avoient  pour  commun  
 fondement la même  apparence astronomique. 
 Un’trait  delà  vie de  PrOserpine , qui  
 présente en  apparence les  absurdités  les  
 plus étranges ,  s’explique  de la manière  
 la plus simple par l’Astronomie. Jupiter,  
 amoureux de  Cérès,  ne  trouvé d’autre  
 moyen pour obtenir  ses faveurs, que de  
 sé  métamorphoser  en  Taureau.  Sous  
 cette forme. Il trompe la Déesse :'elle s’irrité  
 de sa témérité. Pour l’appaiser,elle lui  
 présente }es  testicules d’un Belier, qu’il  
 a  céupés’ ;  et  lui  fait  croire  qu’il  s’est  
 mutile  hii-mêmeL île  cette  union  naît  
 Proserpine. Jupiter ery devient amoureux  
 ensùite  ,  et  s’unit à  elle  sous la  forme 
 Ji)  ow < - i  v OU  L' ,  : 1 1’  .t  • 
 (4)  Julian.  Orat.  9. 
 (5)  Plut.  vit.  Thesei.