DE L’A P O C A L Y P S E .
C H A P I T R E P R EMI E R .
(J ’ E s T de l’obscurité des sanctuai-
I res, qu’est sortie la fable du Tartare
I et de l’Elysée , et toutes, les autres
i fables destinées à intimider le crime ,
1 et à encourager la vertu. Parmi le
I grand nombre de ces fables sacrées,
I qui ont pour but d’imprimer dans le
I coeur des mortels la crainte de la jus-
I tice des Dieux, on distingue sur-tout
Icelles, qui menaçoient l’univers d’uae
I destruction totale , quand les généra-
Itions seroientassez corrompues, pour
I que la Divinité fit éclater sa ven-
I geance contre les coupables mortels.
I homme il y avoit un jugement, qui,
■ après la mort de chaque homme, déicidoit
de son sort, il y en avoit aussi
I "n, qUi décidoit du sort des généra-
[ u?ns ’ 1uand elles a voient mérité
I « être toutes détruites , pour faire place
I Pu ne nouvelle, composée
Innommes plus vertueux. Ce jugement
I ( evolt se faire avec le plus grand ap-
■ K et la chute de l’ancien monde,
■ lapité par des hommès coupables ,
Ictoit accompagnée des désastres les
■ Pus grands , et annoncée par les
■ présagés les plus terribles. Telle étoit
1 a grande menace , par laquelle on ef-
■ layojt les peuples, dans la vue de les
I °ntenir. Quoique jamais elle ne dût
I (?) Si. Cyril!. Catech. q. defutur. Judicio.
Relig. ünw. Tome III.
se réaliser , on la craignoit toujours ;
et c’étoit assez. S i , par hasard , on
osoit eu fixer l’époque , on en étoit
quitte pour la remettre à un autre
temps ; et le peuple n’en étoit pas
moins dupe. Car tel est toujours son
sort, quand il s’abandonne à des Prêtres.
De-là ces frayeurs perpétuelles,
dans lesquelles on tint le peuple, durant
les premiers siècles de l’Eglise ,
et ces funestes craintes de la hn du
monde, que l’on croyoit toujours prochaine
(i). On la remit ensuite au
onzième siècle , ou à l’an mille de
J. C ., parce qu’il est dit dans l’Apo-
calypse, que c’est après un règne de
mille ans de Christ, que la fin arrivera.
On a , jusques dans les derniers
siècles , réveillé cette chimère , qui
n’effraie plus personne. Mais les ouvrages
des temps voisins de l’Ere Chrétienne
ont conservé des traces de cette
opinion religieuse. Elle étoit consacrée
par les vers Sibyliiifs ; et Virgile
l’avoit en vue dans sa quatrième Eglo-
gue, lorsqu’il parie du renouvellement
du monde , et du commencement d’un
nouvel ordre de choses pour la Nature,
comme nous l’avons vu dans le traité
précédent. Les Prêtres Toscans (2) l’en-
seignoient aussi dans leurs sanctuai-
(2) Plutarq. T. 1. p. 455.
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