ï6 k E I I G I Q N U N I V E R S E L L E .
qn’avoit eue ce Me opinion , en faisant
la revue de tous les Peuples de l’ancien
et du nouveau continent, où. l’on en
trouve encore des traces.
Mais nous nous sommes sur-.tout
attachés'à examiner la nature de
ce dogme , et son développement
chez les Nations savantes , au milieu
desquelles vivoit la horde Juive , et
particuliérement chezles Egyptiens et
chez les Perses , qui, plus qu'aucuns
antres Peuples , avec les Çhaldéens
et. les Assyriens , ont du influer sur les
opinions religieuses des Ecrivains Juifs.
Nous rappellerons sur-tout ici ce passage
précieux de Diogène Laërce ( i ),
qui, après nous avoir dit que le système
des deux principes faisoit le fond
de la doctrine des Mages , ajoute que
les Docteurs J uifs étaient tes successeurs
de leur doctrine. Nous rappellerons
aussi le passage d’Augustin (2 ) , qui
assure que les Assyriens , auxquels les
Juifs furent souvent soumis , avoient
fondé leur Religion, comme les Perses,
sur la théorie des deux principes.
Il n’est donc pas étonnant que nous
cherchions, dans la Cosmogonie des
Juifs , leurs sujets et leurs voisins, les
mêmes dogmes que l’on professoit
en Assyrie, en Egypte et en Perse.
Car, ehcoj-e une fois, il n’y a point de
Cosmogonie révélée. Elles doivent donc
toutes porter l’empreinte de la science
humaine ; et quand, ou trouve un ouvrage
de science chez un Peuple ignorant,
c’est naturellement chez les dations
savantes , avec lesquelles il a eu
celle des combats du Serpent on grand
Dragon contre l’Agueau dans l’Apoca-
lvpse. Le Manichéisme , qui semble
placé entre la Religion des Perses et
celle des Chrétiens,etenformer comme
le lien intermédiaire , et. qui, dans le
fait, n’est, comme le Christianisme et
lé Judaïsme, qu’une secte de la Religion
des rapports et un long commerce,
qu’il en faut chercher l’origine.
1 Comme les Perses nous ont paru
avoir sur-lout influé sur les opinions
des Juifs et des Chrétiens , nous avons
donné un certain développement à leur
théorie sur les deux principes , laquelle
èntre comme élément principal dans
la fable du Serpent d’Eve, et dans
(1) Riagen. Xaert. Proerrr. p. 6.
(ï) Aujjust, de CW. dei^ 1- 5. c. 3.
des anciens Mages, nous paroit
aussimériter une attention particulière.
C’est pourquoi nous lui donnerons ici
une étendue que nous ne lui avons
pas donnée ailleurs ; et on y saisira
plus aisément le passage de ces idées
anciennes dans les sectes modernes,
qui, depuis Auguste, passèrent dans
1 Occident.
Manès avoit composé un Ouvrage
intitulé les Miatères , où il s’agissoit de
la création du monde et des deux
•principes opposés de la nature, qui
effectivement sont mis en scène dans
l’oeuvre de la création , connu sous le
nom de Genèse (1). Epiphane prétend
qu’ ilconmiencoit ainsi : Dieu et la matière
, la lumière et les ténèbres , le
bien et le mal existoierit. Us étoient
tellement opposés , qu’ils n’avoient aucune
communication ensemble. Ces
trois idées effectivement sont, les plus
prononcées de toute la Genèse. On y
voit un Créateur et une matière sur laquelle
il agit; les ténèbres, qui couvrent
la matière ohaotique et la lumière
qui jaillit du sein uu chaos*. Ee
Créateur trouve que tout ce qu’il produit
est bien ; mais vient ensuite son
ennemi, sous la forme du Serpent,
qui introduit le niai qui n’étoit pas
encore connu. Ainsi, les trois tableau!
opposés, Dieu, Lumière et Bien , Démon
, Ténèbres et Mal, se trouvent
dans le Traite dçs Mystères de Dfanès,
et dans la Genèse de Moyse.
On prétend que , dans ctt Ouvrage,
Manès (2) blaspnémoit le,Nouveau
. Testament-
( t) Beausobre, T . 1, p. as*.
(2) Ibid, p, 47.
Testament. Peut-être Manès rappeloit-
il à sa véritable origine cette Cosmogonie
, et la blasphénioit-il , comme
nous la blasphémons ici , en montrant
qu’elle 11’offre1 qu’une fiction sur les'
deux principes de la Théologie des
Mages.
Il ne seroit pas même étonnant, qu’il
veut fàit entrer quelques idées Astrologiques
, connue nous allons le faire
dans Sotre'explication ; ear Manès et
ses Disciples étoient instruits dans cette
science (i) , ainsi que lés Mages , dont
nous développons ici les dogmes théologiques
, qui font la base de la Genèse,
Scythien et Manès (2) avoient donné
quelque vogue à Ces dogmes antiques ,
dans les premiers siècles du christianis-
me.On prétend qu’ils les avoient empruntés
de Pythagore.Darisla dispute de
Cascar, où l'auteur cherche à prouver
qu’il y' a deux Dieux , dont l’un est la
lumière et l’autre les ténèbres, on donne
à entendre que cette théorie faisoit par-
tiedela Théologie des Egyptiens, chez
qui Pythagore avoit été s’instruire (3);
Nous avons effectivement déjà vu dans
le Traité d’Isis et dans la vie d’Osiris,
que la Religion des Egyptiens n’avoit
pas d’autre base. ■
Mais Abulfarage (4) assure que Manès
n’avoit fait que repolir l’ancienne
doctrine des Persans, lesquels, comme
Mânes , reconnoissoient deux principes
ennemis , et tous deux eoéternels. lies
Maguséens, suivant Sbaristhan ( 5 ),
admettent deux conducteurs éternels •,
qui sont le bien et le mal, le vice et
la vertu, l’utile et le pernicieux, dont
I un s’appelle la lumière et l’autre les
ténèbres : Pu» et Yezdan ou Dieu, et
j autre Ahnman ou le Diable. Ton) e
Jour religion roule sur cette distinction
, et toute la science des Mages a
pour objet d’expliquer les causes" du
mélange des deux principes, et d’indiquer
, comment la lumière vient à bout
de se dégager des ténèbres. Delà Cette
•vénération singulière que les Mages et
les Philosophes Çhaldéens avoient pour
la lumière, et cette' aversion infinie
qu’ils manifestaient pour les ténèbres,
suivant Beausobre (6).
Poock assure, d’après Abulfcda, que
c’étoit une doctrine reçue dans toutes
lés sectes différentes du Magisme,
qu’il (7 ) existe dans la nature deux
principes , et que les Docteurs n’éteienti
partagés entr’eux, que sur la-question’
de savoir, si ces deux principes sont
coéternels. Les uns sou'tenoient qu’ils
le- sont en elfet ,• et les1 autres préten-
doient, qu’il n’y a que la lumière qui
soit éternelle.
- Telle était vraisemblablement l’opinion
d’Archelaüs (8), dans la dispute
de Cascar contre Manès. En effet il
y veut prouver, contre le sentiment de
celui-ci, que les ténèbres n’existent pas
par elles-mêmes, et qu’elles sont l’effet
d’un corps opaque et de la matière, qui
intercepte la lumière. Il suppose ’donc j
qu’avant la création du Ciel, de. la
terre et de toutes les créatures corporelles
, une lumière constante- éclaircit
tout l’espace , parce qu'il n’y avoit
aucun corps qui l’empêchât de se répandre
par-tout. Cependant la Genèse
suppose l’existence des ténèbres , qui
eouvroient la face dé l’abîme . avant
celle de la lumière y qui fu t un effet
de l’actiomcréatrice ; à moins qu’on né
dise, que la Divinité fit jaillir de’son
sein un rayon de la lumière éternelle
qu’ellehabite,pour dissiper les ténèbres
qui eouvroient le chaos. Quoi qu’il en
soit, il est évident qu’il n’y a dans
tout cela, qu’une distinction métsphy-
( 6 ) Beausobre, ’J’. T, p. 397.
( 7 ) Id em , T . 1 , l . ï i , c. 2 p. i 6t ,
Poook, p. 146.-
(fi) Act. Arch. p. 32. ■
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