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les, effets sublunaires comme produits
par l’action des Planète» , plus il y
avoit de Planètes réunies , plus l’action
étoit forte, et plus l’effet étoit supposé,
grand. Donc le plus grand effet
étoit celui, qui étoit le résultat de l’action
des sept Planètes réunies dans le
même signe , et soumises à la même
influence. Donc la plus grande somme
de chaleur possible | et conséquemment
celle qui produisoit la conflagration,
devoit avoir lieu au moment, où les 7
.Corps. ;se .trouvaient unis; et; agissant
sur une même ligne , dans le point
solstitial , ou au maximum de l’Eté ;
.dans le .ligne le plus chaud, ou au
Cancer.. Car , ies anciens Astrologues
attribuoient à l’énergie .des signes cé^
lestes les phénomènes météorologiques
, qui arrivoient , lorsque le Soleil
leur étoit uni. De-là vint, que S.irius ,
.qui se lève avec le Cancer, était cen-
.sé être la rause des ardeurs brûlantes
de la Canicule. U en fut de même du
Lion, qui occupa autrefois le Solstice.
On appliqua le même principe au
signe solstitial d’hiver , autrefois le
Verseau , et ensuite le Capricorne,
.notés tous deux comme signes humides
dans les; livres d’Astrolpgie. Donc
la réunion des sept influences Planétaires,
confondues ensemble dans le
mime point du Ciel, le plus humide,
r donnoit la plus grande- aboudance
. d hu-midHé possible,-et. conséquemment
avoit’ produit et devoit toujours produire
celle du déluge ; car, on n’én
-connoît pas de plus grande. En un
mot , le plus grand etic-t appartenoit
nécessairement à la plus forte cause,
r. qu’on, pût imaginer.
Nous ne disconvenons pas,, que,, la
. terre n’ait .souvent éprouvé de grands
chan.gemens',,.par des explosions volcaniques,
pajjdes.tremblemensde terre,
des atfaissemens,,;;et des inondations
_. lqç^ieij,,Nous groyons même, qu’il, est
possible, que ces catastrophes réelles
(j) Acad, Iascrig. T. 31. p. 13s.
I V E R S E L L E.
aient fourni des traits aux fictions Astrologiques
, et un moyen de les accréditer
dans l’esprit des peuples inti-
midés par les Hiérophantes, qui ne né-
gligeoient rien de tout ce qui pouvoit
affermir leur empire sur les mortels
crédules et timides.
Mais nous soutenons, que ces destructions
périodiques , qui Se repro-
duisoient à la fin des grandes années
et à la consommation des sièles, dam
les poèmes sacrés de l’Egypte ef de
l’Orient , et qui out é té prédites oh
chantées sous le titre de déluge deDtu-
ca lion, de Xixutrus, de Noé, etc. ou dW
.brasement de Phaéton., sont de pures
fables, qui peuvent tout au plus amit
ser des enfans , bien loin d’avoir dé
intimider des hommes , et devenir
l’objet dé la croyance et de l’effroi
de l’uni vers.. Employer l’érudition,
pour donner à ces chimères astro,
logiques les; couleurs de l'histoire et
de la vérité;, c’est faire de Pesprit le
plus coupable abus ; et la science alors
est uu malheur de plus pour l’humanité.
Les vrais, savans ne.s’y sont point
laissé tromper,. Platon , observe judicieusement
M.. Ereret (1) , contriluia
plus que personne à accréditer la fiction
du déluge-, qui lui étoit nécessaire
, pour donner quelqu’apparence à
sa fable de l’IsIe Atlantique , qu’on
ne doit, ajoute, ce savant , regarder
que comme une fiction philosophique,
Nous n’âvons aucun, détail des inondations
d’Ogygès et de Deucafion.
Mais peu apres Alexandre, on troues
dans l’histoire Chaldéenne de Berose,
de quoi embellir cette tradition Grecque.
Sanchoniaton, dans sa.Cosmogonie
Phénicienne, n’en parle point
Le silence , que gardent Homère et
Hésiode sur les déluges d’Ogygès et de
Deucafion , montre que cette tradi?
tion était fort obscure, dans son origine.
Le silence;des plus anciens p«6"
tes a été imité par. les plus anciens d
R E L I G I O N U N I V E R S E L L E .
[ta plus respectables écrivains de la
IGrèce , Hérodote, Thucydide et Xé-
Inophon, quoique cet événement dût
Inaturellcment trouver sa place dans
Ice que les deux premiers rapportent
[de l’ancienne histoire , et des diverses
[révolutions des nations. Pélasgiques et
[Helléniques. Hérodote noinnie Dcuca-
[lion (1) , et dit qu’il régna sur la
[phtiotide, canton de Thessaiie , qui
»fut le premier séjouT des Hellenes. Si
lia tradition du déluge, dont parle Piu-
Idare , lui avoit paru une tradition
[historique , continue toujours M. Fre-
|ret,il enauroit sans doute dit quelque
|chos<y*feî5**;< - >*•
[ Ces réflexions de M. Freret setrou-
[vent justifiées par la théorie Astrolo-
[gique , que nous venons de develop-
Iper, et par l’accord des traits de la fie-
I lion avec les positions -Astronomiques.
]La seule erreur de 'Freret est d’avoir
cru, que les petites inondations de la
[Grèce avoient donné lieu à' l’exagé-
[ration et à la fable du déluge univer-
[sel de Deucafion , tandis que c’est
[dans l’inondation périodique de l’E-
Igypte , d’où étaient parties plusieurs
[colonies , pour s’établir en Grèce ,
[qu’il faut en chercher l’origine. II y
la uB fond sans doute de réalité, dans
11» ciel, du côté des aspects qui four-
fcissent dés traits à la fiction, et sur
[la terre , dans le débordement qui ,
(tous les ans au Solstice , change en
i
lune vaste mer les campagnes de l’E-
igyptemais ce fond , ou ce canevas,
[brodé de tant de dessins merveilleux,
■ appartient à la Physique et au Ciel , et
luon à l’histoire ; et cette fable contieut
Tencove, comme toutes les autres,
■ l'histoire de lit nature embellie , et non
[pas,comme on l’a prétendu tant de
Près, celle des hommes altérée et dé-
jngnrée. Retranchons donc des annales
[«es peuples ces fictions, qui prises pour
autre chose que ce qu’elles sont. , les
déshonorent ; mais qui, rendues à leur
origine , souvent sont ingénieuses et
même philosophiques. Que ces immenses
périodes , qui enhardissent certains
Clironologistes, et qui en alarment
d’autres, soient réduites à leur juste
valeur ; c’est-à-dire , à de pures fictions
, qui ne doivent ni gêner , ni
mettre à l’aise l’érudition • et -que la
raison, qui doit toujours marcher
avant l’autorité, et la juger, décide
enfin du sort de toutes ces traditions
merveilleuses , que créa l’imagination,
que perpétua 'l ’ignorance , et que la
fausse érudition respecte et encense
encore. Il vaut mieux , après tout ,
risquer de perdre une ou deux vérités,
que de recevoir et de perpétuer
une foule d’erreurs, qui flétrissent la
raison , avilissent la science, et qui
portent aux siècles les pins recules les
témoignages honteux de notre crédulité.
Dans l’explication que nous venons
de donner de la fiction de fa Vache ,
dont les quatre jambes répondent aux
quatre âges de la période Indienne ,
et dans l’explication des déluges , on
trouvera quelque différence avec les
conjectures, que nous hasardâmes , il
y a quelques années, sur cette matière
(2). Mais en les donnant , nous
nous étions réservé le droit de revenir
sur nos pas , lorsque le temps , et un
travail plus mûr, dans une carrière
toute nouvelle , nous auroient fourni
des solutions plus sûres et plus exactes.
C’est un droit même auquel nous
ne renoncerons jamais ; et il n’est point
de sacrifice que nous ne soyons résolus
de faire à l’amour de la vérité, dans
quelque temps qu’elle s’offre à nous ,
et de quelque part qu’elle nous soit
présentée.
( 1 ) H cfocI, 1 . J . p . 3 6 .
(») Mercure ck ï r a n c g , année 1783 , sajnecli
14 juin.
As iron, fi la-Lande , vol. 4,