
eft punie par une forte indigeftion, ce qui a lieu
quand elles vont dans les bois, & lur-tout dans
les jeunes tailles de chên-es, au teins de la poulie.
On a donné à cette indigeftion le nom de mal
du bois , de bois chaud, de brou, &c. J ai vu un
troupeau de Chèvres qui en penfa périr. Voyez le
mot Bois(maladie de). On doit écarter les Chèvres
des terres cultivées, des vignes & des bois, ou
elles cauferoient de grands dommages *, car les
arbres quelles ont broutés périffem preique
tous. ,
Il y a en France beaucoup de troupeaux de
brebis, parmi lefquelles on mêle des Chèvres.
Elles lont toujours à la tête, faifant bande à
part. Elles mourroient dans nos climats fi on ne
les mettoit pas à l’abri dans l’Hiver. Il faut même
les lai fier à l’étable pendant les neiges & les frimais.
11 eft néceffaire, dans cette faifon fur-tout,
de leur donner de la litière renouvellée fouvent,
afin qu’elles ne foient pas dans une humidité,
qui leur déplaît. Lorfqu’on a aflez de Cbevres
pour en faire un petit troupeau, il vaut mieux
les mener aux champs , féparées des brebis , a
caufe de l’inégalité de la marche & du penchant
des Chèvres à s’écarter toujours.
Le proverbe qui dit que jamais Chèvre ne
mourut de faim , prouve que cet animal n eft pas
difficile à nourrir. En Eté , les Chèvres vivent î
des herbes & des feuilles, qu’elles trouvent aux ,
champs. En Hiver , on peut leur donner du foin
ou autre fourrage fané à part, & des feuilles J
cueillies pendant que les arbres étoient encore 1
en sève, & qu’on a fait defféeher. Elles man- j
gent celles de la plupart des arbres. On leur
dorme suffi des raves, du jo-marin, des navets,
des choux , & autres alimens, dont ou nourrit
les brebis. On les fait boire loir & matin.
Au Mont-d’Or, près de Lyon , renommé par
fes fromages de Chèvres , on nourrit ces am-;
maux toute l’année à l’écurie, avec du marc de
raifin & des feuilles de vigne confervées dans
des cuves , qu’on remplit d eau, de manière que
le marc & les feuilles furnagent. Elles mangent
suffi bien volontiers le marc des huiles de noix,
de navette, de colfa , d’olives, de pavots, &c.
Le fon mêlé d’un peu d’avoine, ou bouilli avec
les épluchures des herbes potagères, la farine
de maïs, ou bled de Turquie , & les pommes
de terre, font propres à nourrir les Chèvres,
& à augmenter l’abondance de leur lait. Quelques
perfonnes preferivent de jeter un peu de
jel dans l’eau, dont on les abreuve, ou de leur
en faire prendre en nature. Je ne fais jufqu’à
quel point le fel peut êne utile à ces animaux.
En °énérai, cette fubflance efthienfaifanre -, mais
il faut que ia dqfe en foit toible , & n excède
pas rroi* gros oac femaine pour chaque Chèvre.
M. Thorel ,'( Cours complet d’Agriculture)
croit devoir évaluer à cinq cens le nombre des
plantes que mangent le.s Chèvres. Il n explique
pas d’après quelle bafe il établit cette opinion. A
moins d’avoir eu en fa poffelfion tomes les
plantes connues des pays, où il y a des Chèvres
, & d’avoir eftayé de leur en donner, if eft
difficile de décider au jufte quelles font toutes
celles qu’elles refufent, & toutes celles qu’elles
ne refufent pas. M. Thorel affine encore que la
J'abine , Y herbe aux puces, les feuilles & le fruit
du fufain , & les efpèces de napcltuept les Chèvres.
Mais il auroit dû dire par qui ces faits,
dont je ne nie pas l’exiftence, ont été vérifiés.
Les Chèvres coûtent peu à nourrir, & donnent
un produitconfidérable relativement à leur
taille. D’abord elles font du fumier qui eft chaud,
comme celui des moutons. On trait les femelles
deux fois par jour , & on en obtient un lait
abondant pendant quatre ou cinq mois. Ce lait
eft plus fain & meilleur que celui de brebis. On
l’ordonne en Médecine pour rérablir les efto-
macs délabrés, fl tient le milieu entre le lait d’âneffe
& celui de vaches. En Languedoc & en Provence,
on fait beaucoup de fromages avec le lait de Chèvre,
il n’eft pas aflez gras pour donner du beurre-, ce
qu’il en donne eft toujours blanc, & a le goût
de fuif. Le fromage de Chèvre fert d’appas pour
prendre le poiftoh. On allure que des Chèvres
bien nourries peuvent donner jufqu’à quatre pintes
de lait par jour. Beaucoup de vaches en donnent
à peine cette quantité. Voyez le mot L ait.
On mange la chair des jeunes chevreaux
comme celle dès agneaux. Aux environs des
villes , où l’on en a le débit, on fait couvrir les
Chèvres de bonne heure , afin que les jeunes
chevreaux foient bons à manger peu de teins
après Noël. Pour être bons ,il ne faut pas qu’ils
aient plus de trois'femaines. Si on veut les vendre
plus tard , & quand ils ne tettent plus, il faut
couper, les mâles dont la chair prend un
maavais goût. En général, dans les provinces
du Nord de la France, la chair du chevreau ne
vaut pas celle de l’agneau ; peut-être en eft-il
autrement dans les provinces du Midi. Au refte,
on foigne & on nourrit les jeunes chevreaux
comme les agneaux. On engraifie les boucs &
les Chèvres,A la manière des moutons & des brebis.
Voye% Bêtes a l a i ij e .
Le poil de Chèvre, non-filé, eft employé par
les Teinturiers, à la compofition de ce qu ils
nomment rouge débourré ; il entre dans la Cabri—
\ cation des chapeaux-, lorfqu’il eft filé, on en fait
diverfes éroffes, telles que le camelot, le bon-
racan, &c. des couvertures de boutons, des
gances & antres ouvrages de mercerie. Les Ruf-
fes, qui connoiftem la valeur du poil, pour lui
donner de la qualité, peignent leurs Chèvres
tous les mois.. Le poil de la Chèvre eft plus fin
que celui du bouc.
Le fu if ou la graiffe du bouc & de la Chèvre
eft employé, comme celui du mouton & du
‘ - ' “ boeuf
boeuf, pour faire des chandelles. Les. Corroyeurs
s’en fervent pour l’apprêt des cuirs.
Leur chair eft d’un goût médiocre, fur tout dans
les provinces feptentrionales-, mais les pauvres-
gens ou ceux qui ne fonr pas difficiles, la mangent
comme celle du mouton. La faveur, qui lui
eft particulière, s'affbibîir fi on la conferve falée
quelque tems. L’Italie & l’Efpagne, font les
contrées de l’Europe où l’on mange le plus de
Chèvres. Les anciens Grecs en mangeoient encore
davantage.
Avec la' peau de Chèvre, on fait du mar-
roqnin, du parchemin, des fouliers, des outres,
on vaifieaux pour tranfporrer les vins & les
huiles de Provence & du Languedoc. On allure
qu’en Orient on traverfe les civières, & qu’on
navigue fur i’Euphrate, avec des radeaux portés
fur dès outres. On imite avec la peau de Chèvre
le chamois. Les peaux de Chèvre de Corfe,
égalent en beauté celles du Levant, pour former
dès marroquihs.
Chèvres de Barbarie ou d’Inde.
La' Chèvre de Barbarie ou de l’Inde donne
deux à trois fois plus de lait & de fromage, que
la Chèvre de France. Elle fournit un poil plus
fin, & par conféquent propre à faire de plus
beaux camelots. Les Anglois ont difperfé cette
variété) qu’on peut appeller une race, dans les
pays maigres & montagneux,, où les pâturages
ne font pas aflez bons pour les vaches & pour
les brebis, Les Hollandois en tirent aüffi un bon
parti. 11 ne tient qu’à nous de multiplier cette
efpèce fi profitable, puifqu’on peut s’en procurer
en Angleterre, en Hollande & même en Provence,
où le chevreau s’appelle befon.
Chèvres d Angora.
Les Chèvres d’Angora ont les oreilles pendantes.
Elles fe mêlent & produifenr avec les nôtres. Les
cornes du bouc s’étendent horizontalement de
chaque côté de la tête, & foi niant des fpirales
à-peu-près comme un tirre-bourre. Celles de
la femelle font courtes & fe recourbent en arrière,
en-bas & en avant , en forte qu’elles abou-
tiflent auprès de l’oeil. Leur poil eft très-long,
très-fourni & très-fin. La Chèvre d’Angora,d’après
cette défeription , diffère de celle de Syrie, dont
j’ai parlé plus haut.
Je ne puis mieux faire connoître tout ce qui
concerne les Chèvres d’Apgora, & les avantages
quelles peuvent propurçr, qq’en rapportant en entier
un Mémoire bien fait de M . le Prélident de la
Tour - d’Aigues\, inféré dans les Mémoires de’
la Société d’Agriculture, Trimeftre du Printems,
année 1787. On ne voit nulle part rien de plus
complet fur l’hiftoire de ces animaux , & fur la
préparation de leurs précieufes toifons.
w Les villes d’Angola & de Beibazard, fi ruées
Agriculture. Tome I I I ,
en Natolic, province de l’Afie mineure, font les
lieux ç>ù l’on nourrit les Chèvres d’Angora. Les
territoires de ces deux villes, qui ne font féparés
que par une rivière montueufe c ’eft - à - dire,
couverts decôteaux, ce qui les rend particuliérement
propres à la nourriture de ces animaux
qu’on fait ne point aimer les plaines, La pofi-
t-ion perpendiculaire de leurs jambes & de leurs
p ied s ind ique d’ailleurs qu’ils font deftinés à
gravir & à parcourir les lieux les plus efcarpës. n
« On élève ces animaux avec le plus grand
foin dans ces centrées, parce qu’ils en font la
richefle, Leur toifon y eft toujours préparée &
n’en fort que filée & fabriquée en étoffes connues
fous le nom de Camelot d Angora, étoffe fi belle
qu’elle n’eft deftinée par fon prix qu’à l'habillement
des plus riches du pays & de la narion
Turque. »
« Toutes les nations Européennes ont des
comptoirs fur les lieux pour l’achat des fils.
Ceux qu’on expédie pour la France font envoyés
dans les manufactures de Lille & d’Amiens >
où l’on fabrique des camelots , ou poils y ou
mi-foie, n
u Les fils d’Àngora obtiennent la préférence
fur ceux de Beibazard, parce que les Chèvres
font mieux foignées dans ce premier endroit.
Non-feulemem on les écarte avec attention de
tous les huilions, pour que leur toifon n’en foit
point altérée ; mais le berger pouffe même l’attention
jufqu’à les peigner fréquemment, n
« La tonte fe fait à la fin de Mars ; fi le cifeau
n’enlevoit pas la toifon , elle tômberoit bien-tôt
d’elle-même , comme fi la nature vouloiz débar-
raffer l’animal d’un poids qui lui deviendroit
incommode pendant l’Eté. Celle du dos tombe
la première, & le refte fe fépare fucccflîvemeni
de toutes les autres parties. »
« Après la toifon les habitans travaillent à la
préparation des fils-, femmes, filles, vieillards,
hommes & en fans , toüs peignent & filent. »
« La chair des Chèvres d’Angora forme la
nourriture principale des habitans-, ils la préfèren
t à celle des moutons, dont on fait que les'
Turcs font un de leurs principaux alimens. Les
négocians de MarfeiUe, qui ont féjourné long-'
tems dans ce pays & qui en connoiffenr très-
biçn les ufages , m’ont affuré que cette viande
étoit effectivement bonne -, l’on fait d’ailleurs
que dans toutes les côtes de la Méditerranée on
a toujours, comme à préfenr, préféré à toute
autre la chair de cet animal. »
«‘■ 'Quant à fon cuir, on le convertit en maroquin
commun , employé à plufieurs ufages,
& notatnment à la chauffure. »
« Enfin tout eft utile dans ces animaux, jufqu’à
la barbe des boucs qui eft longue, forte & lui-
fante, & dont les perruquiers favent tirer parti, n
« Le pays, quoique fitiié par le 39e degré
45 miüutgs de lsuituçie , le pays eft froid en