
H c H A
fi on a fcmé le Chardon feul au PrinMms, on
le récolte en Mai , ou en Juin de la deuxième
année. Quelquefois une partie des poirtmes ne
mûrit qu’à l’Automne Clivant ; lorlque le Chardon
a été femé en Juillet, ou Août, il en pion te,
au Ptintetns de l’année d’après , une parue qu on
récolte en Juillet ou en Août, & l’autre partie
au Printeros de la troifiéme année. Si ces plantes '
tardives étoient en petit nombre, on ne les atten-
droit pas pour ne pas perdre l’occafion de faire
rapporter d’autres plantes à la terre Pour peu qu il.
y en ait une certaine quantité , il y a de 1 av«n
tage à les attendre. Afin que la gelée ne les endommage
pas, on les couvre de long fumier. Un
Ecrivain , qui paroît être des provinces mendio-
nales, prétend que le Chardon à Foulon réfifie
à l’Hiver le plus rigoureux. H n en cil pas de
même dans les pays feptemrionaux , fur-tout
fi ie terrain eft humide, oucompafte, comme dans
la Beattce. Dans l’Orléannois, où la terre eft plus;
légère, le Chardon à Foulon y gèle rarement.-
Dans les pays où il peut geler, il eft prudent de
le couvrir en Hiver. Indépendamment de la gelée
& des effets de la grêle , qu’il partage avec
toutes les autres plantes, i l é f l fouvent incom-
jïuxlé des grands -vents, qui le couchent & le
déracinent. 11 faudrait, pour aimt dire qu il-
fût protégé par des paliflades, ou abrité de 1 oued
par des bois. Au relie , cette culture eft dans le
cas de beaucoup d’autres, Ion fort dépend en
grande-partie des faifons. . , r
On reconnoît que le Chardon eft mur, lorf-
que fes tètes font totalement défleunes & qu elles
commencent à blanchir & à fè defiécher. Mais
elles ne mùriffent pas toutes à-ia-fois. Il faut tous
les deux jours parcourir là Chardonnière, quelquefois
pendant trois mois., Quand on fait la
récolte, on n’arrache pas les plantes entières,
mais on coupe les têtes, à mefurê quelles munl-
fent en leur laiffant une queue d environ un
pied , fans bluffer celles qui ne font pas bonnes
à cueillir. On en forme des paquets, ou poignées
de ÎO, qu’on lie avec de la pelure d’ofier.pws on les
attache fous un hangard, ou fous les torts des
couvertures , lorfque l’égoût des couvertures,
Comme en Normandie, efl très-avancé & a quatre
ou cinq pieds des murs , en forte que ce qu on
y expofe ne reçoit ni la pluie, ni 1 ardeur du
loléii. . ~
Le Chardon craint l'humidite , même loflqiul
êft fur pied. Tout fon mérite cor)Me dans la
roideur des crochets des pommes. Or cette roij
deur.fe perd, s’il pleut au teins de fa florailon &
de fa maturité, par l’efpèce de rouiffage qu .éprouvant
les calices. Toute la pomme même pourrit,
lorfque le Chardon neft pas mis à l’écher
dans un endroit à l’abri de l'humidité. L ne irntt
pas l’expofer non plus à un foleiV trop ardent,
dans les pays méridionaux , pour ne pas le trop
dcffécjier, Le fçleil ardent le rougit & lui .ôfe
C H A
fon r effort. L’ufage apprend la véritable manière
de le rendre propre aux travaux des fabriques
de laine. Four le confeftver, quand ileftfec , on
le place dans un grenier, ou dans des chambres
aérées. „ ,
En général, les têtes, ou pommes de Chardon,
qui font alongées, cylindriques & armées de crochets
roides & fins, font 'les plus- efiimées. Elles
ont plus ou moins ces qualités, félon le terrain
on on lésa récoltées. Il ne faut pas quelles foient
trop croches, ni trop droites, pour être bonnes.
Les perfonnes qui les emploient connoiffent le
jufie milieu qui convient. La longueur des pommes
du centre , les plus longues de toutes, en de
deux à trois pouces. Il y-a des années ou les
pointes font plus crochues que dans d autres. On
remarque que les meilleures font celles qui font
venues dans un fol en pente , ç eft-à-dire, dans
un foi léger, ou pierreux. On peut d’avance'annoncer
que des pommes feront bonnes, li en
rompant la tige,, ou les pommes même, on trouve
l’intérieur plein. ,
Je n ai pas befoin de dire que la dminction clés
pommes' de Chardon , en mâles & femelles , eft
chimérique , & n’a été imaginée par les Fabn-
cans que pour exprimer, fous le nom de males,
les plus recherchées , c’eft-à-dire, celles qui ont
les pointes fermes & courtes , &'fous le nom de
femelles, celles dont les pointes font molles,
moins crochues & plus a* ongées;.
Pour ramaffer ia graine de Chardon , il lumt
d’en fecouer légèrement les têtes lorfqif elles lont
fèches, La bonne graine fe détache facilement
des calices.On la trouve même ordinairement dans
les greniers, fous les paquets de têtes. On allure
qu’elleconferve long-tems fa vertu germinative ;
cependant on ne fème pas de la graine qui ait
plus de deux ans. L’expérience apprend fans doute
qu’en fc procurant ainli de la graine,on en recueille
d’affez mûre pour être employée. S’il en étoit autrement,
je confeillerois à ceux qui cultivent en grand
le Chardon à Foulon, de laiffer plus long - tems
fur pied un'ccrtain nombre de tiges, proportionné
au befoin qu’on a de graine,-Tous lés jours on
iroit à la Chardonière fecouer les tètes fur un paii-
laffon, ou dans des corbeilles. Les pommes, qui
fourniroient cette graine, perdroient de leur prix \
mais on en feroit dédommagé par la bonté de la
graine. 1 ■ , - y ,
Les tiges defféchées du Chardon font bonnes a
brûler. Il vaut mieux les employer à chaufferie
four , qu'à tout autre ufage,- car elles ont inconvénient
de crépiter dans* feu , & de jettei les
charbons jufqu’au milieu, des appartement.
Une tige de Chardon produit quelquefois nuit
ou neuf pommes. Celle du milieu eft plus élevée
que les autres; quand le pied eft très-fort on la
décolle, celles des autres en deviennent plus
bCLe Chardon qu’on n’empipie qu’un an après
p Y | ’ ' ' ' ' - ' | | W
cm’il eft récolté, eft dun meilleur fervice. Les
groffes & meilleures têtes font réfervées pour les
Bonnetiers , les moyennes & les plus petites
pour la Draperie.
Les Chardons fe vendent, en- Jtyarmandie, année
commune , de 24 à 25 livres la balle, mefure
de convention, compofée de 200 poignées de 50
têtes chacune •, ce qui fait 10000 têtes pour ce
prix-, enfuppofant qu’ils foient de bonne qualité
car des meilleurs aux moins bons, la différence
du prix eft quelquefois d’un quart.
Le tranfport des Chardonsà Foulon fe fait dans
de grandes mannes quarrées, longues , formées
d’un chaffis groffier d’ofier. On y mêle indiftinéle-
ment les groffes & les petites têtes.
J’ai déjà obfervé que les abeilles recherchoient
beaucoup les fleurs du Chardon à Foulon. Elles y
trouvent, dans un petit ëfpace une abondante récolte
*, car une feule pomme contient plus de fix
cent fleurs, dans lefquellesil y a beaucoup de
miel. C’eft un motif pour engager à multiplier les
ruches, dans les pays où on cultive le Chardon
à Foulon. On a remarqué que ces -infectes alloient
boire de l’eau quis’amaffe & fe conferve dans les
articulations des feuilles fermes & creufes du
Chardon \ c’eft pour elles une grandis reffource en
T t è -, elles ne font point expo fées à s’y noyer,
comme dans les ruiffeaux , les marres, bu les rivières
, & même dans les vafes remplis d’eau, qu’on
place auprès des ruches., Cette obfervatiofi doit
donner l’idée de planter exprès tous les ans quelques
Chardons à Foulon , dans les environs des
ruches, par—tout où on élève des abeilles.
Dans la Bv-auce, on plante des Chardons,dans un
‘.terrain , qui efl à fon année de jachères, & on les
déboîte à l’époque où on récolteroit du froment. On
Tenfeanen.ce.au Printems fuivànt, en orge, ou en
•.avoine, qui y viennent d’autant mieux que, pour
la culture du Chai don , il a été labouré à la bêche
j& bien façonné. On pôurroit même ., en le fumant
bien , y femer aufTi-tôt du froment. MM. Mau-
.gas -Fonrèt & Chaudë Lainé, qui tiennent de:
groffesfabriques de bas, l’un à Oifonville, & l’autre
à Puflay-, ayant répondu à des queflions- que
je leur ai faites, m’ont mis à portée de connoître
ce qui concerne le Chardon à Foulon dans la
Beau.ee.
Pour donner l’idée du produit d’une mefure
déterminée de terre en Chardon à Foulon, je rapporterai
une expérience faite a Oiffel, auprès de
Rouen. Elle .eft inférée dans le deuxième volume
-des Mémoires de là Sociétéd’Agriculture de cetre
.ville. C’eft.à M. cTAmbourney, fi connu, fi efli-
mé , & fi honoré par fes travaux dans l’examen
•des Teintures qu’on peut tirer de tous les végétaux,
que je fuis redevable de la connoiffance de
cette expérience.
M. Jérôme Baratte , d’Oiffel, délirant cultiver
pour la première fois, en Oiffel, leChar-
Agriculture. Tome I I I .
don à Foulon, difpofa, par de bons labours &
des engrais convenables, un terrain de 12 perches,
mefure de Roi-, c’eft-à-dire, de 22 pieds quar-
rés, le pied de 12 pouces. Il y fema des haricots
blancs., au mois de Mai} on lés farclà le 10 Juillet
, & alors on fema la graine de Chardon, qu’on
eut foin d’enterrer. Elle leva bien, & profita rapidement
, aufli-tôt qu’on eût arraché les haricots.
A la fin de Novembre, on a biné, à la houe,
les Chardons, en les éclairciflant, dans les endroits
où ils étoient trop preffés, & on en a~replanté
dans les places où il en manquoit. Ce femis a paffé
ainfï l’Hiver. Au mois de Mars fuivant, on a far-
clé de nouveau. .Une partie des pieds a monté.
M. Jérôme Baratte a récolté, fur cette partie,
plus d’une balle de têtes bien conditionnées. Voici
fon calcul, dans lequel il ne fait entrer pour rien
ce qui reftoit de -plantes de.Chardon, qiii n’a pas
monté à la deuxième année, & qui auroit monté
l’année fuivante.
Produit.
Une manne de Chardon mar-^ H 1 M WÊBÊoeM Wi&r.- 24 bottes de tiges pour chaultage ,!
à 1 f. 6d. i f .r b fJ
Frais.
Une année de loyer des douze per -Y
ches, 2 l. 5 C|
Deux farclages à 2 1. 10 f. 5 1. ) 1 1 1«
Récolte ÿ 3 1. t
Préparation & emballage, i l . J
Produit net........... 14 1. i r f .
On n’a rien compté pour un peu plus de fumier
qu’il n’en eût fallu «pour du froment,
parce que la récolte des haricots a fait compen-
fation. On n’a point .eftimé non plus la femonce,
parce que, dans le pays., elle n’a point de valeur
numéraire-, on en prête & on ènemprunte, ie refte
eft jetté comme inutile.
Le même terrain auroit rapporté, en froment,'
10 livres iQ’fols, dont le produit, frais & femen—
ce prélevés , eût été de 5 livres 8 fols; M. Jérôme
Baratte en conclut, qu’il y a près de deux!
tiers de profit à cultiver du Chardon, plutôt que
du froment, quand le terrain lé pe.rmet. Mais cela
fuppofe ün débit afluré, & une certitude de la
bonté des Chardons.
On conçoit encore que fi cette culture s’éten—
doit beaucoup, le prix, des Chardons diminueroit.
Mais on doit peu craindre une trop grande culture
de plantes qui exigent rplufieurs farclages
à la main , & des yé.cpltes foignëes. (A4. l'Abbé
T e s s i e r . )