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pilotis, qui laiffent l’air circuler par-deffoik
Chaque pilotis eft furtnonté d’une pierre plate
de fchit, qui le déborde de beaucoup, & au-
deffus de cette pierre, eft une autre pièce de
bois, du même diamètre que le pilotis. Ce fchit,
empêche la communication de l’humidité.
On croit qu’il eft impoflible aux 1 ou ris j
qui voudroient monter le long des pilo- j
tis, de franchir l’ obfiacle que la pierre leur
oppofe. Quelquefois, au lieu de pilotis fichés
«n terre, c’eft un petit pilier de maçonnerie,
au - défias duquel on pôle une bille de bois
par - defliis la balle, la pierre de fchite débordant
beaucoup. M. de Malesherbes, en
a mefuré une dans le Valois, qui avoir deux
pieds de diamètre. On trouve encore dans la
Suifie des greniers faits de pierres d’ardoife , juf-
qu’à la hauteur d’un pied& plus haut, de corps
de fapin non écorcés , affez droits pour former
une clôture. On les affemble feulemenr aux quatre
argles. L’air fans doute paffe entre ces corps
d’arbres, comme il paffe entre les planches mal
jointes, ou les couvertures de;bardeau ou de tuiles
des autres. M. de Malesherbes a remarqué dans
ces greniers, des boites à -différensétages , dans
lesquelles les habitans mettent leurs différens
grains. Ils s’y confervent fans doute comme dans
les paniers de paille de M. le Curé' de Cor--
xneil.
Rarement en France les greniers font éloignés
des autres bâtimens. La plupart même font partie
de bâtimens employés à d’autres ufages. M. A r -
rault , ci - devanr Adminiftrateùr des Hôpitaux de
Paris, dont il eft queftion à l’Article Acrapt
de blés, a laiffé fur les greniers, fur les uften-
liles dont ils doivent être garnis & fur les foins
qu’exigent les blés, un Mémoire dont je profiterai.
Il va fervir de bafe à ce que j’ai à dire.
La Conftruélion des greniers peut s’exécuter
de deux manières : l’une en formant un feul
grenier large & fpacieux, au premier étage feulement.
L’autre , en en formant plufieurs les uns
fur les autres.
Des greniers longs, larges & fpacieux, un
premier étage feulement, tiendront plus de blé
que la même fupérficie répandue dans plufieurs
étages, parce qu’il faut à chaque étage' laiflër un
partage pour tourner autour du blé , & que ce
partage emporte beaucoup de terrcin. lien coûte
moins pour emplacer les grains dans ces greniers.
Les Journaliers font plus d’ouvrage quand il y
a peu à monter, & ils fe font moins payer de
leur travail.
Mais ces greniers fi fpacieux ont un. grand
inconvénient; c’eft que, dans un grand efpaçe ,
les fenêtres font éloignées, la pouflière ne peut
les gagner pour fortir, elle refle dans le .grenier
, & fe répand fur le blé même qu’on remue
pour l’en chaffer. Un gïenier moins large, qui
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n’a que cinq à fix toifes dans oeuvre, n’a pas
cet inconvénient.
Dans la conftruéljon des greniers à plufieurs
étages les uns fur les autres, il y a un grand
avantage, qui dédommage bien de la dépenfe
qu’on peut faire pour y emplacer les blés. Le
voici : lorfqu’il y a plufieurs étages de greniers,
il eft de la bonne économie d’emplacer les blés
au plus élevé ; il en coûte plus pour les y faire
porter ; mais, comme l’ufage eft de laiffer dans
la conftruélion de ces greniers à plufieurs étages,
des trous ou des tremis, par lefquels on fait
defcendre le blé d’un étage dans un autre, le
blé reçoit, par cette feule chute , une façon fu-
périeure à celle qu’il reçoit à l’ordinaire par le
mouvement de la pelle..
On prend même la précaution de mettre a u -
deftous de chaque trou, un crible, dans leq u e l
le blé tombe ; & , par ce moyen , le blé eft à-
lu - fois remué . & criblé; un ieul homme fait
ces deux opérations, & on retrouve dans ces
deux façons, fi falutaires au blé, fi utiles à fa
Cônfervation , & qui coûtent fi peu , de quoi
fe dédommager de la dépenfe qui a été faite
pour monter le blé dans ce grenier le plus é le v é .
Après ces réflexions, il eft aifé de conclure
en faveur de la conftruéHon des greniers à plufieurs
étages: mais il faut faire différentes obfer-
vations pour leur conftruélion.
1. ° La conftruélion doit être folide,.tant en
maçonnerie qu’en charpente : la meilleure manière
de les , conftruire feroit de les -^voûter;
mais, au défaut.des= voûtes,. les étaies, pour fou-
tenir des planchers deftinés à porter un fi lourd
fardeau ne doivent pas être ménagés ; car cent
muids de bon blé fur le pied de deux cent quarante
à deux cent quarante-cinq livres le fetier,
mefure de Paris, pefentprès de trois cens milliers.
Les murs doivent être de bonne épaiflpur, pour
garantir les blés de l’humidité & de la chaleur;
& les bois bien fains, afin qu’ils ne favorifent
, pas la naiflance des vers, qui tomberoient dans
le blé. Le bois verd ou nouvellement coupé eft
fujet à; attirer les infeétçs.
2. Il faut que le dernier étage foit lambriffé,
ou qu’il ait un plancher: le b lé , qui féjourne
immédiatement fous’ la tuile, ne fe confervepas
fi bien : l’humidité y pénètre dans l’Hiver; &, dans
l’Eté j la tuile échauffée par l’ardeur du foleil,
répand fa chaleur fur le blé ; & on obferve dans
j ces pays de commerce de b lé , que celui qui en
dépofé fous un plancher, à un premier ou à un
fécond étage, fe garde beaucoup mieux que s’il
éroit dépofé à un troifième étage, fous la tuile
& fans plancher au-deffus. La différence eft telle,
que ce dernier a befoi.n d’être remué trois fois,
lorfqu’il fuffit de remuer les autres feulement
deux fois. Ainli le Père de famille vraiment économe,
ne ménage point ladépenfe d’un plancher,
parce qu’il le regagne dans la fuite, en d£penc
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fant moins pour les façons & l’entretien de
fon blé.
j.® Le plancher ou le fol du grenier de chaque
faaç doit être carrelé ou planchayé. Les uns
préféreront de le couvrir de planches > parce
que le bois eft plus doux pour les ouvrierschar-
oésde remuer les blés: il ne fait point de pouf-
fière, au lieu que les joints du carreau pofé avec
la plus grande attention, en font toujours un
peu; mais, d’un autre côté, les planches coûtent
beaucoup plus que le carreau : d’ailleurs le bois
eft fujet aux vers, & les vers fortiront volontiers
du bois pour entrer dans le blé : il eft facile de ,
remédier à la pouftière que les joints du carreau
peuvent caufer. Il fuffit de les pofer avec attention,
& de répandre deffus du fang de boeuf qui,
en s’infinuant dans les joints des carreaux, y fait
une efpèce de maftic, capable d’empêcher le
mortier de fe convertir en pouflière.
C’efi à celui qui bâtit des greniers, à fe décider
entre les deux manières d’en faire les planchers :
il y a des.pays où les planches font moins chères
que le carreau, & vice verj'â. Du refle, fon inclination
, fon goût, la dépenfe qu’il veut, ou
peut faire, aideront à le déterminer, & dans le
choix, il ne peut fe tromper.
4.0 Les fenêtres des greniers doivent être les
unes vis-à-vis dès autres; il faut les garnir de
canevas, ou de fer maillé ou de clayes, afin que
l’air puiffe y entrer, & afin d’en écarter les in-
feéles, & les antres animaux qui pourroient gâter
le blé, & fur-tout les moineaux, qui viennent
comme des voleurs fondre deffus. On garnira
les fenêtres de volets ou de contrevents; on les
ouyrira & on les fermera à propos, fuivanr le
tems & les faifors ; & toujours dans la vue de fe
précautionner contfe les deux grands ennemis
du blé, l’humidité & la chaleur.
Greniers publics de Strasbourg.
Le magafin des greniers publics de Strafbourg,
a cinq étages de 40 pieds de largeur, fur 400
de longueur ou de flanc.
Il règne au rez-de-chauffée de vingt pieds en
vingt pieds des colonnes au nombre.de quarante;
elles font de pierres, placées fur deux rangs,
ayant quatre pieds en quarré, vingt pieds de
hauteur. Ces colonnes loutiennent le premier
étage. •• r
Jufqu’ici on a employé le rez-de-chauffée,
pour y dépofer plus de quatre-vingt moulins à
■ »as, dont on s’eft fervi quelquefois avec avantage,
lorfque les rivières manquoient d’eau; car
on connoît peu les moulins à vent dans les envi-
rons de Strafbourg.
Le premier étage fe trouve à vingt pieds au-
oefius du rez-de-chauffée. Il n’en diffère, que
paree qu’au lieu de piliers de pierres, il y a des
P/liers de bois de deux pieds de circonférence
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& de huit pieds de haufeur, pour ne pat trop
charger le bâtiment.
Le fol de chaque étage eft formé d’un double
plancher chacun de deux à trois pouces d‘é-
paiffeur.
On y a ménagé des ouvertures de huit pouces
quarrés de dix pieds en dix pieds, au moyen
dcfquels on fait couler les blés d’étage en étage,
jufqu’au rez-de-chauffée.
Les murs à tous les étages, font percés de
fenêtres de trois pieds quarrés, ayant entr’elles
des trumeaux de quatre pieds feulemenr. Les
fenêtres font munies de contré-venrs, & garnies
d’une grille de fil d’archah Celles du cinquième
étage font un peu moins grandes.
Ce magafin peut contenir jufqu’â 50000 re-
zeaux de froment, c’eft—à-dire, 8,bco,000 livres '
pefant ; le rezal de froment à Strafbourg pèfe
160 livres, poids de marc.
Ufienjiles des greniers.
Les premiers & les principaux inftrumens,
dont on ait befoin dans les greniers, font les
bras des hommes. Il y a plufieurs attentions à
avoir dans le choix de ceux qui font attachés
au travail des blés. , •
Il eft néceffaire qu’ils en aient une connoif-
fance générale : elle s’acqûiert aifément, Scelle
fe perfectionne par l’ufage.
11 faut qu’ils foient - fidèles, intelligens, laborieux
; le pareffeux rend fon travail inutile,
s il craint de lever les bras pour donner de l’air
au blé, & en faire fortir la pouflière, il vole
1 argent de celui qui l’emploie, & il fait tort
à fa marchandifè.
Les gens adonnés au v in , ne conviennent
point à ce genre de travail : les fuites fâcheufes
du vin , & particulièrement les querelles, toujours
défagréables qui s’élèvent entr’eux , & la
perte du tems employé néceffairement à un fom-
meil forcé, dans une heure qui ne lui efl pas
deftinée, doivent les en exclure.
Les ouvriers occupés à foigner les blés, doivent
avoir des fouliers de buffle qu’ils chauffent
en entrant dans le grenier, afin de n’y point
porter d’ordures, & pour ne point écrafer de
giain en marchant : car les grains écrafés augmentent
les déchets.
Us doivent aufli avoir un tablier avec une
grande poche, dans laquelle ils puiffent amaffer
les pailles, les pierres & les autres ordures,
pour n’être pas obligés de quitter à chaque
moment, pour mettre ces ordures hors des
greniers.,
Il faut des balances & des poids pour pefer
le blé,à fon entrée dans le grenier & à fa
fortie.
La pèle eft l'uften(ile«ou l’outil dont on fe
fert le plus dans les greniers : elle fert à remuer