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leurs, de l'avoine dans un autre canton , du
fart afin , fouvent du Ion de froment, quelquefois
des glands, des châtaignes, feveroles, pois,
vefces, lenugrcc ,&c. On lait que ces animaux
trouveroient du goût au pain. Ils mangent les
tiges vertes ou sèches des plantes céréales & celles
de la luzerne, dufainfoin, ou efparcette,& du
trèfle. Dans les Jfles à fucre d’Amérique , on
leur réferve les tètes de canne, pour la faifon
où ils ne vont pas dans les favanes. De toutes
les graines c’ efl l’avoine qui eftle plus généralement
employée pour les Chevaux. Les Royaumes
du Nord qui en récoltent beaucoup , & dans
lefquels elle efl de bonne qualité, la deftinent
en grande partie-à ces animaux. L’orge érant
plus abondante dans les pays chauds, où l’avoine
efl rare & vient mal, c’eft l’orge qu’on donne
auxChevaux. Par-tout où on peur avoir facilement
du foin de pré naturel, on en garnit les râteliers.
Les pays de plaine lui fubfliruent le
trèfle , ouïe fainfoin, ou la luzerne, la paille d’avoine
ou plutôt celle du froment, entière ou
hachée, les coflats de pois, de vefees, &c.
dans lefquels il refle toujours quelques graines.
Enfin une partie de ce qu’on récolte
en chaque pays efl l’aliment ordinaire des animaux
qu’on y élève & qu’on y entretient.
Plus un Cheval a de taille, plus on doit lui
donner de nourriture. Je fuppofe qu’un demi-
boiffeau d’avoine & une demi - butte de foin par
jour fuffilent aune petite bête, il faut à unegrofle
jufqu’à deux boifléaux d’avoine & deux bottes
de foin. Il y a des Chevaux qui à taille égale font
plus fobres que d’autres; ce qui dépend quelquefois
du pays & de la manière dont ils ont
-été élevés. On voit aufîi parmi des Chevaux de
même taille , élevés dans le même haras, ou le
même pays, des individus qui ont plus d’appétit
que d’aurres, & qui digèrent plus facilement.
Par exemple, on remarque dans les fermes de
Beauce, que les Chevaux Picards ou Arréfiens
mangent un tiers de plus que les francs - Comtois,
.Nivernois & Montagnards. Us ont donc
befoin de plus de nourriture. On doit avoir égard
à l’âge des Chevaux pour la quantité; car un
poulain qui ne travaille pas doit être peu nourri.
Un Cheval travaillant & croiffant encore doit
Têtre d’avantage-, enfin un vieux Cheval doit
l ’être moins, & d’alimens plus tendres & plus
faciles à b-oyer, à mefure que fes dents s’ufènt.
Quand un animal travaille plus fort, il s’épuife
davantage , on doit augmenter fa ration. Certains
Chevaux préfèrent le foin à la paille ou
l ’avoine au foin, ou à la paille. C’eft à ceux qui
les gouvernent à étudier ces différences & à fui-
vre leur goût , autant qu’il ne fera pas contraire
à leur famé , obfervant de ne pas leur donner
en trop grande quantité la nourriture qu’ils ai-
jn&iu le moins, afin de ne pas les dégoûter.
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Nourriture d'un Cheval de carrojje h Taris*
Je prends pour exemple un Cheval de cinq
pieds deux pouces, taille ordinaire, aflez occupé,
fans l’être autant qu’un Cheval de remife, ou
un Cheval de fiacre. Chaque jour, on lui donne
un boifleau d’avoine du poids de quinze à feize
livres, deux bottes de paille de froment, pe-
fant enfemble de vingt-deux àvingt-trois livres,
& une botte de foin de douze livres. Ce Cheval
allant en route , mange quelquefois un demi-
boifleau d’avoine de plus, ou à la place, dans
les jours de chaleur, un boi fléau de fon. Les
cochers ont le défaut, pour la plupart, de trop
nourrir leurs Chevaux, parce qu’ils ont l'amour-
propre de vouloir qu’ils paroiflent gras; ils en
font plus faciles à panfer. Cette nourriture efl
diflribuée ainfi : le matin, le tius du boifl'eau
d’avoine , puis le tiers de la botte de foin , &
après le tiers des deux bottes de paille; à midi
& le loir même ordre & même quantité.
Nourriture d'un Cheval de ferme en Beauce,
Les Chevaux de? Fermiers de la Beauce ont
communément quatre pieds dix à onze pouces
de taille. Un de ces animaux mange chaque jour
un boiffeau & demi d’avoine, ou vingt - trois à
vingt - quatre livres, une botte de fainfoin de dix
livres, & huit à neuf livres de paille de froment,
ou de coflats dé pois ou vefee.
Lorfque ces Chevaux vont au marché conduire
du bled , ou font employés à d’autres
charrois, plus fatiguans que la éharrue, on ne
leur donne pas plus de nourriture , celle qu’ils
ont ordinairement étant fuffifanre. J ’ai dir, à
l’article Charretier^, que quand on faifoit
traîner un rouleau par un ou deux Chevaux, on
devoit, dans Taprès-midi, parce que ce travail
efl pénible , ramener ces Chevaux à la ferme ,
pour leur donner un peu d’avoine. Mais, dans
ce cas , on diminue d’autant leur ration du f©ir.
Dans les fermes d’une partie de la Beauce, on
ne diminue prefque pas la nourriture en Hiver,
à moins qu’il n’y ait des gelées de durée, ou
que la terre ne foit quelque teins couverte de
neige. Car on y laboure prefque fans interruption.
Dans le refle de la Province, &dans
d’aunes Provinces, on retranche la moitié de
la nourriture des Chevaux, depuis IaTouffaints
jufqu’au mois de Mars.
Nourriture d'un Cheval de roulier , voyageant
d'Orléans dans l ’Artois , la Flandre, la
Champagne, la Picardie, &c.
La taille d’un Cheval de roulier efl dé quatre
pieds dix pouces. Chaque jour on lui donne
deux boiffeau* d'avoine & deux bottes de foin*
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de dix à douze livres. Il ne maftge £oint de
paille. U n’en a que pour litière.
* L e matin , il inange le tiers de deux boifleaux
d’avoine, à midi un fécond tiers, & le foir le
troifîème. Une demi-botte de foin le .matin ,
autant à midi, & une botte pour la nuit.
Lorfque l’avoine efl mangée, on le fait boire
avant que de lui donner du foin.
La même nourriture fe donne dans toutes les
faifons.
Quand le roulier attentif ou propriétaire de
fes Chevaux arrive a la dînée dans l’Eté, il les dé-
sharnache, les bouchonne , les étrille & lespei-
gne.
Les Chevaux de fourgon font plus hauts de
quatre ponces que ceux des rouliers. On les
nourrit de la même manière. II en efl de même
fans doute de ceux des bateaux fur les rivières
& des coches d’eau. Tous ces Chevaux ne peuvent
être employés à un aufli fort tirage qu’à
cinq ou lîx ans.
Nourriture d'un Cheval de Pofîe.
Malgré l’irrégularité du féjour des Chevaux
de porte dans leurs écuries, àcaufe de ceile du
paffage des couriers, on règle cependant, autant
qu’il efl poflible, la quantité d’alimens qu’on
leur donne. Quand ils travaillent peu , ils mangent
par jour , en trois repas, un boiffeau d’avoine,
une botte de foin & de la paille fans
mefure. Quand ils travaillent beaucoup , on augmente
l’avoine jufqu’à un boiffeau & demi par
jour. Alors ils font quatre repas.
Les Chevaux de pofte fatigués font mis au
fon & à l’eau blanche pendant plufieurs jours,
pour les rafraîchir.
Ceux de brancard ont quatre pieds dix à onze
pouces.
Les porteurs, quatre pieds fept à huit pouces.
Les bidets, quatre pieds cinq à fix pouces. On
emploie ces animaux à l’âge de fix ans, pour
qu’ils durent plus long-tems. En général , les
Chevaux réfifient peu aux fatigues de la pofte.
On en voit qui périffent après avoir couru deux
mois feulement. Communément on les eonferve
quatre ou lîx ans. Il y en a qui vont jufqu’à
dix. C’eft en Hiver qu’il en meurt le plus, à
caufe des çourfes de l’Eté & de l’Automne.
Un Maître de pofte attentif, tel que M, Rouf-
feau, Maître de la pofte à Angerville, route d’Orléans
, fait étriller fes Chevaux chaque fois qu’ils
rentrent, défend qu’on les mene à l’abreuvoir
auffi-tôt , & veijle à ce que fes portillons reviennent
de leurs courfes fans s’arrêter.
Nourriture d'un Cheval d'efeadron de Cavalerie
ou de Dragons.
Ue Cheval d’un cavalier a quatre pieds huit à
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' dix pouces, & celui d’un dragon quatre pied
fix à huit. On donne à chacun une ration par
jo u r , compofée de deux tiers de boiffeau d’avoine,
mefure de Paris, de dix livres de foin &
dix livres de paille. Lorfque la paille efl rare,
outre l’avoine, la ration efl de douze livres de
foin& de fix livres de paille; enfin,à défaut de
paille , on donne quinze livres de foin. L ’avoine
fe donne, en deux fois & le fourrage en trois
fois-
Tous les quatre jours, on fait la diftributioa
: des fourrages dans les magafins du Roi.
Quand les troupes font en campagne, la. nourriture
des Chevaux n’eft pas réglée. Elle dépend
des circonftances & de la faciliré qu’on a à faire
des fourrages. En général, la nourriture des
Chevaux de cavalerie ou de dragon eft trop
foible.
Examen des alimens les plus ordinaires des
Chevaux.
i I.® De l’énéautre. On m’a affuré qu’en Allemagne
& m Suiffe, où l’on culrivoit plufieum
efpèces d’épéaurre, on en donnoir à manger aux
Chevaux. Cette plante, comme on fait, eft un
froment, dont les grains font tellement adhérens
dans les bâles, qu’on ne peut les en féparer,
qu’en écrafant les bâles. Faire manger aux Che-i
vaux de l’épéautre, c’eft comme fi on compo—
foit leur nourriture de froment & de bâles. Elle
doit être fubflamielle & fortifiante. Sans doute
on en proportionne la quantité à la taille de«
animaux , aux travaux qu’on leur fait faire, 8c
aux effets qu elle produit fur eux. Je defirerois
q ue , dans les pays où l’avoine ne vient pas
parfaitement, les cultivateurs confacraffentquelques
arpens de terre, à un enfemencemem en
ëpéautre, pouren former une partie de la nourriture
de leurs Chevaux. L ’épéauti.e n’eft point
une plante délicate ; on peut en faner çn Automne
& au Prinrems. On prëféreroit celle qui
eft fans barbes. Voyei Ëpéautre & F roment.
2..° De l’orge. Deux motifs déterminent à
nourrir les Chevaux avec de l’orge dans les
pays chauds; l’un eft la bonne qualité de ce grain ,
l’autre eft la quantité qu’on en recueille, tandis
que l’avoine y vient mal ; car l’orge eft la plante
des pays chauds, comme l’avoine eft celle des
pays froids. EnEfpagne, forge eft la principale
nourriture des Chevaux. M. Thorel ( Cours
complet d’Agriculrure de M. l’Abbé. Rozier) dit
qu’un François s’étant obfiiné à nourrir d’orge
un beau Cheval, fous le prétexte qu’il y éroit
habitué , cet animal fut attaqué d’une fourbure
violente, d’où il conclut que ce grain a d’autres
qualités en Efpagne qu’en France. Je ne tirerois
pas cette conféquence de ce fait, même en
fuppofant que l’ufage de l’orge eût rendu le
i Cheval fourbu • car il feroit poflible qu’on lui
S I