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appauvries. L’efpèêc de décompofition que fu-
fcillent les végétaux pour fe changer en tourbe ,
les prive - 1 - elles des principes nutritifs qui
exigent dans les fumiers ? Mais alors , pourquoi
la tourbe feroit-telle un bon engrais répandu
fur les terres ? Seroit - ce que l’abondance des vapeurs
& la fraîcheur qui s’y concentre , nuit
à l’effet vivifiant de la lumière? Mais-je h’ai
pas remarqué de différence entre les tourbières
de la plaine & celles des Alpes, relativement
à leur influence fur les plantes. Il paroît donc
que les caufes de l’influence des tourbières lur
les végétaux font encore inconnues, & cependant
elles éclaireroient plus d’une obfcurité
dans i’Hifioire des plantes.
D’après ce que j’ai dit ci-deffus, on peut conclure
qu’il ne fnffit pas d’une organifation plus
délicate,d’un volume plus petit, & de l'abfence
des poils, pour féparer', comme efpèce, une variété
d’une plante commune crue dans les tourbières.
J’en ai donné quelques exemples dans
mon Hifloire des Pissen lit s , Mémoires pour fe r -
vir a l'Hijl. Pàyf & Nat. de la Suijfe , T. 1.
Des plantes aquatiques.
On ne doit comprendre, fous ce nom, que les
plantes qui 1e développent fous l’eau, où dont
la fleur & quelques feuilles montent à la fur-
face; les plantes dont le pied feulement eft dîfns
l’eau, & qui croifient pareillement à l’air, lorf-
que cet autre élément s’évapore , doivent être
défignées par le. nom d’amphibies.
Les plantes aquatiques font organifées d’une
manière très - lâche ; leurs vaifiéaux ont un tiffu
cellulaire , & biffent entr’eux de grands efpaces
vides, pleins d’ un fluide aqueux ; on diroit qu’elles
ne tendent qu’à s’étendre pour parvenir à la
furface & y abforher de l’air. Ces plantes n’ont
ni poils ni épines ; leurs feuilles fubmergées,
font capillaires, divifées en lanières, comme fi
on déçoupoit une feuille • ordinaire , pour ne
lui laiffer que fes nervures ; leurs feuilles émergées
au contraire font entières. Les fleurs qu’elles
^portent font ou terminales; lorfqu’elles viennent
nager fur l'eau, ou axillaires, & prefque
invilibles , lorfqu’elles relient dans cet élément.
Culture des plantes aquatiques d l'air.
Divers individus de plantes aquatiques que
j ’avois vu dans des terres accumulées fur le bord
des foffés, & qui y avoiem éprouvés des chan-
gemens m’ont fuggéré l’idée de faire des expériences
fur ces objet. J ’ai recueilli la graine
delà renoncule aquatique. ( Ranoncjslus aquatilis
L . ) que j’ai décrite fous la défignation de
deuxième variété, dans mon Mémoire fur cetre
plante , ( même pour fervir a P H i f Vhyf. & Nat.
de la Suijfe. T. 1. p. 154 ) & en même- rems
celle de quelques individus qui avoient déjà.crû à l'air. J ’ai femé féparément ces deux grainç$ ,
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dans une terre fa b lo n n e u fe médiocrement sèche.
Ces graines ont le vé , & j’en ai obtenu des in'
dividus hauts d’un à trois pouces, dont la tige
étoit droite, mais un peu arquée vers fa baie.
Us avoient quelques feuilles très - courtes, dont
les lanières étoient divergentes, quoique la plante
dont ils tiroient leur origine eût des feuilles J
lanières, parallèles, & des feuilles fupéritures
réniformes, qui manquoient également à ces ind
iv id u s. L e s fleu rs étoient aufli grandes & aiiflj
vigouieu fes que celles des individus longs de
quelques pieds, qui croiflent dans l ’e a u , |f
m’ont donné des femences fécondes. Je fuis
perfùadé qu’en continuant l’expérience pendant
p lu fie u r s années, on auroif donné à cette plante
toutes les habitudesd’une.planrequivégète à l’air.
L ’eau eft un fluide plus denfe que l’air ; ij
oppofe. donc une plus grande réfifiance à lumière,
& les plantes qui fe développent dansfon
fein , fe trouvent, fous plufieurs rapportsdans
la même pofirion que les plantes étiolée-;. Faire
végéter ces plantes à l’air dans la plaine ; c’efl
les expofer à une aèlion de la lumière infiniment
plus.vive , & je trouve le même rapport
enrre les individus des plantes aquatiques crûs
dans l’eau & ceux crûs à l’air, qu’entre les plantes
qui croiflent dans la plaine & celles des hantes
lommités ; en effet, ces individus crûs à l’ait
avoient, comme ces dernières, des tiges baffes,
un e confiflance plus forte, des fleurs plus grandes,
proportionnellement à la tige, & mieux conformées.
Ce nouveau fait confirme d’une manière
invincible , les différens effets de la lumière dans
les différens climats.
Depuis les expériences dont je viens de rendre
compte, & dans un dernier voyage en Hollande,
j’ai trouvé quelques individus de renoncule aqua;
tique , dans les fables mouvans des dunes, qui
étoient encore plus petits que ceux obtenus
par lajeuiture. J ’ignore comment la graine y
av oit été portée; mais ils confirment cette théorie,
puifqu’ils croiflent dans un fite, où les caufes
qui produifent la diminution des tiges, & les
caractères qui l ’accompagnent étoient vivement
prononcés.
Effets du Climat fur les couleurs & les odeuth
Les couleurs font un effet immédiat de la lumière
; une plante qui végète à l’ombre eft décolorée;
à la lumière, elle prend les teintes,
qui lui font propres. Bonnet a donné çe>
deux états aux différentes parties d’un même in*
dividu , & particulièrement à un cep de vigne,
en le faifant pafferau travers de plulienrs tubes
de fer blanc , diflans les uns des autres ; !çJ
efpaces intermédiaires étoient verds , tand,s
que ceux qui étoient couverts avoient tous
cara&ères de l’étiolement. Les expériences de
Bonnet prouvent encore que ce n’eft poin£
la chaleur produite par la. lumière, mais fa&°?
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I ■ /«jnmitrmite *d>u «ra)y’oonn , qui W f ; ! » ....
l /r des plantes tenues à l’ombre, à différensde-
| ci fe chaleur I y font toutes reliées fans «
I L i io n Les principes que j’ai développés fur I frifDu f e u & Je quelques-uns de fes pnn- I ‘ ' TJ I I ) , expliquent cette différence d ac-
I S d’une minière bien funple. Pmfljue les cou-
I Purs des végétaux font un effet auiit immédiat
I fe la lumière, il fuit que fa plus ou moins grande
I intenfité doit produire deseffetsdifferens, St par I , 0.,féquenr que les couleurs des plantes expo- II fféreos nào un cnéee lsu mqiuèer e tcreèlsl e-s v divees , . dploaun teenst; êetxrpe omféieesu xà I une lumière plus foible. En effet, lesplanus des I Alpes ont un verd plus fombre ; les partie^ I „ ‘fines de celles de la génération font fou- I vent colorées, principalement les calices, les
I traftées les écailles des gramens ; beaucoup de I variétés Alpines font diftinguéespar cecaraacre I. On peut citer le Plantain noirâtre qui eft une I variété du Plantain lancéolé, le C/iryJanthemum I stratum, qui eft une variété du Ckryfanthemum I Uucantkemum, &c. Les cordes offrent plus ra- I rement des exemples de coloration', à mefuro I qu’on s’élève fur ies Alpes, le nombre des plantes I à fleurs blanches augmente ; celles à fleurs rouges
I ou bleues y deviennent rares dans la même pro- I portion. Un femblable effet de la ramé de Tair I fur les fommirés feroit intéreffam à expliquer,
I & répandroit quelques lumières fur cette partie
I fi obfcure de la Phyiiologie des végétaux, qui con
I cerne leurs couleurs. , „
En même - tems que les plantes à fleurs co- I lorées deviennent moins nombreules lur ieslom-
I mités, la couleur de celles qui en ont devien- I nent plus vives d’autres efpeces a fleurs
I blanches dans la plaine, y prennent une teinte
| plus ou moins foncée. Ce lont particulièrement
I les ombellifères qui préfenient ce phénomène-,
I plufieurs d’entr’elles le teignent en rofe; fur les I fommités , & prennent une nuancc^Uis foncée,
I à mefure que le lieu eft plus élevé. Les Lcr-
I feuils, quelques lafers , la MuteLme, &c. of-
I frent le plus fréquemment ce phénomène-, dans
I une autre famille | les Anémones & les Renon -
II cuits, ont fouvent une nuance de rote lur les Hautes-Alpes. Comment le même fite peut il
aviver les couleurs de certains végétaux, tandis
qu’il détermine l’exiftcnce de ceux a lleurs
blanches ; c’efl ce dont on n’efi pas encore ml-
; trui^ & cependant ces recherches mériteroient
•la pins férieufe attention des Naturalises.Cette
;quefticn de la corolation des ombelhlères m a
paru un des phénomènes les plus curieux de la
phvfiologie végétale. Les couleurs des végétaux
l'ont encore foumifes à d’autres variations dont
je traiterai plus particulièrement à 1 article Couleur
, parce qu’elles ne m’ont pas paru dans
x une dépendance immédiate du Climat, peut-
être parce que je n’ai pas fu voir : ce loût les
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changement de couleur des corolles. En general.,
plus une plante efl modifiée par la culture, ot
plus les corolles offrent des couleurs variées.
Quelques .plant;: s fauvages varient aufli, & ces
individus d’une autre couleur croiflent fouvent
au milieu d’autres de la couleur ordinaire^ Ces
changemecs font - ils des délorganifations individuelles
, ou plus inhérens à 1 efpèce ; c efl ce
qu’il faut examiner avec quelques détails. Voyt\
Couleur. . ' . , .
Le verd des plantes nent davantage au Climat
que la couleur de leurs corolles ; on obferve,
en général, que le verd des plantes Alpines eft
généralement foncé; celui des plantes de tourbières
pâle, & tirant fur le bleu ( 1 ) ; celui des
plantes des bois, d’un verd pâle tirant fur 4e
Jaunâtre, &c. On ne doit pas ■ confondre ces
nuances avec l’effet des poils qui blanchit ou
altère la coloration des plantes. Une obfervanon
enfin fur les verds, c eft la couleur glauque,
? qui . eft la plus ordinaire aux plantes des
bords de la Mer, à celles des pays lablon-
neux fi tués entre les Tropiques, & particulièrement
aux plantes grades. Quelle peut - être
l’influence de ce genre de pofitions fur les plantes
qni y croiflent ? Voilà encore un objet de recherches
; car on ne doit point reconnoitre
d’effets fans caufes., . .
A l’article Couleur je tracerai le précis des
différens fyftêmes fur les couleurs , je difcü-
terai leur analogie avec les laits; c’eft - à-dire,
leur vraifembiance. . •.
Les odeurs & les faveurs dépendent du Climat;
j’ai cité à l’article Cranson une expérience
qui le prouve. Le cranfon officinal, qui
au Gronand n’a point de faveur, tranfporté cû
Angléterre a pris, dans 1 efpàce de quelques
mois, le même goût que celui qui y croît naturellement
, donc c’efl au degré de chaleur du.
pays que l’exaltation du goût & des odeurs doit
fon principe. J’ajouterai à ce fait que le Meh-
lot bleu, qui a une odeur fi pénétrante dans
les pays un peu chauds , odeur qu on reconnoît
dans le Schap\iguer de Glaris, cultivé en Hollande
-, n’en a aucune ; j ai \ érifié ce fait pendant
plufieurs années. A Paris, je trouve déjà cette
odeur moins forte que fur les individus crûs en
Suifîe , & par conféquent plus .foibles encore que
fur ceux récoltés en Italie, dont on fe ièrt pour
la fabrication du Schapfiguer. Les Epiceries, les
drogues les plus odorantes , & les aromates les
plus exaltés font des pays les plus chauds : dans
le même genre, les efpèces les plus odorantes font
des pays méridionaux, & enfin les plantes des
pays froids n’ont point d’odeur. Celles même
qui y font portées d’un Climat moins féyère
les perdent en très — peut de tems. A 1 article.
?( j ) Cette nuance bleuâtre feroit- elle due à la ptélence
du fér, toujours abondant dans le» tourbières î