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L ’analogie nous conduit même à voir que beaucoup
de plantes à feuilles épaifics, ont des analogues
à fetiilles minçes dans les'Zôîles'tempérées
: les Euphorbes . les. Gerai%es.IçsÇaçaliçs,
les Craffules nous en offrent la preuve.
Les plantes des pays chaûds font généralèmeUt
plus cotonneufes & plus garnies d’épines que'
celles des pays froids. Nous examinerons cette
influence dans un article féparé.
Enfin, les Palmiers, cette famille de plantes
lignçufes], eft un produit des pays fitués entre les:,
tropiques, dont quelques ëfprèçes feulement fë
font étendues au-delà j & cès mêmës êfpèces font
celles qui fe rapprochent le plus de la nature
des herbes. On ne petit point'Corifldéi'èries Palmiers
comme des arbres , puifqu’ils ne font pas
formés de couches ligneufes 3 annuelles'^ confer-
vëes & formées par l’écorce , mais comme des
plantes dont ils ont le mode de développement ;
ils diffèrent fèulèmèpt de la tige du Chou par. la
dureté de leur écorce, câr leur organifation intê -
rieuré' eft âbfolumentla mèine. E t , comme'les
Palmiers fe rapprochent de la nature des herbes,
dans tés efpèces qui s’éloignent le plus des pays
chauds, il faut en conclure que la production
des Palmiers dépenddu Climat qu’ils habitent, &
qu’à mefurë qu’ils s’en éloignent, leurs, caraéfères
s’affoibliffent. II feroit!intéreftant de connoître
quelles circonstances déterminent lçur exjfiçnce
dans ces pays^là, ■ * ;
Forme des plantes fous les Z âne s glaciales.
Dans les parties voifinês des Zônes tempérées,
les arbres font encore affez nombreux* mais, à
mefure qu’on s’en éloigne, pour s’approcher des
Pôles, ils -deviennent :;plii$ rrUrés,^diminuent de
taille, & ne font plus^que des arbriffeaux -avant
de cefler toütrà-fait. Cgs arbrés ont une forme
particulière- ils font prefque tous dé la famille
des eonifèrèsleur fruit eft petit, fans pulpe, &
enveloppé d’une ou deux couvertures de confifi-
tance ligneufe. Voilà donc un extrême ôppofé à
celui des tropiques. Là , des frnits énprmes portés
fur la tige y ici, des fruits infiniment petits,
pu le germe eft à peine enveloppé de pulpe ; &
qui terminent les dernières-' ramifications des
branches. Quelques arbriffeaux baçcifères, & un
P in f o n t les feu fs dont les fruits foient mangeables
; & ces mêmes efpèces font couvertes de
neige, à caufe de leur pêude développement 2
cette circonftance influe beaucoup fur la conformation
des plantes.
Un eoup-d’oeil fur les efpaces intermédiaires
entre ces deux extrêmes, éclaircira encore*ce que
je viens d'avancer. A mefure qu’on s’éloigne des i
tropiques» dans les Z-ônes tempérées, on quitte les •
fruits pulpeux, à écorce épaiffe, pour en voir
dont l’écorce n’eft qu’une pellicule. A Y Orange ,
/accède la Pecke, i’Abricot ; la PfuM., dont le
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volume eft moins confidérable ; ces derniers frui»
ceffent de croître dans Je ÿord de PEûrope &
les fruits1 en bayes font les feuls qu’on voye dans
la partie- des 'Zónes tempérées qui approche des
Cerclés Polaires.
Les herbésTôh't petites dans le Nord -, elles font
prefque toutes vivaces, & fe.multiplient, parles
racines; plutôt que par les graines,’i que des froids
hâtifs empêchent de mûrir -, elles forment par
conséquent là plupart des touffes épaiffes & un
gàzon très-ferré. Il paroît mêmç que cés plantes1
neî cèffënt pas de vëgécer'foùs cette ënorïne çoik'
verturç dé-neigé qui les préfepve du. froid : c’cft
ce que nous verrons plü£ bas.
Influence du Climat fu r la nature du fol.
♦
Le fol des Régions Polaires n’eft pas le même
que celui des pays fitués fous les tropiques. Dans
les pays chauds, la chaleur & l’humidité con-
öoiirrept, 'pendant- tofité l’an née-,-à décbmpofef
les êtres organifés qui périffent -, les plantes fa
putréfient -, leurs parties , entraînées par l’eau
pétaëtfent ia terre, s’ÿ mêlent, St forment le
terreau Ou la terre-végétale. Dans les marais, il
fe-forme du limon.
Lës; Régions Polaires n ont qu’im Eté très-
court,’ le peu de chaleur qu’on y éprouve, eft
accompagné de féchéreffesi Auffi les plantes qui
périffent neffe putréfient pas; elles-fe sèchent, &
lacouclie.de nçigç, quifèscouvre., ne foyirniffam
pas, fans.doute .une humidité, fuffifante, ou pour
quelqu’autre raifon qui nfeft. inconnue * les.
change en tourbe ou .terreau de bruyères.^ qui
forme la fe-ule terre végétale du Nord. En effet,
on qe y-oit-point de tourbières .dans les pays
chauds y elles.commencent.daqs les.pays tempérés,,
& -leur nombre augmente à mefure qu’on
s’avanpe .vep ïes pôles. Lé terreau de bruyère eft
de la même nature, parce qu’il fe,forme au-*
deffus d’une couche de „fable qui abforbç l'humidité,
& produit, par une,caufe différente, un,
effet femblablé. Le terreau des Alpes efi de 1?
même nature que celui du INFord, pour la même
raffon. Là même décompofition des extrémités
des'plantes, qui s’obferve fous'les Pôles, a lieu
fur les Alpes, les végétaux's’ y,’çonfervent par
une progreffion du même individu, tandis que l’a
partie inférieure eft à différens degrés de dëcom-
• pofidôn. Et même les- plantes du Nord ayant les
racines longues, la partie inférieure périt à me-
ftire ,- & fe change graduellement en tourbe,
tandis que le haut végète, fe ramifie, & cpnferve
l’èfpèce par une progreffion femblable'.
Des poils âf des épines, conjide're's relativement au
Climat.
Les poils & les épines, de l’aveu de tous le9
Naturalifles, font des parties acceffoires des végê*
jau<
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taux : ce font des efpèces de fécondés végétations
qui fe développent fur les principales-,
mais ils ne s’accordent pas fur la manière dont
ces productions fecondaires y tiennent. Les uns
prétendent que les poils ont un germe inhérent
11 la nature de la plante | & qui fe développe de
i la même manière que les fleurs, les boutons à
I feuilles & les ail très parties des végétaux. D’autres
! difent que les poils ne font que des aggrégations
fecondaires qui fe forment dans le végétal, & que
leur naiffance dépend, eu entier, de la fuuation
où il fe trouve. Ainfi, la préfence ou l’abfence
j des poils ne peut nullement influer fur la diftinc-
tion des efpèces, parce que leur abondance, &
même leur abfence totale ne naiffent que de cir-
I confiances particulières. Quelques principes ,
! tirés des obfervations les plus conftatées, développeront
la queftion.
Les plantes des pays chauds ont, généralement
parlant, des poils plus nombreux & plus coton-
! peux que celles des pays tempéiés froids.
Deux variétés de la même plante , dont l’une eft
dun pays ou d’un lire plus chaud, diffèrent par
l’abondance des poils qui couvrent la fécondé»
j Deux variétés , l’une d’une' terre sèche , &
I l’autre d’une terre humide, diffèrent par l’abon- f dance des poils qui couvrent la première ; les
I plantes qui croiffent d ms un lieu fec , très-
expofé au foleil, quoique plus petites que celles
I d’un lieu humide ou ombragé , font couvertes
de poils, tandis que les dernières en ont peu
[ ou point.
Les plantes des marais font prefque toutes
glabres.
Une plante d’un terrein fe c , tranfplantée dans
un jardin , y perd fes poils en peu de tems.
La même cliofe s’obferve, d une manière en-
I core plus confiante , lorfqu’on sème la graine.
Beaucoup de plantes perdent leurs épines par
[ la culture.
De tous ces principes, on peut conclure que
le nombre des poils qui couvrent une plante",
dépend entièrement des circonftances où elle fe
trouve, & qu’ils font abfolument des’ produits
accidentels de là végétation. Ainfi, \la nature du
Climat influe fur lçur formation. Refte à examiner
comment elle peut agir.
Un être organifé a une exiflence bornée -, le
terme de fa vie eft celui où fa charpente primitive
, développée, par les molécules qui fe'logent
dans les cavités ou mailles de fon réfeau , ne
peut plus en recevoir. Alors fa caducité commence,
& fes pas vers fon anéanti fie men t, font plus ra^-
pides que fa croiffance. La -vie des végétaux eft
animée par la lumière -, c’eft el'e q u i, par un
mécanifme encore inconnu , détermine le mouvement
de la fève. Donc , une plante qui.végèfe
fans lumière, & une plante qui végète expofêe
ù la lumière la plus vive, doivent recevoir des
impreftions bien différentes. Nous ne pouvons
^Agriculture. Tome I I I .
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pas comparer d’une manière abfoîue les plante5
des tropiques, parce que les vapeurs répandue»
dans l ’air, retardent le mouvement du rayon ,
mais bien celles des hautes Commués, ou i air
étant d’une lècherefle exceffive, elles reçoivent
toute l’inténiïté de la lumière, effet bien différent
de là chaleur de l’atmolphcre ; car plus l'air eft
fec & pur, moins il s’échauffe ( t). ,
Les plantes étiolées font longues, foibles, d’une
conftflance aqueule, jaunes ou d'un verd pâle ;
leurs rameaux font peu nombreux ; les flejjrs ,
- lorfqu’i! en paroît, font, foibles, & avortAtt
prefque routes-, Couvent elles périffent en bouton,
Le tiffu intérieur de ces plantés eft lâche, comme
fi les fécrétions n'ayant pu fe faire, toute l’eau
y fût refiée & eût relâché le tiffu primitif. Leur
lurface eft toujours raie & fans aucun poils j
quoiqu’elles en portent dans leur état ordinaire..
Les plantes des hautes fommités font baffes,
ramifiées dès la racine, d’une nature sèche &
dure ; leurs fleurs, & , en général, tout l’appareil
de la génération , d’un volume énorme.,:-fouvent
égal au refte de l’individu'jileurs graines font
groffes & bien mûres-, leur ûtrface eft couverte
de poils, plus nombreux fur les fommités que fur
le refte de la plante, & plus abondans à mefure
que la plante eft d’un lieu plus élevé.
Une plante dès Alpes , tranfportée dans la
plaine , ou entraînée dans la vallée , par les tor-
rens, fe trouve dans une atmofphère moins pure,
où l’aélion des rayons folaires eft ralentie par les
vapeurs ; cétte plante y acquiert un volume plus
confidérable; fes ramifications y font moins nom-
breufes; maïs en même-tems elle y perd nriè
grande partie de fes poils ; fouvent elle y devient
prefque glabre. Donc, c’eft à la plus ou moins
grande activité de ia lumière , que les plantes
doivent les poils qui les couvrent ; & cela , au
moyen d’une accélération du principe de vie
inhérent à la végétation.
De toutes ces données, on peut conclure que
TaéKvité du rayon folaire a une influence réelle
fur les végétaux ; que cette aélivité eft modifiée
par plufieurs caufes, telles que 1 abondance des
vapeurs. O r , comme l’air d’une montagne élevée
eft plus fec que celui d’une montagne baffe, &
celui-ci que 1 air de la plaine, 1 abondance ou la
: rareté des poils, dans ces fîtes là , ne peut offrir
de caractère çle diftinèlion. Il en eft de même
dans la plaine entre une terre aride & le voifi-
pagê de l’eau, l’atmofphère ferempliffant davanl
i ) La tendance à la chaleur, ou facilité d’échauffè
r en t de • • pur, eft à celle de l’eau comme t à 87 »
celle de l'air atmofphçrique eft a celle de I eau, comme
1 à iS , parce que l’air atmofphérique contient de l’ eau.,
& que l’eau s'échauffant plus facilement que l’air , l’ait
laturé d’eau ou de vapeurs doit s’échauffer plus promptement
que l’air pur, Éojeç , Du f eu , p.ir L. R.XY2ÎIEK.
L i v . H , €liàg. t s , * '