
affûter, il faut femer des grains ifolés *, ce qu’il y
a de certain, c’eft qu’on voit de greffes touffes ,
dont tous les épis font charbon-nés. j ’ai compté 45
épis clans cct état fur une feule louche.
Les feuilles d’en-bas du millet charbonné, fe
comportent comme celles du millet la»n. Elles font*
également- alternes. Elles le fanent feulement un
peu plutôt. Celles d’en-haut n'ont pas la même chl-
pofition apparente; mais, li on les examiné deprès,
on voit quelles fontinléicés, les unes àun côté ,
les autres, à l’autre côté.'de la tige, fans paroître
oppofées. La tige étant repliée fur elle-même, à
fa partie fupérieure, les dernières feuilles fem-
blent être paralèlles , quoiqu’attachées à divers
points, les unes au-deffusdes autres. La pointe de
l ’épi charbonné enfile & perce toujours la derrière
.& la plus élev ée. On voit fortir au-deffus de
la gaine qu’elle forme, ur.e foliole (oncée , qui,
quekjuefoîs, en renferme deux autre* plus petites.
C’effle prolongement de l'enveloppe de l’épi.
Le plus ordinairement il n’y a, à l’extrémité de
la tige, que deux feuilles -parallèles *, maïs quelquefois
il y en a 4 , 5 , 6 , & même jufqu a 10 , ce
qui dépend du peu a accroiffemem & d’élévation
de la tige. Toujours la plus élevée fe recpnnoît au
lieu de fon infertion.
Ce qui indique la place de l’épi charbonné,
c*c!î un renflement à l’extrémité de la tige principale
, ou de chacune de les divifions.Çe renflement
eft formé par l’épi , envçloppé de plufieurs
feuilles, qui le compriment. Elles font jaunes ou
violettes, ilq r i que le millet qui le charbonné , eft
jaune ou violet ; car ces deux v ariétés font fuicep-
tibles de la maladie : l’épi faifant effort pour'for-
tir , écarte les feuilles, & fe montré communément
fous la forme d’un cône alongé, recouvert
d’une peau grife, qui fe déchiré S laiffe appcrce-
voir un corps, çompofé de filets & d’une matière
noire dans toute la longueur , excepté à la partie
inférieure, où elle eftgrile, plus ferme & plus
compare ; mais cette partie ne le voit quç quand
on détruit les enveloppes.
L e pi eft toujours alfts fur un noeud de la tige.
Retenu fupéricurement par les feuilles, qui lui
fervent de fourreau, & le ferrent étroitement;
pour fedébarraffer de fes entraves, il febourfouffle,
fe jette en bas & de côté, fans jamais pouvoir
être libre entièrement La peau, qui le receu^-
vrereffçmbleàcelle du Lycoperdon, pu du grain
de froment carié. Sans doute elle eft formée des
débris de plufieurs feuilles loudées enfemble ; car
©n peut les féparer.fes unes des autres, à l’extrémité
fupérieure, où elles font contournées & repliées
fur elles-mêmes. A la bafe de l’épi, elles
adhèrent à la tige. Une partie de çetre peau eft
fouvent de couleur verte, comme les feuilles.
On ne fe livre point à de (impies conjeéhires,
mais on eft dans le chemin de la vérité lorsque
, d’après ces obfervations, on regarde la
peau, qui fert d’enveloppe à l’épi du millet char?
bonné, comme le produit de la defthiéHon de
quelques feuilles. On eft également aurorifé à
croire que les filets, qui traverfent la fubftance
noire , font les pédoncules de fa paniculè non
développés. Enfin il eft plus que vraifemblable,
aux yeux d’un Obfervateur attentif, que la matière
noi#e eft dûe à la deforganifation & coriup-
tion des parties de la fruélincation. Ce qui l’indique
d’une manière bien certaine , c’eft l’obier-
vation fuivante : fi on abandonne le mill.t charbonné
à lui-même, la matière noire fe détruit &
fe difiipe peu-à-peu ; il ne fubfifte que les filets,
c’eft-à-dire, les. débris des pédoncules.
Il y a des panicules de millet en partie charbonnés
& en partie fainsr. ce qui eft fain , eft loin
de la tige ; ce qui eft malade, en efl voifin.. De
petits corps noirs fe remarquent a^x endroits ou
devroient être les grains, à l'extrémité des pétioles.
Tosas les pédoncules n’ont pas de ces corps ;
car plufieurs y plus fins & plus atténués que ceux
qui portent des grains de m ille tn ’onr rien à leur
extrémité , où ils font contournés & renverfés ;
l’épi ne s’élève pas autant au-deffus du dernier
noeud , que dans les épis lains; le Charbon eft incomplet
clans ces individus.
Les épis charbonnés ne font pas toujours ifolés;
on en voit quelquefois de grouppés de diverfç
manière. Tantôt , ils font les uns au - deffus
des autres; tantôt ils font placés circulairemenr,
où irrégulièrement, parce qu’aiors la tige s’incline
& fe contourne. On croirôit que çe font des fo-
bolcs d’a i l, rangés à l’extrémité de cette plante.
J’en ai compté jufqu’à douze airsfi rapprochés,
fans y comprendre deux autres, qui s’élevoien t
plus haut; chacun avoir fon enveloppe particulière'.
La poudre noire de millet charbonné tache les
doigts & le linge, fans y adhérer beaucoup. Elle
n’a ni faveur, ni odeur : la bafè-de ljjpi feule a
une faible odeur vireufe.
Cette maladie peur faire beaucoup de tort à
la récolte du millet. Il eft poffible qu’elle prive?
d’un tiers de fon produit; car, dans la même
planche, j’ai récolté une petite gerbe de millet
charbonné, d’un pied de tour, & une petite^erbe
de millet fain, de deux pieds quatre p'ouces de
tour.
Pour rendre ces obfervations utiles aux Cultiva-
teursde millet,ijfaudroit pouvoir en déterminer les
caufes & indiquer des moyens préfervatifs, c’eft le
but qu’on doit fe propoler. Ayant vu, en 1785,
du millet charbonné dans pluftçurs planches, Sc
; n’en ayant pas vu dans d’autres, j’ai foupconné
que cette maladie pourroit bien être contagieufe,
& avoir liau dans certains pays, fans avoir lie»
dans d’au très. Mes foupçons étoie n t d’au tan t mieux
fondés que le millet dé chaque planche venoit
d’un pays différent. Les années fuivantes, je re-
femai mes millets il part, & je revis encore du
Charbon dans les uns, tandis que lès autres en
éroîeflt exempts. Alors j’achetai au marché, à Paris,
du millet deftinéaux o’ifeaux, & je le femai,
«nBeauce, comparativement avec du millet récolté
, à Rambouillet, dans mes planches. Celui-
ci fut perdu de Charbon ; l autre , n en avoir
pas un épi. En 175)1, je noircis .de poudre de
Charbon de millet, l’enfeméncemenj de quelques
planches, fait à Andooville, fans noircir celui des
autres planches , qui dévoient fervir de comparai
fon. Cesdernières ne furent pas charbonnés ; les
autres le furent à l’excès ; les tiges mêmes relièrent
très-balles. La même expérience, répétée à
Rambouillet, a donné, à-peu-près, les mêmes
réfultats. La feule différence, c’eft qu’à Rambouillet
les planches, dont la femence n’avoit pas été
noircie de poudre de Charbon, en ont donné
quelques épis, mais infiniment p eu, en compa-
jaifon de celles dont la femence avoir été noircie.
D’après ces faits, on eft âutorifé à croire que
cette maladie eft contagieufe. Des expériences
ultérieures feront voir fi on peut en préferver
le millet.
Du Charbon dans le mais ou bled de Turquie.
Meflieurs Tillet & Duhamel, ayant été envoyés
«n Angoumois, en 1760, par l’Académie Royale
des Sciences, pour y érudier & obferver les papillons,
qui .étoienC depuis long-rems le fléau
des moiffons de cette Province , M. Tillet y refia
plus long-tems que M. Duhamel, & eut occasion
=de s’occuper du Charbon dans le maïs. C’eft particulièrement
d’après les détails, qu’il en a donnés,
dans lès Mémoires de l’Académie des Sciences
, année 1760, que j’en rendrai compte. .
Dans l'Angoumois, le Charbon du maïs eft
appellé nielle > pourriture , dénominations données
improprement à diverfes maladies de froment.
Ÿoye\ les mots Carie ,, Ergot, Rouille ,
Avorté. -
Ce n’eft guères que vers la fin du moisd’Août,
ou au commencement de Septembre, que le Charbon
fe mamfefte d’une manière fenfible dans l’An-
goumois. Il paroir qu’on ne l*a pas obfervé plutôt,
car on pourroit le connoître avant cette
époque, à l’état des-feuilles & à la grofleur du
volume des épis, fouvent rrès/-courts.
Il eft confiant d’abord, que la maladie de cette
plante s’annonce par une protubérance plus ou
moins forte , dans la partie attaquée , qu’il y a
vifiblement une furabondançe de fucs, un engorgement
çonfidérable dans les utriçules, ou tiffu
cellulaire , & que les parties voifines de l’endroit,
où le mals’eft montré,,font altérées, maigies, &
quelquefois defféchées. L’exçroiffance accidentelle
que cette tpaladie ocçafionne dans le maïs,
eft fouvent de la groffeur d’une pomme de. reinette
&' même plus forte; elle eft blanche, charnue,
& auffi adhérehte à la plapte que i’eft une
loupe ap.çorpshumqjn. A.mefuçi que le ratai vient
à fon point, cetteexcroiffance devient fpongieufe 1
elle eft tachée intérieurement de petits points noirs;
if en fuintejorfqu’on la preffe,une liqueur limpide,
& dTme odeur défagréable, mais bien différente de
celle qu’exhalent les grains de froment cariés. La
corruption s’étend infenftblement dans la partie
affeétéc, & fon dernier effet confifte à convextir
cette excroiflance en une pouffière noirâtre , &
affezfeniblable à celle qui fort du Lycoperdon ou
VeJJe, de Loup.
Cette maladie attague tantôt la tige du maïs;
tantôt les feuilles, communément l’é p i, & quelquefois
les étamines : un épi eft en partie fain &
en partie malade ; fouvent le mal fe borne à la
pourriture de quelques grains; fouvent aufît
l’épi eft entièrement corrompu , tandis que lea
balles qui l'enveloppent font parfaitement con-
fervées. Lorfque l’excroiflânce a lieu fur la tige,1
& qu elle eft çonfidérable, il s’y fait un étranglement
: la tige fe ploie dans l’endroit affeélé,'
& la protubérance charnue y efl fur-tout remarquable
: lorfque cet accident tombe fur les
fleurs mâles de la plante , il a encore un caractère
plus fingulier ; quelquefois le mal fe borne
à une ou deux petites excroiffances fur les étamines
; quelquefois auffi la plus grande partie de
ces mêmes étamines font dans un état de monf-
truôfité, & forment en haut de la tige une maffe
charnue, qui a deux pouces ou environ de diamètre
, & fait plier l’extrémité de la tige par lis
pefanteur.
On a cru que le Charbon dp maïs n’éroit pas
la même maladie que le Charbon dans le froment
, 1 orge, 1 avoine, &c. & qu’elle demandoit
à être placée dans une claffe à part. Si on veut
bien faire attention à ce qui précède & à ce qui
fuivra, on verra que c’eft abfolument la même
chofe, & que les différences qu’on y trouve ne
font pas effentielles, & tiennent feulement à la
différence du genre des plantes & à leur confti-
tution particulière.
M. Tillet n’a pas été à portée d’examiner (t
cette maladie du maïs eft contagieufe, & fi la
pouffière noire, qui en efi le dernier effet, contient
, comme celle du froment carié & du mille*
charbonné, un virus funefte au grain fain. Il a
tenté quelques expériences qui pou voient l!y
conduire; mais, n’ayant pu aller an - delà, parce
que les circonftances ne le lui permettoient Das il
fe borna à celles - ci, « ; 4 f *
Il prit un petit efpaçe dans un jardin fi tué â
Ta Rochefoucault,qu’il partagea en Mois planches
chacune de fix pieds d’e largeur, fur dix -h uit
ou environ de longueur. Elles étoient féparées
par un fentier large de deux pieds ; chacune de
ces planches étoit divifée fur la longueur en fept
rayons, & conféquemment ils étoient à un pied
l’un de l’autre. ■
M. Tillef ,çe fena dans la première planche
I ^ dansles juatre premiers rayons de la féconde^