
On croit communément, en Angleterre , que
les moutons engraiffés avec des Navets ont la
chair forte & d’un mauvais goût -, mais Miller
combat cette erreur, & il prouve, au contraire,
que les meilleurs moutons de l’Angleterre font
ceux nourris avec des Navets ; les mauvais goûts
dont certaines elpèces de mouton participent,
efl dû aux terres baffes & marécageufes fur lef-
quelles ils ont été élevés.
Miller recommande, pour fe procurer la graine
des Navets en abondance & d’ une bonne qualité,
d'arracher, au mois de Févrierquelques-unes
■ des plus belles !acines,& de les plantera un pied ,
au moins, de diilance en tout fens ; en obfervant
■ de tenir nette la terre ou elles fe trouvent, juf-
qu’à ce que cts p^anns foient devenues affez
fortes pour étouffer les mauvaifes herbes. Lo rf-
que les filiques qui contiennent la graine font
formés, il faut les mettre à l’abri des oiféaux,
qui les dévorent bien-tôt ; on parvient à écarter
i es ennemis , foit à coup de rufil, foit par des
épouvantails. Quand la fehience eft mûre, on la
coupe , & on l’étend au foleil , pour la faire
fé-her *, on la bat enfuite, & on la conftrve pour
l’ufage.
Les variétés de Navets ou Raves, que l’on cultive
communément en Angleterre , font la Rave
rouge ou pourprée, la Rave verte, la Rave jaune,
la Rave noire , & la printanière d’Hollande. Cette
dernière variété de Rave, fe sème, en Angleterre,
au Printems ; elle fournit alors les cuilines au
mois de Mai & de Juin -, elle paroît uniquement
deftinée pour l’ufage de la table, car on ne la
cultive pas en grand. La Rave rouge était anciennement
plus eftimée, en Angleterre , quelle ne
Feft à-préfent ; car depuis que la groffe Rave verre
eft introduite , tous les Fermiers intelligenS la
■ préfèrent aux autres efpèces. Cette racine acquiert,
en Angleterre, une groffeur confidérable, & fe
conferve plus long - tems que les autres. Après
c e lle -c i, vient la Rave rouge ou pourpre, qui
parvient à une égale groffeur, & fe conferve pendant
quelque tems -, mais elle eft beaucoup plus
fujette à fe creufer que la Rave verte. Les Raves
ou Navets à racines longues, la rave jaune & la
noire ne fon t, à-préfent, guères cultivées en
Angleterre, de même que les petits Navets de
France. La Rave ou Navet jaune des Anglois n’efl
pas beaucoup fujet à varier ; Miller prétend qu’il
«n’a jamais vu cette racine changer par la culture;
fa chair eft toujours blanche, tandis que les autres
ont tous une chair blanche , & ce n’eft que l’écorce
feule qui fe préfente différemment coloriée.
Miiler regarde également le Navet ou la
Rave à lo ngue racine comme une efpèce diftinéte ;
fà forme & fa manière de croître eft .tout-à-fait
diflinélc des autres ; il en a vu qui avoient la forme
du Panais, iant pour la longueur que pour le
^P°rt- En Angleterre , on-ffen fait pas cas pour
nourrir les beftiaux, & pour l’ufage de la cuiline*
ils ne font employés qu’aurant qu’ils font jeunes.
Le Navet croît, à ce qu’en dit Miller, plus
qu’aucun des autres Navets au-deffus de la terre :
pour cette raifon , on le préfère, en Angleterre
pour la nourriture des beftiaux ; & comme il eft
encore tendre & doux, même quand il eft gros
on l’emploie également dans la cuifine. Dans les
Hivers froids, ce Navet eft fouvent endommagé
par la gelée, & plus que tous les autres Navets
qui croiffent plus profondément en terre , fur-
fout. quand il n’eft pas couvert de neige ; car étant
fouvent gelé & dégelé, il pourrit plus aifément
que ceux dont la chair eft moins tendre & moins
douce. Miller dit avoir vu de ces Navets verds,
d’un pied de diamètre, aufli doux & aufli tendres
que les plus petits Navets.
Culture des petits Navets , dans les environs
de Paris.
On cultive fix variétés de ces Navets : favoir,-
le petit Navet de Berlin, le Navet de Vaugirard,
le Navet commun'blanc long, le rond, le Navet
gris & le Navet de Meaux.
Le Navet de Berlin, cultivé en France, ne
produit que la première année un Navet très-
doux & du goût de Noifette ; ce Navet eft très-
petit , même dans fon pays natal, & plus long
que rond. On le tire des environs de Berlin, où
le ’fol, extrêmement fablonneux, convient parfaitement
à toutes fortes de racines., comme
Navets, Carottes, Panais, Radis, &c. Les meilleurs
Navets, prétendus de Berlin, viennent dans
les environs d’une petite ville à trois lieues de
Berlin, nommée Tehow, où cette efpèce eft uniquement
cultivée, & où l’on a le plus grand foin
de la conferver dans toute fon intégrité ; car cette
petite ville envoie rous fes Navets ou à Berlin, ou,
en droiture , chez l’étranger ; elle fait également
des envois confidérables de graines de ce Navet
pour les pays érrangers.Le fol desenvirons de Tel-
tow eft on ne peur pas plus fablonneux & arride ,
& ne produit que de ces Navets ; on a donc beau
en faire venir, tous les ans, la graine du pays
même , on ne parviendra jamais à en obtenir des
Navets paffables, à moins que les terreins que l’on
deftine à leur culture n’aient un fol aride & fablonneux.
Les jardiniers des environs de Paris qui
cultivent ce Navet, prétendent que c’eft le plus
hâtif dans le pays; on n’en fait ufage qu’à la fin
de l’Eté & en Automne.
Le Navet de Vaugirard eft de groffeur médiocre
un peu alongé , d’un blanc fale , tirant fur le
gris du côté de la tête., d’un bon goût & très-
tendre ; il eft fort eftimé à Paris, & un des plus
communs.
Le Navet commun, qui efl ou long ou rond ,
fe cultive principalement aux environs d’Auber-,
‘villiers ; c’eft de-là qu’il vient à Paris. Le rond &
Je long ne diffèrent pas beaucoup, quant au goût ;
niais le rond vient plus gros ; la peau en eft fort
blanche, leur chair eft douce & tendre, & le
goût allez bon.
Le Navet gris a la peau grife, comme fon nom
l’annonce, & la forme affez alongée ; il a fes
partisans, qui le préfèrent aux blancs, à caufe de
fon goût, qui eft un peu plus relevé ; mais, pour
l’ordinaire , il n'eft pas fi tendre, & il eft plus fujet
à être verreux.
Le Navet de Meaux eft celui qui rend le plus
de profit par fa grofieur & fa longueur, qui eft
communément de huit à dix pouces; fa couleur
extérieure eft d’un blanc jaunâtre , & fa chair
très-blanche ; il eft tendre & d’une faveur fort
agréable ; on en fait grand cas à Paris ; mais on
remarque que celui qu’on emporte de Meaux eft
meilleur que celui qu’on élève aux environs de
Paris.
Dans les jardins de Paris ces fix efpèces fe
I cultivent de la même manière ; on les sème en
I deux tems différens, au mois de Mars & au mois
d’Août; mais dans beaucoup de terreins, ils ne
[ réuHifl'ent pas au Printems; la terre la plus légère
eft celle qui leur convient le mieux. Dans les
terres foi tes & humides, ce légume eft prefque
I toujours verreux & fans goût ; il eft, de plus,
important que la terre ait été bien labourée , &
qu elle foit faine quand on fait la femence : trop
sèche ou trop trempée, la graine ne fe diftribue
pas également, & ne lève pas bien; & comme
F cette graine eft très-menue, il faut ufer de pré-
! caution pour ne pas en répandre plus qu’il n’en
| faut. La meilleure méthode eft de la mêler avec
trois fois autant de cendre ou de fciure de bois, &
I de la répandre le plus également que l’on peut ;
[ elle ne fauroit être femée trop claire ; & il faut
dé plus, quand elle eft levée, ol qu’elle eft venue
à un certain point de force, éclaircir le plant, de
1 manière qu’il y ait fix pouces environ de diftance
dun pied à l’autre : en même-tems qu’on fait
cette opération, on farcie les mauvaifes herbes,
& cette double façon eft très-importante. Je fais
[ que beaucoup de gens s’en difpenfenr, fur-tout
r dans les campagnes où on sème des champs entiers
; mais je fais aufli qu’on n’en fait pas mieux,
jx nos Maraîchers de Paris, qui en connoiffent
! utilité, y font très-exaéls ; il n’y a pas d’autre
précaution à prendre. Les Navets se sèment plus
; îna’rement dans les terres qui ont rapporté du
dled, gue dans les jardins ; cependant, lorfqu’on
a un jardin d’une certaine étendue, il eft agréable
ae Jes avoir fous fa main. Les Navets ont un
ennemi cruel, qui eft la lifette : cet infefle dé-
we les deux oreilles de la jeune plante, dès
qu’elle lève, & il n’y a pas de reffource : on pro-
p o fe , pour l’écarter, de répandre de la cendre
deffus, ou de la fuie de cheminée à la rofée du
matin ; mais tous ces expédiens font infuffifans,
d après les épreuves que j’en ai faites. Le plus
courr moyen, quand le mal eft à un certain point,
c efl de redonner une petite façon à la terre, 5fc
de iemer d’autre graine, qui a fouvent le même
fort que la première, & alors il faut y renoncer.
Cet inconvénient efl commun dans beaucoup de
terreifis, fur-tout dans les années sèches; & ceux
qui le connoiffent doivent être en garde, faute de
quoi ils perdront inutilement leur graine 5c leur
rems. En femanr les Navets tard , c’eft à-dire
après la mi-Aoûr, cetinfeéïe, qui commence à
fe retirer, ne la fatigue plus tant. Lorfque ce
moyen réuflïr, le Navet efl ordinairement bon
deux mois après ; & il ne faut pas alors le laiffer
plus long-tems en terre, car ordinairement il fe
corde, ou le ver s’y met, & de plus les mulots
les mangent. On les arrache avec la main, ou avec
une ferfouette, s’ils font trop gros, & on les renferme
dans la ferre jufqu’au befoin, après leur
avoir tondu Ja,fanne. Ceux du Printems fe con—
fervent tour l’Eté, & ceux du mois d’Août paffent
tout l'Hiver, étant mis dans le fable. A Auber-
villiers, les Maraîchers en sèment dans leurs enclos,
qu’ils laiffénr en terre tout l’Hiver, & il$
ne s’y gâtent pas, comme dans beaucoup d’autres
terreins. Dans les pays où l’on fait de grandes
plantations de cette racine, on fait un trou au
milieu de la terre , proportionné à la quantité de
Navets, & on les range dedans-, on les couvre
enfuite avec du chaume, & ils s’y confervent
parfaitement bien , pourvu que l’eau des pluies
ait quelqu’écoulemenr.
Les Amateurs de ce légume en sèment fur
couche dès le mois de Février, dont ils jouiffent
au mois de Mai ; il faut, en ce cas, que la couche
foit chargée de huit à neuf pouces de terreau, &
que fa chaleur foit confidérablement amortie; car
pour peu qu’elle foit trop chaude, les Navets
fourchent & viennent couverts de petites racines,
ce qui eft un grand défaut.
Ce que nous.avons rapporté ici fur la culture
des Navets, telle qu'elle eft fuivie par les Maraîchers
de Paris, eft extrait de l’École du Jardin
Potager.
Plulieurs cantons de la France produifent également
quelques variétés de Navets; nous nous
contentons de nommer ici les Navets de Freneufe,
dans le Vexin François, les NaversdeSaulieu, en
Bourgogne, ceux de Cherouble, dans le Beaujo-
lois, & de Pardaillan, près Pons, en Languedoc.
Jnjlrudion fur la culture du Turneps, mu gros Navet.
imprimée par ordre du Roi.
Dans une année où les fourrages de toute efpèc*