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tage d’émanations dans ce dernier fite. On ne
pourra tirer aucune induétion de la différence
des poils dans ces deux poûtions. Un lieu couvert
enfin, comme un bois, une pentée tournée au
nord, & c ., recevant moins de lumière qu’une
terre nue, on ne pourra tirer de conclufions certaines
de ce que des plantes crues dans l’une .de
ces politions, auront plus ou moins de poils que
dans l’autre. En fuivant ainfi la coinparaifon des
fîtes variés qui exiftcnt, on obtiendra une multi-
tudq de réfuitats heureux, que d’autres obfer-
vaéûfas rendront plus certaines encore.
Il refte à expliquer comment la lumière peut
déterminer la formation des poils : toute explication
, au point d’imperfeélion où fe trouve la
phyfiologie végétale, fera néceffairement hypothétique
-, celle que je vais propofer, répondra
peut-être aux objections.
Le germe contenu dans la graine, contient une
ébauche de l’individu *, toutes fes parties y font
contenues, mais en raccourci; de forte que fa
croiffance future n’eft qu’un développement gradué
de toutes ces parties, & non une véritable
formation. Cette première exiftence peut être
confidérée comme une charpente ; elle fe développe
& s’étend , pendant la jeuneffe de l’indi- j
vidu -, fes mailles fe rempliffent, pendant fa v ie , j
au moyen de la nutrition ; & , lorfque tous les
vides font remplis, l’individu tombe dans la
caducité , & tend vers fa diffolution.
O r , comme le mouvement vital das végétaux
reçoit différons degrés de force de celle des rayons
foiaires, & que leur aéïion n’eft pas la même
dans tous les Climats, il fuit que l’endurciffe-
ment de la charpente a lieu plus promptement
dans une pofîtion que dans une autre, & l’individu
y reçoit des degrés divers d’extenfion ; mais,
comme l’abondance des molécules portées par le
travail de la vie, dans toutes les parties du végétal
, ne permet pas quelles fe logent toutes ;
le fuperflu fe réunit, & forme des poils d’autant
plus nombreux que le développement de l’individu
aura été pins accéléré. En effet, ces productions
acceffoires font généralement plus nom-
breufes fur les parties fupérieures de la plante, i
où fe trouvent les organes de la génération, que !
fur les autres extrémités, & les plantes des A lpes, j
où la vie eft infiniment accélérée par la vivacité i
de la lumière, font plus couvertes de poils près i
des fleurs que fur les feuilles. On obferve aufii !
que les variétés velues font plus petites que les j
variétés glabres, & que leur villofité eft en raifoft j
inverfe de leur grandeur.- J ’en excepre les vari.ér
tés qui croiffent dans les tourbières, dont il fera J
quemon plu? bas.
Les épines nous offrent des faits femblables que |
les poils, mais moins nombreux, parce que le j
volume de ce genre de production étant plus
confîdéi able, il rend leur exiftence plus inhé^-
rente à la conformation des plantes, quoiqu’elle |
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ne lui foit pas effentielle. L ’obfervation fuivanu
de Pallas , me paroit digne d’être confeiW
«c La chaîne des montagnes qui confine au Qhi!
lan, ne préfente que des forêts, où, vu la nati^
graflè & argillcufe du f o l , les arbres joui(Fcn,
d’une telle abondance de fucs nourriciers,
font, pour la plupart, pourvus d’épines très,
incommodes. C’eft une fingularité. qui pgr|jjj
d’être obfervée, que, dans l’Orient, la majeure
partie des plantes font velues, & la plupart des
arbuftes fort épineux. Les Néfliers, le Catalpa
le Grenadier y font très-incommodes par leim
épines -, il y a même d’autres efpèees d’arbres qui
n’ont point d’épines ordinairement, & qui en
| font garnies dans cette contrée : comme, par
| exemple, le Cormier fanguin. On voit ramper
j fur la terre des trèfles très-cotonneux ; quantité
de Lychnides, ainfi que beaucoup de plantes du
genre des Renoncules, y font vêtues d’une efpèee
de peliffe. Hift. des Dec. des Sav. Voy. T. I l
pag. 380. j>
J ’ajouterai à cette autorité l’obfervation que
fa i déjà faite du Rofier des Alpes, qui fe couvre
d’épines, lorfqu’il croît dans un lieu découvert
& un peu élevé, & qui n’en a point danslct
bois ou oh le trouve communément.
Enfin Defay , de l’Académie d’Orléans
a fait perdre à un Rofier fes épines, en le culti-
vantdans un fable p u r , & , parconféquent, ea
diminuant la quantité de fes fucs nourriciers.
Des plantes des montagnes.
Le paragraphe précédent contient déjà que!«
ques obfervations fur les plantes des montagnes;
mais il eft effentiel de les réunir.
L e mot de montagne eft infiniment vague, &
ne fuffit pas pour établir, d’une manière précife,
1 effet de cette pofîtion fur les plantes. Les baffe*
montagnes & la partie inférieure des montagne*
élevées n’ont aucun rapport avec les hautes fom-
mnés : il faut en traiter féparémenr.
Les baffes montagnes font ordinairement couvertes
debois ou de pâturages dontl'herbe hautefc
fans confiftance mftruiroit le Naruralifteque l’ana-
logien auroit pas déjà éclairé: la pentede ces mon-
tagnes diminue beaucoup l’aftion de la lumière ;
I ombre y reftepluslong-temsque dans la plaine,&
les nuages, qui s’y accumulent prefque tous les
jours, outre qu ils interceptent les rayons,dépofent
une rofée abondante q u i, lorfqu’elle s’évapore,
trouble encore la tranfparence de l’air. Aufii les
plantes y ont - elles une conformation femblable
à celles de la plaine: des feuilles énormes, des
.tiges élancées & peu rameufes; elles forment un
intermédiaire entre I étiolement & les pl antes des.
hautes fommités. Ces plantes diminuent fouvent
de volume, Iorfqu’on les cultive dans la plaine,
ot la raifon en eft fimple.
Les hautes fommités font prefque toujours au-
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Meffns de la région des nuages ; un air p u r , dé-
iLgé de vapeurs, y laiffc aux rayons foiaires toute
tu r aéHvité. On peut voir, dans les Ouvrages
|]e Ulloa , Sauffure , & c ., des détails fur les
phénomènes que caufe cette rareté de l’atmof-
Ehère. Les plantes qui font expofées à l’influence
K’une lumière aufii aélive, font baffes, rameufes,
Couvertes de poils, & la grandeur de leurs fleurs
Kurpaffe fréquemment celle du refte de la plante.
■ Leur culture exige les plus grands foins, & le
■ premier changement qu’elles éprouvent, c’eft
Ene augmentation de volume, & la perte de leurs
Eoils, ou d’une partie feulement, parce que
Baélivité de la lumière étant moindre dans un
Imilieu plus denfe, le développement de l'indi-
Iridu eft moins accéléré. Souvent des plantes qui
In’avoient pas deux pouces de haut, m’ont donné
Ides graines bien aoûtées, qui ont produit, dans
|tnon jardin, des individus dont les feuilles avoient
|un pied.
| Un autre phénomène que préfentent ces
Liantes, c’eft leur délicateffe pour le froid. Au
(premier coup-d’oeil, il paroîr fur prenant que les
(productions d’un Climat où les neiges reftent neuf
linois de l’année , redoutent les gelées, même
Icelles d’Àutomne ; mais la neige forme uneenve-
lloppe épaiffe qni couvre les plantes, & empêche
Ile froid de pénétrer jufqu’à elles. Des obferva-
Itions que j’ai faites, pendant l’Hiver, fur les
■ Alpes, m’autorifent à croire que la végétation ,
(quoique ralentie, fe continue fous la neige. O r ,
(comme prefque toutes les pluies , même au coeur
(de l’Eté, tombent en neige, elle prend pied avant
(lesgelées de l'Automne, & la fonte, au Prin-
(tems, n’eft achevée qu’à une époque où les re-
itours de froid ne font plus à craindre. Ainfi, il
(eft de fait que les plantes des hautes fommités ne !
(font jamais expofées au froid, & qu’on a raifon ,
(de les cultiver dans l’orangerie.
| J’ai dit plus haut que la végétation n’eft pas
(abfolument interrompue pendant l’Hiver. En
(effet, il pénètre toujours quelques rayons au
(travers de la neige, & le terreau noir des Alpes
(îesabforbe ; la neige, au Printems , fond tou-
ijours à la partie en conta# avec la terre , & j’ai
■ vu fouvent des. plateaux entiers de neige , qui
■ offroient une étendue uniforme, & qui étoient
I excavés au - deflbus ; la terre y étoit émaillée
(de fleurs. On voit fouvent des plantes en graines
(au moment où la neige difparoît tou t-à -
(fait.
| Plus la montage eft élevée & plus la neige
( y refte long-tems, plus aufii les plantes qui
I en font originaires exigent de foins, lorfqu’on
■ les cultive. Sur les balles montagnes, la neige
■ .couvre les plantes plus tard & les quitte plutôt,
| peut - on les cultiver en pleine terre.
H Le terreau des Alpes eft encore une circonf-
I tance particulière de cette efpèee de pofition ;
* noir , composé prefqu uniquement da.
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v é g é t a u x décompofés un peu plus que la tourbe,
mais de la même manière ; la durée des neiges
explique la formation de ce terreau; ainfi, je
puis renvoyer à ce que j’en ai dit dans le paragraphe,
intitulé : Influence du climatfur la nature
du fol. On imite ce terreau dan« les jardins, ou
plutôt on y fupplée, par un mélange de terreau
de bruyères & de terre végétale; les plantes des
Alpes y croiffent très - bien , même de graine.
Il fuit de ces'bafcs fur la conformation des
plantes Alpines, que des plantes qui diffètenc
feulemenr de celles de la plaine par ces caractères,
ne doivent être confidérées que comme
des variétés; aufii le nombre des efpèees nominales
décrites par les Botaniftes doit - il être
beaucoup reftreint. Beaucoup de plantes Alpines
décrites comme efpèees, doivent être R é ordonnées
à des efpèees communes comme variétés.
Des plantes de tourbières.
Les plantes de tourbières ont aufii une manière
d’être qui leur eft propre : les entrepreneurs
de tourbières en Hollande connoiffent à
l’afpe# des plantes , la nature des tourbières qui
font au - deflbus, fouvent même à quelques
pieds de profondeur, &n e s’y trompent jamais.
Les plantes des tourbières font fluettes ; leurs
tiges font foibles & prefque point rameufes ; leurs
feuilles font minces, alongées, & la plupart du
tems glabres; leurs fleurs font petites, peunom-
breufes, & ont un air d’apauvriflèment. Mais
ce qui caraétérife fur - tout les plantes des tourbières
, c’eft une teinte bleuâtre que l’on apper-
çoit fur chaque individu , & plus facilement
encore lorfqu’on regarde la tourbière d’une
certaine diflance.
Les arbres qui croiffent. dans les tourbières
font petits , rabougris & fouvent tortueux ; j’ai
fouvent reconnu des tourbières dans les bois
à l’abaiffement fubir dès arbres; & , à l’infpeélion
du terrein, j’ai trouvé la confirmation de ce
ligne extérieur.
La diminution de grandeur qu’on obferve
dans les plantes des tourbières n’eft pas la même
que fur les montagnes ; les circonftàncesqui raccompagnent
font très - différentes , & indiquent
que leur caufe n’eft pas la même. Dans les tourbières,
c’eft une efpêced’étiolement, un appau-
vriffementde tout l'individu, indiqué par fou air
frêle, & par la perireffe & la foibleffe des fleurs
fur les fommités; au contraire, fur les montagnes,
la petiteffe des plantes eft accompagnée d’une plus
grande ramofité des tiges, fortes pour leur peu de
de fleurs,enfin d’un appareil très-confitiérable
de hauteur , & d’organes fexue’s.
Il m’a toujours paru difficile de concevoir
pourquoi les plantes des tourbières, qui croiffent
da vs une terre uniquement compofée de détritus
de végétaux,portent tous les caractères de plante*
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