
nos bonnes terres aélueftes reffembLoient autrefois
à des Communaux. La culture les a rendu
fertiles. Le meilleur champ, lorfqu’il n’eft pas
travaillé, devient p e u -à -p e u infécond. La
croûte fuperficielle fe délaie par lés pluies, &
fe difperle pour peu qu’il y ait delà pente;
les pierres redent à découvert. Lest lichens,, le s
moufles fe multiplient; l’herbe n’y. poulFe p/ef-.
que plus, & il manque au fol un principe effen-
tiel pour favorifer la végétation, c’eft l’expoft- ,
lion fuccèflive à l’air des couches inférieures.
Le fol des Communaux eft quelquefois aride,
fans fond & rempli de pierres.Si Ion aridité eft telle
qu’on nepuifie en rien efpérer, foiten cultivant,
foit en y plantant du bois, ilnéfaut pas changer fon
état. 11 eft de peu d’utilité aux habitansfans doute;
mais il feroit poffible qu’il le fût encore moins
à ceux qui entreprendroiem d’en faire un autre
ufage. Cette efpèce de Commune fe trouvé dans
un cas d’exception , & ne doit pas être'confondue
avec les autres, plus ou moins fufcepcibles
de cultures.
La plupart des Communaux-font des prairies
ou des marais. Si ce font de bonnes prairies,
fqr le bord des rivières, fi on en tire tout le,
fourrage qu’ elles peuvent produire, & que le
revenu en foit bien employé, il! n’y a pas'de
doute qu'on ne doive continuer à lés adminif-
trer comme elles le font. En les examinant, & en
prenant connoiffance du produit des prairies, ou
champs des Particuliers du pays, il éft aifé de
calculer leurs rapports comparés. Dans ce cas,
elles ne doiventpas être comprifes dans les Communes
ordinaires.
Mais, lorfque ce font des marais ,.il;s’y trouve
peu de plantes de; la famille dés G rajjiinsÉjes:,;
les plus nutritives pour le bétail. Il n’y çrpîtque
des carex, des job es, des rofeaux & autres plantes
aquatiques,* peu fubftancielles & de mauvaife
qualité. Auffi les befliaux qui paiffent dans ces,
fortes de Communes, & qui lés altèrent fans-celle :
par leur piétinement, paroiflènr-ilsmaigres,.p.e- -
tks & abâtardis.
A ce vice il s.’en joint un antre, qui mérite
plus d’attention encore. Les endroits;marécageux1
font huifîbles. à la fanté des hommes, puifqu’il
en réfulte tous, les .ans des.fièvr(es intermittentes^
& , détems-eq - tems :des, maladies,.putrides. Les
hommes dans, ces pays .font pâles'", languiffans & -
vivent peu. La conséquence à tirer de ces faits
fe réduit à ce problème : vaut - il.mieux laifler
füblîfter des marais, où; les. befliaux ne trouvent
qu’une chétive nourriture., & où les hommes
réfpirent un air. mal fain, ou mettre ces marais-
dans le casd’être defféchés , de produire de bonnes';
plantes;, & de ne plus eau fer, des exhalaifons;
pernicieufès? Il n’y a perfonne qui ne regarde'
comme néceflaire pour la falubrité , ledefféche-
ment de ces'Communes. OnTopéreroit, lion le s
partageoit- entre les Particuliers des Communautés,
Un mbtif moins preflant fans doute, mais non
moins utile au progrès de l’Agriculture, foilicitç
encore le partage des prairies qui font en Communaux
; c’eft la certitude où l’on eft que ce qu’on
en retire actuellement n’égalé pas ce qu’on en
ret i reroi t/ fi ellefrétoient partagées. Un des bons
Ouvrages fur cette matière eft l’Extrait de treize
Mémoires qui ont concouru pour lé prix propofa
par la Société économique de Berne, en 1762 i
fur l’aboHffement des Communes, & fur la manière
de les partager. Plufieurs Auteurs-, qui ont
écrit en faveur du partage, ont puifé dans cette
fource. Je la trouve-trop belle & trop, pure pour
n’y pas puifer moi-même. Cet extrait eft inféré
dans le premier volume de 1765 , du recueil
de cette compagnie. Il en eft encore queftion
dans d’autres volumes.
Pour mettre un pâturage en bon état, & pour
qu’il donne tout le produit poffible., il y a plu--
fieur règles à fuivré. ,
i.° Il ne faut pas y jeçter plus de; bétail qu’il;
n’en; peut nourrir , ou plutôt tout le bétail qu’on
y jette doit y trouver une nourriture fuffifante.
Des animaux qui fouffrent de la faim, pendant
quelques jours, peuvent en être incommodés;
le lait des vaches: tarit, les jeunes bêtes, font arrêtées
dans leur accroiffement.
i;8 II ne convient pas.de mettre des befliaux-
dâns un pâturage avant que. l'herbe fort affe2
forte pour les nourrir. Si l’on veut faire paître
un reyrein plutôt, non - feulement on. expofera
les animaux à j a faim , mais on retardera la
végétation des plantes qui feront broutées & foulées.
aux pieds , n’étant pas encore en état de
réfifler. Pour vouloir.jouir trop, tôt l’onjouitmal,
& L’on perd même, fa jouiffance.
$.° Lorfqùun troupeau, eft compofé d’un plus
grand nombre de bêtes qu’un pâturage p’en.peut
nourrir, il gâte à proportion plus d’herbe qu'un
petit troupeau. Le bétail eft obligé de s’étarter:
au loin pour chercher, fa nourriture ; il fe iaffe,
il s’échauffe *, les vaches pleines ou les vaches pe-
fantes. reftent en arrière , & ne trouvent à,manger
que ühèrbé foulée aux.- pieds par les autres, ,ou à
moitié broutée. ,
4.° U vaut mieux, divifer un pâturage en deux
Où trois portions que . de faire paître la Totalité à—
là-fois.. Chaque. portion, par ce moyen j venant
à.êtcè hroutée îucceffiyement. & entièrement,,
l’herbe aura le teins de pouffer dans les unespen-
dant que les animaux feront fur les autres.
5..0 Enfin , il eft néceflaire encore qu’un pâturage
foit chargé d’une quantité fuffifante de bêtes,
parce que, fi elles n’y-font qu’un petit nombre,
'elles ne mangeront que les meilleures, herbes ;
< celles de mauvaife ou de, moindre qualité fere-
femeront ; fe multiplieront.& détérioreront bien-
; tôt le pâturage. t
La dernière, de ces cinq, règles n’eft pas celle
rfu’on viole le plus fouvent. Il y a cependant en
Suiffe quelques cantons auxquels on pqut le.re-
«rocher. Mais les quatre autres ne font jamais
obfervées dans les prairies communes *, on y met
toujours pins dé bétail quelles n’eu peuvent
nourrir ; 'on précède le tems de la pouffe de
l’herbe, on ne divife pas les pâturages en plufieurs
parties; on met fur toute leur étendue tous
les befliaux d’un Village.
Il ne fuffit pas que ces règles foiènt obfervées.
Pour que des pâturages foient en bon état, il eft
néceflaire de les épurer, d’en arracher lesbrouf-
failles^ de donner de l’écoulement aux eaux fia-'
gnantes, de pratiquer des abreuvoirs fûrs'&côm-:
modes, d’élargir, des foffés convenablement, de,
procurer, par des plantations, dé l’ombrage aux
fonds arides; mais on n’a aucune de ces attentions;
dans des pâtures Communes. Elles reftent toujours
dans le même état. Ceux qui en ont l’u-
fage font rarement daccord. S’ilsconfentent par,
hafard à y travailler, chacun craint de faire plus '
que fon voifin. On fe plaint que le tems qu’on
y emploie pourroit être confacré à des objets1,
plus lucratifs. Mais ce ne font pas là encore les
derniers inconvéuiehs.
Les Particuliers ayant la liberté d’y envoyer
leurs befliaux , fi, parmi ces animaux > il y en a
de fufpeéls, perfonne n’ofe s’en plaindre.
Dans les lieux où les pâturages font éloignés
ou très-vaftes, on perd beaucoup de tems à aller
chercher le bétail le matin, ou bien l’on eft forcé s
de veiller la nuit à tour de rôle.
Les bêtes qui paillent dans de mauvaifes Com- :
mnnesfomt quelquefois fi affamées qu’ellesfran-
chiffent les haies & les foffés, - pour dévorer ou
piétiner les grains , ce qui occafionne des rixès
entre les payfans,
Lorfque 1’ufage ne fixe pas le nombre des pièces
de bétail qu’on peut jetter dans une Commune,
l’homme aifé y en jette beaucoup plûs que le
pauvre ; l’un y enverra un cheval, l’autre un veau.
Rien n’infpire plus de jaloufie & d’envie que
les Communaux. Les paylans empêchent les gens
de autres Communautés de venir s’établir dans
la leur; ils dégoûtent- des mariages, & s’oppo1-
fent ainfi à l’augmentation de la population.
J’ajourerai encore que, dans Les Communes les!
mieux adminiftrées & les mieux louées, une partie 1
du produit eft fou vent-employée à des procédures, :
qui entretiennent l’efprir de chicane & les hairtes
entre les Communautés voifines..
D’après ces pbfervaiions , il paroît évident
qu’il n’y a point de pâturages auffi négligés que
ceux dont on jouit en commun , & qu’il n’y en
a pas d’un auffi foible ra p p o r tp u ifq u ’il n’y
croît que. très-peu d’herbe & foüvent de mau-
vaife qualité, qui font broutées hors de faifon ,
par^un trop grand ou trop petit troupeau. Ainfi,
u n’eft guères poffible de tirer un bon parti d’un
tond pâturé en commun.
Sttppofons qu’on pût engager les habitans
d’une Communauté à mettre leurs pâturages en
bon état & à fuivre les règles preferites ci-deffus,
jamais leur produit n égalera celui qu’on auroit
lieu d’en attendre, fi chaque portion de terrein
étoit employé au genre de culture auquel elle
eft propre par fa nature & par fa polïtion.
L'expérience paroît avoir fait connoître en
Suiffe , que le bétail profite beaucoup plus,, fi
on le nourrit bien, à l ’étable, que fur les pâturages
, excepté fur ceux des montagnes^, à caüfe
des propriétés ■ fvpérièures de leur herbage. Les
vaches ainfi nourries donnent plus de lait, les
bêtes de fatigues & dé 'travail, font plus fortes
& plus vigoureufes; on conferve les engrais pour
les répandre enfuite fur les cham,ps ou ks prés^
11 eft. prouvé d’ailleurs qu’un terrein à peine fuf=:
fifant pour y faire paître une vache , fournira de
quoi en nourrir deux, d’où il faut conclure que
les particuliers rètirèroîent un grand profit des
Communes, fi on l.es leur panageoit.
Les inconvéniens qui ont lieu dans,les Communes
en terres pfies, en prairies ou marais ,
fè rerrouvent dans les Communes en bois &
forêts. Si c’eft un taillis où les habitans ont
le droit de couper du bois de chauffage, il eft
toujours déyafté & détruit, & cseft bien plus
fùrement, lorfque les troupeaux ont laliberté d’.y
aller. On rec'onnoîr par-tout les bois"des Communes,
à leur état de,dégradation. C’iefi.â l’Auteur
du Diéiiônnaire dés Arbres, à rendre compte de
cet objet.;
Utilité- des partages d-ti Communes.
Le pauvre trouveroirunentretienhonnêle dans
la culture de fa portion.
Les particuliers ne feroient pas les feuls qui
gagneroient a ce changement. Il en rëfulteroit
un profit confidërable pour les dëçimateùrs ou
pfoprëtaires de'champarrs daiis les pays ou les
dîxmes & ehamparts ont lieu , puifque des terres
jufqu’alofs inütiies , prodniroient du fo in , des
grains , du chanvre, dû lin, &c.
f II èft de l’intérêt d’un Souverain que fes Etais
foient bien peuplés & leur Agriculture florif-
fiante. lls jouiffent de cës deux avantages quand
les terres produifent beaucoup. Il doit donc favorifer
le partagé dés Communes..
On afin ré que l’Aqgléterre date les brillafls
1 fûccès de fon Agrictilturé de l’époque du par-
' ‘t-agè- dés Comfnùùes &dê'l’aboiiriobtdù parçpurs,
ëfpècéde Co.iùWun'e'dônt je parlerai à'fon article.
V;DanS différées lieux du Eays dé Vaux on a
partagé les Communes & affranchi les terres
füjèttés au pafcOùrs. Quoique l’on fie l’eût fait
d’abord que par effai & pour un teins limité,
ôn s’en èft fi bien trouvé par-tout , qtte perfonne
n’a défiré en revenir à f ancien ufage.
On cite lé fait fdïvant en preuve du bon effet
du partage dés terres;