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Observations fur les cinq evaluations
qui précèdent'.
La première , qui eft celle de M. Maiouin,
cil faite fur la (impie fuppofmon que Paris contient
800 mille habitans, qui conlomment chacun
deux fetiers de blé. Cette évaluation eit
doublement exceffive ; Paris ne contient point
ce nombre d'habitans, & chaque habitant ne con-
lomme pas deux fetiers de froment. Les femmes,
les enlàns, les malades & les vieillards , /font
compris dans la fuppofuion de 800 mille b i lans
Or il c(l très-évident que les enfans à fa
mamelle, les femmes, les malades & les vieillards,
ne peuvent confonuner deux fetiers de bled.
Je donnerai ci-après, des calculs plus précis
fur ccs diverlcs dalles, a’nfi que fur le nombre
des habitans de Paris. Tirons feulement, pour
conféqucnce ailudlement, que les réfultats de
M Maiouin & cïux de M. Duvaucelles qui 1 a
fuivi, font très-exagérés, puifqu’ils offrent une
confommation plus que double^ de celle qui a
été vérifiée fur les entrées de Pans, vers 1750,
& vers 1/73- Us excèdent également de.prèsdu
double la confommation évaluée fur les relevés
pris à la halle & dans les environs de Paris,
depuis 1785. , .
Ces deux premiers réfultats ne méntent donc
aucune attention. Mais il n’en eft pas de même
des trois antres, qu’il convient de drfeuter.
■ Les calculs faits par M. Dupre de Samt-Maur,
fuivispar M. Pan3on, diffèrent de ceux de M. Tur-
eat fuivïs par M. Lavoifîer, de près de 30
millions de livres de pain par an. Cette diffe-
reuce eft très-confidérable, fi i on fait attention
que la population de Paris étoit certainement
plusnombreufe vers 1773, tems o i M. Turgot
a calculé, quelle n e .l’étoit vers 1730, époque
des calculs de M. Dupre de Saint-Maur. A in li,
la confommation devoit être plus’confidérable
en 1773 qu’en 175c. Cependant les réfultats
offrent alors une confommation moindre. D’où
vient cette différence. On peut préfumer quelle
vient de la caufe fnivante.
Les vérifications & les calculs faits, par ordre
de M. Turgot, ont pour bafe _urte année
commune delà Confommation dé Paris, pendant
les dix années de 1764 à 1773■ ’ on fait que,
- pendanr ces dix années, il y a eu deux commotions
violentes dans le commerce des grains,
ou plutôt deux diféttes de grains. 11 eft plus que
probable que la Confommation de Paris a été
moindre quelle rfa été auparavant & depuis.
Perfonne ne peut douter que, dans un tems de
difette de grains, le même nombre d’individus,
n’en confomme beaucoup moins. On économife
davantage le bled , on y fupplée en partie par
des légumes, on mange du pain moins récent,
& par conféquent, on en mange moins ; enfin
beaucoup d’individus fe privent de manger la
c o N
quantité de pain , dont ils ont befoiti, & il n’eft
que trop vrai que,- dans ces tems malheureux,
la Confommation de Paris a dû être moindre
que- dans les années d’abondance , qui ont eit
lieu vers 1750,époque à laquelle l’éerivoit M .Du-
pré de Saint- Maur, fuivi par M. Panclon.
A in fi,M . Turgot avoit mal choifi les années de
1704 à 1773 pour faire une année commune.
Mais ce choix , quoi qu’incapable de conduire
à des réfultats exaèls fur la confommation de
Paris, fert néanmoins à faire connoître la pré-
cifion de ceux de M. Dupre de Saint-Maur en
1750, & de ceux qu’ont ' offert les relevés de
1785 , qui n’orit pas été faits uniquement fur
des années de difette. Ce main ais choix de M. IV -
got, adopté par M. Lavoifer, leur a fait avan-,
cer une affertion., qu’on a cru devoir combattre
& même nier , quoiqu’elle foit une confé-
quencé'des principes qui leur ont fervi de bafe.
Ils.ont fuppofé que h quantité de pain tout fait,
qui arrive dans les marchés de Paris, étoit compense
par celle que les habitans des campagnes
emportent avec eux, lorfqu’ils viennent dans cette
Ville vendre leurs denrées. Mais cette fuppofirion
n’eft pas admiffible pour les années d’abondance
qui font les'plus ordinaires,' 11 eft certain que
Goneffe & un grand nombre d’autres lieux voi-
fins de Paris lui fourniffent plus' de pain que
S les gens de la campagne n’en emportent. Il fuf-
fit d’avoir fréquenté les routes , qui affluent à
la Capitale , pour être perfuadé de cette vérité.
On y voit arriver chaque jour de' marché, beaucoup
dé voitures remplies de pain, & on rencontre
peu de perfonnes qui ssen retournent
chargées de cette.utilè. denrée. Elles n’y auroient
aucun avantage, puifqu’alors le pain eft abondant
& à un prix modéré dans leurs villages. En
l l’achetant chez leurs boulangers, elles s’épargnent
le voyage , &. ne perdent pas inutilement un
tems précieux.
Mais ce n’eft pas la même chofe dans Jes tems
de difette. Dans ces tems, les villages voilins vont
chercher du pain à Paris, où la Police entretient
toujours l’abondance , & fou vent un prix
au-deflous de celui des campagnes, il y a un intérêt
marqué à y aller prendre du pain, & il
eft poflible que, dans, ces circonflances„.il en
forte une quantité égale à celle qui entre. L’erreur
qu’oil reproche à MM. Turgot & Lavoi-
Jier, vient de ce qu’ils ont voulu généralifer &
reporter aux tems d’abondance des réfultats obtenus
dans des tems de difette. Les vérifications
qui ont fervi de bafe à l’évaluation de M. Vu-
pré de Saint-Maur n’ont point admis cette fup-
pofition ; mais on a au contraire conftaté exactement
la quantité de pain , en entrant & en
fortant de Paris ; ( 1 ) fuivant l’afTertion de
( 1 ) Il eft facile de deviner comment on a pu connoirre
la quantité de pain qui arrivoit à Paris, Mais dn a dû
COU
M. Panclon, dan s fa Métrologie, page 508. Cette cir-
conftance d’une fauffe fuppùlirion , faite par
MM. Turgot & Lavoifîer j doit faire préfumer,
que les calculs de MM. Dupré de Saint-Maur
& Panclon font plus fûrs. Ce font aiiffi ceux que
l’adopterai, & bien loin d’en diminuer la quotité
, pour me rapprocher de ceux de M. La-
yoijier, qui offrent des réfultats moindres, je les
augmenterai, parce qu’il eft confiant que la population
de Paris a été accrue depuis 1750 juf-
qn’en 1789. Car les vérifications faites vers
1785 fur les entrées de Paris, ont donné des réfultats
bien plus confidérables que ceux de MM.
Turgot & Lavoifîer, quoiqu’ils foient bien moindres
que ceux de MM. Maiouin & Duvaucelles.
Evaluation de la Confommation de Paris , parla
quantité de pedn ou de grain qui entre, déduciion
faite , de ce qûi en fort»
Comme la Révolution arrivée en France , en
1789, a eu & aura dés effets fur la confom-
mation de la Capitale, j’ai penféque mes calculs
ne dévoient pas paffer l’année 1788. Dans la |
fuite, il fera poflible d’y faire lés changements
que l’état de la capitale rendra néceffaires. J
J ai dit précédemment que., vers 1750, ia con- 1
fommation de Paris étoit de 236 millions 160,
mille livres de pain , d’après les vérifications faites
par la Police, & fuivant lés calculs de M. Dupré
de Saint-Maury adoptés par M. Panclon.
Mais depuis 1750,: la population , & par conféquent
là confommation de Paris, ont étéaug-, jj
rnentés. On pent s’en aflurer par les naiffances, i
régardées avec raifon comme une bafe certaine !
pour évaluer la population , d’après les relevés j
des naiffances épar$ dans différents livres & dans j
les papiers putyies, il paroît que la popnla- j
tion de Paris s’efl accrue de 1750 .à 17.88, d’en-
virôn un i^.eme ; ainfi , en ajoutant un I5,eme |>
aux réfultats de M. Duprédè Saint-Maur, &
de M. Panclon, fur la confommation dé cette
ville, en pain, on aura le total de la confommation
en 1788 ; ce qui donne 261 millions
904 mille livres de pain ,• & un peu moins de
1100 mille fetiers de grains, en y comprenant
non-feulement la nourriture'des chiens, chats
pifeaux , &c, mais encore la pâtifferie-, l’ami-
donnerie, la vermicellérie, les bouillies , colles,
& autres pâtes & comportions.
Ci . . . . . . . Se tiers de grains, 110.0,pop.
....................Livres de pain, 261,904,009.,
Evaluation de la Confommation de Paris , par le
nombre des individus, & d’apres la confommation
des. individus.
Suivant les calculs de probabilité , recor|nus
«prouver beaucoup de difficultés pour conftatercombien*
d en fortoit.
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pour vrais > d’après l’expérience Si les vérifications
faités un grand nombré de fois & dans
plufieurs pays , la proportion des naiffances au
nombre des habitans, eft comme 1 à 26, 2.7 o u
28. ( Métrologie , page 485. )
Ces proportions, qui font adoptées pour la
France en général , ne doivent pas être les mê:
mes, lorfqu’il s’agit de calculer les habitans d’une
grande Ville , ou régnent le luxe , la débauche
& la mifère , qui nuifént à la population. Le
luxe exige des travaux fatiguans , capables d’abréger
la vie des hommes qui y font aflujerris ;
la débauche énerve & la mifère ralentit le défit
de fe reproduire. Au lieu de fuppofer dans Paris
la proportion de 26 habitans pour chaque
naiffance, il faut n’en fuppofer que 25, & P r être
cette fuppofition eft-elle encore bien Forte.
M. Lavoifier, ^anS l’ouvrage c ité , a fuppofé^
comme l’avoit fait M. l’Abbé d'Expilly , au contraire,
que cette proportion pouvoir être de
1 à 30' ; ce qui eft contraire non-feulement aux
calculs très-eftimés de M. Panclon > mais encore
à tous les calculs en ce genre. *
Les naiffances à Paris, année commune , font
de 19769. En les fuppofant de 20 mille, nombre
qui en approche , & multipliant ce nombre par
25, on aura pour réfultat 500 mille perfonnes,
habitans continuellement à Paris, où elles ont
leurs familles, leurs domeftiques, leurs*atteliefs,
leurs mobiliers, & le liège de leur fortune.
Outre les perfonnes réfidentes à Paris, cette
Ville alimente fans ceffe un grand nombre de
forains, voyageurs ou étrangers, venus du dedans
ou du dehors de la France*, tant pour leurs
affaires que pour leur commerce1, !& dont plu—
.fleurs y font un féjour très-prolongé , comme
de deux, trois & quatre ans *, toutes ces per-
fônnes, dans lefquelles il faut corn prendre même
celles qui apportent des provifions à Paris,'
Si n’y relient que quelques heures , en y :con-
fommant toute fois des aliments , forment la
7,criie partie du monde, qui eft continuellement
à Paris; telle étoit du moins la fuppofirion la plus
plaufible en 1788 , année à laquelle j’adopte
mes calculs, ce qui donneroit 70 mille perfonnes
à ajouter aux 509 mille âmes.
Calculant enfuite d’après les principes établis
dans la Métrologie de Panclon , ( Page 488 , )
on trouve qu’il y a à Paris, environ 32 mille
en fans au—deffous dé trois ans, dont la confommation
en pain n’eft que de 4 onces par jou r ,
ce qui fæt 8.miüe livres,. ci - 8090 lv
Les vieillards de l’un & l’autre fexe dans la ‘dé-
, crépitude , forit.au nombre de 8 mille , qui à 8
■ onces de pain, par jour , font quatre mille livres.
Ci 400b 1.
Lés’màladeS fuivant les proportions établies dans
- là. Métrblogie > GP y comprenant ceux qui n’orit
| ; que" des incommodités d’un jour comme1 ceux
/ qui ont de longues maladies, font au nombre
O o o ij