
Mais on a obfervé au haras d’Hyefme , <jue
l’étalon dureroit beaucoup plus long-tems, fi
on le laiffoit à l’écurie dans une café un peu '
plus grande en liberté ; il feroit bien moins fujet
a fe prendre dans les épaules, & cela prolongeront
Ton fervice jufqu’à iS ou 20 ans.
Du choix des Juments poulinières , & du foin
quon doit en avoir.
L a Cavale, ou Jument poulinière , doit être
clioifie avec beaucoup de foin , & fans défaut
héréditaire ; il faut qu’elle foit de belle taille,
qu’elle ait de la vigueur, la côte bien ronde,
le ventre grand , pour que le poulain y foit
bien à l’aife *, qu’elle foit bonne nourrice,
point trop graffe, ni trop jeune, ni trop vieille,
& qu’elle ne Toit point chatouilleufe aux mamelles
, à moins qu’elle ne fut d’une beauté.parti
eu lière , & quon pût faire nourrir fon poulain
par une autre. Une Jument , reconnue
pour être inféconde, ou fujette à avorter, doit
être bannie du haras.
Il paroît qu’en général , dans les haras, le
poulain tient plus du père que de la mère,
fur-tout pour la figure. On affure q ue , fans
avoir une grande habitude, des perfonnes, en
voyant un poulain dans l’herbage, peuvent en
nommer le père. Mais la Jument contribue
peut-être plus à fon tempérament & à fa taille.
Au relie, ces obfervations ont été faites-dans des
haras, où l’on choilit pour étalons des Chevaux
très-vigoureux , qu’on nourrit & qu’on foigne
bien , pour leur faire couvrir des Jumens, dont
la vigueur ne répond pas à la leur. Pour être
a duré que le mâle, dans l’efpèce des Chevaux,
influe plus que la femelle fur le poulain , il
faudroit raffembler, dans un haras, des étalons
& des jumens de même pays, de même race,
également bien foignés. Quoi qu’il en fo it , il
faut que la Jument ait de la nobleffe dans l’encolure
& dans la tête ; il feroit à defirér qu’elle
fut de race, & quelle eût des qualités; elle feroit
toujours plus beau & meilleur qu’elle , & fa
pouliche, fervie de même, la furpafferoit.
Les Jumens mettent bas dans le douzième
mois, quoique l’on dife qu’elles ne portent que
onze & autant de jours qu’elles ont d’années ;
certe opinion eft l’effet d’une crédulité trop ordinaire
parmi, les gens „qui {oignent des animaux.
Il me femble qu’il feroit facile de juger de
la durée de la geftation des Juments, par le
rele’ é des regiftres d’un haras nombreux , fur
lefqùels, fans doute; on infçrit les jours où elles
ont pris l’étalon pour la dernière fois, & où elles
ont mis bas. C’eft le moyen de connoltre la durée
générale & fes extrêmes.
Les jumens, comme toutes tes autres femelles,
font plus précoces que les Chevaux; ceux-ci
pouvant engendrer à deux ans, ou^ deux ans &
demi, les Jumens font fécondes un peu avant
cet âge. Mais on ne doit faire couvrir les greffes
Juniens qu’à quatre ans, & les fines à cinq; elles
peuvent donner des poulains jufqu’à quinze oit
leize ans, fuivant leur vigueur. On les conferv©
tant quelles nourriffent bien, & quelles retiennent.
C’efi au Printems qu’il faut les faire couvrir;
ordinairement depuis le mois d’Avril jufqu’à la
mi-juin : cette laifon eft celle où elles font
ordinairement en chaleur. Le tems de la plus
forte chaleur ne dure guère que quinze jours, ou
trois femaines. Il faut en profiter pour leur
donner l’étalon. Si elles font en chaleur dans une
autre faifon, il vaut mieux ne les pas faire couvrir;
car les poulains, qui naiffent en Automne
& encore plus ceux d’Hiver, ne font pas bons;
en tout le froid eft très-contraire au jeune
Cheval.
L ’heure du jour la plus favorable pour la faillie,
eft celle où il fait frais. L ’étalon & la .Jument
s’en trouvent mieux.
Quand on veut faire faillir une Jument, dans
i le teins de la monte, on la préfente au boute-
en-train} cette,épreuve-eft utile pour les Jumens,
qui n’ont pas encore pouliné ; car celles qui
viennent de pouliner, entrent ordinairement en
chaleur neuf jours après qu’elles ont mis bas»
Dès ce jour même elles peuvent être couvertes,
& neuf jours après une deuxième fois, & ainfi
de fuite tous les neuf jours, tant que la chaleur
dure. Si la Jument ne cherche point à fe défen-
dré, fi elle hennit fouvent, fi la vulve eft gonflée
, fi elle range fa queue & fait quelques éjaculations,
alors elle eft décidée en chaleur. La
liqueur qu’elle éjacule eft le fignal le plus certain.
Cette liqueur, connue parmi les modernes fous
le nom de chaleurs, a été appelée par les Grecs
hippomanes. Us prétendoient qu’on pouvoit en
faire des filtres pour rendre un Cheval frénétique
d’amour. Si l’on veut aider la nature, l’exciter
même, on donnera aux Jumens une joinrée de
froment, ou une éçuellée de chenevis, une fois
tous les jours, huit jours avant de les préfénter
à l’étalon. Cet aliment les. difpofe mieux ce
n’eft point une fubftance aphrodifiaque , mais
un aliment très-nutritif, qui excite la chaleur,
fans caufer enfuite de l’affoibliffement. On paffe
à la jument un colier dans le col,, auquel on aatta-
ché deux longes, qui, croifées fous le ventre,
fe fixent aux deux pieds de derrière, pour éviter
les coups qu’elle pourroît donner à l’étalon qu’on
lui amène , fur-tout la première fois qu’elle eft
couverte, où qu’elle eft révoltée des brutalités,
des morfures & des fauts inutiles que le Cheval
fait fnr elle. On a l’attention de donner à une
Jument- foible de membres & de corps,, un
Cheval bien fourni de l’un & de l’autre, & de
même à. uae Jument très-forte un Cheval plus
foible afin de rétablir la belle nature dans le f
Poulain. < . ,
Le premier poulain d’uue Jument n’étant
jamais fi écofFé que ceux quelle a dans la fuite,
on obferve de lui donner un étalon plus gros,
afin de compenfer le défaut de l’accroiffement,
par- la grandeur de la taille. On a encore égard
à la différence & à la réciprocité dés figures, du
poil du Cheval, & de la Jument, afin de cor- .
riger les défauts de l’un par les perfections de
l’autre. Mais on ne donne pas un très-grand
Cheval à une petite Jument, ou un petit Cheval
à une très-grande jument ; on rapproche les
tailles par nuances. On ne joint jamais enfemble
les Chevaux & les jumens nés dans le même
haras, ni les pères ou les mères avec leurs enfans;
mais on peut faire faillir pur un Cheval étranger
des Jumens nées dans le haras. On évite d’employer
des^Jumens à courte queue, qui feroiem
trop tourmentées des mouches. .
Il faut autant qu’on peiit, fuivant la taille du
Cheval, ou de la Jument, la placer le plus avantager!
fem en t, afin de faciliter au Chevall’inrroduc-
tion.Sila Jument eft plus haute, on place l’étalon
dans l’endroit le plus élevé; fi elle eft plus petite,
•.c’eft elle qu’on place fur la hauteur. Avec cette attention
on ménage les jarrets des étalons, qui de
toutes les parties du corps fon t le plus en foufrrance
dans l’accouplement. Dans quelques haras on
attache folidement la Jument à deux piliers avec
un licol de cuir,ou de corde, ou ce qui eft encore
mieux, avec un caveçon, dans les anneaux duquel
paffent les longes, qu’on affujettit aux piliers.
On.déferre la Jument des pieds de derrière , ou
on y met des entraves ; on la contient même
avec une bricole, dans la crainte qu’elle ne blefle
l’étalon. Il y en a auxquelles on eft obligé de
mettre le, torche-nes ; il faut y être forcé, car
il eft mieux de ne les pas contraindre du tout;
en les careffant & faifant paffer & repaffer devant
elles l’étalon, on parvient à les adoucir &
à les rendre patientes, ce qui difpenfe d'employer
la contrainte , qui les inquiète & dérange le
Cheval par leur agitation. Aprèsi’aéle, quelques
infpecleursde haras, ou propriétaires de Jumens
ordonnent qu’on les fane paffer tout de' fuite
dans l’abreuvoir, ou qu’on leur jette un fceau
d eau fur le rein & fur les parties ; mais cela .
n eft pas d’une abfolue nécefïité. On craint même
que cette pratique ne foit plus nuifible qu’utile.
Il faut l’a rn en e r ' au ffi-1 ô t au pâturage,fans autre
précaution.
Il eft d’tifage de rèprëfenter à T’effgyeur , ou
boute-en-train, la Jument déjà couverte^ü bout
de neuf jours,.& de lui rendre le même étalon
fi elle en veut encore; il faut changer d’étalon
quand une Jument- ne s’emplit pas. Il arrive
fouvent qu’un autre la féconde.
Il y a quelques exemples de Jumens qui font
mortes des fuites de leur premier accouplement ;
quand elles rendent du fang, aufti-tôt'après, il
y a beaucoup à craindre ; ce qu’on doit éviter
avec grand foin, c ’eft que les étalons n’introdui-
fent dans Panas, au lieu d’introduire dans le
vagin, ee qui arrive quelquefois à des Chevaux
pétulans. Cet aéte, contre nature, tue les J.11-
mens. M. Bourgelat en a vu un exemple. La
membrane interne de l’inteftin reélum d’une Jument,
qui avoit été faillie de cette manière, étoit
entièrement déchirée.
Dès que les Cavales ont donné des lignes do
conception, c’eft-à-dire, dès que les chaleurs cefi-
fent & qu’elles refufent le mâle, il faut empêcher
qu’aucun Cheval entier ne les approche ; il y
auroità Craindre qu’elles ne fe v uid affen r, fur-tou e
dans les premiers mois, où elles peuvent être»
encore amoureufes, & fouffrir l’accouplement.
On doit même les féparer des Jumens, qui n’ont
pas conçu; on ne peut difiinguer celles qui font
pleines, qu’à cinq ou fixmois, encore s’y trompe-*
t-on quelquefois , fur-tout fu r celles qui ont
fait plufieurs poulains, parce que l’état d’apa-*
tliie dans lequel elles vivent, la nourriture habituelle
de l'herbe qui gonfle le ventre, leur fait
conferver toujours la même rondeur. Cependant
comme les Jumens pleines s’entretiennent toujours
plusgraffes que les autres,comme dans cet état leurs
mamelles grofliffent & fe durciffent, en y faifant'
grande attention, on parvient à le découvrir. Au
feptième & au huitième mois, fur-tout, on peut
le reconnoîtrc au taél ; il fuffit, pour cela , de
faire trotter la jument, de lui préfenter à manger
fur-le-champ, & de placer la main fur le ventre*
On fem alors les mouvement du poulain.
On ne fauroit trop blâmer les propriétaires de.
Jumens, qui les font travailler quand elfes font
pleines, autant que fi elles nel’étoienr pas. Un tra-r
vaif modéré les entretient en bon état, mais nri
grand travail les affoiblit dans un tems où elles
ont befoin de conferver leurs forces,pour nourrit
leur foetus.
Si une Jument avorte, ce qui arrive quelque*
fois, il faut en avoir le plus grand foin à caufè
des ravagés du lait. Ce qui produit l’avortement^
ce font des maladies aigues, ou chroniques, qui
leur furvientient, un,exercice violent, des fardeaux
trop lourds à porter ou à tirer, des coups1
furies reins, fur les flancs , fu r ie ventre >
peut-être une eau trop crûe , quelques plantes,
les gelées d’Automne , & beaucoup d’autres
irconftances , particuîièment une confûtu -
tion lâche & molle de la matrice. Quelques
Jumens avortent fubitement, d’autres indiquent
qu’elles font fur Je point d’avorter par de l’in*
quiétude, une évacuation d’humeur glaireufe par
le vagin & des mouvemens plusfréquefis & moinà-
forts du poulain. Yoyez. dans ce DiéHonnaire, &
dans celui de Médecine, le mot Avortement.
Dans le cas ou une Jument, prête à metrrè
b as,S feroit furprife d’une qjaladic défefpérée^
P ij