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de raifons, & ils en ont de fi puérile«, qu elles j
ne méritent aucune réponfe. JJ I
« 11 eft cependant des habitans,qui ne font point
attachés à cette mauvaife routine ; ceux-ci ont
fcnti combien il étoit important de planter les
Cotonniers, comme les antics denrées, avec plus
de foin & plus d’ordre, & de les mettre à
des difiances convenables, afin qu’ils puiffent
prendre l’accroiffement qu’il leur eft naturel j &
l’expérience a prouvé que cette dernière mé-
ihode devoir prévaloir fur la première. Mais quel
qu’en ait été le fuccès, elle n'a pas pu convaincre
tous les efprits. Il eft malheureux, qu’il y ait
des hommes que l’amOur-propre porte à facri- !
fier leurs intérêts à leurs opinions. L ’habitant de !
Cayenne q u i, de tout tems, a paru le moins
affujéti au préjugé ordinaire, eft M. Folio-Derofes,
ancien Officier & Créole. M. Folio a fait, en
différons tems un grand nombre d’effais fur la
culture des terres, fur la manière de planter les
arbres qui donnent les denrées, & fur la méthode
de les entretenir dans Je meilleur état- Ces
cffais lui font honneur, & décèlent fes conoif-
fances & fon difcernement -, quoique fes travaux
n’aient pas toujours été fuivis d’un heureux fuccès,
on ne lui en doit pas moins un tribut de
reconnoiffançe. Cet habitant plante le Coton avec
beaucoup de foin & beaucoup d’ordre*, quelques
autres l’ont imité, & l’expérience a fait voir que cet
arbriffeau croît & végète avec force, qu’il s’étend
de tous côtés, devient fort grand, & qu’enfin
un feul pied traité de cette manière, fournit dans
une année plus de revenu, qutTirente ou quarante
traités d’après la méthode ordinaire. Je ne
fais s’il ne feroit pas plus avantageux de faire
venir les Cotonniers de plants que de graine ; je
préfume au moins qu’ils deviendroient plus facile
que de former des pépinières, & de Ifs
planter enfuite dans les champs qu’on auroit préparés
à cét effet. Il feroit néceffaire d’ouvrir les
trous quelque,tems avant que de les planter, &
de leur donner une grandeur &- une profondeur
convenables. »
u Si l’on avoit obfervé avec foin les Cotonniers
qui produifent le plus abondamment, on au-
roit vu que pendant les pluies ils végètent avec
force • que pendant les plus grandes sèchereffes
de l’E t é q u i eft le tems des récoltes, la végétation
fe fufpend totalement, & que l’arbre femble
fécher. Ces deux états me paroiffent né.ceffaires
pour que ces arbres puiffent produire beaucoup
de Coton, & qu’il foit d’une bonne qualité. Il
s’enfuit d e - là , que toutes les fois que cet arbriffeau
fera planté dans de terres baffes & fort
liumide3, il végétera pendant toute l’année, &
alors, quoiqu’il produife beaucoup de fruits,
le caboffes ou cap fuies qui renferment le Coton,
ne pourront jamais fécher affez, pour s’ouvrir |
& donner le Coton; mais cette forte & abondante
végétation f qui a lieu pendant toute l’année f 1
C O T
ne pa*oit pas dépendre uniquement de ta nature
des terres, la grande humidité de l’a ir, & I3
rofée abondante qu’un Ciel ferein produit pendant
toutes les nuits de l’E té , dans tous les
lieux bas & peu aérés, me paroît y contribuer
encore davantage; cette rofée eft fi forte, que
les terres paroiffent tous les matins couvertes
d’un brouillard épais, que le Soleil détruit &
jdiftipe à proportion qu’il le pénètre par fes
rayons. » .
cc Cettegrande*ofée fournit aux Cotonniers,beaucoup
de fucs propres à leur végétation, & malgré
les grandes féchereffes de l’Eté, ils font toujours
- dans un état de belle verdure. Les caboffes, qui
font pénétrées par cette vapeur aqueufe, ne
peuvent point fécher , la forte chaleur du jour
les racornit, les r-efferre ; le Coton qui s’y trouve
renfermé, le pourrit, & elles tombent par terre
fans ouvrir; c’efi ce que les babitans appellent
Coton gelé. Il eft étonnant que depuis le tems
qu’on cultive .cet arbriffeau dans les terres baffes
& humides & dans l’intérieur des rerres, où le
! bois à haute futaie attire confidérablement l'humidité,
on n’ait pas reconnu pette dernière caufe,
qui agit avec tant de confiance & d’uniformité,
que tous les ans les babitans fe voient fruftrés
du fruit de leurs travaux, dans les momens où
ils croient faire la plus belle récolte. La preuve
1 certaine que c’eft la grande rofée qui .empêche
1 les caboffes de s’ouvrir, & que c’eft la chaleur
' trop forte du jour, qui fait pourrir le Coton,
c ’eft que, dans la plupart des Etés de Mars, ces
mêmés caboffes s’ouvrent beaucoup mieux pour
peu que la plaie donne du relâche, & cela parce
que pendant ce petit'Eté, le Ciel eft prefque,
toujours couvert, qu’il y a très-peu de rofée,
& que la chaleur du jour eft moins vive.»
11 eft donc de la dernière conféquence pour
cultiver les Cotonniers avec fnecès, de les faire
venir dans des bonnes.terres défrichées, élevées,
sèches & expofées au grand air, de les planter
à des diftances convenables, & de tes bien foi-
gner. Les terreins peu gras & bien aérés, les
petites montagnes & les revers des grandes, ex^
pofées aux vents qui régnent dans cette contrée,
font les feuls endroits où l’on doit le planter.
En fe conduifant de la manière que nous venons
de l’indiquer , je fuis affuré qu’011 pourra
beaucoup étendre la culture de Cet arbriffeau,
dont le produit mérite bien tous ces foins, Je
fuis auffi très-pçrfüadé que les montagnes de
la grande terre, bien découvertesferoient très-
propres à fournir un produit avantageux (le
cette denrée, celle de toutes qui exige le
moins de peine pour fa fabrique. En effet, le
Coton une fois récolté, féché & mis à couvert,
fe conferye tel pendant Jong-tems, fans recevoir
aucune altération ; de forte qu’on ne doit employer
à fa dernière préparation, que le tems
pendant lequel les Nègres ne peuvent
varller dans les champs à caufe des pluies ; ces
dernières préparations, qui confident feulement à le féparer de la graine & à le trier, font fi peu
pénibles, qu’on peuty employer des Nègres con-
valefcens, des vieux, & tous ceux qui, par quelque
maladie particulière, ne peuvent point vaquer aux
travaux extérieurs. Les habitans doivent être fort
attentifs à ce que ces préparations foient bien
faites, & mettre tout le tems convenable pour
qu’il foit bien trié, afin de conferver £ cette
denrée la réputation quelle a, & fon prix bien
Supérieur à celui du Coton des autres Colonies.
De toutes les denrées de Cayenne, dit M. de
Préfontaines ( Maifon rufiique de Cayenne, page
54,) le Coton eft la plus facile à cultiver, &
qui exige le moins de Nègres. C’eft auffi par
elle que les nouveaux habitans commencent.
«Le Cotonnier vient de graines,que l’on plante
en Oélobre & Décembre. Il vient également
bien planté en Janvier & en Février : lorfqu’un
habitant plante des Cotonniers, il doit, autant
qu’il peut, calculer, de*forte que le tems aéhiel
foit humide pour le développement des germes,
& que la récolte arrive dans fin mois chaud. >3
« Tout terrein convient affez au Cotonnier,
lorfqu’une fois il eftfortide terre. On met communément
trois graines dans chaque trou ; ôn
en met jufqu’à fix , dans une terre où il y a des
fourmis, ou fur les anfes de la Mer. »
« Son bois ne vient jamais fort gros. Dans
le premier farclage qu’on lui donne, on a foin
d’ôter les jets qui occafionnent de la confulion.
La touffe du Cotonnier pâtit fouvent de ce travail.
On doit recommander aux Nègres, pour
ne pas fatiguer la tige, dont ils veulent retrancher
l’excédent, de mettre le pied auffi près
de la racine qu’ils peuvent. »
« Lorfque l’arbre eft parvenu à la hauteur de
fept à' huit pieds, on lui caffe le fommet, & il
s’arrondit. » .
« On le coupe au rafe de terre tous les trois
ans, pour le renouvéller ; les nouveaux jets qu’il
donne portent un Coton plus beau & plus abondant.
»
« L e Cotonnier produit fon fruit au bout de
fixmois, il y a deux récoltes, une d’Eté, l’autre
d’Hiver. »
“ La première eft la plus abondante & la plus
belle. Plus le tems eft chaud, lorfque la caboffe
qui renferme le Coton s’ouvre, plus le Coton
eft propre & fec. Cette récolte fe fait en Septembre
& Octobre. » * :
•“ Celle d’Hiver,qui eft communément en Mars,
moins avanrageqfe, par rapport aux pluies qui
faliflent le Coton, & aux vents qui fatiguent
l’arbre. »
« L a négligence des Nègres occafionne quelquefois
h détérioration de cette denrée; ils,cueill
i t les caboffes par poignées, & mêlent au Coton
des feuilles sèches qui le faiiffent. Le moulin
Agriculture. Tome I I I .
s’embarraffe de ces feuilles, & la qualité de la
denrée en eft altérée. »
« Pour bien cueillir le Coton, un Nègre ne doit
fe fervir que de trois doigts. »
« Il rélulte de la négligence que l’on a de ne
point caffer le fommet du Cotonnier, lorfqu’il
a atteint une certaine hauteur, un inconvénient
très-grand. Le Nègre qui cueille, pour avoir
une caboffe qu’il ne peut atteindre, attire à lui
la branche* Le bois du Cotonnier mol & fragile,
cède au moindre effort & fe rompt. Cinq à fix
autres caboffes vertes encore, ou près de leur
maturité, attachées à cette branche caffée, ne
reçoivent plus la nourriture du pied, & font
en pure perte pour l’habitant.»
« Un Maître attentifdoit vifiterfes Èfclaves ait
travail, & voir dans la cueille du Coton, fi par
pareffe, on pour éviter de faire le tour de l’arbre,
ils n’attirent pas à eux les branches, & ne fe
mettent pas dans le cas d’en caffer. »,
« Pour ce travail, le Nègre n’a befoin que d’un
panier, dans lequel il met le Coton. Le panier
doit en contenir une cinquantaine de livres
en graine.» ,
« On expofe au Soleil,pendant l’efpace de deux
à trois jours, le Coton nouvellement cueilli,
après quoi on le met en magafin. Les piliers
ou poteaux qui foutiennent les hangards dans lesquelles
on garde le Coton, font garnies de petits
godets de fer-blanc, qui empêchent les rats d’y
monter. Ces animaux font extrêmement friands
de la graine. »
«O n fe fert de moulins à une,deux & quatre
paffes pour éplucher le Coton & pour en
féparer la graine ; ceux à deux & quatre paffes
font forren uafge à Cayenne. Lorfque le Coton eft
épluché, & qu’on veut le mettre en balle j
voici la façon dont on s y preijd. »3
a On coupe de la toile , proportionnellement
à la grandeur qu’on veut donner à fon fac. On
prend ordinairement celle de Vitré qui a qua—
rante-fix pouces, ou trois pieds’,dix pouces ds
large. On la coud le mieux qu’il eft poffible ;
on mouille le fac, afin que le Coron s’y attache,
& qu’on puiffe le fouler. Un Nègre entre dans-
le fac , fufpendu en l’air par des traverfes attachées
à des poteaux ; il foule le Coton qu on
lui donne p e u - à - p e u , &' le foule également,
lorfque le fac eft plein, on coud l’ouverture-.
Une balle bien faite doit contenir au tan t de
quintaux de Coton qu’on a employé d’aunes
de toile. En cet état, le Coton eft propre pour
le Commerce, & peut être tranfporté. »
« Avant que de mettre le Coton dans le fac ,
il faut fonger à laiffer au fac deux oreilles pleines
de Coton, afin de pouvoir le remuer quand il
eft plein; il faut également avoir foin, en le
foulant, de frapper la balle en dehors pour
mieux l’arrondir, jj
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