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finit en vous. M. de Voltaire a employé es mot dans
Rome fauvée. Cicéron dit à Catilina ;
Mon nom commence en moi : de votre honneur' jaloux,
tremblez que votre nom ne finifle dans vous.
Je ne fuis tien , dilbit encore Iphicrate 3 mais je
commande à tous. Ce fut fur - tout par la fcience de la
guerre & par la difeipline militaire , quil acquit beaucoup
de gloire. 11 fit des changements utiles dans l’armure
des foldats, il rendit les boucliers plus courts, lés
piques & les épées plus longues, il fit faire des cui-
raffes de lin tellement préparé , qu elles devenoient
impénétrables au fer &. au feu ; il exercoit les troupes
avec tant cTardeur & d’intelligence , qu’au-premier
lignai il étoit fûr de les voir fe mettre en mouvement
avec autant d’ordre que de promptitude , & que
prefque tous les hazards de la guerre les trouvoient
prêtes à - prendre leur parti fur le-chaïnp. Il préyoyoit
tout & pOurvoyoit à tout ; c étoit, difbit-il ,une mau-
vaife exeufe pour un général, de dire : je ET y p en s ois
p a s. Dans l’expédition d'Artaxerce Mnémon en Egypte, -
l’an 377 de J. .C, , lés Athéniens étoient alliés des
Perfès. Iphicrate y çonduifit vingt mille Athéniens ;
Pharnabaze y commandoit deux cents mille Perfes. Les
Perfes 6>C les Grecs réunis emportèrent, l’épée à la
main , le fort qui défendoit la bouche du Nil , ap-
pellée Mendefienne. Iphicrate vôuloit que -pour profiter'
de cet avantage & de l’effroi des- Egyptiens , on
s’emprefsât de'rémonter le N i l, & d’aller attaquer
Memphis. Pharnabaze s’y'oppofà, fous prétexte que
toutes fes forces n’étoient pas raffemblées , &. qu’il
falloit les aXtenàre.Jphicrate demanda là permiffion d’y
aller avec fes vingt mille Athéniens, & il répondoit du -
fuccës ; mais-Pharnabaze ne vouloit pas qu’on réufsît
fans lui ; les Egyptiens eurent le temps de fè reconnoître,
de. refpirer , de préparer leur défenfe ; les inondations
du Nd achevèrent de les mettre, en sûreté ; l’expédition
manqua. Pharnabaze eut l’indigne injuftice
d’imputer'ce mauvais fuccès à Iphicrate. Celui-ci fe
rappellant le fort de Conon, (Voye%_ cet article )"s’enfuit
à Athènes fur un-petit vaiffeau qu’illoua. Pharnabaze
l’y fit acculer d’avoi t fait manquer l’expéditi on d’Egypte ;
les Athéniens qui fa voient à quoi s’en tenir répondirent
que fi on pouvoit l’en convaincre, il feroitpuni
comme le>-cas le méritoit. Il leur parut mériter le '
commandement de leur flotte dans la guerre des Athéniens
contre les alliés-: il fût aceufé d ’avoir “trahi la
patrie & vendu la flotte qu’il comfhandoit ; il fe jufrfia
fur ce point avec beaucoup de hauteur ; maisayant vu
Timothée , un autre grand général d’Athènes , ,foc-
comber fous une accufàtion non moins injufte, il prit
pour fa sûrete des précautions peu républicaines; il
fongea moins à convaincre fes juges qu’à l es intimider.
Des jeunes gens qui lui étoient- enflèrent ;nt dévoués ,
entouraient le lieu de l’aflembiée ; ils étoient armés -de'
poignards dont i1s laiflbiem de temps en temps à deffein,
éntrevoir la pointe.; Iphicrate fut -abfous. Quelqu’un
lui reprochant dans la fuite , ce ftratagême : j ’avôis
bien fervi les Athéniens? dit-il, je crus me devoir aujji [
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quelque chofe a moi-même. Iphicrate avoit époufé la fiî[è;
Cptys *> roi de^Thrace. Il avoit rétabli for le.trône de
Macedoine Perdiccas & Philippe fon frère, qui fut père
d Alexandre-le-Grand, & qui étoient près de fuccom-
ber fousl’ufurpateur Paufauias, fi Eurydice leur mère,
les mettant entre les bras d'Iphicrate , n’eût recommandé
a ce généreux proteÔeur , leur enfance 6c
leur foibleffe. On ignore l’époque pfécife de la mort
a Iphicrate. -
t IRENE , (Hifl. de CEmpire Grec.) jeune athénienne,'
dune famille noble , mais obfoure, étoit- diftinguée
par ces talents , par ce$ grâces de l’efprit & de la
figure., qui, dans les beaux jours de la Grèce, avoient
illüfhe les deux Afpafies. L’empereur grec Conftantin
Copronyme n’ayant pu obtehir pour Léon Porphyrogénète
fon fils, la princefle Gifeie., fille fie Pépin-
le-Bref, dégoûté par ce refus, de mendier une alliance
étrangère, j etta les yeux fur une'de fes fujettes. ; 6c
nomma Irène pour être la femme de fon fils. Conftanti.i
etoit iconoclafte peifécuteur comme l’avoit été Léon
l’Ifaurien fon père. Irène foivoit la foi de l’églifè ; mais
cpoiqu’attachée au culte des images, il fallut, pour
epoufer Léon Porphyrogénète, qu’elle abjurât ce culte;
ôc^fon premier degré pour parvenir -au pouvoir fo-
prême .,. fut un parjure.
Sous l’empire de Copronyme on ne vit àahslréne,
quune fojette refpeâueufe , qu’une époufe tendre,
qu’une femme occupée à plaire.
. Conftantin Copronyme 3 chargé de l’exécration publique,
mourut en 775, d’une maladie à laquelle les
médecins déclarèrent qu’ils ne cormoiflbient rien ; il
commençoit à foupçônner Irène d’être orthodoxe, le
plus grand des crimes à fes yeux. Irène , à qui cette
mort étoit doublement utile , monta for lé trône avec
Léon Porphyrogénète fon mari ; elle pofledoit le coeur
de ce prince ; jna;s Léon,, fidèle à l’héréfie de-fos
pères, étoit tourmenté de l’idée d’avoir une femme
peut-être orthodoxe dans l’orné ; on découvrit une petite
image de Jefos-Chrift, & une de la Vierge, cachées
& coufoes dans le chevet de'fon lit : dès-fors Léon
-n’eut plus que de l’horreur pour elle ; ce fut en vain
■ qu Irène, accoutumée au parjure for cet article , pro-
tefta qu’elle avoit ignoré ce fecret &. infinua que c’etoit
un artifice de fours ennemis, pour ftmer entr’eux la
méfmtelligénce. Il lui fut i'rapoffibte de ramener Léon;
il lui jura une haine & une perfécution éternelles. La
perfécution fut courte. Léon mourut fobitement, &'
d’une ^maladie encore inconnue aux médecins. (786.)
; Irène réo-K fous le nom de Conftantin Porphyro-
genèfé fon fils,’ âgé ..de dix-ans , & deftiné à une
longue e fanes. Léon laiftbit quatre frères qui pou-
voient difputer à une femme l’adminift ration de l’em-
p:re : Arène hs fit tous quatre ordonner prêtres , &
crut s etre délivrée de leurs prétentions ; mais dans la
fuite, quelques mouvements du peuple en leur faveur,
foi ayant montré l’infuffifance de cette, précaution,
ch- en prit de plus barbares- ; elle fit crever les yeux
à l’aîné , comme au plus redoutable , & couper la
langue aux trois autres ; elle eu*t la funefte adreffe de
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ifejetter for fon fils la haine de cette exécutïorî ‘ Mais
•dans la fuite, une nouvelle tentative faite en faveur de
tes princes, tout mutilés qu’ils étoient, ayant appris à
//•^-combien les droite de la mafeulinité s’anéantiiioient
difficilement dans fempire grec , il fallut bien qu’elle
confentît alors à êfre cruelle à découvert & en fon propre
nom , car alors fon fils ne vivoit plus ; elle fit
egorgër à la fois ces quatre malheureux princes, &
par ce1 coup, elle éteignit entièrement la race de Léon
rifaurien , qui fut peu regrettée, moins parce qu’elle
étoit vicieufe , que parce qu’elle étoit iconoclafte.
Dans -l’intervalle de la mutilation de ces princes à
leur mort , Conftantin Porphyrogénète-, parvenu à
l’âge de régner , avbit voulu reprendre des mains de
fa mère , l’autorité dont elle.n’etoit que dépofitaire.
Cette eritreprife avoit été traitée de conjuration, &
Irène avoit fait battre de verges le jeune empereur
dans fon palais, l’avoit fait dépouiller de fes■ droits à
l’empire , & setoit fait nommer elle-même impératrice.
Cependant une révolution la fit defeendre du
trône , & remit fon fils à fa place » mais elle conferva
toujours for lui fon afcendânt, & elle s’en fervit pour
le rendre odieux &. vil ; cet abforde enfant fe. livra
fans réferve à une femme qui l’avoit détrôné , qui
î’aveit fait battre de verges pour le punir d’avoir
voulu régner ; elle parvint à lui rendre fofpeél fon général
Alexis, auquel il étoit redevable de la révolution -
qui l’avoit replacé fur le trône : Conftantin, pour prix
d’un tel fervice , lui donna la mort. Dès-lors perfoene
n’ofa plus-s’ attacher à lui. Enfin , quand il! en fut temps
Irène fit arrêter fon fils au milieu même de fon armée ;
elle lui fit crever-les yeux , ayant auparavant donné
fes ordres pour què le prince ne pût forvivre à l’opération.
Ses intentions furent remplies ; & lorfqu’elle eut
joint à Conftantin les quatre princes fes oncles, qu’elle
eut éteint la race de Léon l’Kannen , elle crût s’être
délivrée'pour jamais de toute inquiétude. Elle venoit
au couîraire d’en ouvrir fone.fource inépuifable. Per-
, fonne n’ayant plus déformais de droit à l’enipire, tout.
le monde 'y prétendit ; ceux fo.r-tout qa’Iréne avoit
élevés jufqu’à elle , en s’abaiftant jufqu’à eux, les
confidents. 6c -les complices de fes crimes' s’armèrent
.contr’ejle de cette . complicité même. Tels furent Stau-
fàcé, ( Voyè^ fon article) l’eunuque Aëtius , enfin
Nicephore, ( Koye^ fon article ) qui fut plus heureux
que les- autres.
L’impératrice Irène étoit contemporaine de Charlemagne
; alarmée des conquêtes de ce prince, elle
féntit la,-nécellité bu de s’unir à.lui 'par une étroite
alliance , ou de lui oppofer- toutes les forces de l’empiré
; elle prit, le parti de la paix , voulut même fe
faire de Charlemagne un appui contre: fes autres ennemis
étrangers ou clomeftiques. Son.fils vivoit alors, &
n etoit point marié ; elle propofa de le marier à la prin-
ceffe Rotrude, fille de Charlemagne ; la ' propofition
fut accueillie. -
Le jeune Conftantin Porphyrogénète accoutumé. à
fuivre en aveuglé toutes les volontés de fa mère, fe
• Paffionna> for la foi ; pouf cette ilîuftre alliance ; il
©toit enchanté du portrait de la princefle , 6c du réçit
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que les àmbaffadeurs faifoient de fes bôfifltt qualités ;
il étoit for-tout flatté de devenir le gendre de ce grandi
roi dont la rénommée publioit par-tout la gloire. Plu®
il s’enflammoit pour ce mariage, plus Irène commenn
çoit à fe-refroidir ; cette f.mme • défiante craignit
qu’une fille de Charlemagne n’eût une partie de l’élévation
& de la grandeur de fon père, qu’elle ns
cohçût & qu’elle n’infpirât à fon mari le defir de régner *
ÔC elle fut effrayée du danger-de procurer dans ce
cas à fon fils, l’appui de Charlemagne.
1 Charlemagne de fon côte ,1 connut toute l’incapacité
de Conftantin, & ce qui etoit plus à craindre, toute
l’ambition de fa mère ; il fut inftruit de fes crimes , &
il frémit des dangers ou il avoit été près d’expofer la
fille. Ces difpofitions réciproques firent manquer le
mariage.,
Lorfque dans la fuite, l’empire d’Occident eut été
rétabli pour- Charlemagne , cette nouvelle porta le
trouble Sc l’effroi à Conftantinople ; Irène regarda
l’Italie comme- perdue - pour elle : alors n’ayant
plus de fils , & la race impériale de Conftantinople
étant éteinte, elle imagina d’unir l’empire d’Orient à
celui d’Oecident , en fe propofant -elle-même pour
femme à , Charlemagne ; elle lui portoit en dot tout ce
qu’il auroit pu vouloir conquérir. C’étoit peut-être
à Charlemagne à balancer fur cette- alliancq avec
rempoifonneufe d’un mari & la meurtrière d’un fils- :
peut - être devoit-il craindre, de prendre pour femme ,
celle qu’il -avoit craint de donner pour belle-mère à
fa fille.-Il ne paroît pas que cette confidération l’ait
^arrêté ; il étoit dans fon caraélère ambitieux & intré-,
pide , qu’un grand empire lui parût plus à defirer que
la femme la plus criminelle ne lui paroifloifà craindre-.:
c’étoit donc de bonne foi 6c_avec beaucoup d’ardeur
qu’on traitoit de part & d’autre cette grande affaire ,
Xoiïcyi Irène fut renverfée du trône par un homme qu’elle
n’avoit pas daigné craindre, par Nicephôre, ( Voye%
| fon article. ) Lorfqu’il eut été proclamé, il parut devant
. elle plutôt comme un fnjet que- comme un maître ; il
protefta qu’il la refoeéleroit toujours comme fon impératrice
& comme la bienfaitrice de l’empire ; mais il
-finit par lui demander lest réfors des empereurs Con£.
tantin Copronyme & Léon Porphyrogénète, dont elle
s’étoit, difoit-qnemparée. « Qu’en veux-tu faire, lui
” dit lrene , ils m’ont trahi comme mes fojets. Je les
5» prediguois ces tréfors pour conferver l’empire 3 &
» rempire.’m’a 'échappé, n Nicephore~toujours refpec-
tueux 3 mais inflexibh fur'un article Ti important, lui
fit entendre que fa liberté dépéndoit de fa coridefeen-
v dance ; il jura for la vraie croix , ferment ordimire à
Conftantinople , qu’à ce prix elle feroit traitéé & fervie
en impératrice dans fon palais: elle- obéit, nè pouvant
réfiftcr,-& remit à Nicephcre ce qu’elle appellofl le
. le refte des tréfors de l’empire. Nicephôre ne crut pas
ou ne voulut pas . croire cette reftiturlon bien com-
. plette ; en conféquence , rie fë jugeant point lié bar
fon ferment, il rélégua Irène au fouet d’un monaftère
qu’elle avoit bâti elle-même dans l’ifle du Princë;
mais enfoité la trouvant, trop près de Conftantinople ,
& jugeant quelle n’étoit pasaffezoubîice, il renvoya