
S u t îe mariage de Luther, avec Catherine de Bore,
( Voyez l’article Bore.) (Catherine de )
Sur fa dilpute avec Carloftad, ( Voyeç CaRLOStad. )
Sur fa querelle avec Eru fine, ( Voye^ F.R asmf. )
Sur fk querelle avec Zuingle, ( Voye^ Zuin gle. >
Quand Luther fut marie, il ne connut plus perle
n ne qui ne dût fuivre l’exemple qu’il avoit donné.
1! écrivit à l’archevêque de Mayence , prélat très-
orthodoxe, pour lui confeiller de prendre une femme,
fui alléguant ce paffage de la Genèfe : il nefl pas bon
à t homme (Têtre feul.L’archevêque ne lui fit point de
réponfe.
Mais la doélrine de Luther, à travers bien,des
viciffitudes, faifoit des progrès dont il avoit lieu
d’être content. L’édit impérial de Vormés n’avoit eu
aucune exécution ; Charles-Quint , occupé d’autres
affaires, ne put fe trouver à la diète de"Nuremberg,
tenue en 152.3 , & les luthériens y prévalurent ; quand
le nonce Chérégat y demanda, au nom d’Adrien V I ,
fiiccefieur de Léon X , l’exécution de l’édit de Vormes,
on lui répondit par dés griefs contre Rome , dont
on fit cent articles', qui Furent dreffés par les réformés,
& qu’on nomma les cent griefs germaniques , centum
gravamïna Germanica.
En 1524 autre diète, tenue encore à Nuremberg,
nouveau triomphe pour Luther. On ne permet déjà
plus au légat de paroître à la diète avec les marques
publiques de la légation, parce, que le peuple, tout
luthérien, ne l’eût pas fouffert. Ce légat étoit le cardinal
Gampége , & Clément VII venoit de fuccéder
au pape Adrien VI. Les princes catholiques s’affem-
btèrent avec le légat à Ratisbonne, le 6 juillet 1524,
& formèrent une confédération pour l’exécution de
lTédit de Vormes dans leurs étals refpeéiifs ; ils firent
fehifine avec l’univerfité dé Vittemb'erg , d’où ils
rappellèrent tous ceux de leurs fouets qui y fâifoient
leurs études ; ils déclarèrent ceux qui continueroient
d’y étudier, privés de tous leurs biens & incapables '
de pofféder aucun bénéfice. D ’un autre côté, les princes
proteflans envOyoient leurs députés à Spire, fe fepa-
rant ainfi des. catholiques, lorfquon reçût de Burgos,
des lettres de Charles-Qüinr, qui blâmoit tout ce qui
s’étoit fait à Nuremberg, défendoit aux princes pro-
teflans de,s’afiémbier à Spire, & ordonaoit l’exécution
de fon édit de Vormes.
De ces deux points, lés princes proteflans obéirent
au premier ; fur le fécond, ils alléguèrent une impof-
fibiiité abfblue, fondée fur la refinance qii’iis trou-
voient par-tout dans leurs états. Luther relia donc en
pa:x & en fûreté à Vittemberg, dfoù il voycit fa
fééle s’étendre dans lé nord de l’Allemagne, & le long
des côtes de la mer Baltique ; elle s’étoit déjà établie
dans les duchés de Lunébourg', de Brunfwick , de
Me ckel bourg, dans la Poméranie, dans lès archevêchés
de Magdebourg & de Bremen , dans lés villes de j
Hambourg, de Vifmar, de Rcflock ; elle bçcafionna
une grande révolution dans la partie de l’Allemagne,
qui forme aujourd’hui le royaume de Prüffe; elle I
gagna le Danemarck & la Suède.
La diète de Spire, en 1526, accorda la liberté/
de conférence jufqu’au concile que l’empereur étoit
fupplié de procurer dans un an.
En 1529, nouvelle diète à Spire ; là querelle facra*
mentaire avoit affoibli alors les luthériens; ils divi-
ferent leurs forces en préfence des catholiques , qui
par là l’emportèrent dans la diète. On facrifia aux.
luthériens, les faci amentaires & les anabaptifles, leurs
deux, plus mortels ennemis, parce qu’ils étoient nés.
de leur fein ; fe luthéranifme feul fut toléré par-tout
où il étoit établi, mais on défendit de l’établir dans
lés pays qui ne l’avoient point encore reçu. Cette
fécondé diète de Spire bornoit considérablement la.
liberté indéfinie, accordée dans la diète de 1.526. Le
luthéranifme avoit reculé de plufieurs pas , & fe s
chefs ne le purent fouffrir. Jean, éleéleur de Saxe ,.
Philippe, Landgrave de Heffe,Ernefl & François, ducs
de Lunébourg , Wolfang, prince d’Anhalt, les députés
de quatorze villes impériales, Strasbourg à. la tête,
proteflèrent dans la diète contre ce décret; delà. le
nom de protestants, d’abord particulier aux luthériens ,
étendu enfuite aux autres feéles de la réforme.
A la diète d’Âusbourg en 1530 , où Charles-
Quhît 'r i t préfider dans tout l’éclat de la majcflé
impériale , les luthériens préfentèrent leur profeflion
de foi fi connue fous le nom de confijfion <£ Ausbourg ,
qui difùngue aujourd’hui lafeéfo luthérienne, de toutes
les autres feéles proteflantes, Luther n’âvoit pu pa-
roître à Ausbourg, c’eût été braver trop ouvertement
l’empereur, qui l’avoit mis au ban de l’empire , & qui
eût pu faire exécuter le décret de Vormes, fi les
catholiques l’euffent emporté à Ausbourg. Il étoit refié
à Cobourg dans les états de l’éleéleur deSaxe, mais
allez près du lieu de la diète, pour pouvoir être
confolté for les opérations. Melanchton, fon ami, étoit
à Ausbourg, & ce fut lui qu’on chargea de drefïer
la confeffion Luthérienne , de concert avec Luther.
La confeffion Luthérienne fut préfentée à l’empereur
, en latin & en allemand, le 25 juin 1530, tout
le parti luthérien la reçut. Les catholiques la réfutèrent
par ordre de l’empereur ; Mélanchton. répondit
& fa réponfe efl cé qu’on appelle Y apologie de la
confeffion d Ausbourg, pièce devenue inféparable de
cette confeffion , dont elle efl comme le fupplé-
ment.
Le 22 août 1530, l’empereur rendit un décret par
lequel il réprouva la confeffion d’Ausbourg , & ne
donna que jûfquau 15. avril, foivant à tous les protêt-
tans, pour rentrer dans le fein de l’églife.
Le lendemain les proteflans voulurent lui préfenteir
l’apologie de la contelfion d’Ansbourg , il la refusa.
Il termina la diète le 19 novembre, par un fécond
décret, qui, plue rigoureux encore que le premier ,
■ défend l’exercice de toute autre religion que la catholique,
fous peine de confifcation de corps & de biens_ -
Il forma en conféquence la ligue catholique d’Aus-
; bourg , à laüuelle on oppofa la ligué proteflante de
Smalcalde-, formée le 27 février 1531. L’empereur
fentit la 'néceffité de céder au temps ; la paix de
Nuremberg , conclue le 23 juin 1532., entre les
càthol.quës &. les proteflans, fofpendit l’exécution des
édits de Vormes & d’Ausbourg, & accorda aux luthériens
le libre exercice de four religion jufqu’au prochain
concile. Il s’éleva de nouveaux troubles, &
Luther, qui d’un côté avoit dreffé les articles de la
ligue de Smalcalde, & qui de l’autre avoit autrefois
pofé pour un des principes de fa réforme : quon ne
prendrait jamais Us armes pour la défmfe de l’évangile,
fe trouva fort embarraffé quand il fallut venir aux
armes : on le preffoit de s’expliquer , la ligue d’Ausbourg
alloit fe ranimer, la paix de Nuremberg alloit
être violée, les princes de fon parti vouloient armer,
alloit-il s’oppofer à fes défenfeurs, au hazard de les
rebuter ? Des avocats dirent à- Luther, que les loix
perraettoient de fe défendre contre qui que ce fut.
Voilà Luther comme frappé d’une lumière nouvelle :
il avoit parlé en théologien, non en jurifconfulte ; t évangile
à la vérité défendoit de refifler aux puijfances légitimés
, mais b évangile ri étoit point contraire aux loix
& puifque les loix jugeoient la défenfe légitime, il s en
rapportoit aux jurifconfultes. En effet , ajoutoit-ïl ,
dans un temps f i fâcheux, on pmrroït fe voir réduit à
des extrémités , ou non-feulement le droit civil, mais
encore la confcience- obligeroit les fideles a prendre les
armes , & à fe liguer contre to.US ceux qui voudroient
leur faire la guerre, & même contre l’empereur.
- -Deux autres affaires causèrent encore de l’embarras
à Luther & aux luthériens.
L’une concernoit le concile ; les luthériens l’avoient
eux-mêmes demandé dans la préface de la confeffion
d’Ausbourg : François Ier, fous la protection duquel
la ligue de Smalcalde s’étoit mife, fe fondoit for cette
foumiffion apparente à i’églife, pour juflifier l’appui
qu’il prêtoit aux proteflans d’Allemagne, & il fe
joignoit à eux de bonne foi pour propofer un concife.
Les proteflants s’attendoient à un reins de la part du
pspè. L ’offre Rit acceptée contre toute efpérance ,
d’abord par Clément VII , enfuite par Paul III. Les
proteflants fe repentirent alors de s’être trop avancés ,
& ils revinrent fur leurs pas. Affemblés à Smalcalde,
en 1537 , pour délibérer fur la bulle de convocation,
ils convinrent qu’ils avoient demandé un concile, mais
un concile libre ^ pieux & chrétien ; or Luther , en
dreffant les articles de Smalcalde , avoit fait paffer en
maxime générale que le pape étoit l’Anté-Chrifl ;
comment un concile convoqué par l’Anté-Chrifl ,
feroit-i\ libre , pieux & chrétien ? Il falloit donc en
exclure le pape, comme l’Anté-Chrifl & les evêques
comme fes enclaves; enfin, il ne falloit admettre que
les feuls luthériens, encore falloit-il ne les affembler
qu’en Allemagne’, & que dans une ville luthérienne;
c’efl-à-dire qu’il falloit ne pas avoir de concile.
L’autre affaire embarraffante pour Luther & pour
fes amis, efl la fantaifie qui prit à Philippe, Landgrave
de Hcfïe , le plus zélé des défenfeurs de la réforme,
d’avoir à la fois deux femmes , & de les avoir légitimement
& conformément à quelques exemples de
l’ancien teflamept, de les avoir e-n vertu d’une difpenfe
que lui donnerorent les doéleurs proteflants-fes amis,
«uxqueljS il ..anftpnççïit que for four refos, il lalfTeroit
taire l’empereur qui lui procureroit une .dffpsnfo du
pape, difpenfe que lui Landgrave, déda’gne comme
tout ce qui vient du pape, mais dont enfin il s’ac-
commoderoit, faute de mieux. Sur cette menace , les
doéleurs proteflants, après avoir, pour la forme,gronde
le Landgrave for fon incontinence , & for ce befoi.n
de deux fetnmes ; après avoir, difent-ils, rempli leur
devoir en lui repréfentant le fien, obfervent que leur
pauvre petite églife a befoin de proteâeurs tels que^
fui, & en cohléquençe lui accordent la^ fatale aif-
penfe , en le priant d’en garder le fecret a fes amis ;
le fécret fut mal gardé. Cette difpenfe eff lignée de
/huit dcàèurs , à la tête defquels fe trouvent les noms
de Luther Sc de Mélanchton.
Depuis la formation de la li^ue de Smalcalde, les
proteflants dAllemagne s’afiembloient par-tout librement
& fans permimon de l’empereur ; ils régloient
entr’eux les affaires de leur religion ou de leur ambition;
ils étoient devenus une puiffance d’autant plus
formidable à l’empereur , que l’intérêt de la religion
leur donnoit pour alliés les rois du Nord, & l’intérêt
de la politique le roi de France. L’empereur employoit
moins alors pour les contenir l’autorite que la rufe ;
il les ménageoit dans toutes les diètes, jufqu’à ce qu’il
trouvât une occafion de les accabler par les armes.
A Ratisbonne , en 1521 ; à Spire , en 1544; à
Vormes , en 1543 , les affairés de la religion toujours
agitées, refient toujours indécifes ; conférences éternelles,
profeffions de foi tournées & retournées en
cent manières, réglemens équivoque« , mais toujours
affez favorables aux proteflans ; les evêques murmurent,
le pape fe plaint, les luthériens efpèrent une rupture
entre le pape & l’empereur , & Luther écrit dans
cette efperânce ; mais enfin le concile de Trente
s’ouvre le 13 décembre 1545 , l’empereur veut qu’on
s’y foumette, & fur le refus des luthériens il prend
les armes contr’eux, n’ayant plus alors d’autres ennemis
, ayant fait la paix avec la France, & une trêve
avec lès Turcs. Ce fut au moment où s’allumoit cette
guerre, que Luther mourut , le 18 février 15 46 ,
comme un citoyen paifible, dans Iflébe fa patrie, ou
les comtes de Mansfeld, devenus proteflans , Tavoient
appelle pour régler leurs partages & concilier leurs
différends ; fa maladie fut courte , il par.cît que c’étoit
une indigèflion ou une apoplexie. Il laiffa trois fils,
Jean , Martin & Paul; on ne fait d’eux que leurs noms.
Il laiffa auffi deux filles. Des catholiques indiierets fe
forit trop preffés de dire , les uns que Luther s’étoit
pendu, les autres que le démon l’avoit emporté ;
d’autres, qu’il étoit mort comme Arius, à la garde-
robe après avoir trop foupé,,d’autres enfin, & même
avant la mort de Luther, qu’à fon enterrement on
avoit vu par offre en l’air, l’hoftie que cet héréfiarque
avoit ofé prendre à la mort en viatique ; Luther,
encore vivant, eut bien du pla'fir à publier lui-même
cette relation, en y joignant des apoffilles.
Une fougue impétueufe, un orgueil greffier, l’in.c*-
lence envers des fupérieurs, le defpotifme envers fes
égaux, voilà les traits principaux de fon caraclere :
il a troublé la paix, il a étendu l’empire de la haine ,
bien gens le regardent comme un des prenne»
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