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même. La dncheffe de Valois & la comteffe d’An-
goal eme trouvèrent des prétextes pour ne jamais perdre
la jreine de vue ; on lui perlaada quelle n’cfëit
coucher feule , & la baronne d’Aumont , fa dame
d’honneur, réclama, comme un droit de fa place ,
de coucher dans fa chambre en I’abfence du roi. La
reine prie ou feignit de prendre toute cette contrainte
pour une étiquette dont Ion rang la rendoit .elclave,
Louis XII ne vécut que deux mois avec Marie,
parce qu’il employa trop ce temps à lui plaire
Outre qu’il avoit changé pour elle toute là manière
de vivre, il avoit voulufl, dit Fleuranges , faire du
gentil compaignon avec fa femme , mais il né toit plus
homme pour ce faire , car de long-temps il ètoit fort
malade.
Après la mort de Louis X I I , Monfieur d’Angou-
lême , dit le même maréchal de Fleuranges, demanda
» à ladicle reine « s’il le pouvoit nommer roi, à caufe
» qu’il ne làvoit fi elle eftoit enceinte ou non ; fur quoi
» îadicte dame lui fit réponfe qù’oui , & qu’elle ne
» favoit aultre roi que lui, car elle ne penfoit avoir
» fruiél au ventre qui l’en peull empêcher ».
T rois mois après, le duc de Suffolck époufa fe-
crètement la reine , qui écrivit elle-même à Ion frère,
quelle avoit forcé le duc de Suffolck à recevoir là
ma:n : «Vous m’auriez refufé votre conlèntement,
lui dit-elle , vous m’accorderez mon pardon ».
Polydore Virgile va julqu’à dire que Henri VIII
defrinoit fa Ibeur à Suffolck, avant que des intérêts
politiques l’obligealTent de la donner à Louis X I I ,
& qu’il n’avoit fait fon favori duc, que dans l’intention
d’en faire fon beau-frère;
Marie retourna auprès de Henri V I I I , &. l’Angleterre
qui l’avoit vue partir reine de France, la vit
revenir cjucheffe de Suffolck, plus contente de l’heu-
reufe médiocrité de ce fécond état, que de la fplen-
deur gênante du premier. Il lui relia de fa couronne
un douaire de foixante mille livres de rente , bien
payé quand la France & l’Angleterre étoiem amies.
Marie d’Angleterre mourut en 1534 , à trente-fept
ans.
Marie Stuart. ( Voye^ Stuart. )
Marie de Médicis. ( Voye^ Médicis. )
Marie première , ( Hift. d*Anglet. ) reine d’Angleterre
, fille de Henri VIII & de Catherine d’Arragon,
iceur d’Edouard V I , à qui elle fùccéda, & d’Elifabeth
qui lui fuccéda, eût pu paroitre digne du trône, fi
elle ne l’eût point occupé. Jamais enfant royal n’avoit
été plus éprouvé par le malheur dès fon enfance.
Enveloppée dans la profeription d’une mère mal-
heureufe & refpeétable , elle ne trouva dans Ion père ,
qu’un tyran & un ennemi, qui la priva des droits
de fa naiffance , qui la livra, fans appui & fans confo-
lafion , à la haine de lès belles-mères ; elle ofa réfiller
à ce père barbare , & relier fidelle à fa mère ; elle
olà regarder comme nul tout ce qui n’étoit que l’ouvrage
de la violence, & défendre avec fermeté
les droits dont on la dépouilloit. Tant qu’Anne de
Boulen vécut, Marie ne voulut faire aucune démar- ,
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che pour fe réconcilier avec fon père ; elle rejettoit
hautement là fuprématie., cette fuprématie qu’il nes’étoit
arrogée que pour répudier Catherine d’Ârragon, &
épouièr Anne de Boulen. La mort de cette dernière
rapprocha le père & la fille. Henri força Marie de
ligner un aéle , par lequel elle reconnoiffoit enfin
fa fuprématie, r enonçoit à l’obéiffance du pape, &
avôuoits: la nullité du mariage de fa mère. Son coeur
défavoua toujours cette fignature arrachée à fa foibleffe ;
elle trouva plus de force contre fon frère, elle n’en re-
c.:**nut jamais la fuprématie, & refulà cônftamment
de fbuforire à la nouvelle liturgie, ce qui lui attira
de la part d’Edouard V I une perfécution , qui lui fit
former le projet de quitter le royaume ; mais on
veilloit fur e lle , & la fuite lui.fut impoffible.
Le premier aéle d’autorité que fit Marie , en mon»
tant fur le trône , fut d’ouvrir les priions des Catholiques
perféc.utés, & de les rétablir dans leurs biens &
dans leurs temples. Tout cela étoit jufle. Que les
Catholiques même euffent la meilleure part aux faveurs
de la nouvelle reine, on avoit dû s’y attendre ; elle leur
devoit ce dédommagement de l’oppreffion qu’ils avoier t
foufferte pour une caufe qui étoit la fienne, mais elle
avoit promis de ne point perfécuter. C ’étoit fur la. foi
de cette promeffe , que les Proteflants s’étoient donnés
à elle. Si long-t-mps en butte elle-même à la perfécution
, elle devoit en avoir fenti toute Pinjuflice ;
l’élève du malheur devoit être la confolatrice de
l’humanité-, Marie n’eut point cet honneur ; le malheur
l’avoit aigrie ; elle étoit fille de Henri VIII ; fa cruauté
faifit tous les prétextes que la politique & la religion,
mal entendues l’une & l’auire, purent lui fournir ; elle
ne pardonna point à Jeanne Gay , qu’on avoit. rendue
coupable malgré elle. Les viélimes immolées à la religion
, furent encore plus nombreufes. On compte
jufqua deux cents-quatre*vingt-quatre perfonnes livrées
aux flammes pour, héréfie, fous le règne de Marie,
& ce règne fut de cinq ans. Plufieurs furent brûlés à
petit feu ; on prenoit plaifir à leur faire tomber les
membres les Uns après les autres en les brûlant avec
des flambeaux. Un malheureux ne pouvant réfifler aux
douleurs, s’écria : jabjure ; on le détacha, on lui fit
ligner fon abjuration ; il vint un ordre de la cour de
le brûler malgré cette abjuration , & le juge fut mis
en prifon pour l’avoir fait détacher.
Une femme f car on brûloit auffi des femmes, &
même dans l’état de groffeffe) une femme qui étoit
dans cet état, fut avancée par les douleurs, & accoucha
au poteau ; un des affiliants retira l’enfant du feu ;
l’autorité publique, après un moment de délibération ,
fit rejetter l’enfant dans les flammes , comme fruit
d’hêréjîe.
Marie époufa Philippe I I , roi d’Efpagne, mariage
l le plus contraire & à la politique angloifè en particulier
, & à la politique européenne en général ; mais
elle efpéroit par le^ mélange des moeurs efpagnoles ,
amener les Anglois à recevoir le joug de rinquifition,
&■ cet avantage faifoit difparoître à fes yeux tous les
inconvénients dune telle alliance. Philippe II la gou-
vernoit &. la méprifoit. Malgré fon indifférence , il
crut
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crut avoir donné un héritier-au trône; Marie le défi-
roit trop pour n’en pas concevoir & n’en pas donner un
peu légèrement l’efpérance. A un fermon du cardinal
Polus, dont elle avoit été pieufement afieélée , elle
avoit fenti' fo n enfant remuer ; le bruit fe répandit en
quelques provinces, qu’elle étoit accouchée d’un fils
Je TeDeum fut chanté dans la cathédrale de Norwick.
Un prédicateur tira en chaire l’horofcope, & fit le
portrait de l’enfant ; mais la reine n’avoit été délivrée
que d’une m de. Philippe renonçant à l’efpéranced’avoir
des enfants de Marie, retourna dans fes états, laifîant
fk femme inconfolable de fon abfence 3c de fes froideurs.
Philippe avoit averti Marie que la cour de France
formoit des projets qui paroiffoient menacer Calais ;
Philippe ajoutoit à cet avis l’offre de mettre garnifon
flamande dans cette place ; mais les Anglois fe défièrent
avec affez de raifoii, d’un foin fi obligeant,
èc l’offre fut rejettée ; ce qui acheva de rendre Philippe
auffi indifférent fur les affaires de l’Angleterre,
qifrl l’étoit déjà pour la reine fa femme. Le duc de
Giiife prit Calais , 3c Marie mourut peu de temps
après, en 1558. On ri a pas connu mon mal, dit-elle
dans fes derniers moments , f i Von veut le J,avoir ,
cjiion ouvre mon coeur, & on y trouvera Calais. Elle
étoit née çn 1515 , .& avoit commencé à régner en
*553-
Marie seconde ,-reine d’Angleterre conjointe,ment
avec Guillaume III fon mari, prince d’Orange , étoit
fiile du malheureux Jacques II. Elle naquit au palais
.de Saint-James en 16 0 2 .fous le règne de Charles II.
Son oncle , Jacques I I , étoit alors duc d’Yorçk ; il fe
fit catholique , au grand défagrément de la nation an-
glo'.fe ; mais il n’eut pas la liberté d’élever fes filles,
dans cette religion; Charles II , malgré le penchant
qu’il avoit lui-même pour le catholicifme, prit foin
de lés faire infiruire dans la foi proteflante.
Le prince d’Orange, déjà uni par les liens du fang
à la maifon dAngleterre, neveu de.Charles H&du
duc jd’Yorck par fa .mère ., leur fceur, plus uni encore
par les liens politiques avec les républicains anglois ,
qui, foulevés par lui contré la France-, s’indignoient
dés liaifons de leurs princes avec Louis X IV , voulut
former de nouveaux noeuds plus étroits encore avec
cette maifon & avec ce pays, en épouiànt la princeffe
Marie. Les grandes révolutions que c,e mariage entraîna,
dans la fuite., fembloient annoncées par les conjonctures
mêmes dans lefquelles ce mariage fut conclu, 3ç par
la hauteur avec laquelle Guillaume fit la demande de
laprincefl'e Marie. .Charles II n’a voit" point d’enfants
légitimés, le duc ciYorck n’avoit que. des filles ;
celui qui épouferoit Marie , acquerroit; de grandes
çfpérances.
Le prince d’Orange vint en 1677 > en Angleterre,
faire la demande de la princeffe ; c’étoit le temps ou
il foulevoit toute l’Europe contre la puiffance menaçante
de Louis XIV. Le duc d’Yoixk accueillit froidement
cette propofition , 3c fe contenta de dire, qu’il fe fou-
mettroit toujours aux volontés du roi fon frère. Charles
Mijloirç, Tome U f
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voulolt que le mariage de fa nièce fût le fceau de la
paix qui fe négocioit alors à Nimègue ; le prince
| d’Orange commença par déclarer hautement-que la
princefle lui avoit plu dès la première vue, & qu’en la
connoiffant mieux, il i’aimoit tous les jours davantage,
mais qu’il étoit incapable de fàcrifier le moindre des
intérêts de-fes concitoyens & de fes aljjés , pour la
plus belle femme du monde , & qui lui feroit la plus
chère ; Charles prit le parti de dire qu’il eflimcit in-
finimeni cette franchife de fon neveu.
L’affaire du mariage traînant en longueur, parce que
Louis XIV la traverfoit, Guillaume dit hautement
qu’il falloit que cela finît, &. que le roi choisît d’avoir
en lui un ami fidèle ou un ennemi implacable. Ces
traits d’impatience ÔC de hauteur qui révoltoient le'
j duc d’Yorck , trouvoient plus d’indulgence chez
Charles II. Il voulut toujours n’y voir qu’une noble
franchife ; il avoua au chevalier Temple , qui avoit
toujours fait des voeux & des démarches pour cette
alliance,(qu’il s’étoit toujours piqué d’être phyfionomifte;
qu’il prétendoit nes’êtrç jamais trompé, en jugeant d’après
la phyfionomie :■ « Celle de mon neveu me plaît,
ajouta-t-il, elle m’annonce un honnête homme ; vous
‘ » pouvez l’affûrer qu’il aura ma nièce ». Ce mariage
fe fit en effet en 16 77, à la grande fatisfàéfion des
Anglois , & le prince d’Orange acquit à la fucceffion
d’Angleterre , des droits qu’il fit valoir avant le temps ,
quoique détruits par la naiffance de Jacques III,-
Cette naiffance même h.ata la révolution. Le prince
1 d’Orange affûré des fùffrages de la nation angloifè ,
que le catholicifme perféçuteur de Jacques II revoltoit
depuis long-temps, prit le parti, en 1688, de détrôner
fou beau-père , du confentement de fa femme. Les
Catholiques comparèrent Guillaume à Tarquin, & la
; princeffe Marie à Tullie , écrafant fous les. roues, de
foh char , le corps de Servius - Tullius fon père;
Guillaume & Marie furent couronnés roi 3c reine
d’Angleterre. "
Marie mourut le 7 janvier 1695 , fans enfants , &
le trône paffa , mais feulement après la mort de
Guillaume en 1702 , à la princeffe Anne , foeur de
Marie,, $c femme de George , prince de Danemarckr,
' Un prédicateur jacobite infolta la mémoire de Marie9
en prêchant fur ce texte où Jéhu dit, en pariant de*;
Jéfebel : Ite vide te màlediçlam ilium & fepelite eam ,
quidfilia Regis- eft. « Allez voir ce qu’eff deyenue cette’
'n m'aJheureme , erifeveliffez-laparce qu’elle eff fille
,» dé roi ». Rois , liv. 4 , chap. 9 , verf. 34.
Les Proteffants au contraire la célèbrent comme’
proteélrice des arts & bienfaitrice des malheureux.
Elle faifoit en fecret, à fon père détrôné par elle*
.une penfion de foixante-dix mille livres , qu’il perdit,
à fa mort.
Marie-Thérèse d’A utriche , reine ffe France ,
: fille de Philippe I V , roi d’Efpagne ; née à Madrid
; en 1638 , époufa Louis XIV le 9 juin 1660, à Saint*
Jean - de> Luz, en vertu de Ja paix dçs Pyrénées*
mourut ep 1683, 3° jnillet,;
On a , pour juger d e cette princeffe , deux mots^
Q. q a