
tage avoit déjà coûté le trô:ie & la vie à lès premiers
maîtres : fi les vues de Charlemagne furent celles que
u’v îuppofe l’auteur des cbfervations, on fera forcé de
.convenir que la politique fut inférieure en ce point à
celle de. Louis le Pieux. ( M—y . )
Louis U, fùrncmmé le Begue, XXVIe roi de France,
è toit fils de Charles-le-Chauvc Si d’Hermentrude : quoique
le trône fut héiéditaire, il. ne crut pas pouvoir le
difpenfer de demander les fuffrages des évêques & des
•feignëurs pour y montet. Cette particularité prouve la
foibleffe du gouvernement : leur fuffrage lui coûta une
conceffron forcée de précieux privilèges. Ceux qui ne
s’étoient point trouvés a fon avènement accoururent
en foule pour participer à des largeffes dont-le monarque
n eût pu fe difpenfer làns péril , & ce ne fut qu’en
les comblant de biens qu’il crut pouvoir s’affurer de
leur fidélité. Mais lui & Tes fucceffeurs éprouvèrent que
ce n’elt pas en flattant des féditieux que l’on peut elpérer
d’être j amais bien obéi :..les fùjets alors affez puiffans
pour foire la loi au fouverain, étendoient ou lintitoient
a leur gré fa puiffànce. Bolbn, frère de l’impératrice
Richilde, fans avoir le titre de roi, en affe étoit toute la
pompe, Si jouiffoit dî toutes lès prérogatives de la
fouveraineté ;Tes dignités accumulas fur fa tête, les
alliances avec les premières familles du royaume le
rapprochèrent du trône, qu’il fembloit dédaigner par la
grahde facilité qu’il, avoit d’y monter..
Louis afpiroit à l’empire ; on prétend même qu’il en
reçut la couronne des mains du pape dans un concile :
mais cette opinion-n’èfrpas générale, nous la révoquons
en doute avec doutant plus de raifon ,. que dans tous
les aétes qui nous relient de ce prince, on n’en voit
aucun ou il prenne la qualité d’empereur.. Carloman
forti de la branche aînée, nous femble avoir eu plus
de droit de le porter ; mais c’étoit un préjugé affez
généralemeut reçu, qu’aucun prince ne pouvoit le
prendre fans avoir été couronné par le pape. Les rois
de France & de Bavière fe difputoient fbn fûffrage :
comme il ne pouvoit le donner à tous les- deux, .il'1 les
amufa l’un & Tautré par d?àrtificieüfes promeffes ; le
but de ce manège étoit de les engager à lui fournir du
fecours contre les Sarrafins. Cet artifice ne lui réufïit
pas, les deux rois refusèrent de l’affifler, & le trône
impérial refia vacant.
Louis le Begue défiroitfaire- reconnoître Adélaïde
qu’il avoit époufée après avoir répudiée Anfgarde ,
dont il avoit eu Louis & Carloman; mais il ne put
l’obtenir. Tout le peuple applaudit au refus qu’en fit
le pape, Anfgarde étoit encore vivante: c’eût été
exclure fes enfans & confirmer le fécond mariage, qui,
iuivant les loix de l’Egîife, n’étoit qu’un concubinage.
Après la féparation , la France fut embrâfée du feu
des guerres civiles. Lotaire, roi de Lorraine, le marquis
de Septimanie, & le comte du Mans, s’étoient.
érigés en tyrans de leurs vaffaux : ils exercèrent les plus
cruels ravages dans le royaume., Louis employa contre
eux les armes de l’Eglife. Le comte du Mans , effrayé
des foudres de Rome, reflitua,au roi tous les châteaux
qu’il lui avoit.ravis: les démêlés avec le roi
de Lorraine furent terminés par la négociation. Le
marquis de Septimanie refufoit èncore de-fe fbumettre :
quoique dépouillé de fes états par l’interd élion ecclé-
-fiafhque & par une fentence de Louis , il n’en conti-
nuoit pas moins la guerre ; fon armée non moins intrépide
que l u i & non moins impie, bravoit les excommunications
Si les menaces d’un roi trop foibie
pour les punir.
Louis, pour arrêter le feu delà révolte Si l’empêcher
de s’étendre dans toute l’étendue du royaume , s’avança,
contre ces rebellés, réfolu de terminer la guerre par.
un coup décifif : mais il efl attaqué à.Troye par une
maladie qui l’arrête dans fa marche : 'on le tranfporte
à Compiegne, où il meurt avec le foupçon d’avoir été
empoifonné il fut enterré à l’abhaye de Saint-Corneille,;
il étoit âgé de trente-cinq ans ,il' en avoit régné
vingt-deux. L’hifloire l’a placé parmi les-rois fainéans
ce n’efl pas qu’elle l’accufe de molleffe ou d’indolence,
elle lui reproche feulement de n avoir rien fait de
grand-Ce fut fous fan régne quê l’on vit éclorre cet
effaims de comtes v de ducs Si de marquis : c’étoient..
autant de petits tyrans qui fecouoient le joug de l’autorité
royale *,&- qui chargçoient le peuple des chaînes*
dont ils fe dégageoient. Il làiffa Adélaïde enceinte d’ua
fils, qui fut appelle Charles, ôtqui, pour avoir donfté
fa confiance à des traîtres., fut furnommé le Simple.
Le courage de ce prince & l’excellence de fon coeur,
lui avoient mérité une dénomination plus honorable,
Louis III g* Carloman , rois de France. Louis T
fils aîné de Louis-le-Begue , étoit appellé au trône par.,
la naiffanee Si par le teflament de fon père qui, en
mourant, chargea.Odon , évêque de Beauvais, & le
ccmte Aibain, de lui porter la couronne ,. le feeptre
& l’épée ainfi que les autres attributs du pouvoir fou-*
veraïn. Les faâioris qui déchiroient le royaume j ne
daignèrent .pas confultèr les loix. ; Si comme la. révolte '
efl ingénieufe en prétextes., les mécontens proposèrent
d’élire un roi , les deux fils de Louis lé Begue étant,
trop foibles, difoient-ils, pour tenir lé timon de l’état
dans ces temps orageux g Si pour donner l’appareil de
la. jufliçe à. la dégradation des princes ,#ils prétendirent
que la répudiation d’Anfgarde, leur mère, devoit lès-
ranger dans laclaffe des enfans naturels- Goffelin, abbé
de Saint-Denis, Si.Conrad, comte de Paris, étoient à
la .tête de cette faétion :tils mettoient tout ea combufliôn
dans le royaume, tandis que Bofon , qui\tenoit le
parti des princes, prenoit des mefiires à. Meaux , pour
mettre une armée en campagne. Le roi de Germanie ,.
Tufeité par Goffelin & par fes. complices, entra fur les -
terres de France : .tout .préfagecit fesfuccès, lorfque.
des troubles excités dans la Bavière le forcèrent de re?
paffer le Rhin;, cette expédition, ne lui fut cependant
pas infruétueufe, les p.artifans des princes lui cédèrent,
par un traité , une partie de l’ancien royaume de Lor-
ra ne royaume autrefois puiffant, Si dont la province,
qui retient fon nom, n’efl qu’un foibie refie.
Les rebelles privés de fon appui, ne tardèrent point
à réveiller fon ambition ,. ils. rengagèrent à rompre le
traité, il fe préparoi t à faire une nouvelle invafion ,
mais il fut retenu par Hugues ,, fils de Lotaire,, qui
menaçait cette partie de. la Lorraine qu’on, lui avoit
cédée. Le fuffrage des François étoit partagé entre Carie
man Si Louis, les Neuflrîëris fixoient leurs voeux, fur
Louis;.mais Cailcmgn avoit pour lui Bofon ; il ctoit
à craindre que la rivalité de ces princes n’excitât une
guerre.civile : ce fut pour en prévenir les ravages,,
qu’on les facra tous deux en même temps. Louis eut
la France proprement dite, Carloman la Bourgogne
& rÀqiiitaine. • .
- Bofonqui vendit de faire deux rois,. ne put refiüer
àla tentation de. l’être, Les princes , jeunes & fans expérience
, laiffoient un libre couf^s a fon ambition,: il
féduifit par des préfens ceux que les menaces ne purent
ébranler : il s’étaya encore,de la protection du pape &
des évêques. Alors il prit la couronne, & fe fit couronner
roi d’Arles. Ce nouveau royaume comprenoit
le Dauphiné, le Lyonnois, la Provence, la Savoie &.
une partie de la Bourgogne.
Tous les princes de la maifon Carhenne tinrent une
affemblée «frétas à Gondreville ;,on y délibéra fur le •
moyen de rétablir le bon ordre dans le royaume, Si
d’en cHaffer les ennemis domefliques & étrangers : il fut
décidé que Louis Si Carloman marcheroient c o n t r e
Hugues, fils de Lotaire, qui dévafloit la Lorraine
le rebelle n’eut point affez de confiance pour tenter le
fort des armes en bataille rangée,. il fe. retira-dans les
forêts. Les deux rois pensèrent alors qu il leur feroit
facile, de punir Eofon d’avoir ofé préndre le titre de-
roi ; ils lé tinrent aflïégé pendant deux ans fans pouvoir
le réduire ; une irruption de Normands repandùs dans
l’Artois Si la Flandre força Louis d’oublier le rebelle.-
Il alla combattre ces nouveaux ennemis, qu’il vainquit
dans les plaines de Saucour. Cette viéloire.fut le dernier
événement mémorable du . règne de Louis. Ce
prince, qui méritoit une vie plus longue Si un plus
heureux règne, miourut vers l’an 883* deux ans Si
trois mois après fon couronnement.
Louis ne laiffa point. d’ënfans, .fon frère lui fucceda
fans aucune côntradiélion. Carloman. fit ferment de
garder les.capitulaires de Charles-le-Chauve , & fut
aufli-tôt proclamé roi de Neuflrie :. fon nouveaujègne
fut mêlé de profpérités de revers. La conquête du
Viennois le rendit maître de la reipme de Bolbn qui,,
dans cette guerre, avoit montré un courage Si une
conduite qui auroient illuflré un général î les Normands*,
témoins de Tes fuccès , recherchèrent fbn amitié, Si
lui demandèrent la. paix ; Carloman y çonféntit,. mais
à. des conditions trop humiliantes pour une nation auffr
fière : il eut à fe repentir de ne leur en avoir point pro-
pofé. de plus modérées ; les Normands lîii taillèrent en
pièces trois armées puiffante’s , Si le forcèrent d acheter'
la paix, il la paya douze mille livres d’or : la- mort"
qui l'enleva ( 884) peu de temps après , ne lui permit
pas d’effacer la honte de ce traité ; .il mourut d’une
blefïiire que-lui fit un fanglier à la chaffe. Une laiffoir
po’nt d’héritiers, fes états pafïérenuà..Châiiês-le-Grosÿ-
dont la., fin fut fi déplorable..
■ Louis IV , dit d' Outremer, XXXIIe roi dé France,
fils.de Chaiiës-le-Simple & de'la reine Ogive, fille
d’Eclpuard, roi d’Angleterre. Ce prince fut ainfi nommé
d’Oüiremsrparce qu’au. moment. : de la. captivité de
Charles-!e-Simple, il alla chercher un afyîe en Angleterre
çontre la violence des grands qui avoit fecoué
le joug de l’obéifïbnce : il refia treize ans à la cour
du roi de la Grande-Bretagne, fon aïeul mate nel,
Huguôs-le-Grand parut dédaigner un truie qui étoit
environné d’écueils ; & ne pouvant s’y placer fans
péril, il y fit monter Louis, Si fut le premier à le reconnoître
pour Ton fouverain. L’exemple de fa foumlf-
fiqn politique entraîna les feignëurs des deux ordres
qui l’accompagnèrent jufqu’à Boulogne où, d’un commun
accord ils laluèrent Louis à- la defeente du vaifleau v,
Si le proclamèrent roi de France- Ce fefvice intéreffé-
valut à Hugues le nom de Grand, avec une partie de
la Bourgogne,, dont le frère de Raoul fut dépouillé. Le
timon de l’état fut confié à fes foins, Si quoiqu’il n’eût
qu’une autorité empruntée, il eut tout l’extérieur de
la royauté. Ses-procédés trop fiers pour ceux d’un fujet,
affeâoient fenfiblement le jeûne monarque' déjà trop
humilié de languir fous 4a tutelle d’un vaffal qui, fous --
prétexte de le loulâger du poids-:des affaires, le tenoit
captif dans l’enceinte d’un palais. Ce fut pour fbrtir
dé cet efclavage que Louis fe ligua avec le duc de
Normandie , ,les comtes dè Veimandois '& de Poitiers, -
qu’il croyoit ennemis de Hugues : mais ces alliés in fi- -
dèles le Sacrifièrent bientôt aux intérêts de leur fortune. -
Hugues qui fàvoit que les hommes font toüjours vaincus'
par leurs pariions, augmenta le territoire des uns, Si
accorda des privilèges aux autres - Hugues verfa fur '
eux une infinité de bienfaits, dont il étoit d’autant plus -
prodigue qu’ils ne lui coûtaient rien ; c’éfl ainff qu’il en
fit les'inftrumens de fes profpérités.-Le mônarque chan--
cela plus que jamais-fur le trône qu’il prétendoit raffer--
mir : la révolte l’affiégea de toute part ; les foudres de-
I l’églife lancées contre les rebelles lés arrêtèrait quelques '
inftans dans la route du crime, Si- quoiqu’ils bravaf- '
fent les excommunications, -ils craignoient tout de la '
terreur qu’elles infpiroient au peuple, - Hugues en -
[ prévit.lès. luîtes , . Si pour lés-prévenir iîfoonfentit a*
| une trêve dont Louis crut devoir- profiter pour reprendre
la Lorraine : il en fit là conquête ; mais cette
démarché n’étoit - pas d’un politique : il indifpofoit
contre lui Othon, - roi de Germanie, dans un temps
où l’amitié "de ce prince lui eût été d’un très-grand
fecours , . comme-fa haine lui fut très-funefle. Louis
ne put confeiverla Lbrraine , Oihon la lui reprit
dans mie guerre1 cù il eut pour alliés» Hugues le"
comte de Vermandois..
Les prélats , à -la faveur des troubles , fe ren--
doient fouvèrains de's*villes de leurs diocèfes ; c’efl
ainfi ,par exemple- y-que l’archevêché de Reims efl
devenu • duché-pairie du royame. L e comte de" Ver- -
mandôis',,.pour le conferver à fon fils, qui en avoit
été'dépouillé ,,attifa- le- feu' de la guerre ; mais il fut
obligé de fe’ contenter de deux riches abbayes. Les- -
rebelles afliégèrent là ville de Laon ;' & pour rnar— ■
quer leur reconnoiffâhce à Odion qui les protégeoif -
avec une armée, ils Te déclarèrent roi de Fiance- Le'
vertige de l'a • révolte égarant les- François, ils dépo—-
sèrent leur fouvérain, Si fè’donnèrent à Othon r elpè—
rant jouir • d’une plus grande liberté fous l’empire^