
. abandonner Charles dans de pareils dangers, elle lui
amena de Hollande quelques foibles fecours : ce fut en
paffant avec ces fecours eh Angleterre , qu’elle efluya
cette violente tempête, oh les matelots, félon Texbref-
fion de BofTuet , alarmés jufqu a perdre l’efprit, fe
précipitoient dans les ondes, & ou elle feule raflùroit
tout le monde, en difant avec un air ferein-, que les
ruines ne fe noyoient pas. Le parlement -anglois eut la
criminelle infolen.ce de déclarer coupable de haute
trahifon, une femme, une reine qui fecouroit fon mari ;
les rebelles la pourfuiyirent & fur la mer &fur la terre ;
à peine put-elle trouver dans toute l’Angleterre, un
lieu sûr pour accoucher de la princefTe. Henriette-
Anne : on fe rappelle tout ce que BofTuet a dit de
fublime & d’attendriffant fur cette fuite de la reine 8c
• fur cette naiffance de fa fille. Affiégée dans Exeter
elle part peu de jours après fon accouchement, à la
vue d’une efcadre ahgloiie, pour fe réfugier en France :
vice-amiral Batti pourfuit fon vaiffeau juiqu’auprès des
. côtes de la Bretagne ; & n’ayant pu l’atteindre , il fait
tiret fur elle pour la fubmerger tout le canon de fon
efcadre. La reine échappée prefque miraculeufèment
a ce danger, trouva du moins un afyle en France pour
elle & pour fes enfants ; c’eft prefque tout ce que fit
cette couronne pour la fille 8c lès petits-fils de Henri-
le-Grand, « Henriette d’un fi grand- coeur, dit BofTuet $
» eft contrainte de demander du fecours. Anne d’un fi
»grand coeur, ne put èn donner afTez ». On fçait ce
que rapporte le cardinal de Retz , qu’étant allé au
mois de janvier, fa're une vifite à la reine d’Angleterre,
il la trouva au chevet du lit de la princefTe Henriette-
Anne fa fille, qui étoit malade , 8c qui ne pouvoit fe
lever, parce qu’elle n’avoit point de feu. Ce fut lui qui fo
chargea de leur; fournir dubois. Cette reine fût réduitea
l’humiliation d’implorer la pitié du meurtrier de fon
mari. Elle pria Mazarin de demander à Cromwel qu’on
lui payât fon douaire , & elle efluya un refus. Mazarin
lui annonça qu’il n’avoit rien obtenu , 8c qu’il ne
pouvoit rien faire pour elle.
( Henriette-Marie, ; après tant de douleurs , eut la
confolation de voir Charles II fon fils aîné, folidement
affermi fur ce trôné d’où elle avoit été précipitée ;
cl'e reflerra fes noeuds avec la France , en mariant
ave: Mcnfieur, duc d’Orléans , fécond fils de LouisXIII,
la d rnière de fes filles , cette célèbre Henriette-Anne,
le plus bel ornement de la cour,de Louis XIV , la
pL s parfaite image de fa bifayeuîe Marie Stuart, par
les g-aces de la figure & de T’efprit, par fes vertus
tencrüS & touchantes , par fon .defir & fon art de
plai; e , & même par fa fin défaftréufè. Son fouvenir eft
encore préfent à tous les coeurs, dans la relation attefi--
driftante que madame de La Fayette nous a donnée'
de la mort de cette princefTe, 8c dans ce grand monument
d’éloquence que Bcfîùet a cônfacrê à fa gloire.
Elle fu t, tant qu’elle vécut, le lien delà France & de
l’Angleterre. ( Voyc1 fon article particulier dans l’article
général de la rnailon Stuart. ) ]
Henriette-Marie ^mourut fubitement le 10 feptembre
1669. « La mort n’a pu la furprendre , dit BofTuet,
ô encore quelle foit venue fous l’apparence du fommeil.
Le coeur de la reine d’Angleterre eft à Sainte Marie
de Chaillot , & c’eft là que Boffuët a prononcé fa
magnifique oraifon funèbre.
H EN R IO N , (Nicolas) (Hiß. Litt, modi) de
l’Académie des Inscriptions 8c Belles-Lettres, d’abord
a titre d’élève, enfuite d’aflocié - vétéran , étoit né à
-Troyes en Champagne le 6, décembre 1663. On n’a I
de lui que très-peu de mémoires, & encore par extrait, I
dails THiftoire de l’Académie. Il apporta en 17 18, à I
1 Academie , une efjpèce de table ou d’échëlle chrono- I
logique de la différence des tailles humaines , depuis I
la création du monde jufqù’à la naiffance de J. C. I
Sur cela, nous ne pouvons que tranferire les propres I
paroles de Fhiftorien de l’Académie.
u Dans cette table , M. Henrion afligne à Adam I
» 123 pieds 9 pouces dehaut, & à Eve 1 18 pieds.9 I
» pouces trois quarts, d’où il établit une règle de pro- I
” portion entre les tailles mafeulines & les tailles fémi- I
» nines, en raifon de 2.5 à 24. Mais il ravit bientôt'à I
» la nature cette majeftueufè grandeur : félon lui, Noé I
» avoit déjà 20 pieds de moins qu’Adam. Abraham I
m nen avoit plus que 27 à 28. Moyfe fut réduit à 1 3 , 1
» Hercule à 10, Alexandre-lé-Grand n’eii avoit guère I
» que 6 , Jules-Céfar n’en avoit pas 5 . ............Si la I
» providence n’avoit daigné fùfpendre les fuites d’un fi I
» prodigieux abaifTement, à peine oferions-nous au- I
»> jourd’hui nous compter, au moins à cet égard , entre I
» les plus confidérables infeéks de la terre.
» La géographie tient effentiellement à la taille des I
» hommes ; leurs pas ont toujours été comme ils font, I
» 8c Feront toujours la première mefùre des efpaces I
» de longuêur qui fe trouvent fous leurs pieds: ainfi I
» M. Henrion joignit une nouvelle table des dimen- I
» fions géographiques des premiers arpenteurs-de Tuni- I
» vers , à celle des tailles humaines dont nous venons I
y> de parler ; & ces deux tables qui ont un merveilleux I
” rapport entrelles, font probablement tout ce qu’on I
» verra jamais des 3 ou 4 vol. in-folio dont il nous I
» flattoit ».
M. Henrion fut nommé en 1705 , profeffeur en I
langue fyriaque , au Collège Royal ; on eh fut farpris, I
on mit dans les Nouvelles Littéraires, qu’il avoit I
ete choifi pour apprendre le fyriaque au Collège "Royal, K
u abufant malignement.du terme Rapprendre, qui, dans I
n notre langue, eft quelquefois fynonyjne avec celui I
». d enfeigner ,* mais la manière dont il, s’en acquitta, I
» leva bientôt tout P équivoque de. cette expreffion ».
Nous remarquons ici deux chofès y Tqiië', que I
l’hiftorien laifïe fùbfifter l’équivoque en difant qu’elle I
fut lèvee , 8c en ne difant pas comment .elle fut levée ; I
& l’autre , que le mot équivoque, fur. legenre duquel I
le doute de Boileau nous étonne aujourd’hui ■: équivoque I
maudite ou maudit, étoit ou pouvoit être encore..,mafi- I
ctilin en 1720, temps où écrivoit l’auteur de l’éloge de I
M. Henrion,.
M. Henrion difputa & obtint en 1710 , une place I
d’aggrégé en droit." Cet homme , qui a fi peu produit, I
mourut, * dit-on, d’un épuifèment caufé par un excès I
de travail, le 24 juin 1J20.
HENRYS , (Claude) ( Hiß. Litt, mod,) avocat
«lu Roi au bailliage de.Forez, arrêtifte connu , 8c grand
Jurifconfulte. Mort en 1662.
HENSCHENIUS, (Godefroy) jéfuite Flamand,
un des Bollandiftes.
HEPTARCHIE, f. f. ( Hiß, mod. ) gouvernement
des fept royaumes des Anglo-Saxons, conlidétés comme
ne faifànt qu’un feul corps & un feulétat.
Les Anglo-Saxons établirent en Angleterre un gouvernement
à-peu-près femblable à celui fous lequel ils
»voient vécu en Allemagne, c’eft-à-dire , que fe cou-
fidérant comme frères 8c compatriotes, 8c ayant un
égal intérêt à fe maintenir dans leurs conquêtes , ils
conçurent quM leur é.oit néceflaire de fe fecourir mutuellement,
8c d’agir en commun pour le bien de tous,
Ce fut dans cette vue qu’ils jugèrent à propos de fe
nommer en général un chef, ou, fi l’on veut , un
monarque , auquel ils accordèrent certaines prérogatives
dont nous ne fommes pas bien informés. Après
la. mort de ce général ou"'monarque, on en éiifoit un autre
du confentement unanime des fept royaumes ; mais il
y avoit quelquefois d'aflez longs interrègnes caufés par
les guerres oc par les divifions entre les fouverains ,
qui ne pouvoient s’aflémbler ou s’accorder fur un choix.
Outre ce monarque , qui lioit enfemble les Anglo-
Saxons , ils avoiènt encore une affemblée générale
compofée des principaux membrës des fept royaumes
ou de leurs députés. Cette affemblée étoit comme le
centre du gouvernement heptarchique; on Tappelloit
le IVittenat-gémpt, ou le parlement-général, & on n’y
délibéroit que fur les chofes auxquelles toute la nation
prenoit intérêt! -
Chaque royaume avoit d ailleurs un parlement particulier",
formé à-peu-près de la même manière qu’on
le voit pratiqué dans les fept Province s-Unies des Pays-
Bas. Chaque royaume étoit fouverain 8c néanmoins ils
délibéraient en commun fur les affaires qui regardoient
l’intérêt commun de Yheptarchie. Ce qui étoit ordonné
dans Taffemblée générale devoit être exa&ement ob-
fervé , puifque chaque roi & chaque royaume y avoit
donné ion confentement. C ’étoit-là la forme du gouver*
nement heptarchique en général.
L'heptarchie dura 378 ans. Si Ton voulait rechercher
les caufes de fa diffolution, il ne ferait pas difficile de
les trouver dans l’inégalité qu’il y avoit entre les fept
royaumes , dans le manque de princes du fang royal,
dans l’ambition des fouverains, & dans le concours
de certaines circonftances qui ne fe rencontrèrent qu’au
temps d’Eçbert en 828, ( Z>. ƒ. )
HEQUET ou HECQUET, (Philippe) (Hiß. Litt,
mod. ) médecin célèbre. Il faifoit toujours maigrç, &
ne buvoit que de l’eau: aufli r.-.-il célébré dans un
livre exprès les \Vertus de l’eau commun* C’eft le
do fleur Sangrado de Gilblas. Il étoit contraire aux médecines,
& on a de lui un Traité de Tabus des purgatifs.
On a de lui encore le Tombeau de la 'Médecine y un
ouvrage intitulé : de l’indécence aux Hommes d accoucher
Femmes , & de l'obligation aux Femmes de. nourrit
*urs enfïns ; la fécondé partie de ce titre eft reconnue
aujourd’hui, la première eft plus éloignée que jamais de
l’être, du moins dans la pratique. M. Hcquet cherchent
à unir en tout la dévotion avec la médecine ; en
conféqnence, il a fait la Médecine Théologique. On a
encore de lui le brigandage de la Médecine ; la Médecine
, la Chirurgie & la Pharmacie des Pauvres. Il difoit
qu’a/z médecin qui voyoït beaucoup de malades , voyait
peu de maladies. On dit que quand il étoit appellé chez
des malades riches, il faifoit la facétie de rendre vifite
aux çuifiniers & chefs d’office , comme aux bienfa’teurs
de la médecine & aux pères nourriciers de la faculté..
Il avoit été médecin de Port-Royal, & confèrvoit des
relations avec cette maifon. Cet homme n’étoit pas
fans bizarrerie, & on pouvoit lui reprocher d’être un
peu fyftématique, mais c’étoit un fçavant médecin &
un homme vertueux. Né à Abbeville en 1661. Môrt
en 1737.
HE’RACLION ou H e’r a cl ion as étoit fils du premier
empereur Héraclius & de Martine, fa fécondé
époufe. Cette femme ambitieufe ne put confentir à
vivre fous Tobéiflance du jeune Héraclius qui, par
le droit de fa naiffance-, excluoit Héraclion du trône.
Elle applanit cet obftacle , en emp®ifonnanr ce prince
infortuné. L’empire qu’elle envahit, fous le nom de
fon fils, fut gouverné par elle pendant deux ans. Le
fénat humilié ae recevoir lës ordres d’une femme , feu-
leva les efprits. Les Romains femblèrent reprendre leur
première fierté. Elle fut dégradée & condamnée avec
fon fils à vivre dans l’exil. Comme elle étoit naturellement
éloquente, le iénat lui fit couper la langue
pour prévenir les féditïons' qu elle auroit pu exciter par
fon éloquence. Héraclion eut ...le nez coupé. On crut
devoir le défigurer, afin que les grâces touchantes de
fa figure ne puffent plus intérefler à fon malheur. Le
fénat, après leur dégradation, proclama Confiant empereur
fans le concours 'de l’armée , qui applaudit à
cette nomination. On avoit peu vu d’empereurs élus
par ces magiftrats avant & depuis Tacite. (T-N.)
HÉRACLITE, ( Hifi. ancienne ) célèbre philo fophe
grec , natif d’Ephèfe , vivoit environ cinq fiècles avant
J. C. Il étoit en tout l’oppofé de Démocrite ; ^celui-ci
rioit de la nature humaine ; l’autre pleurait fur elle :
l’un étoit frappé de fes ridicules ; l’autre , affligé de fes
malheurs.
Qui des deux eut raifon ? je n’ofèrois le dire •
Mais je fçais que de l’homme on doit pleurer ô; rire.
Il refte quelques fragments d’Héraclite, qu’Kenri
Etienne imprima avec ceux de Démocrite, de Timon
8c de plufieurs autres, fous le titre de Poefis philo fa-
phica. 1
HERACLIUS , ( Hifloire Romaine. ) fils du gouverneur
d’Afrique, fut élevé dans fon camp où il fe
forma dans le métier de la guerre. L’empereur Phc carT
s’étant rendu odieux par fon avarice & lès débauches,
les armées proclamèrent Héraclius Tan 6 ro. Ce choix
fut -confirmé par les applaùdifftmens du peuple 8c du
fénat. Phocas détrôné fut condamné à la mort. Herar