
fànt s’écria : oui , comme le poijfon dans Peau j &
voilà quelles foat quelquefois Iés: critiques du parterre,
La raifon qui fit tomber Child 'ric, peut être imputée en
pa “te à l’auteur, en partie aux circonftances du tems.
On foi. qiraiors 1; théâtre était furçhargç de fpeélateurs
Uux premières reprcfentatiohs, & qu’il ne reftoit quun
elpaee très étroit & t.è^-incommod ? aux açfours pour
tous leurs mouvemens : un de ces fpeclateurs voyant
qu’un aéleur. tenant une lettre à la main , avoir peine
à percer la foule pour fe mettre en fcèn-e, cria {place
(tu. facteur ; les éclats de rire furent fi univerfels , qu’il
ne fut pas poflible aux a&mrs de fe fa're. entendre.
Il eft vrai que quand Roxane apporte à Atal.de , la
lettre d’Amurat, qui profcrit Bajazet ; quand, dans la
même pièce, Fatime apporte à Roxane, la lettre de
Bajazet, au’Atalide avoit cachée dans (on fein ; quand,
dans Z,dire , Méiédin apporte à Orofmane , une lettre
de Nereftan, adrefiee à Zaïre ,, la même pla.fantgrie
pourroit -ou du moins auroit pu autrefois avoir lieu,
quoique ces trois momens foient des momens bien
tragiques ; mais il faut convenir qu’en général, ces
Idées burlefques ne fe préfenteftt au fpedateur que
quand il n’eft point ému ou même que quand il eft
ennuyé, & que dans le cas particulier de Çhilderic,
Fobfcurité d’une intrigue eonfufe & embarraffée ,
d fpofoit îç fpeâateur à la critique 8c à la pla'farçterie ;
inais foqvenons-nous que le mot : la Reine boit, fit
> tomber Marianne , pièce intéreffante, quoiqu’on en
dife, & que le iqot Coujfy, Couffy, fit tomber Adélaïde
du Guefdin , pièce d’un grand intérêt, comme tout
le monde en convient aujourd’hui.
M. Morand avoit été marie ; il crut avoir à fe
plaindre de fa belle-mère , il la quitta ainfi que fa femme;
il les Iaifïa en province , &. vint faire des vers à Paris.
- Sa belle-mère lui fit des procès, & le déchira dans un
faScum. Pour fe venger, il la joua dans là comédie de
PEfprit du Divorcé, Le portrait de cette femme parut
outré , le poète s’avança fur le théâtre, & fe mit à
vouloir démontrer au public, par le récit de ce qu’il
avoit éprouvé , que le perfbnnage n’ctoit que trop
réel. Après là repréfentation delà pièce, qui ne tomba
point en totalité, on en annonça une fécondé représentation,
quelqu’un cria dans le parterre : avec le
compliment de P auteur. M. Morand , dont la harangue
n’avoit pas rçufij, jette fon chapeau dans le parterre,
en difant : celui qui veut voir l’auteur, ria qidà lui
apporter fan chapeau. On le mena chejt le lieutenant
de police , qui lui fit une petite correéfion paternelle ;
mais cette faillie ? moitié de poète , moitié de gentilhomme
, remplit fon objet en lui donnant de là 'Gelé- .
britë , & en le montrant fou & brave comme M. de
l ’Empirëe dans la Métromanie * aufti fut - il fi content
de fa petite aventure, qu’il fe hâta d’en faire lui-même
la relation dans une lettre imprimée , pour achever
d’en inftruire la portibn du public qui n’en avoit pas
été témoin. On a remarque qu’il n’avoit é;é heureux
ni en littérature , ni en mariage , ni au jeu , ni en
bonnes fortunes, & qu’il mourut au moment où fes
affaires étant arnrgées & fes dettes payées,.il alloit
commencer à jouir d’une fortune honnête & fans embarras.
Ce fut le 3 août 1757.
Dans le même temps vivoit un autre homme ou
même nom , plus illuftre & plus utile , Sauveur-
François Morand, de l’Académie des Sciences, de là
Société Royale de Londres, chevalier de l’ordre de St.
Michel, un de nos plus grands c.ij.u’vens & père
d’un Médecin qui foutient dignement la gloire de fon
nom. L’hiftoire'dë Sauveur-François appartiens àcetle
de l’art falutaire qui lui a dû des progrès importai«.
En 1729, il alla en Angleterre pou: connoitre à
fond par lui-même la pratique du célèbre Çhefelden
dans l’opération de la taille, & en procurer les avantages
à fes concitoyens. L ’article du charbon de terre
dans les arts, de l’Académie, eft de M. Morand, IL
on a de lui plufieurs pièces fugitives d’un grand prix ,
fur la médecine £c la chirurgie , entr’autres , la
relation de la maladie de î,a ferrmie Supiot, dont les
os s’étoient amollis , 8c divers mémoires dans le
reçueil de l’Académie des Sciences , 8c dans celui de
l’Académie de Chirurgie 11 mourut en 1773.
MORATA ou M O R £T A , (Olympia Fulvia)
( Hiß. Litt. mod. ) née à Ferrare en 1526, morte à
vingt-neuf ans en 15 5 5 , avoit enfeigné publiquement
en Allemagne, les lettres grecques & latines ; elle
avoit embraffé le luthéranifme, 8c avoit époufé un
profejTeur de médecine à Heidelberg. On a d’elle
des vers grecs 8c latins , imprjmés à B|le en 1562;
avec les oeqvres de Coeliiis Çurion.
MORAVES ou FRERES UNIS, Moraves, Moro»
vites ou Frères uriïs, feéfe particuhèrè & refte des
Huftites, répandus en bon nombre fur les frontières d<*
Pologne, de Bohême & de Moravie , dfoù, félon
toute apparénee , ils ont pris le nom de Moraves : on
les appelle encore Hernheutes, du nom de leur principale
réftdençe en Lufaçe , contrée d’Allemagne.
Ils fubfiftènt de nos jours en plufieurs maifons ou
communautés , qui iront d?autres liaifons entr’elles ,
que la conformité dé vie & d’inftitut. Ces maifons
font proprement des agrégations de féculiers , gens
mariés & autres, mais qui ne font tous retenus que
par le lien d’une fociété douce & toujours libre
aggrégadon où tous les. fujets en fociété de biens &
de; taléns ,, exercent chffërens arts & proférions a«
profit général de la communauté ; de façon néanmoins
que chacun y trouve aufîi quelque intérêt qui
lui eft propre. Leurs enfans font élevés en commun
aux dépens de ta mpilon , & on les y occupe de
bonne heure , d’une man ère édifiante & fruélueufe ;
enforte que les parens. n’en font point embarraffé^.
Les Moraves font profefBon du çhriftianifme , ils
ont même beaucoup de conformité avec les premiers
chrétiens, dont ils nous retracent le défintéreffement
& les moeurs. Cependant, ils n’admettent guères que
les principes de la théologie naturelle,, un .grand ref-
péÀ pour la Divini:é , une exacte juftice- jointe à
beaucoup d’humanité pour tous les hommes ; &L
plus outrés à quelques égards que les,, protcftaüs mêmes
, ils ont élagué dans la religion topt çe qui ley|
a pâfii fentir l’înftitution humaine. Du refte , Us
font plus que perfonne dans le principe de la tolérance
; les gens fages & modérés, de quelque communion
quils foient, font bien reçus parmi eux, &
chacun trouve dans'leur foc'cté toute la fa c i lité p’ o f -
fible pour les pratiques extérieures de fa religion. Un
des principaux artcles d e le u r morale , c’cll qu’ils
regardent la- mort comme un bien , & qu’ils tâchent
dinculquer cette doélrine à leurs enfans, a u ft i
ne les voit - 011 point s’attriftër à la moi t de leurs
proches, Le comte de Zinzendorf patriarche ou chef
des freres unis , étant décédé au mois de Mai 1760 ,
fut inhumé à Emeut en Luface , avec afl’ez de p om p e -’
mais fans aucun appareil lugubre; au contraire avec
des chants mélodieux & une religieufe allégrefle. Le
Zin/zeiîdorf é;Git u" feigneur allemand des
P’us diftingués , & qui ne trouvant dans le monde
rien de plus grand ni de plus digne de fon eftime,
que linftitut des Moraves , s’étoit fait membre &
protédeur zélé de cette fociété ; avant lui opprimée
& prefque eteinte, mais fociété qu’il a foutenue de
fa fortune & de fon crédit, & qui en confëquence
rèparoit aujourd’hui avec un nouvel éclat.
Jamais l’égalité ne fut plus entière que chez les
Moraves ; fi les biens y font communs entie les frères,
1 eftime & les égards ne le font pas moins , je
veux dire que tel qui remplit une proMion plus
«hitinguee , fuivant l’opinion , n’y eft pas réellement
plus cônfidéré qu’un autre qui exerce un métier vul-
gaire. Leur vie douce & innocente leur attire des
profélites, fit les fait généralement eftimer de tous
les gens qui jugent desv chofes fans préoccupation.
vJn fait que plufieurs familles Moravites ayant paflé
les mers pour habiter un canton de la Géorgie américaine
fous la protedion des Anglois, les fauvages
en guerre contre ceux-ci , ont parfaitement dift n-
gue ces nouveaux habitans fages & pacifiques. Ces
prétendus barbares , malgré leur extrême fupériorité,
n ont voulu faire aucun butin for les frères unis, dont
ns refpedent le caradère pafible & dèfiutérefle. Les
Moraves ont une maifon à Utrecht ; ils en ont aufti
en Angleterre & en Siufle.
Nous fortunes fi peu attentifs aux avantages des
communautés , fi domi 'és d’ailleurs par l’intérêt particulier
, fi peu difpofés à nous fècourir les uns les
autres, & à vivre en bonne intelligence, qüe nous regardons
comme chimérique tout ce qu’on nous dit
dune lociéé allez raifonnable pour mettre fes biens
& fes travaux en commun. Cependant l’hiftoire ancienne
& moderne mus fournit plufieurs faits fem-
hlables. Les Lacédémoniens -, fi cé’èbres parmi les
Grecs , formèrent au fens propre une ré ublique ,
puifqu« ce qu’on appelle propriété y étoit prefque
entièrement inconnu. On en p ut d re autant des
Efleni ns chez les Juifs, des Gymnofophiftes dans
les Indes ; enfin * de grandes peuplades au Paraguay
téal.fent de nos jours tout ce qu’il y a de plus donnant
& de plus louable dans la c ndure des Moraves.
Nous avons même armi nous quelque chofe d’ap-
prochant dans i’établiflement des frères cordonniers I
8c tailleurs, qui fe mirent en communauté vers le
milieu du dix-lèptième fiècle. Leur inftitut confifte à
vivre dans la continence, dans le travail & dans la
piété , ' le tout fans faire aucune forte de voeux.
Mais nous avons, for-tout en Auvergne, d’anciennes
familles de laboureurs , qui vivent de tems immémorial
dans une parfaite fociété, & qu’on peut regarder
à bon droit, comme les Moraves de la France ;
on nous annonce encore une fociété femblable à
quelques lieues d’Orléans , laquelle commence à s’établir
depuis vingt à trente ans. A l’égard des communautés
d’Auvergne , beaucoup plus anciennes &
plus connues, on nomme en tête les Quitard Pinoux
comme ceux du temps le plus éloigné 8c qui prouvent
cinq cents ans d’aflociation ; on nomme encore les
Arnaud, les Pradel, les Bonnemoy, lesLournel ÜC
les Anglade , anciens & fages roturiers , dont l’origine
fe perd dans i’obfcurite des temps , 8c dont les
biens 8c les habitations font fitués dans la baronnie
de Thiers en Auvergne , où ils s’occupent uniquement
à cultiver leurs propres domaines.
Chacune de ces fam lies forme différentes branches
qui habitent une maifon commune, 8c dont les
enfans fe marient enfemble, de façon pourtànt que
chacun des conforts n’établit guère qu’un fils dans
la communauté pour entretenir la branche que ce'
fils doit repréfenter un jour après la mort de fon
père; branches au refte dont ils ont fixé le nombre
par une loi de famille qu’ils fe font impofée , en con-
féquence de laquelle ils marient ‘au-dehors les enfans
furni >4, irai res des deux fexes. De quelque valeur
que foit là portion du père dans les biens communs
, ces enfans s’en croient exclus de droit, moyennant
une fomrae fixée différemment dans chacue'
communauté, & qui eft chez les Pinoux de 500 livv
pour les garçons , & de 200 iiv. peur les filles.
Au refte , cet ufage tout confacré qu’il eft par fon
ancienneté & par l’exacl tude avec laquelle il s’ob-
ferve , ne paroît guère digne de ces repeélàbles afo
foc;és.vPourquoi priver des enfans de leur patrimoine,
& les chafler ma’gi é eux, du fein de 1 ur famille ï
n’ont-ils pas un droit naturel aux biens de la maifon,
8c fur-tout à l’.neftiniable avantage d’y vivre dans
une fociété douce & pa fible, à l’abri des misères & des
follicitudes qui empoifbnnent les jours des autres
hommes ? D’ailleurs l’affociation dont il s’agit étant
eflentieîlement utile , ne convient-il pas pour l’honneur
& pour le bien de fhumanrté , de lui donner le plus
d’étendue qu’il eft pofiable ? Suppofiz donc que les
terres aéluelles de, la communauté ne fuffifent pas
pour occuper tous fes enfans , il fèroit aifé : avec le
prix de leur légitime , de faire de nouvelles accui-
fitioris ; & fi Ja providence accroît le nombre des
fùjets , il n’eft pas difficile à d.s gens’ unis & laborieux
d’accroître un domaine & des bâtimens.
Quoi qu’il en foit , le gouvernement intérieur eft
à-pcu-près le même dans toutes ces communautés,
chacune fe cho fit un chef qu’on app lie maître ; il
tft chargé de l’mfpeéÜon générale ÔL du détail des
affaires ; il vend ? û acheté , 8 c la confiance qu’on a