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plus long-temps dans 1 eglife, je le crois bien, & on
peut affurer qu’elle durera jufqua la confommation des
fiècles, parce que, comme c’eft une affaire de fentiment
plus que de raifonnement & d’opinionelle renaît
toutes les fois qu’on croit voir le bien & le mal regner
toùr-à-tour dans le monde avec un empire égal & ref
peftivement indépendant. Le manicheifme- s’eft mêlé
dans les divers temps & dans les divers, lieux à beau-f
coup d’autres erreurs ; de là viennent tous les différens
noms de feéles dont le manicheifme efl la bafe &
qui ne fe diftinguent que par les noms de leurs différens
chefs & par les erreurs particulières qu’ils ont ajoutées
à l’erreur principale. Dans la fuite, les Albigeois
ou Pétro-brufiens, ou Henriciens, ouTouloufains, ou
Bu1 gares, ou.Çathares, ou Poplicains, ou Pathariens,
car ils ont eu tous ces noms, forent de vrais Manichéens
,. avec quelques modifications, additions, ref-
tri étions, &c. B eau foire, ( voyeç fon article , ) a écrit
l’hiftoire critique du Manicheifme; Saint-Auguftin avoit
été Manichéen, & combattit leur feéte..
On fait que le pieux roi Robert ayant découvert
avec bien de la peine quelques Manichéens en France,
ne crut pouvoir rien faire de plus agréable à Dieu que
de les livrer aux flammes ; ce qui multip’ia tellement
les Manichéens qu’on les trouvoit fans les chercher ,
même à la cour, & qu’il fallut brûler jufqu’ati confef-
feur dè la reine.
Beaufbbre a aifément juftifié les Manichéens de certaines
imputations qui leur ont été faites par leurs ennemis;
prefque toutes les imputations de parti font calom-
nieufes..
Quant à Mânes, il avoit puifé fes- erreurs dans les
écrits d’hérétiques plus anciens qui les avoient eux-
mêmes tirées d’ailleurs. M â n e s étoit né en Perfe, il
étoit né dans l’efclavage. Une femme dont il étoit Tefo
«lave , le fit inftruire par les mages.. Son efprit & fa
figure lui procurèrent des fuccès; les femmes étant
pour lu i, fes dogmes fe répandirent piomptement. Il
fe qualitioit d’abord l’apôtre de J. C. par excellence ;
Bientôt il fut le Saint-Efprit que J. C.-avoit promis
d’envoyer. Il ne manqua pas de faire des miracles :
C ’eft un poids bien péfant qu’un nom trop tôt fameux,
Mânes ne. foutint point cet honneur dangereux.
Sa réputation parvint jufqua la cour, il faifbit des
miracles ; on lui en demanda, il en promit. L’occafion
s’en préfentoit : un fils durci de Perfe étoit dange-
reufement malade , Mânes commença par châtier tous
les médecins & aflura qu’il n’avoit befbin que de fes
prières pour guérir le prince ; le prince mourut comme
fi les médecins étoient reftés.. Les rois font fou vent
trompés, & ils s’en doutent bien; mais quand par
hazard ils viennent à s’en appercevoir, malheur au trompeur
mal-adroit ou malheureux. Icilachofe étoit claire,
Je roi de Perfe crut que Manès en renvoyant les médecins,^
voit privé fon fils defecours qui auroient pu lui
être falutaires ; il fit arrêter Manès, en attendant qu’il
difpofat de, fon fort. Manès trouva le moyen de fe fau-
fa prifon 9,£tut été- fon miracle. le plus, utile i
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mais ayant été repris peu de temps après par les
gardes du jo i de Perfe, il fot écorché v if, châtiment
trop cruel, prefque mérité cependant, fi Manès n’étoit
de tout point qu’un impofteur ; mais dans cés temps
d’ignorance & d’abfordité, les charlatans même étoient
les premières, dupes de leur art ;les hommes fe croyoient
infpirés, apôtres, prophètes, taumaturges , forciers ;
ils s’avouoient tels, quoique cet aveu dût les faire brûler
vifs, & qn’il le sufTent bien. Il eft difficile d’affigner des
bornes à l’extravagance & à la fottife humaine.
MANETHON, ( Hijl. Lut. anc.) vivoitfous Pto-
lomée Philadelphie, plus de trois fiècles avant ) . C.
C ’étoit un prêtre d’Egypte natif d’Héliopolis ; il avoit
compofé en grec, une hiftoire d’Egypte d’après les
écrits de Mercure Si d’anciens mémoires confervés dans
les archives des temples confiés à fa garde. Cet ouvrage
eft fouvent cité par Jofephe & par d’autres auteurs
anciens; mais nous n’avons ni l’original de Manéthon,.
ni l’abrégé que Jules Africain en avoit fait.Tl ne nous
refte que des fragmens, des extraits de Jules Africain
dans le fyntelle , & ces fragmens font très-précieux.
Gronovius a publié à la fin du dernier ftècle un
poème de Manéthon en grec avec la verfion latine,
fur le pouvoir des aftres qui préfident à la naifiance
des hommes : l’abbé Salvini a traduit ce poème en Vers
Italiens.
MANFREDI (Euftache, Euftaehio, ) ( Hï[î. Litt'.
mod. ) fils d’Alphonfe Manfredi notaire à Bologne en
Italie , doit être regardé comme 1% . fondateur de l’inf
titut de Bologne. Cette académie d’hommes, dit M.
de Fontenelle, eft née d’une académie d’enfans dont
le jeune Manfredi étoit le chef, &L qui s’afTembloit pour
ajouter aux leçons du collège , par la réflexion. & la
communication des lumières. M. Manfredi fot doéleur
en droit à 18 ans ;. mais il ne fe partagea véritablement
qu’entre la poëfie & les mathématiques. Il fit des fon-
nets, des canzoni, il eut beaucoup de fuccès en poëfie,
il réforma même à quelques égards le goût de fa nation
dans ce genre, & la rapprocha de la n a tu re il étoit
à ce titre de l’académie de la Crufca<
La fameufe Méridienne de Bologne reftoit négligée
dans Péglife de St. Pétrone, il manquoit des aftronomes
a ce bel infiniment. MT Manfredi^ trois frères, deux
foeurs, & un ami particulier qu’il avoit, fe firent tous
aftronomes, ou du moins obfervateurs, & ce ne forent
pas les deux foeurs- qui fécondèrent avec le moins de
zèle & d’intelligence les travaux de M. Manfredi. Jamais,
dit M. de Fontenelle, une famille entière & auffi nom»
breufe ne s’étoit unie pour un femblable deflein.
On fait quels font lès embarras, quelles font le*
conteftations que les rivières caufent dans toute la Lombardie
& dans quelques.autres contrées dé l’Italie; il
faut que les habitants défendent fans cefle leur terrein
contre quelque rivière qui menace de les inonder ;
chaque état veut rejetter ce fléau fur l’état voifin, au
lieu qu’on devroit s’accorder enfemble pour trouver
quelque expédient général , qui garantît également
tous ces états. La ville de Bologne donna en 1704,
à M, ManfredihrnpoïuntQ charge de-fur-intendant 4i§
■ eaux, l’aftronomiê en fouffrit, mais l’hidroftatique en
profita. Dans l’exercice de ce nouvel emploi, il s’ex-
pofa *plufieurs fois aux plus grands dangers, parce qu’il
vouloif tout voir & tout faire par lui-même. Ce qu’il
.a écrit fur les eaux a été imprimé en 1723 , à Florence ,
dans un recueil de pièces fur cette matière.
M. Manfredi eut en 1711 une place d’aftronome
dans ce même inftitut de Bologne qui lui devoit ion
.exiftence.
Quelques années après, il publia plufieurs volumes
d’Ephémérides, ouvrage plein de calculs laborieux &
difficiles dans lefquelsil fut enepre très-utilement "aidé
ipar fes foeurs.
En 1724 , il publiâ tes obfervations qu il avoit faites
le 9 novembre 1723 , for une conjonction de Mercure
.-avec le Soleil., à Pobfervatoire naiffant & à peine encore
achevé de Pir.ftitut de Bologne.
En 1726, il fot t£çu à Pacademie des fciençes de
Paris, en qualité d’affocié étranger.
En 1729, il fot reçu dans la fcclété royale de Londres.
Cette même année & la foivante, il publia fes
«bfer varions fur les aberrations des étoiles fixes.
En 173 5, il fit imprimer à Rome le réfoltat des travaux
aftronomiques Si. géographiques de M. Bianchini
qui avoit laifle fes papiers dans un tel défordie qu’on
défefperoit abfolument d’en rien tirer. Les foeurs de
.M. Manfredi l’aidèrent encore dans ce travail.
Il mourut le 15 février 1739. Il étoit né le 20 fep<-
tembre 1674. Il n’étoit, dit M. de Fontenelle, ni fayi-
•vage comme mathématicien, ni fantafque comme poète.
Un de fes amis particuliers fut le cardinal Lambertini,
archevêque de Bologne, depuis Benoit XIV. il n’eut
pas le plaifir de le voir pape.
Un autre Manfredi { Lelio, ) traduifit en Italien
dans le feizième fiècle , ( 15 38 , ) lê roman Efpagnol
de Tyran le Blanc , qui avoit paru à Barcelone a la
fin du quinzième fiècle , ( 14 9 7 ,) & qui a été traduit
en François dans celui-ci par M* le comte de Caylus,
MANGEAR.T, (Dom Thomas,) ( Hijl. Litt.
mod. ) Payant bénédictin de la congrégation de Saint-
Vanne Si de Saint-Hidulphe, antiquaire, bibliothécaire
:& confeiller du duc Charles’de Lorraine , auteur d’un
grand ouvrage, oublié en 1763 après fa mon, par M.
l ’abbé,- Jacquin, fous ce titre : Introduction à la fcience
des Médailles, pour fetvir a la connoiffànct des dieux ,
■ de la Religion , des Sciences , des Arts & de tout ce qui
appartient à l’kif.alre anciennne , avec les preuves tirées
des Médailles. On regarde cet ouvrage comme pouvant
fervir de fopplément à Fantiquité expliquée de
Dom Montfauçon. Dom Mangeart mourut dans cette
même année 1763 où fon livre fot publié après fa mort.
Il eft encore auteur de quelques .autres ouvrages moins
importans.
MANGET (Jean-Jacques,) {Hijl. Litt. mod.)
lavant Genevois, premier médecin de l’eleéleur de Brandebourg
, auteur de Bïbliotheca Anatomica ; BibViothcca
Pharmaccictico-Mcdica ; Bibliotheca Ckymica ; Bïblio-
theca Chïrurgica ; & autres femblables ouvrages dans
jlgfquels fl fot aidé par D,aniel le Clerc, auteur d’une
hiftoire de la médecine. Né en 1652/ Mort à Genève
fa patrie, en 1742 , ayant prolongé fa vie , foit par
fon art, foit par un heureux tempérament, jufqua près
de 91 ans.
MANGEUR de feu ( Hijl. mod. ) Nous avons une
grande quantité de charlatans qui ont excité l’attention
& l’étonnement du public en mangeant du feu, en
marchant dans le feu , en fe lavant les mains avec du
plomb fondu, &c.
Le plus célèbre eft un anglois nommé Richardfon
dont la réputation s’eft étendue au loin. Son feerçt,
qui eft rapporté dans le Journal des Savons de tannée
1680 , çonfiftoit en un peu d’efprit de foufre pur dent
il fe frottoit Jes mains & les parties qui étoient deftinées à
toucher le feu ; cet efprit de foufre brûlant l’épiderme,
endurcifloit la peau ,&■ la rendoit capable de réfifter
à l’aéflon du feu. _
A la vérité ce fecret n’eft pas nouveau. Ambroife
Paré nous aflùre qifil a éprouvé par lui-même qu’après
s’être lavé les mains dans fa propre urine ou avec de
l’onguent d’or » on peut en fureté les laver avec du
plomb fondu.
Il ajoute qu’en fe lavant les mains avec le jus d’oignon
, on peut porter defïus une pelle rouge , tandis
. qu’elle fait diftilier du lard. {A. R.)
MANGOT , {Hijl. de Fr. ) c’eft le nom de deux ,
frères, fils d’un avocat de Louduu en Poitou, tous deux
magiftrâîs diftii ignés.
Le premier ^ i z c Q i i e & Mangot^ avocat général au par.-.
; lement de Paris dans des temps de factions & de troubles,
fut inacceffible à i’efprit de parti & occupé uni?
quemént de fes devoirs.; il mourut en 1586 à trente- tix
ans avec la réputation d’un homme intègre, d’un orateur
éloquent, d’unmag’ftrat (ayant,il ne fut qu’eftir
mable. Il eft à peine connu aujourd’hui.
Le fécond, Claude Mangot, eft beaucoup plus connu,’
parce ' que la -courte & rapide faveur du maréchal
d’Ancre, l’éleva rapidement d’honneurs en honneurs
jufqu a la dignité de garde des feeaux. Il y fot nommé
en 1616. L’année foivante, fon proteéleur, le maréchal
d’Ancre, fot affafïiné. Au premier bruit de cet
évènement, Mangot tout effrayé, courut fe cacher dans
les écuries de la reine. S’étant .enfuite remis peu-à-peu
de fa terreur, fl réfolut de tout hazarder , il fe préfenta
au (ouvre , & marcha droit vers l’appartement de la
■ reine. Mais la reine avoit elle-même perdu fon crédit
par le .coup qui avoit détruit le maréchal d’Ancre ;
elle allôit elle-même partir pour l’exil, (ans avoir pu
parler en .mère à un fils , dont la réponfe étoit dictée &
même le felence. Le capitaine des gardes du corps, Vitri,
qui venoit de tuer le maréchal, rencontrant Mangot,
lui dit d’un ton de raillerie & d’infulte : où allesgvous ,
Monfieur, avec votre robe de fatin? L e roi f i a plus befoin
de vous. Vitri, qui avoit la confiance de Luynes, dont
le règne commençoit, fe fentoit aurorifé fans doute à
parler ainfi ; en effet Mangot fot obligé de remettre le*
feeaux. Il mourut dans î’obfeurité cii il avoit Iongr
temps yéçu. Avoit-fl mérité d*en fortir ? a voit-il mérhï
M ni m %