
dégagea les fujets du ferment de fidélité, & la Sorbonne
ne fut point abolie ; un fpadaffin traîna le parlement
u la Baftille. Tous ces attentats demeurèrent impunis ÿ
*l_n y av01t de fupplice alors que pour l’innocence.
Henri I I I fentit enfin la' nécefiité de s’unir au roi de
Navarre ; tous deux s’avancèrent vers la Capitale, dont
le duc de Mayenne s’étoit fait le gouverneur ; le blocus
etoit forme , lorfque Henri 111 fut affaflïné à Saint-
Cloud le premier d’août 1585 , par Jacques Clément,
jacobin fanatique, qu’on eft forcé de ' plaindre, en le
deteftant, & qui croyoit fèrvir Dieu en égorgeant
un roi : on accula la maifon de Lorraine d’avoir armé
ce miférable dans ces temps affreux , où les loix
etoient fans vigueur ; * cette famille penfa fans doute fe*
rendre juftice en vengeant des meurtres par un affaflï-
3wt* Si Henri I I I étoit mort au fiège de la Rochelle,
on l’aurait placé parmi les hommes iliuffres ; il falloir
du génie pour vaincre deux fois Coligny : mais les
dernières années de fa rie ont fait oublier les premières.
On ne fe fouvient que de fes débauches, defesfoi-
bleffes & de fes cruautés. ( M. de Sact )
Henri IV , (Hift. de France.) roi de Navarre,
■ aquit à Pau le 13 décembre 1553 ; quoiqu’il ne fût
parent de Henri IH que du dix à l’onzième degré, fès
droits à la . couronne ne lui forent point conteftés
puifcm’il defcendoit de Robert, comte de Clermont’
fils de famt Louis, qui époufà l’héritière de Bourbon:
ion enfonce fut'expoféeà tous les périls, fon éducation
toute guerrière le femiliarifa-avec les fatigues &
le mépris de la mort qu’il eut à effuyer pour joutenir
fes droits,. & pour foire le bonheur de la France
fcleve dans le camp de Condé & de Coligny ce
fot fous de tels maîtres qu’il fe forma dans 1 art de la
guerre; il fot profiter des leçons & des exemples de
ces deux grands hommes, dont il fit revivre le cou-
rage ‘g j es ™rtoe. L’hiftoire de fa vie depuis fa naiffance
jufcjua fon avènement au trône .ferait fans doute plus
mterdTante que tout c ’ qu’il fit lorlqu’il fot paifibte
poiieüeur d un royaume conquis par fes armes : on
aime a fuivre les hommes extraordinaires dans leur
marche, à développer leurs moyens, à les étudier
dans leur vie privée-; mais le plan de cet ouvragé
nous prefcrit de le repréfenter ici comme roi. - “
Henri, avecletrcre de roi de Navarre , oh il n’avpif
preique aucunes poffeffions, fe vit à la tête d’un parti,
qui partageoit la France foûs prétexte de venger lare-
% o n ; il fot attisé à Paris par les promeffes de Charles
iA. non manage- avec la princeffe Marguerite fceùr
du monarque, attira dans la capitale tous, les fei-
S"6? ? Pm i i la cérémonie s’en fit fur un écha-
faud drefle devant la porte dé l’églife de Notre-Dame,
rlufieurs purs fe pafferent en feffitis, en tournois &
en baUets, Mais au milieu de'ces fêtes on médîtoit
le maflacre de tous lès huguenots. Avant de donner
fe lignai du carnage , le roi fit appeller le roi de Navarre
& le prince dë Condé dans fon cabinet & leur
dit ,mon, mejfe ou baftille ;,dette menace eut fon effet
rts firent abjuration, & ce fot à,ce nrix qu’ils achetèrent
leur vie à la journée de la fâint-Barthelemi
fes deux princes, fe couvrirent d’un mafque hypocrite
jiilqu aü temsde leur évafion. Le roi de Navarre, las
dé vivre dans une.efpète de captivité à Senlis, forma
une partie de chaffe qui facilita fon évafion ; il
le retira a Alençon oh. il fit abjuration de la religion
catholique. Deux cents gentilshommes fe rangèrent
autour de lui & l'accpmpagnèrent en. Guyenne dont
il etoit gouverneur. La nobTeffe vint en foule fe ranger
fous fes enfèignes, & la plupart des villes lui
ouvrirent leurs portes.. Son parti dominoit alors dans
la France : Condé & le duc d’Alençon à la tête de
mente mille hommes pouvoient y donner la loi -
lorfaue la paix fut conclue à Moulins en 1 576.
Cette paix fimulée n’avoit d'autre but que de dé-
faraier les huguenots pour mieux les accabler; leur
défiance fit leur fureté. Henri ne fé laiffa point féduire
par 1 éclat des promeffes de l’artificieufè- Médias:
mais la puiffance de fon parti replongea la France dans
de n°uvelles calamités. La politique fo couvrant dii;
voile de la religion donne naiffance à la confédération,
des grands & des villes.; ce: fût l’origine de lafainte
union, ou de la ligue , dont le but étoit d’exterminer
les proteftants , & d’exclure le roi de Navarre du
trône : cette tigefoible en fa naiffance pouffa tant de-
rameaux , que fon ombre obfeurcit l’autorité royale,
v e fut pour prévenir de plus grands ravages que les
huguenots demandèrent laffemblée des états de Blois;
mais au lieu d’y trouver un remède à leurs maux ’
ils reconnurent trop tard qu’ils s’étoient rendus les
complices de leur ruine : le duc de Guile qui dirigeoit
.reffo«s de la ligue, régla aufli toutes
deliberations des états : les huguenots oppoferent Une
contre-ligue, dont le roi de Navarre fut déclaré le.
chef, le prince de Condé fut fon lieutenant : ce fut
alors qu’il publia un manifefte fier & menaçant dont
le nyle militaire décëloit la franchife de fon caraéfère
& l’intrépidité de fon courage ; il leva, une arméè -
pour donner plus de poids à fes menaces. La
rncfmtelligence qu i divifbit les fèigneurs de fon parti,
. oppofant un obftaçle à fes deffeins, la paix parut"
neceffaire. Le cinciuième édit de pacification conclu à.
Bergerac & drefle a Poitiers ,fot vérifié au parlement,
en 1577 ; mais les deux partis riattendoient que dès.
circonffances favorables pour en violer impunément
les conditions. La reine-mère, fous prétexte de mener
au roi de Navarre fa. femme, qui lui étoit fort
indifférente & dont il ri étoit point aimé, fe rendit
en Guyennè pour conférer avec lui ; mais il ne fe
laiffa point fiirprendre par fes artifices ; elle ne fot
point rebutée par ce mauvais fuccès : elle indiqua,
une autre conférence à Nérac,. où elle fe rendit accompagnée
de toutes les beautés de la cour , Bien per-
fuadee que c’étoit un écueil où le roi de Navarre ferait
naufrage ^quoique fenfible aux charmes de l’amour, il'
ne voulut, rien conclure fans avoir conïùlté, tout fon-
parti, dont les députés s’affemblërent à Montauban.
Sa paffion fot: toujours, fobordonnéa aux intérêts de fa
gloire..
Les proteftants. étoiènt diyifés eh deux fiéfions; le
peuple ardent pour la., défcnfe dé fon culte', riavok
dé confiance que dans le prince de Condé,, véritable^
lient homme de bien , & le feul des grands qui fut
perfuadé de fa religion; fes moeurs rigides, fon ca-
raéfëre grave & férieux étoient propres à en impofer
à une feéfe Raiffante qui confond les auftérités avec
les vertus. L ’autre fa â io n , qu’on nommoit les politiques,
étoit compofée de tous les feigneurs qui fe
fervoient du prétexte de la religion pour élever leur
fortune. Le roi de Navarre qui regardoit d’un oeil
indifférent toutes les queftions agitées, aimoit les proteftants
qui pouvoient le fervir, fans haïr les catholiques
dont il prévoyoit qu’il auroit un jour befoin.
Au milieu de l’agitation des intrigues, il fe livroit
aux plaifirs de l’ amour, & captivé par les charmes
de la belle Foffeufè, il entreprit une nouvelle guerre
que l’on nomma la guerre des amoureux , parce qu’elle
fut excitée par les intrigues des beautés qui compo-
fbient fa cour ; ce qui ' donna naiffance à de nouveaux
troubles. Henri fut mal fécondé, parce que
plufieurs provinces, qui eroyoient cette guerre in-
jufte, renièrent dans la neutralité ; il n’eut d’autre
reffource que de faire entrer en France une armée
de Reines dont le nom infpiroit de la crainte & de
l’horreur à tous les François le fouvenir de leurs
brigandages infpira des defirs pacifiques. L ’édit accordé
aux huguenots fut religieufement obfervé pendant
cinq ans.
Le roi de Navarre offrit au roi cinq cens mille écus
pour faire la guerre,à l’Efpagne & une armée de
Reitres & de Suiffes. Cette propofitîon - qui faîfoit
connoître fa puiffance , frit rejettée. Le fcandale excité
par la reine Marguerite, les traitements ignominieux
qu’elle .reçut .a la cour du roi fon frère, donnèrent
naiffance à de nouvelles tracafferies : le roi
fon époux fut obligé de la reprendre chargée d’opprobres
, pour prévenir une nouvelle rupture. La
mort du duc d’Anjou le fit affeoir fur les dégrés du
trône ; alors le parti de la ligue fe réveilla pour Fefi
précipiter. Un fanatifme épidémique faifit tous les
efprits, chaque province - eut des chefs qui convoquèrent
des affemblées & levèrent des fbldats : l’Ef-
pagne ouvrit'fes tréfors, & le pape prodigua fès bé-
nediéfions à ces dévots, infènfes*; leurs émiffaires, de
ces deux cours, réglèrent le deftin de la France ; le
duc de Nevers, le cardinal de Pellevé, le jéfuite
Mathieu frirent les principaux agents dont l’ambi-
tieufo politique des Guifes fè fervit pour l’ exécution
de leurs deffeins. Henri II I , flottant, eut recours
a négociation quand il étoit encore affez puiflant
pour punir ; ce fut en temporifant qu’il favorifa les
accroiffements de la ligue. Le roi de Navarre, après
avoir publié des manifeftes pour établir la juftice de
fa caufè , offrit au duc de Guife de terminer cette
querelle par un combat particulier ; ce défi ne fut
point accepté ; le duc protefta qu’il n’avoit ri211 à
démêler avec le roi de Navarre dont il refpe&oit la
naiffance & le mérite. Les ligueurs trop puifïants pour
ne pas tout fe promettre 'd’un gouvernement foible
. voluptueux,. obtinrent des villes de fureté, & l’on
vit s élever dans la France une nouvelle puiffance*
rivale de l ’autorité'royale., Les huguenots1 mécontentsafîocîèrefât
h leur reflentiment les feigneurs qui ne
vouloient point ployer fous la tyrannie des Guifes. Il
fe forma un tiers-parti, dont les Montmorencis forent
les chefs ; ils fe joignirent au roi de Navarre dont la
puiffance s’affermit dans plufieurs provinces , tandis
qu’elle s’affoihliffoit dans d’autres ; fes ennemis s’au-
torifoient du nom du roi qui fe protégeoit en fecret,
mais qui étoit trop foiblè pour ofer manifefter fcn
penchant.
Sixte-Quint occupoit alors le fiège de Rome : ce
pçptife altier & fopetbe , affeéloit de fouler fous fes
pieds les diadèmes ; & fe croyant le difpenfateur des
feeptres & des couronnes , il lança les foudres de
l’églife for le roi de Navarre & le prince de Condé,
qu’il déclara hérétiques , relaps, fauteurs & protecteurs
de l’héréfie, & comme tels, privés de toutes
feigneuries, terres & dignités , incapables de fucçé-
der à aucune principauté, nommément à la couronne
de France, délioit leurs fujets du ferment de fidélité
& leur défendoit de leur rendre aucune obéiffance ,
fous peine d’être enveloppés dans la même excommunication
; cette bulle les qualifioit de génération bâtarde
& abominable de la maifon de Bourbon. Ce
flyle , qui riavoit rien d’apoflolique , révolta tous les
gens fenfés , qui rien trouvèrent le modèle ni dans
les canons ni dans les conciles. Les deux princes
firent afficher un placard dans les places publiques
de Rome , où ils foutenoient que le pape en avoit
menti; ils.le. qualifièrent d’ante-chrifl, le citèrent au
parlement pour le temporel, & au futur concile pour
le crime d’héréfie. Sixte qui , malgré fon orgueil,,
aimoit, tout ce qui avoit l’empreinte du grand, en
conçut plus d’effime pour les princes. Elifabeth reine
d’Angleterre , leur prêta quarante mille écus & dix
vàiffeaux , dont ils fe ferment pour délivrer la Rochelle
& forprendre Royan , qui paya deux cents
mille écus de contribution par an. Henri rendoit de
fréquentes vifites à la comtcffe de Guiche , dont il
étoit éperduement amoureux ; il fut fur le point d’être
arrêté par le duc de Mayenne qui lui tendoit des
embûches; au paffage de la Loire. Henri III prêtoit
fon nom aux ennemis des princes , qui, par la voix
des prédicateurs fanatiques,-le décrioient dans l’efprit
du peuple 'comme fauteur d’héréfie.. La guerre fe fai-
foit avec une fureur barbare ; deux régiments, qui
s’étoientrendus à diferétion , forent maffacrés par l’ordre
de -Joyeufe..
Henri III , forcé de faire là guerre à fes fujets ,
leva trois armées, dont l’une fous les ordres du duc
de Joyeufe , qui avoit plus de préfomption que de
capacité , marcha contre le roi de Navarre , qu’il
rencontra dans la plaine de Coutras ; l’aefion ne fut.
pas vivement difputée; toute la cavalerie de Joyeufe
plia dès le premier choc- , & l’infanterie fuivit fon
lâche exemples la viéloire fut complette ,.tout fut
paffé au fil de l’épée ; Joyeufe fe retira auprès de fon
canon pour y attendre la mort ; il y fot tué par deux,
capitaines qui vengèrent les deux régiments maffacrés
Par fes ordres. Cette viéloire ne coûta que trente,
hommes.. Henri III ne parut point affligé d’une perte.