
Elles fe nomment ainfi.du mot allemand marche,
Kmite , frontière , comme étant jus conceffum in alte-
/tus principis marchas feu limites tranfeundi -fi bique jus■
faciendi, un droit de "paffer les Imites ou frontières
d’un autre prince , & de le faire jûftice à loi-même.
{ A . R.)
MARQUIS , f, m. ( Hiß. mod. ) & par quelques
vieux auteurs gaulois MARC RI S , .ce qui elf plus
conforme au terme de la baffe latinité marchio.'
Les princes de la mailbn de Lorraine prenoient
la qualité de ducs & de marchas de Loheirene, comme
on le voit dans le codicille'de Thibaut III. de l’an
1312., dans un autre a&e de 132.0, ôc dans le tefta-
ment du duc Jehan I. de 1,377.
Quoique les noms de marchis , marquis , & marg-
grave Lignifient originairement la même choie , un
feigneur commandant fur la frontière , ils ont acquis
avec le temps une lignification bien différente.
Un marggrave eft un prince fouverain qui jouit
de toutes les prérogatives attachées à la fouvei ai-
neté ; & les marggraves ne fe trouvent que dans
l’empire d’Allemagne.
Il y a quelques marquis ou rnarquifats en Italie , comme.
Final ; en Elpagne , comme le marqùilat de Ville na,
peffédé par le duc d’Efcalona. Il n’y en a point en
Danemark, en Suede & en Pologne.
Enfin le titre de marquis en France eft une (impie-
qualification que le fcuverain confère à qui il veut,
•fans aucun rapport à fa lignification primitive; & le
marqùilat n’eft autre chofe qu’une terre ainft nommée
par une patente, foit qu’on en ait été gratifié par le roi,
Joit qn’on en ait acheté la patente peur de l’argent.
Sous Richard , en 1385 , \e comte d’Oxford fut le
premier- qui porta le titre de marquis en Angleterre,
où ihétoit alors inufité.( D . J. )
MARRIER , ( D. Martin ) ( Hiß. Litt. mod. ) bé-
ïîédiélin Ounifte, auteur du recueil intitulé ; Bibîio-
theca Cluniacenfii ; c’eft une colleéHon de titres , de
pièces concernant les abbés & l’ordre de Cluni. Ces
fortes d’ouvrages font toujours de quelque utilité pour
î’hiftoire eccléfiaftique. On a du même dom Martin
Marrier, une hiftoire latine du monaftère de St. Martin-
des-Champs., dont il étoit prieur. Né en 1572 ;mort
e» 1644.
MARSAIS, (Géfar Chefitéau du) (Hiß. Litt, mod.)
né a Marfeille en 1676 , entra d'abord dans la congrégation
de fOratoire ; mais i l lui falloit plug de liberté
en tout genre, & fur-tout plus de liberté de penfer,
que cette congrégation , d’ailleurs fi fage , n’en permet
& ne peut en permettre; il la quitta, il vint à Paris ,
s’y maria, époufa une fionefia, dont il fut obligé de
ieféparer î
Nepoufez point d’Honefta,. s’il fe peut,
N’a pas pourtant une Honefta qui veut.,
F?- reffource fut d’élever des enfants. Il fut précepteur
dans la maifo* du fameux Law , dans celle du ’préfident
de Maifons, dans celle du marquis de Baùfremont ’
dont il éleva les trois fils ; on lui imputoit d’avoir
demandé, en y entrant, dans quelle, religion on vou-
loit qu’il les élevât. En général, il a .paffé pour être
d’une grande, ind fférence lur cet article important ; les
Jéfuites faifirent ce prétexte de le perfécuter.; mais
leur vrai motif, dit-on, étoit que du Mar fais avoit
été oratorien , & qu’il en confervcit les fèntiments
à leur égard. En même, temps, i's laiffoient en paix
le célébré Boindin, dont l’irréligion étoit plus affichée
& plus bruyante, mais qui ne fbngeoit point à eux,
& auquel ils ne fongeoient point ; du Mdrfais témoignant
un jour fon étonnement à Boindin fur cette
conduite fi-différente des Jéfuites à leur égard : rien
de plus naturel 3 lui répondit Boindin , vous êtes un
athée janfénijle, 6%.:noi un athée moliriifte. L’athée jan-
fénifte mourut en 1756 , & l’hifloire a pris foin
d’obferver que ce fut après avoir reçu les façrements;
il avoit vécu pauvre ,_ aimé & eftimé ;
Probitas laudatur & alget,
M. le comte de Lauraguais lui faifpit une penfiori
de mille livres , dont il a continué une partie à une
perfonne qui a pris foin de la vieilleffe de ce philo-
fôphe. M. du Marfais avoit l’efprit le plus' jufte, le
plus lumineux , le plus ami du vrai, & du naturel en
tout genre. Il avoit dans le commercé, beaucoup de
fur.plicité, de candeur , de naïveté , peu d’ufage du
monde, peu de connoiflance des. hommes, Fontenelle
le caraéférifoit , en difant que c’étoit le nigaud le plus
fpirituel qu’il eût connu. Par une fuite de. fon amour
pour le naturel, il fit adopter, dit-on , à mademoifelle
Le Couvreur, un fyftême de déclamation fimple &
rapprochée de la nature , qu’on ne connoiffoit point
avant elle. Son Traité des Tropes, que des ignorants
appelloient fon Hifioiredes Tropes , eft un des meilleurs
ouvrages de grammaire &. de rhétorique. Ses
articles de grammaire dans l’Encyclopédie , ont la
même mérite ; lumière & jufteffe par-tout. Sa Méthode
raifonnée peur apprendre la jangue latine , eft
d’un, eîprit oui ne reconnoît d’autorité que celle cle la
raifon. On a de lui encore une Expojïtion de la doElrine
de tEglife Gallicane , par rapport aux prétentions de
la cour de Rome ; & une Logique ou Réflexions fur les
opérations de l'efprit.
MARSHAM, (Jean) ( Hifl. lin , modi ) célèbre
antiquaire & chronologifte anglois, baronnét& che*
yalier de l’ordre de la jarretière, a débrouillé les An*
tiquités Egyptiennes , autant qu elles peuvent être
débrouillées. On connoît fa Diatriba chronologica, Sç
for-tout fon Canon Chronicus Ægypiiacus, Hebraicus ,
Gratcus. Prideaux l’a réfuté fur quelques points,
fans avoir porté auçune atteinte à fa réputation. Non
moins bon citoyen qu’habile chronologifte, le cher
valier- Marsham avoit fouffert pour la çaufe de
Charles J. en fut récompenfé par Charles II. Né
à Londres en 1602, il mourut en 167.2,
MARSIGLI ( Louis-Ferdinand ) ( Hifl. Litti
mod. ■ )
fiod ) Il y a deux hommes à confidérer dans M. le
-comte Marfigli, le militaire & le lavant. B étoit né
à Bologne le io Juillet 1658, du comte Charles- ;
François Marfigli, d’une ancienne maifon patricienne
de Bologne. Ses maîtres de mathématiques furent Gé-
miniano”Montanari & Alphonfe Borelli ; fon maître
d’anatomie, Marcel Malpighi. Capitaine d infanterie en
J68, au fervice de l’empereur, & combattant-contre
le s Turcs, il- fût bleffé au paffage du Raab le 2 juillet,
6c tomba prefque mourant entre les mains des Tard
e s . Il fut fi ma'hcureux dans cette première captivité
, qu’il regarda comme, fes libérateurs deux
’Turcs, frères, fort pauvres qui l’achetèrent, chez
léftmêls il manquoit de tout, & qui le faifoient enchaîner
toutes les nuits à un pieu planté au milieu de
leur caban—, un troiftème Turc cm vtvott avec eux
étoit chargé de ce foin. Délivré le « Mars 1684,_
il fortifia plufieurs places & ferytt très-uttleroent &
comme ingénieur 6c comme foldat. Il firt fait colonel
en 1689. A la paix, il fut employé par l’empereur a
régler les limites refpeélives de fes Etats, de ceux de
Venife & de ceux de la Porte. Se trouvant fur les
confins de la Dalmatie Vénitienne, il reconnut de
loin une montagne;, au pied de laquelle habiîoient
les deux Turcs dont il avoit été l’efclave ; ils vivoient
toujours & étoient toujours pauvres il eut le plaiftr
de fe faire voir à eux, environné de troupes qui lui
obéiffoient ou le refpeâoient, & le plaiftr encore
plus doux, de foülager leur mifère. Il écrivit au grand-
viftr, êc lui demanda .pour l’un de ces Turcs un.
titnariot (iénéfice militaire) ; il en obtint un beaucoup
plus cottftdérable qu’il ne le demandoit. Sagénéroftté ,
dit M. de Fontenelle, fat fende par ce vifir comme
„ on auroit pû fouhaiter quelle le fût par le premier
„ miniflre de la natipn la plus polie 6c la plus exercée
st à la vertu, ■
L’ennemi de mon dieu connoît donc la vertu ?
T u la connois- bien peu puifque tu t’en étonnes.
Ce comte trouva dans la fuite à Marfeille
un galérien Turc ; c’étoit celui qui l’attaeboit
toutes les nuits au pieu dont pn a parlé : ce. malheureux,
faifi d’effroi , fe jette à fes pieds pour le prier
de na pas fe venger en le faifant traiter avec plus
de rigueur.-Le comte lui procura la liberté par M.
le comte de Pomchartrain, & .le fit renvoyer à A 1-;
Ber , d’oïl il manda au comte Mirjîgli , qu’en
teconnoiffance du biênitut qu’il avoit reçu de lu i,.
il avoif obtenu du hacha des traitetnens plps doux
pour les efelaves chrétiens. Il eft donc vrai que le
bien lè rend ainft que le mal., 6ç qu’on a par çon-
féquent intérêt de faire le .bien 1
Dans la guerre de 1701 pour la fuccelbon dEf-
pagne, parvenu au grade de général de bataille, il
.étoit en .1703 , dans Brifac fous le comte d Arcô ,
gouverneur , Ionique cette place fe tendit le 6 ‘Septembre
à M. -le duc de Bourgogne. L’empereur crut
que Brifac avoit été mal défendu , il fit faire le procès
aux comtes d’Arco &. Mirjîgli, §c par un jugement
fliftoire. Jom, 111.
du 4 Février 1704 , le premier fut condamné à a /cir
la tête tranchée, ce qui fut exécuté le 18 du même
mois ; le comte Marfigli fut dépofé de tous honneurs
& charges avec la rupture de l epee. Un coup
fi terrible , dit M. de Fontenelle , lui dut « faire re^
» gretter l’efclavage chez les Tartares. »
. Je voudrais être encor dans les prifons d’Epire;
Le comte Marfigli vint à Vienne demander1
la révifion du procès, mais n’ayant pu approcher;
de la perfonne de l’empereur, il prit le public pour
juge & publia fa juftification ; long-temps avant lé
ftege de Brifac, il avoit fait voir que la place ne
pouvoit pas fe défendre ; il le prouve par les états
de la garnifon, des munitions de guerre, &c. On
lui avoit refofé, fous prétexte d’autres befoins , cé
qu’il avoit demandé de plus néceffalre. Marfigli ne-
toit pas le commandant , il n’avoit rien ordonné ,
il n’avoit fait que fe ranger à l’avis unan ime du con-
feil dfe" guerre. L’innocence du comte Marfigli fut
reconnue par les puifïances mêmes, alliées de l’empereur.
Le public , qui fait fi bien, dit M. de Fonte*
nelle, faire « entendre fon jugement fans le pro*
» noneer en forme, ne fouferivit pas à celui des
n commiffaires impériaux. « Parmi tant de fuffrages
favorables au .comte Marfigli , Fontenelle en cite
un qui n’eft que celui d’un particulier 9 mais ce particulier
« eft M. le maréchal de Vauban , dont l’au-
» torité auroit pu être oppofée, s’il l’eût fallu , à
» belle de toute l’Europe comme l’autorité de Caton
» à celle des dieux. Il paroît qu’on avoit voulu, au
commencement d’une guerre , donner un exemple
effrayant de févérité, mais il faut que ces exemples
foient juftesjv La morale des Etats,, dit M. de Fontenelle,
fe réfout pour de fi grands intérêts a ha*
farder le facrifice de quelques particuliers ».
Oui, les Etats ont bien de la peine à comprendre
qu il n’y a qu’une morale, qu’elle eft là même pour
les Etats & pour 'lès particuliers; qu’il n’y a auffi
Qu’un intérêt , celui d’être fidèle à cette morale
unique^
Le courte. Marfigli fe crut fi peu flétri par ce
jugement injufte, qu’il prit, pour deyife une M ,
première lettre de ~ fon nom , qui porte de part
& d’autrei entre fes jambes les tronçons d’une épée
rompue ♦ avec ces mots, FraElus imegro, Diveifes
pu fiances lui proposèrent ,de l’emploi, & le jugement
■ fiont il avoit à fe plaindre , fat regardé-comme non
avenu a force d’être injuft'e ; çè qui prouye l’intérêt
fie n’en rendre que de juftes,
Le comte Marfigli , fe confola de finjuffee qu’il
avoit ëffuyée , par les plaifns de l’étude qu’ il avoit
'toujours, joints à l’exercice des armes^ Dès 1670 ,
n’ayant encore que yingt-un ans , il avoit été à Ccnf*
tantinople •; il avoit ^.examiné en politique, l'état cj.es
forees-Ottomanes, & en phyficiea le .Bofphore de
Thraçe & fes fameux courans. Son traité du Bof'*
phpre } qui eft fon premier ouvrée , parut en