
M A R
ce règne efl une époque de grandes violences & de
grandes déprédations. Enguerrand de Mangny &
tous lut, Etienne Barbete , maître de la moirnoie
devinrent trop puiflants par le malheur public, & par
les alterations de la monnoie : « Il s’étoit plus levé
dit Mezeray , de deniers extraordinaires durant ce’
a» règne -leul que dans tous les précédents.. . , . on
” *ailoit entreprendre au roi des chofes au-deffüs des
* torces de ton état.. . . . . il ét'oit d’ailleurs enveloppé
” PaiL?eu!c <P“ manioient les finances ; il leur en
ri iaiffoit prendre leur bonne part en récompenfe de
n ne qu ils donnoient les moyens de foire ces exaâions
» bes coffres etoient comme le tonneau des Dana'ides
» où I on verfoit fans ceffe, & qui ne fe rempliffoit
« jamais. Ainfi, c étoit .toujours à recommencer ; un
” lmFot en attiroif un autre nouveau & plus grand
Enguerrand de Marigny a trouvé des défenfeurs qui
1 ont reprefente comme un homme d’état, & qui ont
pris Ton .parti contre Mézeray ; mais la -mauvaife
admimltiaticn des finances & fa fortune particulière
1 acculent trop^ hautement. Les paradoxes hiftoriques
peuvent éblouir , mais ils ne perfuadent pas toujours.
La hn de Mangny fut.malheureufe, c’eft ce qui lui
a donne des partilans. La pitié fait quelquefois iliufion.
Mangny fut pendu fous Louis - le - Hutin en tare
lavedle de lafeenfion, au gibet de Monfimcon qu'il
avoit fait conffruire ; & comme maître du logis ' dit
encore Mezeray , il eut Ihonneur S être mis au haut
tout au-deffus. ,de tous les autres voleurs. Mais les
hommes ont un grand talent pour gâter tout, & pour
fane injuftement meme les chofes les plus juftes
Mangny fut pendu bien moins pour avoir été oppreffeur
que pour avoir été infolent envers le comte de Valois ’
plus oppreffeur ^ue lui. Charles de Valois lui demandent
compte dutrefor qu’avoit laiffé le roi PhiÜp-'e-le-Bel
J en rendrai bon compte, dit Marigny.— Rindêz - le
dew-preferit.-.- Eh bien , Monf.eur, je vous en ai
donné la moine, l’autre a fervi à payer les dettes du
toi. - - Certes de ce mentez-vous , Enguerrand.—
Pardieu, Monfieur, de ce mentez-voiis vous-même.
Le comte de Valois mit l’épée à la main ; Marigny
fe mit en defenfe.Cette fcène fe paffoit en plein confiai
& devant le roi. Marigny fin pendu; mais Charles-
de-Valo,s ne fut pas juffifié. Il eut des remords : la mé-
réhabilitée, mais elle n’efl pas
juionee non plus dans 1 opinion générale.
Divers perfonnages du nom de Marigny font connus
les lettres ; i». Jacques Carpentier Æ Marigny,
gentilhomme françois fa du feigneur de Madgny
près Nevers, ecclefiaftique très-irrégulier , homme
voluptueux, efpnt piaffant, conteur agréable , chan-
_ lej-Cef j ^ firr frondeur, parce qu’ilétoit attaché
■ S S P l de Re? » Puis ™ grand Condé ; il fit de§
chanfons contre le cardinal k z a r in . Cependant
céîùfnff116 S 6 ÇT f J S q“ 1 apporteroit la tPêft°ep odrué caPradri nlea l,P &im lae nript a, ,
imon qui fit delà femme aflignée, tant pour quf h
cquperoit le nez .tan t pour uni oreille, tant pouru
« i l , tant pour le faire eunuque. Cette plaifanterie étoi
plus propre a donner du ridicule à Pmrêt qu’au cai
M A R
dinal. On a de Mangny, un Recueil de Lettres en vêts
6* en profe, & lin poème fur h Pain béni. Il efl le
gentilhomme françois dont il efl parlé à l’article A llen.
( cet article. ) Il avoit voyagé en Allemagne'&
en Suede. Etant en Allemagne , il eut une maladie
tres-grave, dont il penfa mourir; l’évêque luthérien d’OC
nabruck 1 aflùroit qu’il n’en mourroit pas, & plaifàntant
pour rendre Ton pronoftic plus vraifemblable ,. vous
n aurez pas , lui dit-il, le chagrin d’être enterré parmi
des Luthériens : En tout cas , répondit Marigny , le
remede feroit facile, il fuffiroit de creufer deux ou trois
pieds plus bas, je ferais avec des Catholiques. Il mourut
en 1670.
Nous avons d un autre Marigny ( l’abbé Augier de )
mort a Paris en 1762, une Hijioire du douzième fiècle ;
une Hijioire des Arabes j & les Révolutions de l’Empire
des Arabes. ;
iviAtuurwi , 1. m. ( Verne de relation ) Ce mot
lignifie en général dans les îles de l’Amérique , un
jj/? eaux de la pluie s’aftemblent & le conferyent,
MARILLAC , ( Hifl. de Fr. j famille françoif? ;
Pro^u*£ entr’autres , trois perfenna^es très»
célébrés : ..........■ {SI "
x°* Charles de Marillac , archevêque de Vienne p
ms de Guillaume üte Marillac , contrôleur général des
finances du duc de Bourbon. 11 fe diftingua fùr-tout
a la conférence de Fontainebleau en 1560. Il fut fufi
çed de proteftantifme , ainfi que fon ami Montluc ,
evequé de Valence, & fon autre ami le chancelier
de 1 Hôpital, parce qu’il attaquoit les abus de la cour
de Rome, & qu’il ofoit s’élever contre les Guifès ,
alors tout-puiffans. 11 mourut dans la même année
* 560 > de douleur , dit-on , des maux qu’il prévoyoit,
& qui furent plus grands peut-être , qu’il ne l’avoit
prevu.
"j 1.°' de Marîilac , garde des fceaux , néveu
de l’archevêque de Vienne , avoit été dans fa jeunefle,
un ardent ligueur. Il étoit fort dévot , & fembloit
d abordn avoir de goût que pour la retraite ; il s’étoit fait
faire un appartement dans l’avant-cour des Carmélites
du fauxbourg St. Jacques , pour avoir la jouiffance
continuelle de leur églife. Marie de Médicis, fondatrice
de cette maifon, y venoit fouvent ; elle connut
Marillac, & le recommanda au cardinal de Richelieu,
fur qui elle avoit encore alors du crédit. Richelieu
fit Marillac dire&eur ou furintendant. des finances en
1624 , & garde des fceaux en 1626. Marillac publia
en 1629, une Ordonnance générale, qui rëgloit les
principaux points de" la jurisprudence , & qu’ayant
ete rejettée par le parlement, & nommée par aérifion,
Ie Code Michau , du nom de Baptême de Marillac ,
elt aujourd’hui louée & regrettée à beaucoup d’égards,
par quelques jurifconfultes. La difgrace de Marillac,
arrivée quelques années après , porta le dernier coup
\ Cf tte ordonnance* L’ingratitude du cardinal de Richelieu
envers la reine-mère, rendit les Marillac ingrats
a leur tour envers Richelieu, ou, fi i’on veut, ayant
a prendre parti entre la reine & le cardinal , ils re-
M A R
gardèrent la reine comme kur première & principale
bienfaitrice, puifque c’étoit elle qui les avoit recommandés
au cardinal. Quoi qu’il en foit, ils travaillèrent
de concert avec elle , à la perte de Richelieu, & ils
furent les plus fortes dupes de ce qu’on appella la
Journée des dupes, journée où Richelieu découragé
fuivit cependant le confeil que lui donna le card inal de
la Valette, d’aller joindre le roi à Verfailles, & revint
triomphant de fes ennemis, qui , fe croyant fûrs du
fuccès, négligèrent de faire, la même démarche , &
laifTèrent le champ libre au Cardinal. Celui-ci fit enfermer
le garde des fceaux dans le château de Gaën,
puis dans celui de Châteaudun , où il mourut en 16 32,
fi pauvre , que Marie, de Creil fa belle - fille , fut
obligée de faire les frais de fès funérailles , après ■
l’avoir nourri dans fà prifon. Le dernier defeendant
du garde des fc e au x a été Jean-François de Marillac,
brigadier des armées du roi., gouverneur de Béthune ,
tué en 1704, à la bataille d’Hochftet; mais il reftoit
d’autres Marillac de la même famille. Le garde, des
fceaux de Marillac a. laiffé quelques ouvrages. On a
de lui des poëfies , entr’autres , une traduâion des
Pfeaumes en vers françois ; une Differtation fur l’auteur
du livre de VImitation.
3°. Louis de Marillac, maréchal de France, frère
du garde-des-Sceaux, fut une des viélimés de la haine
& de la vengeance du cardinal de Richelieu., & victime
innocente, comme ce miniftre eut l’atrocité de
le reconnoître lui-même dans le perfiflage amer dont
il récompenfa la lâche & barbare condefcendance
•des Juges qui condamnèrent Marillac à avoir la tête
tranchée : « Il faut avouer, leur dit- il, que Dieu
» donne aux Juges des lumières, fupérieures à celles
» des autres hommes, puifque vous ave2 vu dans
ï> le procès du maréchal, de quoi, le condamner - à
» mort. Pour moi, je,, n’aurois jamais cru qu’il mé-
n ritât une peine fi rigoureufe ».
Si tu ne le croyois pas, homme de fang, pourquoi .
ne lui faifois-tu pas accorder fa grâce ? Mais les
Juges n’avoient pas eu d’autres lumières que celles
que le cardinal leur avoit fuggérées ou plutôt commandées.
Ayant réfolu la perte de Marillac , il avoit
commencé par le priver de fes Juges naturels; il lui
avoit nommé une commiffion fur laquelle il comptoit,
.& qui cependant lui manqua ; elle ne crut pas pouvoir
s’empêcher d’admettre Marillac à fe juftifier. Richelieu
caffer cet arrêt, & nomma une autre commiffion,
dans laquelle il fit entrer ceux qui étoient connus
our les plus grands ennemis de Marillac, entr’autres
aul Hay du Châtelet, à qui tout le monde attri-
buoit une fatire fanglante contre les deux frères, &
qui, fans avouer cette fatire, allégua qu’èlle lui étoit
attribuée pour fe difpenfer d’être des juges , ce qui
lui attira la haine du cardinal & une difgrace. ( Voye^
l’article C hâtelet ) ( Paul Hay, feigneur du ) Le
cardinal avoit fi grande peur, que les juges ne con-
damnaffent pas Marillac , qu’il fit faire le procès fous
les yeux, dans fa maifon de Ruel, violant impudem-
snent toutes les loix , toutes les formes, toutes les
biçjùeances pour affouvir fa vengeance. Au refie,
M A R 4 P 3
les Marillac n’étoient pas des perfonnages plus vertueux
qu’on ne l ’eft communément à la cour. Originairement
créatures du cardinal, iis n’avoient pas
eu pour lui plus de reconnoiffance que le cardinal
n’en avoit eu pour la reine mère, à laquelle il devoit
toute fa grandeur & toute fa fortune. Ingrats, ils
s’unirent à la reine-mère pour punir un ingrat, qui
l’étoit plus qu’eux; car, pour eux, ils avoient du moins
l’exeufe de ne nuire au cardinal que pour firvir la
,reine , leur première bienfaitrice j & qui leur avoit
procuré la faveur du cardinal ; mais dans le fond
ils ne fongeoient qu’à s’élever fur fes ruines. La
journée1 des dupes éclata , & Richelieu écrafà tous
fes ennemis. On dit qu’en cette , occafion le maréchal
de Marillac s’éroit diftingué parmi tous les conjurés,
( fi l’on peut appeller ainfi la mère & le frère du
roi réunis avec les grands, contre un mlnifire odieux )
en offrant de tuer dé fa main le cardinal, qui inftruit
dit -on, de cette délibération, fe piqua de punir chacun
de fes ennemis de la même peine que chacun avoit
prononcée contre lui. Cette offre de tuer le miniftre,
fut la véritable caufe du fupplice du maréchal ; elle
n’eft point alléguée, parce qu’une propofition vague,
non acceptée , non exécutée, ne pouvoit pas être
punie de mort ; on chercha d’autres crimes beaucoup
moindres en eux-mêmes , mais qu’on pouvoit aggraver
à fen gré , & fur lefquels on pouvoit prendre le prétexte
d’unè loi pofitive , ce qui s’appelle affaffiner
avec le fer des loix ; ori l’accufa de péculat & de
concuflion ; on difeuta jufqu’aux moindres droits de
fa place, qu’ il avoit exercés ou permis qu’on exerçât,
on les lui contefta tous, & à force d’envie de le
trouver coupable , on le trouva coupable. Il s’ag'ffoit
le plus fouvent d’objets qui, par leur peu d’importance ,
n’avoient pas été jufqu’à lui , & dont il n’avoit pas
même d’idée. Il répondoit fur les uns , fa i cru avoir
ce droit ; fur les ' autres, j ’ ignore f i j ’avois ce droit ;
fur tous , j ’ ignore f i ces droits ont été exercés en mon
nom , ou s’ils ont été négligés ; des foins plus importuns
exigeoient mon attention. Quelquefois impatienté
des interrogatoires ridicules qu’on lui faifoitfubir,
il s’écrioit, chofe étrange qu’un homme démon rang foit
perfécuté avec tant de rigueur & d injuftice ! I l ne s’agit
dans tout mon procès que de foin , de paille } de pierres &
de chaux,. . >
Il eft vrai que la petiteffe de ces objets ne feroit
pas toujours une raifon de les négliger, & que chez
une nation, très-vertueufe, très-ferme fur tous les principes
de la probité , la plus légère faute dans l’emploi
des deniers publics, & dans l’exercice de droits onéreux
feroit fi fort en contradiction avec les moeurs qu’elle
paroîtroit toujours fort grave ; mais accoutumé comme
on l’étoit depuis fi long-temps , à la plus grande indulgence
fur cet article , les excès même les plus
crians dans ce genre , paroiffoient à peine une faute
légère, & le maréchal de Marillac, même coupable,
avoit le droit de n’être pas condamné , fur - tout à
mort pour une faute fur laquelle on avoit l’habitude
de ne rechercher perfonne; rien de plus injufte en
général que ce qu’on appelle faire un exemple , fur