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les puiflanees Européennes, & il ne s’écarta point de
fon plan ; enfôrte que depuis l’époque du traité de paix
qui avoit mis fin à la guerre élevée au fujet delà fuc-
cefTion d’Efpagne, le Portugal jouit du calme le plus
parfait pendant toute la durée du règne de ce fouverain,
qui, épuifé* par le travail aflidu auquel il s’étoit livré
pour le bien de fès fojets, mourut le 31 juillet 175.0,
âgé de 60 ans, après avoir tenu le fcèptre pendant 43
années. Il avoit pour maxime de ne jamais embraffer un
parti qu’après avoir mûrement réfléchi fur Tes avantages
& tes inconvéniens ; mais il fut -dans l’ufage confiant de
ne jamais abandonner le parti qu’il avoit pris, & il
étoit à cet égard de la plus inébranlable opiniâtreté.
Du refis y Jean fut minutieufement déver, il n’eût tenu
qu’à lui d’anéantir le tribunal de l’inquifition ■ mais il
ne Fcfa point, & en cela ce prince fut d’une malheu-
reute puûllanimité. ÇL. C. )
Jean (ffift. du Nord.) roi de Danemarck, de
Suede & de Norwege. Il étoit fils aîné de Chrifliern I.
Après la mort de ce prince , arrivée l’an 1481 , Jean
réclama. la prpmeffe que les états de Suede , de Dane-
marck 8c de Norwege avoient folemnelLment jurée,
de placer lèsirois couronnes fur fa tête, & de rétablir
la célèbre union de Calmar. Il convoqua à Helmfladt
une aflèmblée des députés des trois royaumes ; ceux
de Dai lemarck & de Norwege le proclamèrent ; mais
Ceux de Suede manquèrent au rendez-vous* L’admi-
mffrateur Steenflure leur avoit ordonné de s’y trouver ;
mais fes ordres ne furent point exécutés , ou plutôt
cette défôbéiffance étoit combinée avec lui, parce qu’il
craignoit que l’éleélion de Jean ne lui enlevât l’autorité
dont il'jouiffqit en Suede. Malgré les efforts de Steenf-.
ture Jean fut proclamé à Calmar. Il ne refloit à l’ad-
Bîin-.ftrateur d’autre reffouree que d’impofèr au non*
veau roi des conditions difficiles à. remplir, dont l’in-.
fraélion dégagerait les Suédois du ferment de fidélité
Ce moyen lui réuffit. Après bien des débats, Steenf-
ture voyant le roi Jean déjà maître du Gothland, céda
a la fortune & rendit hommage au nouveau roi, l’an
1487.. A peine fut-il retourné en Danemarck , que
Fadmimflrateur reprit le cours de fès complots, &
foule va la Suede* Jean étoit un de ces efprits flegmatiques
qui ne s’échauffent que. lentement & par dégrés,
mais dont la colère ne peut plus s’éteindre, lorfqu’elle
a une fois éclaté.. Avant de prendre les armes a il voulut
•enter la voie de la négociation : elle ne lui réuffit pas ;
& les délais de Steenflure rendirent inutile une affem-
felée indiquée à Calmar. Cependant Jean avoit engagé
fes Rudes à porter -le fer & le feu au fein . de la-Finlande;
la difgrace de Steenflure, en 1497 , ranima fès
efpe'rances. Il parut , fit .des conquêtes, gagna une
bataille, fut. une féconde fois, reconnu par l’adminif-
trateur, & reçut là couronne des mains de l’archevêque
d’üpfàl. L ’année fuiyante, 1498, le jeune Chrifliern,.
fon fils , fut proclame l’héritier du trône. L’autorité, du
roi s affermiffoit de plus en plus ,.lorfqu’une démarche
ambitîeufe lui fit perdre le fruit de tant d’efforts ; il
voulut affervir les Dythmarfes ,. fut vaincu, s’enfuit
dans le Holffein avec, les débris de fpn armée, fut
fontrafot de demander 1a. paix*
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Steenflure faifit des circonflances fi faVbrâbles à fès
deffeins. Les Suédois révoltés le mirent à leur tête *
une partie des Norwégiens fe joignirent à eux ; le château,
de Stockholm fut emporte, 8c la reine, que Jean y
fon époux, y avoit imprudemment îaiffçe , fut faite
prifonnière. Au milieu de ces troubles, l’un des chefs
des rebelles fut affafliné en Norwege, 8c Paul Laxmann %
maréchal de la cour, eut le même fort. C» dernier
attentat s’étoit commis à Copenhague, & le roi renvoya
les affaffins devant le tribunal des électeurs de
l’empire ; ce qui fit fbupçonner qu’il n’étoit pas intéreffé-
au châtiment de tous les coupables. Cette Conduite étoit
d’autant plus dangereufe, que le roi fembloit par-là rendre
une efpèce d’hommage aux empereurs, qui avoient fou-
vent prétendu compter les rois de Danemarck au nombre
de leurs valfaux. La fortune parut changer ; Chrif*
tiern, fils de JeaJs tailla en pièces les rebelles de Norwege*
l’an 1503 ; il fit même quelques conquêtes en Suede ;
mais Steenflure eut bientôt réparé ces pertes. Jeàn,
en armant le duc de Mecklenbourg contre la république
de Lubeck, la força à fe dé.acher de falliance
de la Suede. Il lança en même temps un arrêt par
lequel il eondamnoit les rebelles, Cefl-à-dire , tous,
ks Suédois, à perdre leurs biens , & c .... L’empereur
Maximilien ratifia cet arrêt, comme fi la Suede
eût été une de fes provinces. La guerre étoit à cha-
que inflant fufper.due par les.délais de Steenflure ,
qui propofoit toujours d’entrer en négociation ,' 8l
qui n’y entroit jamais. Malgré fâ longue expérience a
Jean fut toujours la dupe de ces rufes politiques. Ce
fut alors que ce prince , pouffé à bout, vengea d’une
manière affreufè tous les oütrages qu’il avoit reçus..
Il ravagea la Scanie , & fit un défert de cette province
fur laquelle il vouloit régner., Steenflure n’étoit
plus. Les Suédois , l'as de défendre leur liberté expi- '
rante , s’engagèrent de payer une fomm,e de treize
mille marcs d’argentjufqu’à ce que le roi où fon' fils**
Chrifliern fut reconnu d’un concert unanime par la
nation. Jean mourut l’an 1513. On lui pardonnera
peut-être le ravage de la Scanie ,, lorfqu’on fongera.
combien de fois il avoit pardonné aux rebelles , comr
bien de négociations il avoit entamées pour les faire
. rentrer dans le devoir. Il étoit d’un caractère doux ,.
fon jugement étoit fain,. fes intentions droites , fa:,
générofité dirigée par un goût épuré. Gérait parmi
les membres de l’académie de Copenhague qu’il choi*
fiffoit fes ambaffadeurs.. Il fit de grandes fautes en.
politique ; il effuya de grands échecs dans la guerre g
8c parmi fes malheurs., on peut compter celui d’avoir
été père de Chrifliern II. (M . de Sac y. )
Jean , ( Hijl. de Suede. ) roi de Suede,, étoit fils-«de1
Guflave Vafa & frère d’Eric XIV. A peine Eric étoit—
il monté for le trône , l’àn 1560 , qu’il traita fès frèresv
en fujets, & peut s’en faut en efclâves ; il leur refiifà.
une partie de leur apanage., 8c ne leur céda quelques,
principautés, qu’en les condamnant à les perdre, f l
jamais ils ofoient lui défobéir. Leurs vaffaux dévoient,
relever immédiatement de la couronne. G’ëfl. ainfi:
qu’Eric vouloit fobfiitper le defpotifme au gouvernement
féodal Le prince Jean etoit fur-tout indigo %
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'ff’ùne forvitude qui bleffoit la fierté de fon caraâère.
Mais comme il ne trouva pas dans fès frères le même
courage dont il fe fentoit animé , il époiifo Catherine
, princeffe de Pologne, 8c fe fortifia dé l’aliiance
fie cette république. Ce mariage célébré l’an 1562
malgré le roi Eric, lui donna de jufles alarmes for
la fidélité de fon frère. Il le fit afliéger dans le château
d’Aboo , l’an 1563. Jeun fe défendit'avec intré-
Eidité ; mais la place fût emportée par- flratagême,
e duc fut fait prifonnier avec fa famille : il fut condamné
à perdre la ‘tête comme rebelle. Quelque ri-
goureux que fut cet arrêt, Jean auroit dû fe fouvenir
dans la fuite , lorfque fon frère tomba entre fès mains ,
que celui-ci lui avoit fait grâce de la vie , & avoit
changé la peine de mort en une prifbn perpétuelle.
On prétend qü’Eric, partagé entre le remords 8c la
haine, alloit quelquefois au château de Gripshohri oîi
languiffoit fon frère ; qu’il y entroit, refolu de 1 affaf-
fmer ; que fa colère expiroit , dès qu’il voyoit ce
malheureux prince , & qu’il fortoit toujours le coeur
ferré & les yeux mouillés de larmes. Enfin l’an r 567 ,
il rendit la liberté au duc , qui jura d’être à l’avenir
îe plus fidèle 8c le plus fournis de fes fujets. IGre-
ijonça pour jamais à la couroune, 8c s’impofà d’àu-
tres conditions diâées par 1a riéceffité , 8c bientôt
violées par l’ambition. Eric avoit accumulé crime for
crime ; le peuplé l’avoit en horreur : la révolte n’at-
tendoit qu’un chef pour éclater. îles frères' du roi fè
liguèrent, levèrent des troupes , appelèrent l’étranger
à leur fecours, afliégerent Eric dans Stockholm , fe
faifirent de fk perfonne , &. le jetterent dans une étroite
prifon. Il y fo” ffrit. des maux qu’il n avoit pas fait
effuyer au duc Jean , lorfqu’il î’avoit tenu dans les
fers. Celui-ci fe faifoit un jeu d’infulter aux malheurs
de fon frère , &. de redoubler fès tourmens. Ce fut
au milieu de ces foins cruels, 8c plus dignes d’un boùr-
reau que d’un, prince , que Jean fut proclamé, l’an
* 1568. Il commença par écarter du gouvernement
Charles, fon frère , avet qui il avoit promis d® le
partager ; fit fa paix avec le czar , 8c défavoua la
conduite de fes ambaffadeurs qui avoient conclu avec
îe Danemarck un traité ignominieux. En donnant à
fon frère quelques provinces qu’il ne pouvoit foi réfuter
, il força les habitans de ces contrées à promettre
.de ne jamais placer fur le trône d’autre prince
que fes defeendans. La guerre fe ralluma bientôt avec
la Mofcovie ; la Livonie étoit le tifon de difeorde
entre les deux puiffances. Jean, attaqué à la fois par
fes Danois & les Mofêovites , acheta la paix avefc le
Danemarck, aux conditions qu’on voulut foi impofer.
11 renonça ,à toutes fes prétentions for la Norwege,
for les provinces de Hafland 8c de Bleckingie , for
Jemptland & Hermdaln ; enfin il paya les frais d’une
guerre que fon frère avoit fait naître, & dont la Suede
cftvoit effoyé tous les échecs. Quelques tentatives pour
rétablir en Suede la religion catholique ; quelques dé-
. marches infruéhieufes pour obtenir la couronne de
Pologne après la mort de Sigifmond ; le procès de
Charles Mornay qui eut la têfe tranchée, pour avoir
plaint le fort du malheureux Eric ; uqe vi&oire pref-
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qu’incroyable , remportée fur les Mofêovites avec
des forces inférieures ; un formulaire dreflé fous
le titre de liturgie de Céglife fuedoife conforme.à Féglife
catholique & orthodoxe ; quelques brouiller es à ce
fujet avec la cour de Rome ; la perfécuticn élevée
pour le formulaire ; enfin l’empoifonnement d'Eric
ordonné par le roi, approuvé, parles ptincipaux fé-
nateurs, & le cadavre de ce prince donné en fpeâacle
au peuple, tels font les événemens qui remplirent le
règne de Jean depuis 1571 jufqu’en 1579.
Après la mort de l’archevêque d’Upfal, le roi voulut
fui donner un focceffeur ennemi de l’héréfie 8c
partifàn de l’églife romaine. Il envoya Laurent Magnus
en Italie pour y prendre le goût du catholicifme , 8c
fe concerter avec la cour de Rome fur les moyens de
le rétablir dans le Nord. Le clergé ne fe feroit peut-
être pas apperçu de ces menées, fi le duc Charles,,
intéreffé à détruire fon frère dans l'efprit du peuple ,
n’eût ouvert for fa conduite les yeux de tous les ordres
du royaume. On fit des remontrances au roi ; il fut-
inflexible. Ce ne fut qu’en 1582 qtfil parvint à faire
approuver par le clergé le changement qu’il vouloit
établir. Cette révolution foi avoit coûté bien des peines
8c il étoit occupé à convaincre des doâeurs, tandis
que fes généraux luttoi.ent loin de foi contre toutes les
forces de la Mofcovie. Cette guerre ne paroiffoit
point intéreffer le roi Jean ; tout entier à la religion 9
la gloire n’étoit plus rien pour foi, 8c celle dont les
foldats fuédois fe couvrirent dans cette guerre, ri’ap-
partenoit qu al eux. Une trêve de deux ans, conclue
en 1583 , fufpendit les hofliUtés. Cependant le. duc
Charles négocioit avec la plupart des princes protef-
tans , 8c les engageoit à défendre leur religion. Ce
n’étoit pas qu’il fut plus attaché à l’une qu’à l’autre ;
mais il efpéroit rendre fon frère odieux au peuple ,
s’approcher du trône par dégrés, £c y monter peut-
être à la faveur des troubles qui étoient prêts à naître
de ces débats théologiques. Le roi preffentit le defïein
de l’ambitieux Charles ; & pour .appaifer les nombreux
partions de la confeflion d’Ausbourg, il défendit aux
catholiques rie tenir des affemblées. Mais ce qui acheva
de renverfer tous les projets du duc , ce fut l ’ék^lion
de Sigifmond , fils rie Jean , au trône de Pologne. On
impola à ce prince des conditions qui tendoient à
maintenir la religion proteflante en Suede , 8c. à la
fomenter en Pologne. Jean, tou ours attaché à l’égli fe
romaine, fit de nouveaux efforts pour en rétablir le
! culte dans fes états. On vit l’inflant oîi toute la Suede
i alloit prendre les armes pour la défente de la confef-
fion d’Ausbourg Charles s’étoit déclaré chef de la
révolte. Jean y qui (avoit qu’il avoit plus d’ambition
que de zèle , crut l’attirer , en partageant avec lui le
gouvernement du royaume : il ne fe trempa point.
Dès que Charles eut obtenu les honneurs dont il étoit
•jaloux, il ne fè mêla plus des querelles de religion , 8c
vécut en affez bonne intelligence avec le roi Jean, qui
mourut îe 17 novembre 1592, viélime de l’igrj» ance
des médecins.
C’étoit un homme prefque fans caraélère, d’un tempérament
froid, faifant le mal par foibkffe, 8c le bit»
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