
*«-------— 70i H i s t o i r e E c c l e s i a s t i q u e ,
A n. i i 50. un blasfême dans la bouche d’un prêtre : il vous eft
honteux d’éclater de rire, & encore plus d’y excicer
' • I+’ les autres. Quant à l’avarice, ajoûte-t-il, je n’ai
rien à vous faire confiderer, car 011 dit que vous regardez
l’argent comme de la paille: mais donnez-vous
de garde de l’acception des perfonnes & de la facilité
à croire les mauvais rapports,qui eft le vice le plus
ordinaire de ceux qui font en grande place. Tel eft
le fécond livre de la Confideration.
x lv ii i . Vers le même tems pierre abbé de Clugni étant
a-nURomelU" revenu de Rome après cinq mois d’abfence, S. Bernard
lui écrivit une lettre fort obligeante : à laquelle
toutefois l’abbé de Clugni ne put répondre auffi-tôt
qu’il auroit voulu , à caufe de la multitude d’affai-
*1. et. 47. res dont il fut accablé à fon retour. Il trouva des
députez qui l’attendoient d’Italie, d’Allemagne,
d'Efpagne, d’Angleterre, de France, c’eft-à-dire,
des monafteres dépendans de Clugni dans tous ces
païs, 8c il falut expedier les affaires qui s’étoient
tfifi. 4£. accumulées pendant fon abfence. Dans fa réponfe à
faint Bernard , il parle ainfi'de la réception que lui
avoir faite le pape Eugene. Il a toujours eu pour
moi un vifage égal, quoiqu’il changeât avec difcre-
tion pour les autres, fuivantladivçrfité des perfonnes
ôc des évenemens. Il me préferoit à tous, même
à ceux qui étoient d’un rang plus élevé : j ’étois
prefque le feul étranger qui fut admiS à fes confeils
avec les Romains, Voila pour le public; mais dans
le particulier je n’ai jamais trouvé d’ami plus fîdele,
ni de frere plus fincere. Il m’écoutoit patiemment,
il me répondoit promptement 8c efficacement, il
me traitoit comme fon égal, quelquefois comme
L i v r e S o j x a n t e - N euv ie’me. 703
fon fuperieur. Rien ne fentoic le faite ou la grandeur
, ce n’étoit qu’équité, humilité 8c raifon : ce
que je lui ai demandé, ou il me l’a accordé, ou il
me l’arefuié, de maniéré que je ne pouvoir m’en
plaindre. Je l’avois vû à Rome la première année de
fon pontificat, je l’avois vû depuis à Clugni, à Au-
xerre, à Chaalons, à Reims 8c ailleurs ; mais je l’ai
trouvé encore tout autre.
Roger roi de Sicile avoit perdu en 1140. fon fils
aîné Roger duc-de Poüille, après avoir perdu trois
autres de fes fils; c’eft pourquoi en 1150.. il fit couronner
roi de Sicile le feul qui lui reftoit, fçavoir,
Guillaume prince de Capoüe. Pierre de Clugni écrivit
au roi Roger une lettre de cônfolation fur la
mort de fes fils, marquant qu’il a fait dire pour eux
des meifes 8c d’autres prières, & diftribuer des aumônes.
Enfuite il dit qu’il eft fort affligé de l’inimitié
, qui eft entrq ce prince 8c le roi d’Allemagne,,
qu’il offre d’aller trouver pour faire la paix entre
eux. Mais , ajoûte-t-il, ce qui nous excite le plus,
nous 8c tous les François, à defirer que vous foyez en
paix, c’eft la déplorable trahifon des Grecs contre
nos pelerins. Je ne vois perfonne entre les princes
chrétiens, qui pUiffe fi bien que vous en faire vengeance.
Allez-donc, je vous le dis au nom de tous ,
marchez aufecours du peuple de Dieu ; vengez tant
d’affronts, tant de morts & tant de fang injuftemenc
répandu. Ces Grecs toutefois contre lefquels l’abbé
de Clugni excite le roi Roger étoient Chrétiens ; ôc
n’avoit pas befoin d’être exhbrté' à leur nuire, il;
étoit déjà leur plus grand Ôc' leur plus terrible ennemi.
X L IX .
Lettres de Pierre
de G iugni au
roi Rogér.
Romu. Salern.
Baron, an.
ix 50.
VI. ej>. 16.