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A n. 1148. le pneur lui répondit : Les Cifterciens venus depuis
peu luivent le grand chemin, & leurs ftatuts
peuvent iuffite pour la plus grande perfection : quant
à nous, nous fournies bornez & dans le nombre des
perfon nés & dans l’étendue de nospoifeffions. Vous
qui avezaiTemblé pluficurs perfonnes au fervice de
Dieu , & qui avez refolu d’en recevoir encore davantage
, vous devez plutôt embrafler la vie cenobi-
tique.
Au retour de laChartreufe Etienne augmenta les
bâtimensd’Obafine, pour recevoir ceux qui venoient
tous les jours fc ranger fous fa conduite , entre lesquels
fut un gentilhomme, qui ayant déjà mené
dans le monde une vie très-reglée, fe donna à lui
avec fa femme , fes enfans, toute fa famille & tous
c.l9l fes biens -, car Etienne recevoir auffi des femmes, &
il en convertit un grand nombre, même des plus no-
c.5,. bles, 8c de celles qui avoient le plus vécu dans le
luxe , la mole île &c ledefordre; & il les accoutu-
moit à ne point dédaigner les travaux les plus bas.
Elles avoient leur habitation feparée, mais enfuiteii
les mit plus loin , & dans une clôture plus exade ;
& elles furent bien-tôt jufques au nombre de cent
cinquante.
Ui.iuc.1. Etienneayant donc refolu deprendrela réglé mo-
naftique,principalement par le confeil d’Aimeri évêque
deClermont, envoya à Dalone, qui étoit le
feul monaftere régulier du pays, & qui fuivoitdéja
l’obfervance de Cîteaux, fans toutefois être encore
e’ 1' aê S reSe a 1 ordre. Il en fit venir des moines pour
inftruire les fiens; & le .jour des Rameaux de l’an
1142., il reçût la benedidion abbatiale de Geraud
L i v r e S q i x a n t e - N e u v i e’m e. 683
évêque de Limoges, qui donna auffi l’habit monaf-
tique à tous ceux de fes difciples qui étoient clercs,
laiffiant les autres dans l’habit qu’ils portoient auparavant.
Enfuite l’évêque avec fon clergé , le nouvel
abbé & fes moines menèrent en proceffion les reli-
gieufes au monaftere qui leur étoit préparé, ou l’abbé
les enferma pourn’en jamais fortir, fous quelque prétexte
que ce fut. Leur eglife etoit difpofée , comme
nous voyons encore celles des anciens monafteres de
filles, c’eft à-dire que la partie orientale comprenant
l’autel, étoit feparée du refte par une muraille , &
avoit une porte du coté du feptentrion par ou entraient
les-moines pour chanter les nodurnes & la
melfe. Le mur de feparation avoit une fenêtre grillée
avec un rideau en dedans, par où les religieufes re-
cevoient la communion, même les malades, que l’on
y apportoit en quelque état qu’elles fuftent. Car les
moines leur rendoient tous les fervices fpirituels,fans
jamais entrer dans la clôture; & elles avoient un
frere lai pour procureur, qui les fervoit quant aux
befoins temporels.
Les moines de Dalone qui avoient été appeliez
pour inftruire ceux d’Obafine, les trairaient durement
& avec peu de difcretion, comme s’ils avoient
dû fçavoir tout d’abord les pratiques monaftiques,
qu’ils n’avoient point apprifes. Ils s’en plaignoient à
l’abbé Etienne, qui les avoit accoûtumez à être traitez
charitablement ; & il les fjxhortoit a la patience.
Toutefois fçachant que le pape Eugene étoit en
France, & qu’après le concile de Reims il étoit venu
à Cîteaux , il alla l'y trouver ; car il defiroit depuis
long-temsdefefoumettre à cet ordre. L’abbé Etienne
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