
» ,86 H i s t o i r e E c c l e s i a s t i q u e :
AN.1143. aviez les yeux fur moi, vous écoutiez mes prières J
vous receviez avecempreffement tout ce que je vous
écrivois, vous le lifiez avec plaifir, vous y repondiez
avec bonté : au lieu que depuis quelque tems vous
ne me regardez plus. Il fe juftifie enfuite au fujet de
l’argent du défunt cardinal Iv es , dont on l’accufoit
d’avoir difpofé. Puis il ajoute : Jefçai que je vous ai
auifi déplu par la multitude de mes lettres : mais je
m’en corrigerai facilement. J'ai trop préfumé, ne
confiderant pas affez qui vous êtes 8c qui j e fuis : mais
votre bonté , vous en conviendrez, m’avoit infpiré
cette hardieffe. D’ailleurs l’affeétion pour mes amis
me prelfoit : car je m’en fouviens bien| je vous ai
fort peu écrit pour moi : mais il vaut mieux déplaire
à quelques-uns de mes amis, que de vous être importun.
Et maintenant même je n’ai pas ofé vous
écrire des périls dont l’églife eft menacée, 8t du grand
fchifme que nous craignons : mais j ’en ai écrit aux
évêques qui font auprès de vous, 8c vous le pourrez
apprendre d’eux: c’eft la derniere lettre de S. Bernard
au pape Innocent II.
Pierre le Venerable abbé de Clugni, écrivit aufifi
au pape en cette occafion une lettre , où avec beaucoup
de difcretion 8c de refpeét, il lui reprefcnte la
dignité du roi 8c du royaume de France , l’importance
de l’affaire 8c le péril dont l’églife étoit menacée
, 8c le prie d’ufer de condefcendance à l’égard du
jeune roi : fans toutefois s’ingérer adonner au pape
aucun.confeil particulier.
Tenta^pour Le clergé de Tournai voulut profiter de la divifion
Tournai.^6 excitée entre le pape ôc le roi pour l’affaire du comte
Nam 1 !.<"»• de Vermandois , dans laquelle Simon fon frere évê-
SpiciLp- 48° . *
L i v r e So i x a n t e H u i t i ’eme . jgy
¿que de Noyon fe trouvoit enveloppé. Ils voulurent
donc reprendre la procédure commencée fous le pape
Urbain II. 8c continuée fous Pafcal, pour le rétablif-
fement de l ’évêché de Tournai. Pour cet effet ils députèrent
à Rome Herman abbé de S. Martin : qui
ayant expliqué l’affaire au pape Innocent, en obtint
des lettres, par lefquelles il ordonnoit au clergé de
Tournai d’élire un évêque, le prefenterà l’archevêque
de Reims pour être facréj 8c s’il le refufoit , l’amener
au pape. En confequence de cet ordre, Abfa-
Ion abbé de S. Amand fut élu évêque de T o u rn a i,
Scl’éleélion notifiée à l'archevêque de Reims : mais
i l dit qu’il n’oioit facrer cet évêque , par la crainte
du roi 8c du comte de Vermandois. Ils furent donc
obligez de renvoyer à Rome, mais l’évêque élu ne
voulut pas y aller : craignant que la cour de Rome
ne fe laiffât gagner pour changer de fentiment, 8c
qu’il ne reçût un honteux refus. Les députez du
clergé de Tournai étant arrivez à Rome , montrèrent
leur décret d’éleêtion au pape , qui les reçût
agréablement; 8c ils attendoient de jour en jour fa
réponfe décifive , quand on apprit tout d’un coup,
que Simon évêque de N oyon les avoit fuivis 8c étoic
a Rome. Il fe plaignit au pape de l’éleétion que les
clercs de Tournai avoient faite au préjudice du ferment
qu’ils lui avoient prêté, comme à leur évêque :
mais le pape répondit , qu’il les avoit abfous de ce
ferment, 8c qu’ils n’avoient rien fait que par ion ordre.
Herman qui étoit à la tête des députez de Tournai
, repondit qu’ils n’avoient porté au pape aucune
plainte contre l’évêque de Noyon ; 8c que Téleêtion
a un autre évêque ne venoit d’aucune mauvaife vo-
E ee e ij
Sup. liv. LXI Y»
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