
A n . i i jo. On dira peut-être: D'où favons-nous que cette en-'
treprife eit venue de Dieu ? quels miracles faites-vous
pour mériter notre créance ? Ce n’eft pas à moi à répondre
à cette objeètion f il faut épargner ma pudeur.
Répondez pour moi ôepour vous-même, félon
ce que vous avez oüi Sc v û , ou plutôt félon ce que
Dieu vous infpirera. Ce peu iuffira pour mon apologie.
La meilleure cxcufe eft à chacun le témoignage
de fa confcience. Je me mets peu en peine du jugement
de ceux qui appellent le bien mal &. le mal bien;
& s’il eft neceftaire que l'un des deux arrive , j ’aime
mieux qu’on murmure contre moi que contre Dieu ;
& je ne refufe pas de perdre ma gloire, pourvû qu’on
n’attaque pas la fienne.
i-i* Revenant à fon fujet, il définit la confideration
une recherche attentive de la vér i té, la diftin-
guant par là de la contemplation, qui luppofe une
vérité déjà connue. Il divile en quatre l’objet de la
f confideration, & dit : Vous devez premièrement
v o ! s confiderer vous-même, puis ce qui eft au-def-
fous de vous , ce qui vous environne & ce qui eft au-
c• 6- deffus. Quant au premier point il s'étend fur les de-
-jtrem. 1.10. voirs du prélat, qui confident à arracher & détruire
, édifier & planrer, comme il eft dit danslamif-
fion du Prophète : il n’y a rien l à , dit-il , qui fente
lefafte, mais le travail; c’eft un miniftere & non
une domination ; & vous n’êtes pas plus qu’un prophète.
Vous êtes fur une chaire élevée, mais e’tft
pourvoir de plus loin; & il ne vous eft pas permis
d’être oifif, étant chargé du foin de toutes les égli-
fes. Voilà ce que les apôtres vous ont laide, non pas
de l ’or & de l’argent : fi vous en avez ce n’eft pas com-
L i v r e S o i x a n t î - N e u v 1 e’m e. 701
jiie leur fuccefteur, mais à quelque autre titre, Si
vous devez en ufer comme n’enufant point. Si vous
vous glorifiez, ce doit être comme faint Paul dans
les travaux Sc les louffrances. Vous devez domter les
loups Sc non pas dominer fur les brebis. Votre no-
blede confifte dans la pureté dés moeurs, dans la fermeté
de la foi, dans l'humilité, qui eft le plus bel
ornement des prélats.
Et enfuite : c’eft une chofe monftrueufe qu’un
courage bas dans un rang élevé, une vie méprifable
fur premier f iege, un vifage grave &c une conduite
legere, une grande autorité fans fermeté, Vous n’êtes
pas de ceux qui prennent les dignitez pour des
vertus, vous avez connu la vertu par experience avant
la dignité. Il releve enfuite la dignité du pape fuc-
ceffeur de S. Pierre, au deftus des évêques, pafteur
non feulement des brebis, mais des pafteurs, avec la
plénitude de puiiTance : vicaire de J. C. pour gouverner,
non un ieul peuple, mais tous. S. Bernard
toutefois appelle auffi ailleurs les évêques vicaires de
J. C. parce qu’ils tiennent de lui immédiatement
leur puiffance quoique plus bornée. Il exhorte en-
fuite le pape Eugene, à examiner le progrès qu’il a
fait dans la vertu depuis qu’il eft en place. S’il eft
plus patient, plus doux, plus humble, plus affable,
plus courageux,plus ferieux, plus défiant de lui-même
: ou s’il n’a point donné dans des défauts contraires.
Quel eft fon zele, fon indulgence, fa dif-
cretion , pour rcgler l’un & l’autre. S’il eft égal dans
l’adverfité & dans la profperité : fi dans le repos il
ne fe laide point aller à des railleries indecentes ;
c a r , dit-il, ce qui eft badinerie entre les feculiers eft
T t t t iij
A n . 1150.
1» Cor.xi. 23,
e. 7 .
c. 8.
Opufc. I I l f ( y ,
n. 3*.
1 1 . Conjid c. i l .
c. II,
e. 12«