
—— ~w*— £78 H i s t o i r e E c c l e s i a s t i q u e :
AN.1148. ^eur confeil le pape lui ordonna de continuer avec
la grâce de Dieu l’oeuvre qu’il avoit commencé. Il
voulut s’excufer fur fon âge de foixante 8c cinq ans
8c fur fon incapacité , mais le pape le jugea d’autant
plus propre à la conduite des ames qu’il la defiroit,
moins. Il eut regret de ne l’avoir pas connu plutôt,
8c déclara qu’il lui auroit donné l’archevêché d’Yorc.
En ce voyage Gilbert lia une étroite amitié avec faint
Malachie d’Irlande 8c faint Bernard : il fe trou voit
fouvent en tiers quand ils étoient feuls. Ils lui donnèrent
chacun leur croife, 8c faint Bernard y ajouta
une étole 8c un manipule.
Gilbert étant de retour en Angleterre, appella à
fon fecours des ecclefiaftiques pour la conduite de
fes religieufes ; 8c forma ainil une double congrégation
de filles fous la regle de S. Benoît, 8c de chanoines
réguliers fous la regle de faint Auguftin , 8c
leur donna des conftitutions écrites, qui furent confirmées
parle pape Eugene, 8c par fes fucceffeurs.
Dieu bénit tellement fon travail, qu’il fonda treize
monafteres, quatre de chanpines 8c neuf de religieufes,
contenant plus de deux mille perfonnes. il fonda
d’ailleurs plufieurs hôpitaux, de malades, de lépreux
, de veuves 8c d’orfelins. Sa vie étoit auftere;
il ne mangeoit point de viande, 8cs’abftenoitmême
de poiifon pendant l ’Avent 8c le Carême. Il ne fe
fervoit que de vaifelle de Bois ou de terre 8c de cuillères
de corne. Il ne portoit point de fourrures, 8c
toujours les mêmes habits hyver 8c été. Il étoit vêtu
de gris, 8c fut long-tems fans prendre l’habit ni la regle
de chanoine régulier: mais fes difciples lui re-
préfenterent, qu’il étoit à craindre que fous ce pré-
L i v r e S o i ^ a n t e - N . e u v i b ’me. 679
texte on ne leur donnât après fa mort un fuperieur
écranger. Il prit donc l’habit de chanoine, des mains
ds celui de la congrégation qui étoit le plus diftin-
gué pour fon mérité: il lui promit obéïffance en fai-
fant fes voeux, 8c le regarda toûjours depuis comme
fon fuperieur.
Etienne abbé d’Obafine vint auffi trouver le pape
Eugene à Clairvaux, 8c pour le même fujet. Il étoit
né en Limoufin de parens médiocres, ôc après avoir
étudié la fcience ecclefiaftique , il ne biffa pas de
demeurer dans le monde, prenant foin de fa famille
8c des pauvres : mais ayant été ordonné prêtre, il
réfolucdefe donner entièrement àDieu, ôc commença
à mener une vie auftere 8c à prêcher avec beaucoup
de force 8c d’onéfion. Les leètures qu’il faifoit
pour inftruireles autres, lui firent naître le deffein
de renoncer à tout, 8c fuivre J. C. dans une parfaite
pauvreté. Il confulta fur ce fujet Etienne de Mer-
coeur, quiavoitétédifcipledeS. Robert de laChefe-
Dieu , 8c ce faint homme lui confeilla d’exécuter au
plutôt fon pieux deffein. Etienne avoit déjà pour
compagnon un autre prêtre nommé Pierre, homme
d’une grande fimplicité, qui étoit dans la mêmere-
folution. Donc le jeudi après le jour des cendres,
ils affemblerent leurs parens pour leur dire le dernier
adieu, leur donnèrent un grand repas, 8c diftri-
buerent aux pauvres tout ce qui leur reftoit de bien.
Ils pafferent la nuit fuivante en prières, pour demander
à Dieu la grâce d’accomplir ce qu’il leur
avoit infpiré : puis s’étant revêtus d’un habit de religieux,
ôc marchant nuds pieds, ils partirent avant
le jourpour quitter leur pays ôc fe bannir volontaire-
An. 1148.
XL.
Etienne d’O -
baiîne.
Vita 4. Mifcell.
Baluz,, p, 69,
Boll. 8. Mar t.
to. 6, p, 800. r