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Am W pape Innocent, ÔC anima fi furieufement fon cierge,
que dêilors ils commencèrent à perfecuter ouvertement
les catholiques. Jufques-là qu après que aint
Bernardfut parti, le doyen de Poitiers brila aute
oii il avoir célébré; la meffe. x
Le duc d’Aquitaine feul appui du fchiime deçà
les A lp e s , étoit Guillaume IX. du n om , ne 1 an
1099. qui fucceda en iu t f . à Guillaume VIII. ion
pere. Il reconnut d'abord le pape Innocent, puis il
■Boiu 10. Frf. fe laiffa entraîner dans le fchiime par l evêque d Aniefm£
i Ayant infulté les moines de S. Jean d'Angeli
le jour même de la S. Jean lorfqu’ils celebroient
l’office ôc enlevé les offrandes, il leur en fit réparation
en plein chapitre : puis en leur prefencc ôc de
fes barons, il alla à l ’églife nuds pieds des verges a la
main ; 8c profternéà terre devant 1 autel, il le reconnut
coupable i 5c pour réparation , fit au monaltere
une donation confiderable dont l’adte eft date del an
rwfft 8c du pontificat d’Anaclet. Du confentement
de ce prince, Gérard s’étoit emparé de l’archeveche
de Bordeaux, fans toutefois quitter 1 evêche d An-
goulefme. Mais l’argent qu’il avoir diftribue a fes paf-
tifans venant à fe diffiper, 6c la vérité fe reconnoil-
fant de plus en p lus, les feigneurs commençoient a
l’abandonner. Il demeuroit donc dans les lieux ou il
fe croyoit le plus en feureté, 6c ne fe trouvoit pas volontiers
aux affemblées publiques,
xxx. Cependant on fit fçavoir au duc par des perfonnes
CTumfie°nduc qualifiées, quil’aprochoient avec plus de liberté, que
¿'Aquitaine. l’abbé de Clairvaux, l’évêque de Chartres, d autres
37' évêques 8c d’autres hommes pieux demandaient a
conférer avec lu i , pour traiter de la paix de 1 eglife,
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ôc on lui perfuada de ne pas éviter cette entrevûë, A n. 1134.
parce qu’il pourroit arriver, que ce qu’on croyoit im-
poffible deviendroit facile. On s’affembladoncàPar-
thenai, 6c on parla fi fortement fur l’unité de l’eglife
6c le mal du fchifme ; que le duc déclara qu’il pourroit
confentir à reconnoître le pape Innocent : mais
qu'il ne pouvoir fe refoudre à rétablir les évêques
qu’il avoit chaffez de leurs fieg e s , parce qu'ils l’a-
voient trop offenfé, ôc qu’il avoit juré de ne leur
jamais accorder la paix. On porta plufieurs paroles de
part ôc d’autre ; ôc comme la négociation tiroit en
longueur, faint Bernard eut recours à des armes plus
puiffantes, 6c s'approcha de l’autel pour offrir le faint
facrifice. Ceux qui pouvoienty aififter, c’eft-à-dire,
les catholiques , entrèrent dans l’eglife : le duc comme
étant d’une autre communion , attendoità la
porte.
La confecration étant faite 8c la paix donnée au ».js.
peuple, Bernard pouffé d’un mouvement plus qu’humain,
mit le corps de notre Seigneur fur la patene,
le prit avec lu i, ôc ayant le vifage enflammé ôc les
yeux étincelans, il fortit dehors, non plus en fup-
pliant, mais en menaçant -, ôc adreffa au duc ces paroles
terribles : Nous vous avons prié, ôc vous nous
avez mépriiez. V o ici le Fils de la Vierge qui vient à
vous, le chef ôc le Seigneur de l’églife que vous per-
fecutez : voici votre ju g e , au nom duquel tout genou
fléchit au c ie l, fur la terre ôc aux enfers : votre juge
entre les mains duquel votre ame viendra. Le mé-
priferez-vous auffi, comme vous avez méprifc fes
lerviteurs ? A ces mots tous les aiïïftans fondoient en
larmes, ôc priant avec ferveur, attendoient l’évene-
O o o ij
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