
A n .i i 16.
Tetr. u .m ira c .
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Tel. Ticlav•
Taneg. bibl.
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3<?4 H i s t o i r e E c c l e s i a s t i q u e .
étoic abbé de C lu gn i, quand il s’éleva dans cet ordre
un fchifme fcandaleux. Pons predeceffeur de Pierre
s’ennuyant du féjour de la Paleftine , revint en Italie
; & ne voulant pas aller à Rome, il s’arrêta dans
l’évêché de T re v ife , ôc y bâtit un petit monaftere.
Mais il n’y demeura pas long-tems , ôc revint en
France : où Tes partifans eiTayerent de le faire paiTer
pourunfaint, faifant courir le bruit qu’il portoit des
cercles de fer fur les bras ; qu’il ne mangeoit point ;
qu’il prioit continuellement;: qu'il guerifToit toutes
fortes de maladies. Ayant fait marcher devant lui
cette réputation, il prit fon te m s pendant l’abfence
de l’abbé Pierre, occupé en Aquitaine de quelques
affaires de l ’ordre ; & feignant de ne vouloir pas aller
à C lu gn i, il ne laiffoit pas d’en approcher peu à peu.
Enfuite ayant pris avec lui quelques moines fugitifs
ôc quelques laïques armez, il fe prefenta à Clugni ,
où on ne l’attendoit point : chaifa le prieur Bernard ,
vieillard venerable ôc les moines , qui fe difperferent
de côté ôc d’autre , ôc entra dans la maifon avec
toute fa fuite , dans laquelle il fe mêla même des
femmes.
Pons étant ainfi entré à C lu gn i, fe rend maître
de tou t, oblige ceux qu’il y trouve par menaces ôc
par tourmens, à lui prêter ferment de fidélité, chaife
ceux qui le refufent, ouïes met dans une rude prifon.
Il prend les c ro ix , les calices, les reliquaires, les fait
fondre , ôc en tire une grande quantité d’or , pour
payer fes troupes ; c’eft-à-dire, les gentilshommes du
voifinage , ôc tous ceux qu’il peut attirer par l’efpe-
rance du butin. A v e c leur fecours il fe jette fur les
châteaux ôc les fermes du monaftere, ôt ravage tout
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par le fer ôt parle feu. Cette guerre dura tout l’été
de l'année 112.5. depuis le commencement du Carême
jufques à la faintRemi. Le prieur Bernard ôc les religieux
les plus confiderabies fedéfendoient comme ils
pouvoient dans les lieux les plusfûrs.
Le pape Honorius ayant apris ce defordre-, envoya
le cardinal Pierre de Fontaines fon légat : qui avec
Hubaud archevêque de Lion , prononça un terrible
anathême contre Pons ôc les Pontiens, car on nom-
moit ainfi fes partifans. Toutefois enfuite lé pape ap-
pella devant lui les parties à un certain jour,, pour
juger leur différend. Le parti de l’abbé Pierre obéît
auffi-tôt, il alla lui-même à R om e ; ôc entre tous
les prieurs de tordre, il choific Matthieu prieur de
S. Martin des Champs pour le mener avec lui. Pons
v in t auffi à Rome avec les fiens , quoique malgré
lu i , ôc fut appelle pour fe prefenter au jour nommé.
Mais comme il étoic excommunié, ôc par confequent
incapable félon les canons, de comparoître en jugement
: le pape lui envoya dire, qu’il fe mîc en état
d’être abfous, en fatisfaifant pour les maux qu’il
avoit faits. Pons répondit,qu’homme vivant fur la
terre ne pouvoit l’excommunier ; ôc qu’il n’y avoic
que S.. Pierre qui eût ce pouvoir dans le ciel. Le pape
fut encore plus irrité de cette réponfe , tout Rome
en fut fcandalifé; ôc on traita Pons de fchifmatique.
Le pape envoya demander à ceux qui étoient venus
avec lu i , s’ils vouloient au moins fe mettre en devoir
de fatisfaire : ils en convinrent, entrèrent au palais
nuds pieds, feconfefferent coupables, ôc furent auffi-
tôt abfous de l’excommunication. Enfuite ils plaidèrent
leur caufe fans rien omettre de ce q u i. pouvoit
Z z iij
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