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pouvons diilimuler de voir notre mere outragée,mé-
prifée, foulée aux pieds. Nous demeurerons fermes, 6c nous combattrons pour elle jufqu’à la mort ,■ s'il
eftbefoin, parles armes qui nous font permifes, c’eft-
à-dire par nos prières Si nos larmes devant Dieu.
Pour moi , outre mes prières ordinaires pour vous &
pour votre royaume : j ’avoue que j ’ai encore foute,
nu votre parti auprès du pape par mes lettres Si par
mes agens, prefque jufqu’à bleffer ma confidence,
& jufqu’à m'attirer , je n’en dois pas difconvenir ,
la jufte indignation du pape. Mais vos excès continuels
font que je commence à me repentir de mon
imprudence, Si d’avoir trop excufé votre jeuneife.
Te défendrai déformais la vérité félon mon pouvoir. .
Il écrivit fur le même fujet aux deux principaux
miniftres du jeune r o i , Joifelin évêque de Soiflons, 6c Suger abbé de S. Denis , qui avoient été les médiateurs
de la paix entre le roi 6c le comte de Champagne
, avec l’évêque d’Auxerre Sc faint Bernard. Il répond
aux plaintes que le roi faifoit contre le comte
Sccontrelui Scajoute: Nous étions encore convenus,
que s’il naifloit quelque différend pour l’éxecution de
ce traité, il feroit examiné entre nous quatre , fins
que les deux princes ufaiTent de voyede fait l’un contre
l’autre, jufques à ce que nous euiïionS eflayé de les
reconcilier. C ’eft ce que le comte demande inftam-
ment , mais le roi le refufe. Enfin je veux que le comte
ait tort : mais qu’a fait l’égliie ? Qu’a fait non feulement
l ’églife de Bourges, mais celle de Chaalons,
celle de Reims, celle de Paris? De quel droit le roi
ofe-t-il piller les terres des églifes, 6c empêcher qu’on
ne donne des pafteurs aux ouailles de J. C. en dé-
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fendant aux uns la promotion des évêques élus, 6c
preferi vant aux autres un délai pourl’éleéfion, ce qui
cil ians exemple , 'jufques à ce qu’il ait tout confu-
mé, en pillant le bien des pauvres, 6c défolé le pays ?
Eit -c e vous qui lui donnez de tels confeils ? Il eft
étonant qu’on le falTe contre votre avis : mais il eft encore
plus étonant Sc plus mauvais, quecefoitde votre
avis. Donner de tels confeils, c’eft manifefte-
ment faire fchifme ,'refifter à Dieu, réduire l’égli-
fe en fervitude. Le mal que fait un jeune roi ne fuf
eft pas imputé , mais à fes vieux miniftres.
S. Bernard écrivit fur le même fujet au cardinal
Etienne évêque de Paleftrine , qui avoit été tiré de
l’ordre de Cîteaux. Vousfavez, dît-il, avec quelle
chaleur j ’ai foutenu les intérêts du roi auprès du pape;
6c le bien que j’ai dit de lui , parce qu’il faifoit de
belles promeiTes. Maintenant qu’il me rend le mal
pour le bien,je fuis contraint d’écrire le contraire. J’ai
honte de mon erreur 6c delafaufte efperance quej’a-
vois conçue de lui, & je rends grâces de n’avoir pas
ete exaucé lorfque je fuppliois pour lui par fimplicité.
Jecroyois avoir de la déference pour un roi pacifiq
u e ^ il fe trouve que j ’ai flacté le plus grand ennemi
de l’églife. On foule aux pieds les chofes faintes
chez nous : l ’églife eft réduite à une honteufe fervitude.
Car on empêche l’éleêtion dès évêques , 6c
fi le clergé ofe en élire quelqu’un ,, on ne lui permet
pas de fe faire facrer. Enfin l’églife de Paris eft dans le
deiiil Sefanspafteur,. Scperfonne n’ofe parler d’y en
mettre un autre. On ne le contente.pasdedépoüiller
les maifons épifcopales des biens que l’on y trouve: on
porte les mains facrileges furies terres 6c les hommes
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