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id* S» Loei dei.
484 H i s t o i r e E c c l e s i a s t i q u e .
Après ces reftitutions Ponsdiffribua aux pauvres
ce qui luireftoit de biens j 8e partit avec íes fix compagnons
lanuitdu Jeudi auVendredi Saint pour aller
en pelerinage, n’ayant chacun qu’un fimple hab it,
un bâton, une;gibeciere 8e marchant nuds pieds. Ils
allèrent d’abord à S. Guillem du defertpar un chemin
très-rude. Le lundi de Pâques ils partirent pour aller
à faint Jacques en Galice, 8e firent ce voyage vivant
d’aumônes ians rien garder pour le lendemain. La
ils s’affermirent dans la refolution defe retirer dans
un defert, 8e y vivre du travail de leurs mains : à quoi
l’archevêque de Compoftelle les encouragea, 8e voulut
d’abord les retenir dans fon dioceie : mais fai-
fant reflexion qu’ils feroient peu de fruit dans un pais
dont ils ne favoient pas la langue, il leur confeilla de
retourner chez eux, les exhortant à perfeverer dans
leur fainte refolution. ils allèrent enfuite au mont
S. Michel, à S. Martin de Tours, à S. Martial de L imoges,
à S. Léonard, 8c terminèrent leur voyage a
Rodes.
Ademar qui en étoit évêque, étoit un prélat vertueux
8c liberal, qui vers le même tems donna des
biens confiderables pour la fondation de l’abbaye du
Loc-dieu, fille deDalones, 8c réunie avec elle â l’ordre
de Cîteaux, il reçut les fept amis avec joye ÔC
refpeèt, lâchant que c’étoit de? gentilshommes connus
8c voifins; 8c le comte de Rodes ¿prenant que
Pons de Laraze fon ancien ami ¡ctoit à l’évêché , le
vint voir 8c lui offrit tout ce qui dépendoit de lui
pour l’execution de fon deffein. L’évêque 8c lui offrirent
aux fept amis des villages 8c des églifès abandonnées
pour bâtir un monaftere : mais ils fuyoient le
commerce du monde8c cherchoientles folitudes. Ils A N . in i .
choifirent donc le lieu de Salvanés au diocefe de La-
vaur que leur donna un feigneur nommé Arnaud
du Pont j 8c ils commencèrent à y bâtir des cabanes
de leurs propres mains 8c à défricher la terre. Leur
réputation vin t aux oreilles des évêques voifins de
Locjeve 8c de Beziers , 8c du peuple de ces diocefes ï
d’où plufieurs perfonnesles venoient vifiter 8c leur
offroient des prefens.
Le païs étant affligé d’une grande fam in e , une
multitude innombrable de pauvres vint à Salvanés :
parce que ces pieux folitaires exerçoient l’aumône,
fhofpitalité 8c toutes les autres oeuvres de mifericor-
de. Effrayez de cette multitude ils vouloient s’enfuir :
mais Pons les retint 8c leur dit : Il faut vendre nos
beftiaux 8c tout ce que nous avons pour affifter nos
freres, 8c mourir enfuite avec eux s’il eft befoin : cependant
je vais demander l’aumône pour eux aux
grands du .fiecle. Ayant ainlï parlé il partit monté
fur un afne un bâton à la main. Mais Arnaud du
Pont ayant aprisqueles folitaires vouloient tout vendre
pour les pauvres, ouvrit fes greniers 8c donna
une quantité de viv re s , qui multiplia de telle fo r te ,
qu’il y eut de quoi nourrir tout ce peuple jufques â la
récolté. Pons revint aufll avec une quelle abondante
8c le jour de la S. Jean , il donna un repas à ceux
qui s’y trouvèrent, puis il les congédia remplis de re-
connoiffance.
Peu de temsaprès l’habitation de Salvanés étant augmentée
en biens 8c en nombre de folitaires:on trouva
qu’on pouvoit y fonder une abbaye 8c y pratiquer
l’obfervance reguliere. La queftion fut quel inilituc on
P p p i i j