
impériale , & fes actions prenant crédit, ils firent
partir au commencement de 172,0 cinq vaifleaux
richement chargés pour les Indes Orientales , malgré
les menaces des Hollandois , qui de leur côté paroif-
foient difpolés à continuer d’empêcher par la force
un établifïèment qu’ils croyoient tout-à-faic préjudiciable
à leur commerce.
Un fi grand2 armement fut encore fuivi d’un plus
confîdérable en 172,1, & les Oftendois équipèrent
fix vaifleaux , dont trois furènt deftinés pour la
Chine , un pour Moka , un pour Surate & les côtes
de Malabar , & le fixiéme pour Bengale : ces vaif-
lèaux furent le S. Jofeph, le wartemberg , la maifon
d’Autriche , l’impératrice , la galère de Bruxelles, &
la ville de Gand.
Les Hollandois de leur côté, pour arrêter le commerce
& les grands progrès des Flamans & des Brabançons
Autrichiens, ordonnèrent au mois d’avril de
la même année , la confifcation d’un vaifleau armé
pour les Indes Orientales par les négocians de Bruges
, & malgré les oppofitions des miniftres impériaux,
réfidans à la H aye, en indiquèrent la vente par
des affiches'au 2 S du même mois.
. Les Forbans Anglois ayant pris dans les mers de
Madagalèar un navire d’Oftende richement chargé
qui revenoit en Europe, cette nouvelle perte fembla
dé courager la c om p a g n ie im p é r ia le , qui n’en eut
pas plutôt l’avis , qu’elle ordonna le défarmement
d’un autre bâtiment qui étoit en charge dans le port
d’Oftende , prêt à mettre à la voile pour les Indes :
mais l’arrivée de deuxdefesnavires aux mois demai&
de juin 17 22 j & l’attente de deux autres qui arrivèrent
en effet au mois - de feptembre fuivant, tous richement
chargés particulièrement de café, de drogues
6c d’épiceries , changea la face des affaires de la
c om p a g n ie , qui par la vente de tant de préçieufes
marchandifes, fe’trouva non - feulement en état de
réparer toutes fes pertes , mais epcore de continuer I
Ion commence avec plus de fuccès & de réputation
que jamais.
Jufques là les intereffés à la c om p a g n ie d’Gftea-
de , s’étoient tpujours flattés , mais aflez inutilement,
qu’ils fe verroient à la fin autorifés par des lettres patentes
impériales à faire le commerce des Indes
Orientales. 11 e-ft vrai que l’empereur avoir toujours
eu defîein de leur accorder ces lettres, mais les
vives repréfentations & les inftanees continuelles* des
H oilandois en avoient fufpendu l’exécution : & quoiqu’il
ne leur eût jamais refufé fes pafïéportspour faire1
ce négoce , ils nel’avoient fait jufquesrlà que comme
Hiae c om p a g n ie établie par l’autorité du prince.
Enfin ces lettres tant défîrées & fi long-rtemps con-
teftées & différées , leur furent accordées au mois
d’août 1723 , mais les plus amples & les plus authentiques
qu’aucune compagnie de commerce en eût
encore reçu de larproteârfon, de fon fouverain.
Dès le mois de décembre de Tannée précédente,
le bruit courut que milord Cabharn Anglois , directeur
général du commerce à la cour de Vienne, avoit
fait ryuffir cette affaire y & i’on ajQUKÛt qu’outre la
remife pour trois ans de tous les droits d’entrée &
de fortie dûs à fa majefté impériale dans les pays-bas
Au cri chiens., l’empereur faifoit à la compagnie -un
don gratuit de trois cent mille écus pour la dédommager
des pertes qu’elle pourroit faire dans les premières
années de fon établifîement.
Sur les avis plus certains que la compagnie eu
eut, elle arma un vaillèau pour le Bengale , dans la
réfolution d’y prendre poiïeffiôn du fort que le Mç>-
gol lui avoir permis de faire fur fes terres , pour la
fureté du comptoir qu’elle y avoit déjà établi : & pour
trouver encore plus d’accès auprès de ce monarque ,
le fieur Cobbah commiftaire impérial s’embarqua
fur ce vaifïèau , qui mita la voile le' 7 janvier 1725./
Ce député étoit chargé de complimenter le Mogol de
la part de l’empereur, & de lui préfenter fix canons
de fonte au^ armes de la maifon d’Autriche.
Ces premières nouvelles de l’expédition des lettres
patentes del’empereurenfaveur delà compagnied’OC,
tende, réunirent les Anglois & les Hollandois pour
tâcher d’en obtenir la révocation , &’ils travaillèrent
avec d’autant plus de chaleur , qu’on répandit dans
le public le plan fur lequel la compagnie dêvoit ê t r e
établie.
Par ce plan i°. Les directeurs font fixés au nombre
de huit choifîs parmi les plus riches &les plus habiles
Négocians des Pays-Bas Autrichiens, avec chacun
quatre mille livres d’appointements par an, lefquels
ne pourront refter en direction que pendant fix années,
après lefquelles ’ ils ne pourront être de nouveau
choifis qu ils n’ayent paffé un an entier hors d’emploi.
2°. Chaque année l’aflemblée générale de la compagnie
procédera à l’éleCtion des perfonnes qui devront
être propofées pour directeurs, dont la lifte
fera préfentée à l’empereur , qui de trois perfonnes
en pourra çhoifir une qui fera préférée aux autres.
3°. L’aflembiée des directeurs 3 la caiffe, les comptes
& les bureaux delà compagnie fe tiendront à
Anvers les trois premières années, & les trois autres
années fuivantes , à Gand ou â Bruges, mais les ventes
fe feront à Oftende ou à Bruges.
4°. Les fonds feront de dix millions de florins argent
de change , divifés en dix mille aCtions de mille
florins chacune.
y0. Les prifes que les vaifleaux de la compagnie
feront en tems de guerre contre les ennemis de l’état,
lui appartiendront & fe vendront à fon profit.
6°. Toutes les provifîons de guerre & de bouche
de même que tous les agrès , artillerie , armes & généralement
toutes les provifions navales, tant pour
les vaifleaux que pour la fureté des port, forts , 8c
faCto ries de Ici compagnie, feront exemptes de payer
aucuns droits,, tant à fa majefté impériale , qu’à tous
autres feigneurs, villes , nj communautés eccléfiaftir
ques des pays-bas,
7°; Enfin toutes fortes de marchandifes qui feront
tranfportées dans les vaifléaux de la compagnie qui
viendront des Indes ou d’ailleurs, payeront fans
exception d%xcuaes, pour droit d’entréç ôc dç foïtj#
C O M
tort Flandres , fçavoir jufqu’au mois de feptembre
1724 ? quatre pour cent, & après ce terme expiré fix
pour cent.
La plupart des articles de ce projet;, font em-
plôyés dans les lettres patentes, à la réferve pourtant
de ceux qui regardent 1* fonds de la compagnie
qui font un peu diftérens, comme on le peut
voir plus bas.
Les chofes étoient en cet ;écat, lorfque les lettres
arrivèrent à Bruxelles. Elles parurent d’abord en Latin
, en Allemand , en Flamand , en Anglois & en
François, & l’on longea même à les traduire en Ef-
pagnol & en Italien , elles font datées du 19 décembre
1722 , & contiennent cent trois articles ,
dont on ne donnera ici que l’extrait des principaux,
la plupart des autres n’ayant rien de par tien lier &
qui ne leur foit commun avec toutes les autres compagnies
de commerce , ou fe trouvant dans le plan
ci-defius rapporté.
Dans le préambule , l’empereur prend non-feulement
les titres qui lui appartiennent , ou comme-
empereur, ou comme chef de la maifon d’Autriche ,
mais auffi tous ceux de la couronne d’Efpagne, foit
en Europe , foie dans les autres parties du monde y
entr’autres le titre de roi des Indes Orientales &
Occidentalesdes ifles Canaries , & des ifles & terres
fermes de la mer Océane.
La conceffion de la compagnie eft pour 30 années.
Ses limites $ les Indes Orientales & Occidentales
, toutes les côtes- d’Afrique tant en deçà qu’au
delà du Cap de Bonne - Efpérance y enfin tous les
ports-, havres , lieux, rivières, où les autres nations
trafiquebt librement, en- obfervant néanmoins les
maximes & coutumes reçues & approuvées par le
droit.
Le f o n d s de la Compagnie eft fixé à fix millions
de florins argent de change , en 6,000 aérions de
100o florins chacune.
Les actionnaires ne pourront avoir voix délibérative
dans les affemblées générales, s’ils n’ont en
propriété & fous leur nom au moins douze aérions,
ce qui pourtant ne s’entend que des nationaux , les
étrangers n’y pouvant avoir ni féance ni voix , quelque
nombre d’aétions qu’ils puiffent avoir.
Les directeurs tiendront leurs affemblées à Anvers,
& y réfideront pendant les trois premières annés , &
pendant les trois années fuivantes à Bruges ou à
Gand , fuivant que l’aflemblée générale le trouvera
à propos ; ce qui fe continuera ainfi alternativement
de trois ans en trois ans.
La compagnie aura la liberté d’embarquer de
1 artillerie & autres attirails de guerre autant qu’elle
aura befoin pour fa navigation & la fureté de-fon
commerce , comme aufli toutes forces de marchandifes,
même celles de contrebande.
Elle pourra pareillement charger fur fes vai fléau y
tontes matières d’or & d’argent monnoyé ou non !
•monnayé , pourvu , , à i’égara des èfpèces , qu’elles i
n’ayent point cours dans les pays-bas Autrichiens. !
11 lui fera loifible de mettre dans les forts , châ- ]
COM '667
féaux & places qu’elle aura acquis aux Indes , toutes
fortes d’armes, canons, munitions de guerre & de
bouche , dè fondre des canons & autres armes en
tels lieux & en tel nombre qu’elle en aura befoin,
fur lefquelles les armes Impériales feront empreintes
, & au-deffous celles dé la compagnie : enfin de
faire tout ce quelle croira néceflaire pour la défenfe
& la confervation de fes places.
Elle pourra armer & équiper tel nombre de
vaifleaux de guerre ou marchands qui lui feront nccef-
faires , même faire conftruire fes vaifleaux dans
les ports des pays-bas , en Italie & ailleurs , excepté
! dans ceux d’ifirie & de Dalmatie , appartenais à fa
i majefté impériale , où cette conftruétion eft permife
privativeme.nt à une autre compagnie [ c’eft la
compagnie d’Orient établie à Vienne. Voyez le
paragraphe précédent ] avec laquelle compagnie
celle d’Oftende pourra néanmoins convenir pour en
acheter au moins deux ou trois vaifleaux par an.
Il lui eft permis d’acquérir aux Indes des terres,
d’y établir des faCtories & colonies ; d’y faire bâtir &
conftruire des ports , havres, châteaux , fortereffes,
de les, pourvoir d’artiiierie , d’armes , dé munitions
de boiiche & de guerre , d’y entretenir des garni-
fons pour les défendre. , & de lever & tenir fur
pied tel corps de troupes qu’elie jugera à propos
i dans l’étendue de fa concelhon.
Elle eft encore autorifée de traiter même au nom
de fa majefté impériale avec les princes fouverains
& états des Indes ,pour la liberté de fon commerce,
fans _toutefois pouvoir déclarer la guerre à aucune
puiflance fans le confentement de ladite majefté.
Pour reconnoiflance de cette conceffion & oétiroi
la compagnie fera tenue à perpétuité d’offrir en
fo rme d’hommage à fa majefté impériale & à fes
hoirs & fucceffeurs à chaque mutation , un lion
d’or Couronné, du poids de 20 marcs , tenant les
armes de la compagnie qui font une doublé aigle
déployée , portant entre fes deux têtes un globe
couronné.
Enfin fa majefté impériale promet de protéger la
nouvelle compagnie , & la défendre envers & contre
tous ceux qui l’attaqueront injuftement , même
en cas de befoin , d’employer la force de fes armes
pour la foutenir & maintenir dans la liberté entière
de fon commerce & de fa navigation , de lui faire
faire raifbn de toutes les înjuftices , injures & mauvais
traitemens , en cas qu’aucurie nation entreprît
de l’y troubler , fongeant au furplus à lui procurer
tous les avantages & facilités pofnbles par les traités
de paix , d’alliance & de commerce que fadice majefté
fera à l’avenir.
Auflî-tôt que ces lettres-patentes eurent été publiées
& regiftrées dans les cours fouveraines des.
pays-bas Autrichiens , les directeurs qui conformément
au projet qu’on a donné ci-defiùs , avoient
été choifis & nommés par fa majefté impériale ,
prêtèrent ferment entre les mains du marquis de
Prié confeiller d’état aulique , & plénipotentiaire de
l’empereur aux pays-bas, tinrent peu de jours après
I