
fiant commençoit à fe fortifier , & profîtoit déjà des
avantages de la paix couclué à Utreck en 1713 ,
lorfque la mort de Louis XIV arrivée en feptembre
T7 r S' i ayant fait prendre comme une nouvelle face à
la France , on y prit aufli de nouvelles mefures pour
l’avantage de cet établiffement.
Le fieur Crozat ayant en même tems demandé à
remettre fon privilège au ro i, la permifiion lui en
fut accordée par arrêt du confeil d’etat du 13 du mois
d août 1717 j & par un édit du même mois , enretnf-
tre en parlement le 6 du mois fuivant, il fut établi une
compagnie de commerce, fous le nom de compa-
g n i t d'ocident i à qui, outre tout ce que compre-
noit la conceffion de celle de la L o u ifia n é , on réunit
encore le traite du caftor de canada qu’avoient eu
les fieurs Aubert, Neret, & Gayot dès l’année 1706,
& qui deyoit expirer à la fin de 1717.
Les claufes & les conditions de cet établilîement
font contenues & expliquées en ç 6 articles, une partie
defquelles eft ordinaire à ces fortes de concédions,
& l’autre partie ne peut convenir qu’à celle-ci, 011 les
finances & le commerce fèmblent avoir un égal interet
: "celui-ci par le parfait établiffement d’une colonie
fi utile pour tant de riches marchandées qu’on en
peut tirer : celles-là par le débouchement d’une partie
de ces billets que l’on appelloit b ille ts de V é ta t,
qui ne pouvoient fufifter plus long-tems fur le pied
qu’ils étoient.
On ne parlera ici que des articles qui ont quelque
ehofede propre à la nouvelle compagnie.
Par le premier article, elle eft établie fur le pied
dés édits des mois de mai & août 1664, donnés lors
de l’établiflèment des grandes compagnies des Indes
orientales & occidentales ; & encore conformément
a ceux des mois d août 1665? , & de décembre 1701 ,
particuliérement pour la non-dérogeance, à l’égard
des nobles qui y prendront des aCtions.
Le fécond article régie à z 5 années la concelîion ,
&le privilège exclufîf de faire tout le commerce de
la Louifiané j & pour le même tems, celui' de recevoir
tous lescaftors gras & £èçs ,qui feront traités
dans la colonie du Canada : le premier à commencer
du jour de l’enregiftrement des lettres patentes ; &
l’autre feulement au premier janvier 1718, pour finir
tous deux à la fin de 1741. '
L'etendue de la L o uijiane eft fixée par le cinquième
article , & les bornes de cette province déclarées
les mêmes que celles accordées audit fieur Crozat par
les lettres patentes de 1712.. Sa Majefté cédant cette
partie de l’Amérique découverte par fgs ordres à la
compagnie d 'o c c id e n t, en toute propriété, Seigneurie
& juftice, & ne fe refervant, &à fes fuceeffeurs
rois , que la feule foi & hommage , avec une cou-
rone d’or du poids de trente marcs à chaque mutation
de roi.
Il eft défendu à la compagnie par le vingtième article,
defefervirpour fon commerce d’autres vaiftèaux
que de ceux à elle appartenans , ou aux Sujets des .
rois de France , dont les équipages feront François ,
& qyi feront armés dans les ports du royaume 5 & il
lui eft pareillement fait inhibition de faire fes retours
ailleurs qu’en France , aufli bien que d’envoyer en
droiture delà Louijiane des vaiftèaux f u r les côtes‘de
Guinée.
Parle vingt-deuxième , il eft déclaré que tous les
effèts , marchandifès , vivres, & munitions qui fé
trouveront embarqués fur les vaiftèaux de la compa-
S nj e > feront cenfés & réputés lui apartenir, à moins
qu il n apparoifle du contraire par des connoiflèmens
en bonne forme.
Le 13 e met au nombre des regnicolés , nonfeule-
ment les François qui pafferont & s’établiront dans
j la Louijiane y mais encore ceux qui y naîtront des
habitans François , & même des étrangers Européens ’
faifant profeffion de la religion catholique, leur con-
ferve les memes privilèges que s’ils étoient nés dans le
royaume, les déclarant d’ailleurs par le 14e aticle ,
exempts de tous droits fufceptibles d’impofitions, tant
fur leurs perfonnes & efclaves, que fur leurs marchan-
difès pendant les z 5 années que doit durer la con-
ceflïon.^
Les Z5 , z7 , & z8 articles contiennent diverti5
exemptions, ou totales , ou en partie des droits
d entree, de fortie , péages , travers , & autres impo-
fîtions fur les marchandifès & effets appartenans à la
; compagnie j foit qu’ils foient du cru du royaume ,
foit quelle les faflè venir des pays étrangers, en
rapportant neanmoins par elle dans 18 mois des certificats
qu’ils auront été déchargés dans les lieux de
leur deftination : ce qui s’entend pareillement aux
marchandifès du cru de la Louijiane appartenantes
a la compagnie , qui viendront en France, qui ne
payeront que la moitié des droits d’entrée pendant
dix ans , a la réfèrve du plomb , du cuivre, & des
autres métaux , pour lefquels fa majefté accorde une
exemption totale.
Pour exciter la compagnie à faire conftruire des
vaiftèaux dans les pays de fa conceffion ; fa majefté
par le z^e article lui accorde flir fon tréfor Royal,
par forme de gratification , 6 livres par tonneau ,
pour les vaiftèaux duportdezoo tonneaux & au def->
fus , & 9 livres auïïi par tonneau pour ceux de z f o
tonneaux & au deflîis qui y auront été bâtis , feulement
néanmoins pour la première fois qu’ils arriveront
dans les ports du royaume.
Sa majefté ordonne par le 31e article , qu’il fera
delivre par chaque année de fes magafins à la compa« .
g n ie quarante milliers de poudre au prix coûtant, pendant
tous le tems de fon privilège.
Dans le 3 ze article & fuivans , jufques & y non
compris le 41e il eft traité des fonds de lucompaghie ,
& delà maniéré que les billets de l’état y feront portés
& reçus.
i°.Les aCtions font fixées à cinq cent livres cha*
cune , payables en Billets de l’état.
z°. Les billets des aCtions font établis dé deux
fortes 3 les uns d’une feule aCtion , & les autres de
dix; les uns & les autres payables au porteur.
j 3°* La permiffion eft accordée aux étrangers,
d acquérir tel nombre d?aCtions qu’ils jugeront à propos
, & lefdites actions déchargées de tous droits d’au-
beine , confifcation, réprefailles , &c.
4°. Les aCtions font regardées . comme marchan-
difes , & en cette qualité pourront être vendues ,
achetées , & négociées, ainft que bon femblera aux
propriétaires.
5°. Tout actionnaire qui aura fo aCtions, aura
droit de voix délibérative aux affemblées , & deux
voix s’il en a cent, & ainfi par augmentation de 50
en 5 o.
6°. Les billets de l’état, qui feront le fonds des
aCtions-, feront convertis en rente au denier zf ;
dont les porteurs des aCtions jouiront.
7°. Les arrérages de l’année 1717 dus pour les
billets de l’é tat, qui feront portés à la compagnie,
feront employés à fon commerce , fans qu’il foit
jamais loifible aux directeurs d’y employer aucune
partie des années fuivantes.
Dans le 41e article , le roi fe réferve le premier
choix des directeurs , laiflknt néanmoins à ia compagnie
la liberté d’en nommer trois nouveaux, ou
de continuer les anciens après deux années révolues,
depuis ladite nommination faite par fa majefté.
Le 4ze ordonne que le bilan général des affaires
de la compagnie fera dreffé tous les ans par les
-directeurs, & les répartitions réfolues arrêtées dans
une aflèmblée générale des actionnaires après ledit
bilan arrêté; & par le 43e il eft réglé que pour
faciliter tant le payement des intérêts de$ aCtions,'
..que celui des profits , il fera fait & affiché des états ,
pour avertir les actionnaires de l’ordre qui fera
ténu chaque année , & que lefdics états feront même
inférés dans les gazettes publiques.
Le 44e article déclare, que les aCtions & les effets
de la compagnie, aufli bien que les appointemens
de fes directeurs , Officiers , & employés ne pourront
être faifis, non pas même pour les propres
deniers & affaires de fa majefté-, fauf néanmoins aux
■créanciers de faire faifir s’ils veulent les profits &
les répartirons des actionnaires ; pour la liquidation
defquels, les directeurs ne feront point obligés
de faire voir leurs livres , ni rendre compte, mais
en feront crus les comptes & états délivres par le
caiffier général.
Le 4Çe parle de la fuppreflîon de tout les billets
de l’é tat, qui auront été employés en aCtions de la
,icompagnie lefquels feront brûlés dans l’hôtel de la
ville de Paris , en préfence des prévôt des marchan-
chands & echevins, & autres perfonnes commifes à
cet effet par le même article.
Les 4 6 , 47, & 48 articles règlent les privilèges
, droits , & fonctions des directeurs ; & le 49 ,
la manière de tenir les livres de la compagnie.
Par les ?o & ç i articles , le roi fait don à la
compagnie des forts, magazine, maifons , canons,
armes , poudres , brigantins , bateaux , pirogues ,
& autres uftenciles qui font à la Louijïanne appartenans
à fa majefté , & pareillement des vaiftèaux ,
marchandifès , & effets remis à fa majefté, par le
fieur Crozat , à quelques fommes qu’ils puifïènt
monter , à la charge de cranporter fix mille blancs &
trois mille noirs dans les pays de fà conceffion,
pendant la durée de fon privilège.
Le 5 z e article affure à la compagnie après l’expiration
de fon privilège, en cas qu’il ne lui foie
point continué , la propriété à perpétuité de toutes
ifles & terres qu’elle aura habitées , ou fait habiter ,
avec les droits utiles $ cens , & rentes qui feront dus
par les habitans j fa majefté renonçant à cet égard
a tout droit de retrait ou autre _, à condition que
lefdites terres & ifles ne pourront être vendues qu’à
des fujecs de fa majefté, à laquelle feront néanmoins
remis par la dite compagnie les forts, armes , &
munitions appartenans à la compagnie, dont la
valeur lui en fera payée fuivant la jufte eftimation
qui en fera faite.
La conftruCtion des : eglifes , & l’établiffement
des curés .& autres eccléfiatiques dans toute l’étendue
de la conceffion, tant pour le fervice. des habitans
catholiques , que pour la converfion & l’inftruc-
txon des Indiens , lont ordonnés & réglés par le
5 3 e article.
Enfin des crois derniers articles , le 54e donne
des armes à la compagnie , qui font un ecuflhn de
finople à la pointe ondée d’argent , fur la quelle eft
couché un fleuve au naturel , appuyé fur une corne
d’abondance d’or au chef d’azur , femé de fleur-de-lis’
d’o r , foutenu d’une fafé en devife aufli d’o r, ayant
deux fauvagespour fupports, & une courrone treflée.
Le 5 5e lui permet de dreflèr des réglemens & ftatuts
tels qu’il conviendra pouf la direction & gouvernement
de fes affaires , foit en France , foij dans les
pays de fa conceffion , qui néanmoins feront confirmés
par lettres patentes enregiftrées en parlement :
6 par le 56e & dernier, pour ne point préjudicier
aux autres colonies déjà établies , il eft fait défenfes à
la compagnie de tranfporter, ou recevoir à la Louijiane
aucun habitant des autres colonies , fans une
permiffion par écrit des gouverneurs généraux deft-
dites colonies, vifée des intendans ou commiflaires
ordonnateurs..
Pour achever de former cette compagnie , & y
ajouter ce qui manquoit à Ta derniere perfection y
le roi donna au mois de décembre de l’année 1717s
un nouvel édit , enregiftré en parlement le 3 1 du
mois aufli de décembre, parle quel en.dix-huitarticles
rédigés en forme de règlement, on fixe le fonds d&
la compagnie à cent millions ; on affigne celui
deftiné pour le payement des ai rerages des nouvelles
rentes fur les fermes du roi ; on régie la contribution
que les actionnaires rentiers ferçnt tenus de faire en
cas qu’il fut befoin d’augmenter les fonds de la
compagnie : on marque les jours d’aflèmblées ,
foit générales,. foit particulières des directeurs &
actionnaires, les droits, de ces derniers &les fonctions,
des premiers; enfin on affure la difeipline. &la police
qui doit s’y obferver,, tant pour la tenue des livres r
que pour celle de la caiffe.
Le fonds de cette compagnie fixé à cent millions
par l’édit du mois de décembre 1717 s’etaut trouvé