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dation de plufîeurs marchands, ou même d’autres
perfonnes , qui ne font point engagées dans le commerce
, qui s’unifient d’intérêt & qui contribuent
de leurs Fonds, de leurs confeüs , de leurs foins ,
pour entreprendre ou fbutenir quelqii’étabfiftement
utile au négoce.
I l le fait des compagnies pour plufîeurs entEe-
prifes , comme pour des manufâttures , pour des
arméniens de vaiflëaux , foit en marchandife , en.
courfe, pour faire la banque , pour l’envoi & entretien
des colonies dans les pays nouvellement découverts.
Dans la librairie, pour l’édition des grands ouvrages
, foit des anciens, foit des modernes. Dans
les armées de mer & de terre pour la fourniture des
vivres, & encore dans ces dernières , pour la fourniture
des fourages , des étapes , des hôpitaux : en
un mot pour toutes fortes de commerce , foit en
gros , foit en détail, qui demandent des fonds & des
fecours extraordinaires, & au-defîus des forces d’un
feul .négociant.
Quoique compagnie & fociété foient en effet &
dans le fond la même choie l’ufage y met pourtant
quelque différence r fociété fe difànt de deux ou
trois négocians , ou de peu davantage. ( Ce qui eft
la fociété proprement dite , dont on traitera dans
l’article des foclétésj & compagnie s’entendant pour
l’ordinaire d’un plus grand nombre d’affbciés, qui
n’eft fixé que fuivant les fecours, dont ceux qui
s’àffocient, croyent avoir befoin pour les entreprîtes
ou les établiflemens qu’ils veulent faire. )*
Une autre différence entre les fimples fbciétés &
les compagnies y c’eft que ces dernières, fur-tout
quand elles ont des privilèges exclufifs, ne peuvent
être établies que par la conceffion du prince, & ont
befoin de lettres-patentes, d’arrêts du confeil, d’édits
& déclarations ; & que pour les autres , il fuffit
de la volonté des affociés, certifiée & fixée par les
actes 8c les contrats, autorîfée par les loix entre
particuliers.
Enfin il fémble que le mot de compagnie y en fait
de négoce, ne fe dite plus guères préfentement,
que de ces grandes affociations qui fe font faites ,
6 qui f e font encore pour les commerces étrangers,
& pour les voyages de long cours, telles q u e font
les compagnies F r a n ç o i f e s , Angloifes & Hollan-
doifes, des Indes orientales ou Occidentales , de la
Chine , de la mer du Sud, du Sénégal, du Cap-
v e r d , & autres f e m b l a b l e s dont on va parler, après
avoir expliqué quelques expreffions mercantiles, où
l’ufage a fait entrer le terme de compagnie.
Billets de compagnie. Sont des billets faits
pour emprunter de l’argent au nom d*une compagnie,.
& qui font foufcrits par un , ou plufieurs affociés.
Non-teulement les foufcripteurs font garans de ces
fortes de billets, mais encore leur foulcription engage
tous les autres afiociés , & emporte leur foli-
dité pour la filreté & le paiement des billets, comme
fi tous les av oient fignés.
Les billets de compagnie font ordinairement efti-
jbiss les meilleurs de ceux qui ont cours dans le
commerce. On en a pourtant quelquefois vu de-
très-décriés, & dont les efcompces égaloient celles des
plus mauvais papiers.
Quand un marchand1 ou banquier ajoute à- fou
nom , en foufcrivant un billet ou le ttre -d e -ch a n g e ;
le mot de compagnie, comme par e x em p le , Ùu-
mont & compagnie il faut entendre que ce biliee
ou lettre-de-change ne font pas de fon fait p a rtic u lie
r , mais une dette de lui- & de fes affociés.
Il en eft de même à proportion, quand un tireur
fe fert de ce terme en tirant une lettre fur des afiociés,
fes correfpondans , ce qui fe fait conformément »
l’exemple fuivant : monsieur Perard & compagnie ?
i l vous plaira p a y e r, &c.
Quelques négocians ont aufli coutume de mettre
le mot de compagnie dans lafufcription & adrefie
de lettres qu’ils écrivent à des affociés, ainfi qu’il
fuit : A Monsieur Divernay & compagnie.
Voici l’ordre que nous avons fuivi dans ce qui
concerne les compagnies de commerce de l’Europe%
dont nous allons parler ci-après*
Compagnies Franco i/ès*.
Compagnies établies à Vienne >. &dans les Pays*
Bas Autrichiens.
Compagnies Portu0 ifes.
Compagnies Hollandoijes*
Compagnies Angloifes*
Compagnie des états du roi Georges, en Allemagne*
Compagnies Ecojfoifes'•
Compagnies Danoifes
Compagnies Suédoifes*
Compagnies GlnoifesI
Compagnies F rançoifes établies pour tes commerces
& voyages de long cours.
C’eft véritablement aux Portugais que l’on doit
la découverte de la route des Indes orientales , par
le Cap de Bonne-Efpérance , comme on doit pareillement
aux Efpagnols celle des Indes occidentales-,
également inconnues avant eux aux anciens & aux
modernes.
Les François ont femblé cependant vouloir en
difputer l’honneur aux uns & aux autres. Aux Portugais
, parce que quelques hiftoriens difent, qu’avant
1402 , ou plutôt en 1417 , Jean de Be-
thencour*,. gentilhomme Normand , eût fait la conquête
des rfles Canaries , les François avoient pénétré
jufqu’à la Côte d’o r , 8c au-delà. Et aux Efp2X
gnols, fur une vieille tradition-., peut-être affez
équivoque, qui veut, qu’en 1484, un pilote de
Bifcaye , ayant été jetté par la tempête dans une-
des ifles de l’Amérique , & étant mort depuis entre
les bras de Chriftophe Colomb j ce fameux navigateur
ne fit enfuiteles découvertes que furie journal
& les inftrii ôtions de ce François..
Quoiqu’il en foit, fans etnrer dans cette difpute s
ce qui eft bien certain, c’èft que dès l’an 142.0 ,
Henri, fils fie Jean premier-, roi de Portugal, fit
faire quelque découverte le long des côtes d’Afrique.
Qu’en. 14.87, fous le règne de Jean fécond , Barthélemi
Dias , doubla le cap des Tourmentes, qu’011
nomme préfentement le cap de Bonne-Efpérance.
Et qu’enfin fous Emmanuel , fuccefteur de Jean
fécond, le célébré Vafco de Gama étant parti,
pour tenter la même découverte , au mois de juillet
14577, arriva devant Calicut, royaume fur la cote de
Malabar, dans la prefqu’ifle de l’Inde, au-deçà du
gefife de Bengale, au mois de mai de l’année
fuivante.
A l’égard des Indes occidentales, plus connues
fous le nom d’Amérique, perfonne n’ignore l’heu-
reufe témérité de Chriftophe Colomb, & tout le
monde fait que cet hafardeur Génois , après s’être
vainement offert à fa patrie, à la France, à l’Angleterre
, au Portugal, & même à des feigneurs particuliers,
obtint enfin des Rois Ferdinand & Ifabelle,
lin allez modique armement, avec lequel ayant fait
voile le 3 août 1492, il découvrit le 11 octobre de
la même année, l’ifie qu’il nomma de Saint-
Salvador y dont il prit poffeflîôn au nom de fes
maîtres, & qui fut les prémices des conquêtes
prefqu’incroyables, que firent depuis Fernand-
Cortes du côté du Mexique, 8c les Picards du
côté du Pérou.
Les François ne furent pas des derniers à courir
les côtes de l’Amérique ^ pour y faire ou des découvertes
, ou des établiffemens ; & il y eut aufli plufieurs
fi’entr’eux quife hafardèrent à fuivre les Portugais
jufqu’aux grandes Indes, ce qui donna depuis
occafion aux premières compagnies qui furent établies
en France.
Les Bretons , les Bafques, les Normands découvrirent
le grand banc en 1504. Us s’attribuent aufli
la découverte du B réfil, bien long-temps avant qu’A-
méric Vefpace y vint aborder.
Le cap Breton , & l’ifie de Fernambourg furent
découverts en 1520.,- parles trois frères Patmentiers,
qui pouffèrent même leur commerce jufqu’en Guinée
& aux Moluques.
La découverte de la Floride , de la Virginie, du
Maragnan, fe fit en 152.4, & l'on en prit pofleflion
au nom dé François premier.
Le Canada. devint François en 1534, par la
découverte de Jean Cartier de Saint-Malo 3 & l’éta-
bliflement qu’y fit le fieur de Roberval, gentilhomme
Picard, fix ans après en afiura la pofleflion à la
France , qui depuis ce temps-là en jouit paifible-
ment, & y a une floriflànte colonie.
Pour ce qui eft des grandes Indes, quoiqu’on
voye dès le temps de François premier, des édits
de ce Prince, & particulièrement ceux dé 1537 &
1543 , pour exciter & animer fes fujets à entreprendre
le commerce & les voyages de long cours, il
ne paroîtpas que ceux qui fe firent alors , eurent
. un grand uiccès 5 & l’on ne voit rien de bien confi-
dérable avant l’armement du capitaine le Lièvre de
Honfleur en 16\6 , 8c celuidu capitaine de Beaulieu
en 1615?, qui y conduifirent chacununeefcadre.de
trois gros vaifteaux, dont une partie revint en France
ferèi richement chargée*
Le capitaine Régimont de Dieppe , 8c Ricaut,
capitaine de vaifleau du roi, ne firent pas non plus
ce voyage infruôtueufement en 1637 , & dans le*
années luivantes.
Toutes ces eutreprifes n’avôient été jufques - là
que l’ouvrage de quelques particuliers, & ce ne
fut proprement que fous le miniftère du cardinal de
Richelieu, que l’on vit fe former en France des
compagnies fous l’autorité' du roi, & avec fes lettres-
patentes, pour l’une & l’autre Inde.
Celle de la nouvelle France fut établie p comme
on le dira dans la fuite, en 1628 j & celle pour
l’ifie de- Saint-Chriftophe une des plus confîdérabies
des Antilles , fut établie au mois d’oôlobre 1626 ,
tant pour cette Ifle que pour les ifles adjacentes,
& fut confirmée en 1642 pour toutes les ifles d’Amérique
, fituées depuis le dixiéme degré jufqu’au
trentième au-delà de l’équateur.
Ce fut à la valeur & à la bonne conduite ds-
M. Defhanbuc, gentilhomme Normand, de la mai-
fon de Vanderop, que la France dût cet établiffement*
Celui de la première compagnie pour les grandes-
Indes , eut pour auteur le capitaine Ricaut, donc
on a déjà parlé , & ne.fe fit qu’en r^42.
Vingt-quatre particuliers, négocians & autres s’étant
unis-pour le commerce d’Orient r Ricaut obtint
pour dix ans une conceffion exclufive de le faire fèui
avec fes affociés , & au mois de Septembre de l’année
fuivante , il la fît confirmer par fies lettres-patentes-
du roi Louis XIV , nouvellement monté fur le
trône.
Quoiqu’il parut que cette compagnie n’eût en.
vue que le commerce des côtes Orientales de l’Afrique
, & particulièrement l’établiffement d’une co*
Ionie à Madagafcar, ( peut-être pour ne pas donner
de jaloufîe aux Hollandois, dont la France avoir
alors befoin , ) elle pouffa néanmoins fon négoce
jufqu’à Surate, & aux autres ports des côtes dfe-
cette partie de l’Inde.
La compagnie de R ica u t, que les troubles delà
minorité de Louis X IV , avoient fort affoiblie y
obtint néanmoins une nouvelle conceffion à l’expiration
de lapremière. Mais le maréchal de la Meille-
raye, qui avoit pris goût pourla colonie de Madagafcar
, fur les rapports favorables que lui en avoit
fait Pronis ", premier gouverneur de 1 iïle de Madagafcar,
& infidèle ferviteur de fes anciens maîtres 3
ce maréchal, dis-je, s’en étant emparé par une efpèce-
de furprife, malgré les droits & les oppofîtions de-
cette première compagnie , il en demeura en pof-
feffion jufqu’à fa mort, 8c après lu i, le duc de Ma-
zarin fon fils , qui enfin, auffi-bien que les anciens
afiociés, céda fes prétentions 8c fes droits à la célèbre
compagnie des Indes, qui fut établie en 1664:
dont on va parler.
Compagnie des I ndes orientales*
On ne peut guères rien voir de plus beau & de
plus grand que le projet de cette compagnie , qui:
fut dreflé en 40 articles, le 26 mai 16.64., dans>