
raillions, payables en billets d’état, pour' lefquels ;
le roi créa quatre-millions de rentes au .profit de
la compagnie; fçavoir, deux millions fur la ferme
des contrôles , un million fur la ferme du
tabac & un million fur celle des portes.’Le pre-.
mier août 1718 , la compagnie fe rendit adjudicataire
de la ferme du tabac, fur le pied de quatre
millions 2,0,0001. j & par l’édit du mois de feptern-
bre fuivant, fa majefté aliéna au profit de la compagnie
, quatre millions fur cette ferme , pour tenir
lieu de la même rente créée par l’édit de 1717.
Le 19 feptembre 1719 , un arrêt du confeil ré-
duifit à trois pour cent la rente du capital de cent
millions, y affecta la ferme du tabac, & ordonna
que la compagnie rétiendroit annuellement trois
millions par fes mains pendant la durée de fon
b ail, & qu’enfuite les adjudicataires qui lui fuccé-
deroient, lui payeroient la fomme de mois en mois
à raifon de 2,50,0001.
La jouiffance du bail fut interrompue pendant
la régie ordonnée par fa majefté’, pour les affaires
de la compagnie & pour la reddition de fes comp-.
tes. Cette régie ayant ceffé, & le roi ayant jugé à
propos de rétablir la compagnie dans la jouiffance
de les effets, il fut rendu le zz mars 1723 , un
arrêt du confeil qui lui accorda la vente exclufive du
tabac , pour lu i tenir lieu de la rente de trois
millions jufqu’à la concurrence de deux millions
700,000 liv. le roi fe réfervant de pourvoir au
paiement des 300,000 I. reftans.
En conféquence il fut ordonné , par un arrêt du
1er feptembre fuivant, « qu’il feroit paffé à la com-
» pagnie des Indes un contrat d’aliénation , à
» titre Rengagement du privilège èxciufif de la
» vente du tabac, -pour demeurer quitte par fa majefté
» de la fomme de quatre-vingt dix millions fur la
» fomme de cent millions qui font l’ancien fonds
» de ladite compagnie , & qui , par elle, ont été
» portés au tréfor royal en exécution de l’édit du
» mois de décembre 1717».
Le contrat fut paffé le 19 novembre 1723, &
cette aliénation fut confirmée par l’article 7 de l’édit
du mois de juin 1715.
La compagnie , en jouiftant du produit de la-
vente exclufive du tabac , étoit donc cenfée n’avoir
<qu’un équivalent de deux millions fept cens mille
livres de rente , & le roi lui donnoit trois cent
mille livres par an pour completter la rente à trois
pouf cent du capital de cent millions.
Ces faits une fois établis, tout ce que la compagnie
a reçu par-delà Tintérêt à trois p our cent de
quatre-vingt-dix millions, eft une grâce dii Couve»
.rain, prife fur les revenus publics , c’eft-à-dire , en
dernière analyfe fur toutes les clartés des citoyens.
Or , à ne compter que de 1713 au 30 juin 1747,
on trouve déjà une fomme de plus de 130 millions
donnée par le roi à lu compagnie par-delà ce-
qu’elle auroit du recevoir, en vertu de fa rente de J
t-rois millions. En voici le calcul.
A trois millions par an la c om p a g n ie «’au ro it}
dd "recevoir , à compter du premier avril t'jz
jufqu’au premier
juillet 1747, que .
Dans ce même
intervalle, la compagnie
a reçu en
60,625,000 1
1715 • • • •, i. -
De 1725 au 30
avril 1730 annuel-
7,500,000
lement . . . .
Du 30 avril 17 30
à 1735 du prix de
bail des - fermiers
7,500,000
généraux . . . •
Et du premier
juillet 1735 jufo
qu’au premier juillet
7, 5 00,000»
1 7 4 7 • * .. . 8,000,000
Recette totale du premier avril
T713 au premier juillet 1747 . . 191,014,353 L
On a vu plus haut qu’elle n’aui-oit
dd recevoir que . • . .■ _. 60,615,000
Ainfi elle a profité fur l’état &
aux dépens des autres citoyens de * 130,3 87,353. L
Il fernble que les adminiftrateurs auroienc du fe
contenter d’un bénéfice aufti confidérable , -qu’ils
dévoient craindre que le miniftère n’ouvrit les yeux y
& qu en les ramenant à l’exécution du titre originaire
, il ne fut tenté de procurer, à l’état un fou»
lageme-nt de 5,300,000 1. par a n , en retirant une
conceffion dont le produit excédoit beaucoup la
dette de l’état , & qui étoit par-là nianifeftement
faite aux dépens de la ebofe publique. Cependant
nous allons voir la compagnie s’efforcer -de prouver
au gouvernement qu’elle a fouffert une perte
reelle , faire de cette perte un motif de demandes-
exorbitantes, & qui plus eft obtenir de nouveaux
fe cours auffi onéreux à l’état que les précédens;:.
c’eft ce qui fe parta en .1747*
On à-vu ei-deffus' que le capital'de la compagnie
ét-oit diminué de 1725 à 1743 de près de
quatorze millions. Les dépenfes occafionnées par la
guerre, qui fui vit de. près cette époque, abforbè-
reiit bientôt la plus grande partie des fonds circu-
lans dans fbn commerce. Elle fufpendit le paiement
des dividendes, des années 1744 & 1745, & elle
demanda aux aéfionnaires lin fupplément de fonds
de deux cents livres par aétion , auquel joignant
les trois cents livres pour les deux années de dividendes
, elle donna en paiement aux a&ionnaires
des billets d’emprunt de cinq cents livres , donc elle
fit l’intérêt au denier vingt , t-par ce moyen elle:
épargna dans ces deux années un paiement de
quinze millions , & elle fe procura un nouveau:
fonds de dix millions.
Malgré ces fecours la continuation des mêmes
dépenfes. augmenta encore là détteffe &:excita-Pim
quiétude,.des aétiqnnai.res , qui jufqLualors , s’étoient
regardes comme de Simples- rentiers , & par. cette
raifon avoieiit pris ’ peu d’intérêt aux fuccès du
commerce* Les- adminiftrateurs de la compagnie,
pour ranimer, la confiance des- a&ionnaires , eurent
recours aux bontés de fa majefté.
• fis préfentèrent ùri mémoire* contenant douze
chefs de demandes qu’ils firent monter à-des- fomnaes
Vmmenfês. Si ces demandes av oient été difcutëes
. rigoureufement , il eft vraifemblable. qu’ellçs au-
roient été réduites bien plus, encore qu’elle.s ne le
furent 5 mais l’on crut néceffàire. afors de foutenir
cet etabliffement , les circ.onftançes engagèrent à
donner, à la compagnie un nouveau crédit pour*
faire face a des emprunts qui lui. étoient devenus
neceffaires , & qui s’effeétuèrent- peu après ; &•
c eft d après ces motifs que le roi voulut bien
1^. porter l’intérêt’ des anciens cent, millions, de
trois a cinq pour cent, x°. fe reconnoître débiteur
de quatre-vingt millions au denier vingt, ce
qui fit monter le capital de la- dette dp çoi à cent
quatre-vingt millions &. l’intérêt de la totalité de
ce capital à neuf millions : ce-font les difpofitions
rte 1 edit du mois de-juin 1747..
Arrêtons-nous d’abord fur cette conyerfion,- à cinq
pour cent • de la rente du capital de cent millions ,
qui n avoit été conftituée- originairement qu’à, trois
pour cetit.
On ne démêle. dans l’édit aucun motif particulier
de cette claufe fi avantageufe à la compagnie & fi
onereufe a l’état. Elle n’y eft mêmë énoncée qu’in- j
eide m ment j comme fi une difjpofïuon qui chargeoit j
* envers la compagnie d’une rente de deux
millions eut été d’une petite importance. On ne peut
donc 1 attribuer qu’à la réfolution formée de fbu-
tenir la compagnie , .à quelque prix que ce fu t,
d apres les idees qu’on fe faifoit alors de fon utilité
pour le commerce & pour les opérations de finance,
idées ^ un peu differentes de celles qu’on en a aujourd’hui.
Quoi qu il en foie., le roi , par cet éd it, dom-
noit en pur don à la compagnie deux millions ’
’ e^ e ^es a perçus depuis l’époque de 1747
jufqu a préfent, c’eft-à-dire , pendant 22 ans , c’eft
une fomme de 44, 000, 000 qu’il faut compter
parmi les fecours abfolument gratuits que le roi a
accordes a la compagnie , pour l’encouragement de
ion commerce.
_ 2,0 .^?ur mettre le public à portée de juger fi les
«o millions étoient réellement dus par l’état à la
Compagnie , ou fi cette conceffion ne doit être regar-,
ee , au moins en grande partie , que comme une
pure grâce , il fumt de quelques réflexions fur le
mémoire qui a fervi de fondement à l’Edit du mois
de Juin 1747. Le mémoire- entier fe trouvera parmi
les pièces juftificatives, & fervira à tout leéleur défin-
.téreffé d une preuve , entre cent autres qu’on pourvoit
donner du peu de modération des compagnies fcxciufives dans fours demandes au gouyememenu
Le&motifs dëlaconcefiion de là fomme dê quatre-
vingt millions'énoncés dans les dérhandes d& la compagnie
, approuvés par, le- roi-en marge defdiccs
demandes, ou articulés dans rédit de Juin 1747-,
font i° . que c’eft à la bonne exploitation dè la
compagnie que l’augmentation du produit de la
ferme du tabac doit être-attribuée ÿ que le produit
n-etoit que de trois millions ,. lorfque là ferme lui
fut aliénée en 1723-, qu’il a monté fubitement à-
huit'millions- en 1730 , & qu’il eft de là juftice du
roi de tenir compte à la compagnie- de toutes les
depenfos- qu’elle a faites pour l’améliorer.
z °. Que la compagnie étoit propriétaire du
privilège, pour en jouir, à-quelque fomme que le
produit, eivput monté#.
3°. Qn’il étoit juftë que fa majefté fit raifon à la
compagnie, du profit que l’état avoit retiré de la
ferme du tabac. depuis. 173 8 , outre & pardeffus les
huit millions qui lui avoient été annuellement
payés.
0 i- ces crois prétextes font Mîüfoires... Le premier
eft établie fur deux faits peu conformes à la vérité#
E n 1718 , ta vente exclufive avoit été affermée
4,020,000 1. Depuis 1724, elle,avoit, jufqu’à 1730 ,
eonftamment produit 7,500,000 1. C’eft en 1730 ,
c eft-à-T-dire , à l’époque de la ceffation de la régie de
la compagnie que l’augmentation fucceffive a coith
mencé. En voici la preuve dans l’état fuivant.
La ferme du tabac - a produit net , déduction
fa ite de tous fra is , année commune.
S ç a v o I 3L>
Du premier oétobre 1730 au premier
ôétobre 1732- ...........................12,040,334 U
De 1732 à 1738 • . • . • 14,35.4,8^8
: De 1738 à 1744 18,50^,444
| Ue 1744 a T7 S° • . . . . . 21,25)8,535
[ De 1750 à 1756 25,114,3^2:
De 17S6 à 1762 . . . . . . 2,3.688,563
Il feroit donc plus naturel d’attribuer laugmen-»
tation du produit à la Régie des fermiers-généraux.
Mais la vérité eft qu’elle eft due à la fàntaifie du,
public , à l’empire de la mode , ou fi l’on veut-
à la connoirtance plus répandue de cè nouveau
befoin.
Le deuxième prétexte prétendu par la compagnie
eft encore bien moins recevable , quoique
avoué par le ro i, dans l’édit de juin 1747. Il eft
abfolument contraire au droit public du royaume.
Le roi eft regardé comme pouvant toujours rentre
r dans un engagement en rembourfant le prix
qu’il en a reçu. Ce principe qui peut-être auroit
befoin d’être modifié relativement aux domaines fon-
J cier§ $ à d’àutrçs objets ? eft au moins rigourçufe