
pas Jbefoin dy faire la guerre, ou fi il faut faire
la guerre pour ce commerce, c’eft une preuve dé-
raonftracive que nous ne devons pas y faire ce
Commerce.
Nous finirons par réfoudre une objeCtion qu’on
ne manquera pas de faire contre les vérités que
nous venons d’établir.
La plufpart des raifons que nous donnons de
n efpérer plus aucun fuccès dans le commerce de
l’Inde par la compagnie , prouvent , nous dira-
t-on , sujffi fortement contre tout commerce particulier
qu’on pourroit y entreprendre. La fituation
critique de l’Inde, celle de l’Europe en cas de
guerre, la concurrence de la compagnie Angloife,
&c. -font dés obftacles qui doivent aufli s’oppofer à
tout commerce François dans l’Inde , aufîi-bien
qu’à celui que nous y pourrions faire par le moyen
d’une compagnie à privilège exclufif. Il s’enfuivroit
donc de nos principes qu’il nous fera à jamais impof-
fïble de faire aucun commerce dans l’Inde.
Nous pourrions dire que les obftacles que trouve
la compagnie à la continuation de l’exploitation de
fon privilège exclufif, ne s’oppofent pas aufli fortement
au commerce libre : que le commerce particulier
échappe bien plus aifément à la guerre que
celui d’une grande compagnie dont les envois , les
retou rs, les - opérations, font vifibles à tous les
yeux : qu’en cas de guerre , le pis aller du négo- j
ciant particulier eft la fufpenfion du commerce,
au lieu que cette fufpenfion à laquelle les grandes
compagnies font 'aufli forcées , eft accompagnée
de dépenfes ruineufes, qui confomment en peu
d’années une grande partie de leurs capitaux, &c.
O n trouvera la preuve de ces vérités dans ce que
nous dirons plus bas de la poftibilité du commerce
particulier ,. en traitant la troifième queftion que
nous .avons annoncée ; nous nous contenterons ici
d’une feule réflexion qui renverfe l’objection qu’on
vient de propofer.
La poftibilité ou l’impoflibilité d’un commerce
particulier dans l’Inde, n’ont rien de commun avec
la queftion que nous examinons ici. Il s’agilïoit de
Lavoir fi la compagnie peut éfpérer de faire déformais
fon commerce avec plus de fuccès que
dans les années précédentes ; fi elle peut fe flatter
d’une augmentation de capitaux ou de bénéfices
de l’achat à la vente : nous avons prouvé que ces
efpérances étoient fans Fondement, & qu’elle a les
plus légitimes fujets de crainte pour 1 avenir, ou
plutôt une certitude entière de voir déchoir encore
êc fes bénéfices & fes capitaux ; nous en avons
conclu que la compagnie ne peut pas fe flatter de
pouvoir conferver fon privilège exclufif pour le
•commerce de l’Inde. Nos principes font vrais, la
conféquence. que nous en tirons eft jufte. Après
c e la , que de ces mêmes principes il s’enfuive aufli
que les François ne pourront faire aucun commerce
, même particulier , dans l’Inde, ( confé-
quence que nous n’avouons point , & que nous
combattrons plus bas ) , e’eft ce qui eft parfaitement
étranger à la véritable queftion, à la feulé
qui intereiïe la fortune des actionnaires, à la feule
qù’il s’agiflbit de traiter ici.
S E C O N D E Q U E S T I O N .
Les actionnaires peuvent-ils continuer l'exploita*
tion de leur privilège exclufif?
Apres avoir prouvé , comme on vient de le voir 9
qu il n’eft pas de l’intérêt des actionnaires eux--
mêmes, de continuer le commerce, l’examen de
cette fécondé queftion peut paroître, & devient en
effet fuperflu. Car puifque nous fommes allurés "
que la compagnie a toujours détérioré fou capital,
que fon commerce ne lui donne que de la perte
meme en temps de paix ; que rien ne peut lui faire-
efpérer un avenir plus heureux ; quelle ne s’elh
foutenue jufqu’à préfent que par les fecours exor—
bitans que l’état lui a accordés; il s’enfuit , que1
quand même elle pourroit pourvoir aux befoins-
du moment, elle ne devroit pas profiter de cette
refîource, qui ne pourroit que retarder la ruine*
pour fort peu de temps, & compromettre vifîble-
ment la fortune de fes actionnaires & de fes créanciers.
Cependant, pour né laiiïer aucune défenfe aux
partifans du privilège exclufif de la compagnie
nous allons encore faire voir qu’en fuppofant que
les actionnaires enflent le plus grand intérêt à continuer
le commerce, ils font aujourd’hui dans l’im-
pofîïbilité de confulter cet intérêt prétendu.
En effet, la compagnie a befoin , pour continuer
fon commerce en confervant fon privilège exclufif
d’un fonds nouveau de plus de foixante millions',
qu’il eft néceflaire qu’elle fe procure d’ici à une
epoque très-prochaine , foit pour fatisfaire à fes
engagemens , foit pour fuivre le cours de Tes opérations.
O r , elle eft dans l’impoflibilité de trouver
une pareille fomme ; elle ne peut donc pas- continuer
le commerce.
Nous prouverons la première de ces propofitions,
en mettant fous les yeux de nos leCteurs le réfumé
de l’état des dépenfes auxquelles la compagnie
reconnoft qu’il faut qu’elle fournifle jufqu’au 3 r
Décembre 1771 , dans le cas de la continuation
de fon commerce, état fourni par la compagnie
comme les précédens, & que nous accompagnerons
auffi de quelques obfervations*.
Je dis le réfumé de cet état, car l’état lui même
eft trop volumineux pour être placé ici. On ÿ
fait connoître les befoins de la compagnie , mois
par mois, du moment préfent au 3 1 décembre 1772..
\ Suivant cet état, la compagnie aura à emprunter
pour remplir fes befoins :
5 Ç A -y O X R :
En juillet 17651.......................« 11,830,208 1,
F,n janvier 1770. . • • . • • 10,35)7,561
En août 1770. .* . . . . . . 10,370,161
Nos obfervations feront courtes, mais décifives.
Les befoins de la compagnie ne fe trouvent bornés
à cette fomme, que parce que l’on a compté dans
l’état dont il s’agit, fur des recettes qui ne fe réa-
liferont pas en entier, ou qui ne rentreront pas en
argent, & par conféquent ne feront pas dilponi-
bles pour le commerce.
En effet, i°.,on compte dans ces états le produit
des deux prochaines ventes fur
k P^d de.......................• • • • 45,140,000 1,
20. On calcule comme fommes
à recevoir en entier , d’ici à décembre
1772 , dans le cas de la continuation
du commerce, les articles
fuivans.
juillet BHÜ H lM ff lB M Ie , (_ roi liquidées.. 4,020,701 1.
Retours desmar-
ehandifes en-
yoyées ci-devant
Décembre 1770*^^ aux ifles.. . . . 2,000,000
J Droits de tonneau
de 17651,
&c. . . . . . . . . , '' 840,406
r ‘Meubles & im-
\ meubles* cédés
Juillet 1771. ... .T au roi dans les
* / iflesrdç-Françe
^ & de Bourbon. 7,625,348
/■" Droits de ton- .
[ neau de 1770. 840,406
% Retours des mar-
1 chandifes en-
Décembre 1 7 7 1 ./ voyéesci-devant J aux -ifles. . . . . 4,256,000
/Retours des ifles
| de l’expédition
V de 1765à 1770. 3,65)0,000
CDroits de ton-
, , 1 neau de 1771. 1,050,000
Décembre 1 7 7 2 ./Retours des ifles
J de l’expédition
v. de 1770a i7 7 1. 3,690,000
T o t a l . . . . 28,012,861 1. ;
O r , t 9. fur le produit dès deux
prochaines ventes, on prévoit, fuivant
la IXe. obfervation fur l’état de fituation
ci-deffus, un d é f i c i t de. « 1,910,000 L
20.-L a fomme de 28,012,8611.
eft formée de différentes créances
fur le ro i, fufceptibles de quelques
réductions, & q u i, fuivant les apparences,
feront payées en contrats ;
des retours à attendre des iiles-de-
France & de Bourbon, qu’on ne
peut efpérer qu’en petite partie,
avant la fin de 1772 , & tout au
plus à raifon de 1,200,000 1. par an.
En déduifant de ces 28,012,861 1.
ce que la .C o m p a g n i e pourra en recevoir
en argent avant cette époque
, & que l’on eftime à trois millions
, les befoins de la c o m p a g n i e
augmenteront de. . . . . . . . 25,012 86r
A quoi il convient d’ajouter les
intérêts pendant deux ans des deux
fommes. ci-delïus, ci...................... 3,23 1,936
Total des fommes comprifes dans *
l’état de recette des d é p u té s& qui
ne rentreront point en argent, ce
qui doit augmenter d’autant les be-
foins. . . . . . . . . .. . . 30,164,707 **
Montant des befoins fuivant l’état
des députés. . . . . . . . . , 33,5^8,032
Total des befoins réels de la
compagnie. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6 3 , 7 6 2 , 8 2 9 1 .
Nous pouvons encore voir que
les befoins de la c o m p a g n i e montent
à peu-près à cette fomme, en
jettant un coup d’oeil fur l’état de
fituation au i avril 1769, que nous
avons vii plus haut , en nous
fouveïiant toujours que la c o m p a g
n i e \a befoin de deux fonds & demi
pour continuer le commerce.
En effet , nous avons vu que la
compagnie n’a pre{qu’aucun fonds
dont elle puiflè difpofer pour fon
commerce ; les 39 millions de fon
a<ftif cdnfiftant en .contrats & fonds
morts , & que , pour lç continuer,
il lui faut ;
r°. Les fonds nécdfaires pour
l’expédition de cette année , montant
, fuivant l’état fourni " par la
c o m p a g n i e , à. . . . . . . . . 17,175,000 1,
20. Ceux pour l ’expédition de
1776, montant, fuivant le même
état,a. .......................« . . » . 20,955,00©
38,130,000 L
F fffij