
manque de preuves, impofer le ferment à Tune
des parties. Elles peuvent nommer des commif-
lïons pour faire dépofer des témoins abfens. Elles
peuvent encore, au lieu de fixer des dommages &
intérêts , condamner à l'exécution précife d'un
engagement : mais , à l'exception de ces cas
d'un petit noqibre d'autres pareils , elles ne peuvent
s'écarter des principes de la commune loi j.
bien moins encore réformer a fous prétexte d'équité
, les jugemens rendus dans les autres cours ( i ) .
V I . La chambre des pairs eft la plus haute cour
de juftice : affiliée de douze grands ! juges , qui
cependant n'y donnent point leur voix , elle reçoit,
en certains cas , les appels des jugemens rendus
dans les deux cours d'equité, & les writs d'erreur
des jugemens rendus dans les tribunaux de la commune
loi.
VII. Les cours d'affife. Elles fe forment fur une
commiflion du roi : les juges parcourent un certain
nombre de comtés qui leur font alignées, ils
y vérifient, par des déclarations de jurés, les
matières de fait dans les çaufes pendantes aux
cours de Weflminfter j & ils prononcent de plus
fur les diverfes caufes criminelles. Ces cours d'af-
fifes font au nombre de quatre ; elles doivent em-
braffer toute l'Angleterre dans leur circuit. Elles
font compofées de deux ou plufieurs des juges
des cours de Weftminiter , qui font leur tournée
deux fois par an.
Il y a plufieurs tribunaux dont on ne parlera pas ici.
Je me contenterai d'indiquer la cour d'amirauté
où re(fortifient les affaires de la marine.
Celle du grand maréchal ou Ton juge des armoiries
& des généalogies.
Le tribunal de Lançaftre, qui, par une inftitu-
tiorï particulière, prononce exclulivement à tout
autre, fur les affaires de ce duché.
L e tribunal de l'archevêque deCantorbery , où
l'on eft obligé de porter les teftamens 5 car par un
refte de la féodalité , qu'il feroit temps d'abolir ,
un fils ne peut fe mettre en-pofifeffion de l'héritage
de fon père fans la permiflion par écrit de ce prélat
y l'archevêque de Cantorbery ne doitpas à la vérité
, la refufer s'il manque de motifs légitimes ,
mais il tire un gros revenu de ce privilège. Il nomme
auffi les notaires , lefquels n’ont point de charges
comme en France 3 & ne gardent pas aveç allez
de fojn les minutes de leurs aftes.
S e c t i o n I Xe.
Des formes obfervées dans la jurifprudence criminelle.
Lorfqu'un homme eft accufé de quelque crime
, le magiftrat qu'on appelle en Angleterre ÿ
juge de paix ( 2 ) , expédie un ordre ( Warrant y
de le faifir : mais ce -warrant ne lignifie autre
chofe, linon qu'on doit lui amener l'accufé j il eft
obligé de l'entendre, & de prendre par écrit fes
réponfes, ainlï que les diverfes informations. S'il
réfulte de cette enquête, ou que le crime n'a pas
été commis, ou qu'il n'y a pas de raifon de foup-
çonner la perfonne qu'on dénonce , il faut qu'il
renvoie l'accufé. Si l'enquête donne un réfultat
contraire, il doit exiger de l'accufé une caution
qu'il viendra répondre à l'accufation ; ou , s'il
s'agit d'un crime fur lequel la loi prononce une
peine capitale , l'envoyer réellement en prifon ,
pour fubir fon interrogatoire & fon jugement aux
premières alfifesi^)*
La précaution de faire examiner un accufé avant
de permettre qu'on l'emprifonne , n'eft pas la
feule que les loix aient prife en fa faveur déliés ont
établi que fa caufe feroit de nouveau difcutée,
avant de lui faire courir le hafard quelconque
d'une procédure. A chaque aflïfe , le shérif
nomme ce qu'on appelle la grande affemblée des
jurés ( grand jury ) : cette affemblée doit être de
plus de douze perfonnes, & de moins de vingt-
quatre , & eft toujours formée des habitans les
plus qualifiés : on la charge d'examiner les preu-
| ves qui ont été données de chaque accufation ;
i & fi deux arbitres ne trouvent pas qu'une accufation
foit fondée, l'accufé eft relâ.c|ié fur le champ :
; f i, au contraire , il y en a douze qui jugent les
preuves fuffifantes , l ’accufé eft indifted, &: on
le retient fous bonne garde jufqu'à la fin du procès.
Lorfque le jour du jugement eft arrivé , le pré»
venu comparoît à la barré du tribunal. Le juge ,
après lui avoir lu le bill de fon inüiftment 3 doit
lui demander comment il veut être jugé , il
répond par Dieu & la loi de mon pays ; ce qui eft
une manière de réclamer les moyens que la loi
lui donne pour fa juftification.
Le sheriff nomme alors ce qu'on appelle les
petits jurés , {petti jury ) (4) : cette affemblée doit
être compofée de douze hommes, choifis dans le
comté du prévenu (5); ils doivent être poffeffeurs
d'un fonds de terre de dix liv. fterling de revenu ;
& c'eft fur leur déclaration qu'on condamne ou
qu'on a,bfout l’accufé.
Il eft néceffaire dans les principes de la confti-
tution , que l'accufé ait une grande influence fur
le choix de ces hommes dont fon fort dépend ;
auffi la loi lui en art-elle donné une très-conlï»
( 1 ) Commentaires de Backftone , liv . 3. chap.- 47. ,
(z) Les juges de paix font un certain nombre d’ officiers que le roi n'omme tous à la fois dans une ccmmiifion générj
pale donnée fous le grand fçeau : leur fonction eft de conferver la paix dans tel comté.
(3) Les affifes fe tiennent une fois tous les trois mois dans les comtés ; Sc à Londres il n’y a que fîx fçmaînes
4’intervalle de l'une à l'autre.
4) Le shériff en préfente quarante-huit, & c’eft ce qu’ on appelle l e pannel,
i 's) Liberps & legales hçmines dç vicineto.
dérablcV
dérable, parle grand nombre de récufations qu'elle
lui accordé.
' Ces récufations font de deux fortes. La première,
qui s'appelle récufation ( to ikearray) , eft
{k>ur rejetter tout le pannel : elle a lieu dans le
cas où le sheriff, qui l'a formée , ne peut-être
regardé comme indifférent ; par exemple, s'il eft
intérefle dans l’accufatiow , s'IFeft parent ou
àllié de l'accufateur, où‘en général de la partie
lézée.
La fécondé efpèce de récufation , qui s'appelle
récufation, to ihe poil 3 ( in capita ) a lieu contre les
jurés pris féparément, & Coke la divffe en quatre
éfpèces ; celle qu'il appellepropter honoris refpeftum,
eft fondée fur la différence de condition ; ainfi le
prévenu roturief'peut récufer un lord dont il voit
le nom fur le panneL Celle qu'on appelle propter
deliétum 3 a pour but d'éloigner un homme qui au-
roit été flétri par un jugemènt.-Celle' qu’il appelle.
propter defeclum 3 s'emploie contre un juré qui feroit
étranger, ouqui n'auroit pas un fonds de terre
de la valeur fixée par la lo i. Par celle qu'il nomme
propter ajfectum, on récufe tout juré qui pourvoit
avoir quelque, intérêt à la condamnation de
l'accufé4: celui, par exemple, avec qui* on’ Suroît
quelque inimitié ; celui avec qui on feroit en procès
; celui qui ferdit; parent, allié ou affociéde
l'accufateur, ou d'une même corporation , & c . (1).
Enfin , pour raffurer jufqu'à' l'imagination de
l'accufé , la loi lui accorde.,. fans préjudice des
diverfes récufations ci-deffus, la récufation pé- ,
remptoire , •' c'eft-à-dttfe 'j • fins alléguer de raifon ,
de vingt jurés fucceflivement (2) .. «
M. de Montefquieu dit à cette éçcafion : « cha-
« que année le préteur romain fdrmoit une-lifte (3)
sa ou tableau de ceux qu'il choififfoit pour faire la
>3 fonélion de juges pendant l'année de fa magiftra-
33 ture. On en prenoit le nombre fûffilànt pour
^ chaque affaire. Cela fe pratique à- peu près
« de même j?n. Angleterre. Et ce qui étoit très-fa-
>3 vorabîe à la (4) liberté , c'eft que fe préteur
» prenoit les juges du confentement ■ ($} des-paras
ties. Le grand nombre de récufations que l'on
as peut faire aujourd'hui en Angleterre 3 revient à
53 peu près à cet ufage »• Mais il auroit dû qbfer»
ver que les anglois , en tirant cet ufàge de Rome,
l'ont beaucoup perfectionné.
- Lorfqu'ehfin l'afferùblée des jurés eft formée
d'une manière invariable , Y indi ciment eft ouvert,
& l'accufateur donne les preuves de fon accufation.
Mais, à la différence des règles prefcrités
par le droit civil des romains', les témoins dépo-
fent en préfence de l'accufé : il peut leur propofer
des queftibnsj produire des témoins en fa faveur,
& leS faire dépofer fous ferment. Enfin, il a un
' cônfeil-pour l'aider, non-feulement dans la dif-
cuffion du point de droit qui fe trouve mêlé
; avec le fa it , mais aufli dans l ’éclairciffement du
fait lui-même j ce confeil lui indique les questions
à faire, ou même les fait pour lui.
Telle eft la bienfàifance & la douceur de la loi
dans les accufations ordinaires ; mais s'il s’agit d'un
crime de haute - trahifon, & de misprifion de tra-
hîfon, c'éft-à-dire, de confpiration contre la vie
du roi ou contre l'é ta t, & de non - révélation >
comme ces ( 6)' accufatiohs fuppofent un parti &
desiâccufateurs puiflans, elle donne à l’accufé de
nouvelles reffources.
D'abord, aucune accufation, à moins qu'il ne
foit précifément queftion d'un attentat fur' la vie
du roi, :ne peut être reçue trois années après l’é-
j pôque du délit. 20. L'accufé', outre les diverfes
récufations dont j'ai parlé , récufe péremp.
itoireméh’t jufqh'â. trente-cinq jurés. 30. Il peut
choifir deux confeils pour l'afiïfter dans le cours de
la procédure. 4Q.:<Afin qu’on n'écarte pas les témoins
qu'il veut produire, les tribunaux doivent
lui donner tous les feeours qui font uiîtés dans des -
cas pareils^ 50. On doit lui livrer, dix jours avant
le jugement ;eW préfence de deux témoins , &
pour cinq shellings , une copte de 'l.'ihdiâment
qui contiennè tous les faics^Furlefquëls porté l'aç-
cufation, le nom, la demeuré & l'état des jurés
qui compoferont. le pannel, & it êiuê. de; tous les
:témoins que l’on produira contre lui (7). '
1 Dans Je cas de haute - trahifon 3- :Sc dans celui
_ des crimes ordinaires, lorfque.racc.ufate.ur. & l'accufé
ont donné leurs raifons, & que les témoins
ont répondu aux 'queftions, foit des ju g és: foit
des jurés, l'un des juges prend la parole & récapitule
tout ce qu'on a dit ou produit d'effentiel. Il
explique aux jurés en quoi confiftê précifément
. l'état de la queftion, & il leur donne fon avis non
fur le fa it, mais fur lé point de droit qui peut fer-
( ï j Lorfque l'accufé eft étranger, la inoitié des jurés doit erre eomjpofé d'étrangers, c’eft ce qu’on appelle jury de me*
dietate lingues.
(» ) Si ces diverfes récufations épuiferit le pannel, on no011115. d’autres jurés fur un Wnt du juge, qui porte decem ou
o6l(T taies ; ©n les nomme, les taies.,
.( 3 ) Album judiciu,m, ‘ .
(4) Nos ancêtres n’ont-pas voulu, dit Cicéron pro C tu en t io qu’un homme dont les pairies ne | fer oient pas con-*
tente? pût être j.uge, non-.feülement Je la réputation d'un citoyen, mais .même de la moindre affaire pécuniaire.
( s ) VoyeX dans les fragméns de la loi fervihenne , de la cornélienne &' d'autres, de quelle manière ces loix don-
noienç des juges dans les crimes qu’elles fe propqfoient de punir. Souvent ils étoient pris par cho ix, quelquefois pac
le fort , ou enfin pair lë fort mêlé avec le choix,
(6) La peine de la non-révélation eft la confifcarron des biens:, & l’emprifonnement pendant la vie.
{ 7 ) Statuts ï de George -III c; 3 & - Ann. c. z i . Ce dernier afté ne devçit ay.Q_ir force de loi qu’après la mort du prç-
Kendant atftuel
fl£con. p o lit , & diplomatique, T om , 1 , Y