
fournit à la même peine les prêtres catholiques
qui reviendroient dans la colonie , après en avoir
été bannis > & la même peine encore aux quakers
qui reparoîtroient, après avoir été fouettés ,
marqués & chalfés. Telle étoit l’horreur qu’on
avoit pour ces nouveaux feélaires, ennemis de
toute cruauté j qu’on ne pouvoit en ramener aucun
dans le pays , ou l’y garder une heure , fans
s’expofer à payer une amende confidérable.
La colonie de la Nouvelle-Angleterre occupoit ,
avant la révolution , trois cens milles fur les côtes
de la mer, & elle svétendoit à plus de cinquante
milles dans les terres.
Les défrichemens ne s’y faifoient pas au hafard
comme dans les autres provinces. Dès les premiers
temps;, ils furent affuj.ettis, à des loix, qui
depuis ont été immuables?. Un citoyen 3 quel qu’il
frit J n’àvoit pas la liberté de s’établir même dans
un terrein vague. Le Gouvernement 3 qui vouloit
que tous fes membres fuffent à l’abri des injuriions
des fauvages 3 qu’ils fuifent à portée des
fecours d’une fociété bien ordonnée 3 régla que
des villages entiers feroient formés dans le même
temps. Dès que foixante familles offroient de bâtir
une églife 3 d’ entretenir un palleur , de folder
un maître d’école 3 l’affemblée générale leur afli-
gnoit un emplacement 3 & leur donnoit le droit
d’avoir deux repréfentans dans le corps légiilatif
de la colonie. Le diilriét qu’on leur affignoit étoit
toujours limitrophe des terres déjà défrichées, &
contenoit le plus ordinairement iîx milles quarrés
d’Angleterre. C e nouveau peuple choiliiFoit une af-
fiète propre à former, une bourgade dont la forme
' étoit généralement quarrée. Les temples étoient au
milieu. Les colons partageoient le terrein entr’ eux,
& chacun enfermoit fa propriété d’une haie vive.
O n réfervoît quelques bois pour une commune.
Ainiî s’agrandit continuellement la Nouvelle-Angle
terre3 fans ceffer de faire un tout bien organifé.
Les quatre provinces qui compofoient la Nouvelle
- Angleterre , n’avoient, dans l’origine , pref-
que rien de commun. La néceflité d’être.en armes
contre les fauvages, les décida à former en 164,3
une confédération à où elles prirent le nom de
Colonies- Unies. En vertu de cette union, deux
députés de chaque établiffement dévoient fe trouver
dans un lieu marqué, pour y décider des affaires
de la Nouvelle - Angleterre , fuivant les intimerions
de Taffemblée particulière qu’ils repréfen-
toient. Çetté aflociation ne bléffpît en rien le droit
qu’avoir chacun de fes membres de fe conduire
en tout à fa volonté, fans avoir befoin, ni de la
pèrmiflîon , ni de l’approbation de la métropole. ;
C e s provinces bornoient toute leur foumiflion à
reconnoître vaguement les rois d’Angleterre pour
leurs fouverains.
Une dépendance li foible déplut à Charles II.
La baie de Maffachufett, qui étoit la plus riche &
la plus peuplée des. quatre provinces., quoique la
moins étendue, fe rendit coupable de quelque ;
faute epvers te gouvernement. Le roi faifît cette
oçcafion, en 1684, pour révoquer les privilèges
de cette province. Elle fut fans charte jufqu’au1
détrônement de Ja.cques II. On lui en accorda une
alors, mais qui ne répondit ni à fes prétentions,
ni à fes efpérances; La cour s’y réfervoir le droit
de nommer le gouverneur, tous les emplois militaires
, les principales places de finance & de judi-
cature. En maintenant le peuple dans fon pouvoir
légiilatif, on attribua la voix négative, & le commandement
des armées au chef de la colonie 5 ce
qui lui affûroit une influence fuffifante pour confer-
ver dans fori entier la prérogative de la métropole.
Les provinces de Connedlicut & de Rhode-llland ,
ayant prévenu le châtiment par leur'foumiflion y
lorfqu’on dépouilloit Maffachufett, relièrent en
poffeflion de leur contrat primitif. Pour le N ew -
Hampshire, il fut toujours conduit à peu près fur
la forme d’adminillration qu’on avoit impofée à
Maffachufett. Un même gouverneur régiffoit
toute la colonie, mais avec les maximes propres
à la conllitution de chaque province.
A l’époque de l’infurredtion des colonies, les
dénombremens les plus exadts, portoient la population
de la Nouvelle - Angleterre à quatre cens
mille habitans, plus multipliés au midi qu’au nord
de la colonie , qù le fol eft moins fertile- Parmi
tant de citoyens, il ne fe trouvoit que peu de propriétaires
allez riches, pour abandonner le foin d e v
leurs plantations à des économes ou à des fermiers
: la plupart étoient des cultivateurs aifé s,'
qui vivoient fur leurs héritages, occupés d e t r a - ‘
vaux champêtres. Cette égalité de fortune , jointe
aux principes religieux & à la nature du gouvernement
, donnoit à ce peuple un génie plus républicain
que dans les autres colonies.
La Nouvelle - Angleterre , outre le commerce. '
qu’ elle faifoit de fes productions, s’ étôit appropriée
une partie des denrées de T Amérique, foit
méridionale, foitfeptentrionale, enfaifant paffer
par fes mains les échanges de ces deux contrées, ‘
Aufli les nouveaux anglois étoient-ils regardés
comme les courtiers , ou les hollandois de l’Amérique.
Malgré cette adlivité fi vive & fi foutenue, la
colonie n’a jamais été- fans dettes. Jamais elle n?a
pu payer exactement ce que la Grande - Bretagne .
Iiii fourniffoit , ou de fon induftrie, o u d e l’ induf-
trie étrangère, ou des Indes orientales : objets de
commerce qui s’élevoient chaque année ày une
fomme très - confidérable.
Cependant, fa navigation étoit affez animée pour
occuper habituellement 606© matelots. Indépendamment
des petits bâtimens qui faifoient la peche
ou le cabotage, & qui fortoient indifféremment de
toutes les rades ouvertes en grand nombre fur les
côtes, fa marine confiftoit en cinq cens navires,
qui formoient quarante mille tonneaux de port.
La plupart prenaient leur chargement à. Boiron ;
la plupart y faifoient leur décharge.
Un auteur bien inllruit, &: qui a voyagé
dans les colonies d’Amérique , par ordre du gouvernement
d’Angleterre ( 1 ) , donné l’état fuivant
des marchandifes exportées de la Grande-Bretagne
pourla Nouvelle- Angleterre.
Fer , acier , cuivre , bronze , fer-blanc &
plomb travaillés, draps de laine, étoffes, flanelles
, molleton, diverfes toiles, fo ie , galons d’or
& d’argent, mercerie, bonneterie, chapeaux,
velours de coton, coutellerie, quincaillerie, chanvre
, toiles à voiles, cordages, ouvrages de tapif-
ferie & de fellerie, menuiferie, couleurs, outils
de navires 3 agrès > poteries , marchandifes
des Indes, meules à aiguifer, filets pour la pêche
, fromages , viande falée 3 colifichets, breloques
, & c . femences , tabac , pipes, bière
forte , liqueurs, vins & drogues médicinales qui,
au prix moyen de trois ans, ont coûté 395000L
Marchandifes exportées de là Nouvelle-Angleterre.
.
1000 tonnes de morue, à 10 1.
Mâts , planches, poutres , ais ,
folives . . * ; ; .
70 navires, à 700 1.
8000 barriques de maqueraux &
alofes faléSj à 20 f. .
100, 0001.
45 , coo 1.
49.0001.
8,0001.
7000 tonnes d’huile de baleine
, à iy 1.
28 tonnes de fanons de baleine ,
àfOO l. • ' ;. . . .
1500 barriques de thérébentine ,
poix & goudron, à 8 f.
Chevaux & gros bétail,
8000 barriques de potaffe , à 50 f,
9000' barriques de viande fum é e ,
à 30 f. . . . . 1 3 , 5001.
Cires & divers articles, évalués
au prix moyen de trois années, . 9 , 0001.
0001.
10 S
8, 4001.
_ 6 o q 1.
12.0001.
20, 0001.
307, J001.
V :ye? les articles E t a t s -U n is , C o n n e c t i c
u t , M a s s a c h u s e t t , N ew-H à m p h i s r e e t
R h o d e - I s l a n d .
A N G L O - S A X O N S . Sous le nom d’A N G io -
S a x o n s , nous comprenons ic i les fa x o n s , les
angles , les jutes qui habitoient autrefois le Jut-
là n d , la S a x e , la W e llp h a lie , les deux F r ife s ,
la Hollande & la Zélande. O n les a quelquefois
appelles du nom général de germains.
Chaque province des germains avoit un préfi-
dent ou ju g e , nommé forjle dans la langue du
p a y s , &■ très-improprement roi ou prince par les
romains. . L ’ emploi de ce ch e f étoit de vifiter an-
nuéllement les terres , d ’en faire une nouvelle répartition,
de recevoir les plaintes, & de terminer
les différends > il étoit accompagné d’une efpèce
de cour, compofée. des jeûnes gens de la pro^-
vince , les plus diilingues par leur nobleffe (2)
& par leur mérite. Ces compagnons du prince ;
en latin comices, lui fervoient de gardes & de
confeillers , ils étoient également prêts à veiller à
l’exécution de fes décrets & à limiter fon pouvoir.
Juges en temps de paix , les chef? des germains
devenoient généraux en temps de guerre.
Sous eufc, des officiers commandoient, ou j comme
chez les francs 3 des compagnies égales .de
■ cent hommes , ou , à l ’exemple des Ifraëlites,
des philillins, des romains & des tartares, des
corps de mille, de cent, de cinquante & d e dix
foldats. .
- On a lieu de penfer , malgré le filence des'hif-
toriens, .que chaque province avoit fes affemblées
particulières , & que le prince , dont probablement
la dignité étoit à vie , ÿ faifoit l’office de
préfident. i l paroît qu’il avoit le droit , ou plutôt
qu’il étoit obligé d’avoir plufieurs femmes 3
il jouiffoit d’une plus grande portion de terrein j
& on lui attribuoit un quart dans les amendes
modiques , par lefquelles, tous les crimes , à là
réferve de ceux de haute trahifon & d’adultère 5
étoient expiés. Si fes revenus ne .fuffifoient pas y
il trouvoit cé qui lui manquoit dans les contributions
volontaires des peuples qu’il rendoit heureux.
Jufqu ici nous avons vu chaque province en
quelque forte indépendante , mais pour terminei
les querelles de corps à corps , pour travailler â
là fûreté mutuelle , pour réformer les abus, &c.
on eonvoquoit des affemblées générales. Chaque
homme libre des diverfes tribus pouvoit y aflif-
te r , & , dans des occafions importantes, il étoit
obligé de s’y rendre , fous peine d’une groffe
amende. C e tribunal fuprême fufpendoit toutes
les dillinétiohs d’Homme à homme. Tous y pa^-
roiffoient dans l’état d’ égalité naturelle. Chaque
particulier y étoît écouté, on tomptoit les fuf-
frages, & la pluralité décidoit. Les prêtres qui
dévoient fe livrer à l’étude de la fageffe & à la
pratique de la modération , préfidoient à ces af-
fèmblees 5 ils cqhfervoient l’ordre , recueilloient
lès ; voix , .& prôhonçoient les décrets.
Ces affemblées devaient être' tumultàeafes'.
aufli les queftioris. qu’on y agitoit étoient - ellefe
portées, en première iitftance, devant des confeüs
particuliers formés par les chefs des divers tributs
5 mais les délibérations de cès confeils ne
devênoièht des décrets que par l’approbation de
tout lé peuple affemblé.
( 1 ) F 'oyez le Voyageur américain , pag. 10p.
Géux^ qui , par leurs fervices , avoient" bien rii'érîté' <l.e Iz jjtftriSy êroient honores après* leur mort. Lesr enîaris de
s héros etoient nobles, & jouifloient de quelques diftîttftiohs , mt)hls' propres cependant £ fafiilkir'e' leifif Vanité dii*i
uc retracer fans cefle les devoirs qu l/*ur impofoit leur naiflànce.
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