
chaffés par les efpagnols. La jaloufie de ceux-ci
va jufqu’à défendre à des barques, même de pêcheurs
, rapproche d’un rivage où ils n’ont qu’ un
droit de poffeflion fans exercice. Condamnant
rifle des Crabes à une folitude éternelle, ils ne
veulent ni l’habiter, ni qu’on l’habite ; trop pa-
reflfeux pour la cultiver, trop inquiets pour y fouf-
frir des voifinS actifs. Un tel cara&ère de domination
exclufive a obligé le Danemarck de détourner
fes regards de l’ifle des Crabes 3 pour les porter
vers Sainte-Croix. Voye^ Sainte-Croix.
C R E A N C E . ( Lettre de ) On appelle lettre
de créance 3 la lettre d’un fouverain qui prie un
autre fouverain d’ajouter foi à ce que fon miniftre
lui dira de fa part. C ’eft cette lettre qui fert de
titre au miniftre public, qui le conftitue tel ^ &
qui autorife fa négociation.
Avant de préfenter la lettre de créance au fouverain
, le miniftre doit la communiquer au maître
des cérémonies, à l’introduéleur des ambaffadeurs,
ou à L’officier chargé de tout difpofer pour la
réception des miniftres publics.
On donne fouvent à un miniftre deux fortes de
lettres de créance. L ’une , appellée ordinairement
lettre de cachet, eft expédiée & contre-lignée par
le fecrètaire d’état des affaires étrangères , & on
l’appelle quelquefois lettre de chancellerie \ l’ autre,
appellée lettre de la main , eft lignée-de la main
du ro i, fans être contre-lignée. Les miniftres rendent
communément cette fécondé lettre à la première
audience particulière , & la première à l’audience
publique.
Les bulles que le pape donne à fes légats ,
indiquent leur commiflion , & leur fervent de lettres
de créance & de plein-pouvoir $ mais ce plein-
pouvoir a les mêmes bornes que la légation. Pour
conclure un traité, pour faire une alliance, pour
régler une affaire particulière, le .légat a befoin
d’un pouvoir fpécial. Quant aux nonces & aux autres
miniftres de la cour de Rome, ils reçoivent
du pape des lettres de créance, telles que celles que
les ambaffadeurs ont de leurs maîtres.
Les ambafladeurs que les princes envoient aux
fuiffes, ont uqe lettre de créance pour le corps
helvétique en général, une pour les cantons catholiques
, une pour les canton's proteftans, &
une pour chaque canton en particulier ; c’eft d’après
cet ufage que lorfqu’un ambaffadeur de France
arrive à Soieure, il communique fes lettres de
créance à tous les cantons , tant catholiques que
proteftans, pour fe faire reconnoître. Il fait en-
fuite fon entrée publique en cette ville. Le lendemain
de fon entrée, fe confeil va en corps le
complimenter j & , deux jours après, Tansbàffa-
deur fe rend à l’hotel-de-ville, où il prononce un
difeours relatif à fon ambaffade. Il remet en même-
temps fes lettres de créance à Tadvoyer en charge,
qui en fait la le&ure, & qui répond au difeoursde
Tambaffadeur. Les députés des Treize - cantons
font, quelques jours après, l’ouverture de La diète
qu’on nomme de légitimation, parce qu’elle eft
deftinéë à reconnoître foiemnellement le nouvel
ambaffadeur, & cette diète fe tient à Soieure dans
l’hôtel même de l’ambaffadeur, ou quarante-deux
députés du corps helvétique fe rendent de la mai-
fon de ville.
La lettre de créance conftitue le miniftre homme
public, repréfentant la perfonne du roi, ou de l’e-
tat qui l’envoie. Elle établit la qualité de celui qui
eft envoyé , & le déclare miniftre du premier* du
fécond ou du troifième ordre.
Si cette lettre ne donne pas précifément la qualité
d’ambaffadeur à celui qui en eft porteur, il ne
doit être traité que comme miniftre d’un ordre inférieur.
C R É A N G E -K R ICH IN G E N , comté d’ Allemagne.
C e comté fe trouve , ainfi que les feigneu-
ries qui en dépendent, dans la Weftrie i une partie
eft enclavée dans la Lorraine & le Luxembourg,
& relève à quelques égards de ces deux duchés.
C e n’étoit autrefois qu’ une baronnie : l’empereur
Mathias l’érigea en comté en 1619. Jean V»
l’ un des comtes de ce petit pays, laifla deux fils
George & Wirick , qui devinrent les chefs de
deux lignes diftin&es , celle de Putelange & celle
de Créange, & dont les rejettons mâles s’éteignirent
, ceux de la première en 16 8 1 , & ceux de la fécondé
en 1697. Chriftine-Louife, fille unique de
FerdinandUlric qu’Anne-Dorothée, fille du comte
Albert-Louis de Créange 3 avoit eu du comte Erard
Ferdinand d’Oftfrife, tranfmit alors ce domaine à
la maifon de Wiedrunkel, par fon mariage avec
le comte Jean-Louis Adolphe, malgré les prétentions
des princes de Solms-Braunfels , & des comtes
d’Ortenbourg qui en prennent encore le titre.
Les comtes de Créange ont voix & léance aux
diètes du cercle du haut-Rhin, & depuis 1765 à
celles de l’Empire, où ils fiègent parmi les comtes
immédiats de la Wetteravie. La matricule de
l’empire les taxe à deux cavaliers & quatre fan-
taftins, ou à quatre florins par mois > on dit que
cette fomme a é«:é réduite à la moitié. Ils payent
treize rixdales 46 ^ creutzers pour l’ entretien de
la chambre impériale.
La feigneurie de Saar-Wellingen fur la Saar ,
celle de Créange , Putelange & celle, de Rollingue
font toutes trois unies à ce comté, & relèvent immédiatement
dé l’Empire, & en partie des états
de Naffau-Saarbruck, ou du duché de Luxembourg.
C R E D IT , C R E D IT PUB L IC . le Di&.
des Finances.
C R EM O N O IS , ( le ) pays d’ Italie , au duché
de Milan. Il a été long-temps, comme tout lç
refte du Milanois, fous la domination de l’Efpa-
gne î mais depuis la guerre pour la fucceflion de
Charles I I , il a été cédé à la maifon d’Autriche
qui le poffède, ou plutôt à l’Empire dont il eft
un fief, & qui en laiffe la fouveraineté à Tempe
reur. Voye7 l’article M il a n o i s ,
C R Ê T E .
C R Ê T E . Voye[ l’article C andie.
C R IM E , aélion atrocecommife par d o l, & qui
bleffe dire&ement l ’intérêt public ou les droits du !
citoyen.
Différentes ejpéces de ■crimes. Principes de législation
fur cette matière. On peut ranger tous les
crimes fous quatre claffes : ceux de la première
choquent la religion, ceux de la fécondé les moeurs,
ceux de la troifième la tranquillité, ceux de la
quatrième la sûreté des citoyens. Mais cette di-
vifîon n’eft pas la feule qu’on puiffe faire j les ju-
rifconfultes en ont même une autre. En conféquence
les peines que Ton inflige doivent dériver de la
nature de chacune de ces efpèces de crimes. C ’ eft
le triomphe de la liberté, dit M . de Montefquieu,
lorfque les loix criminelles tirent chaque peine de
la nature particulière du crime : tout l’ arbitraire
ceffe , la peine ne dépend point du caprice du lé-
giflateur, mais de la nature de la chofe} & ce
n’ eft point l’homme qui fait violence à l’homme.
Dans la claffe des crimes qui intéreflent la re-
ligiop, font ceux qui J’attaquent directement, tels
fon t, par exemple , l’impiété, le blafphême, les
facrilèges. Pour que leur peine foit tirée de la nature
de la chofe , elle doit confifter dans la privation
de tous les avantages que donne la religions
l’expulfion hors des temples, la privation de la fo-
ciété des fidèles pour un temps ou pour toujours,
les conjurations, les admonitions, les exécrations,
& ainfi des autres.
La fécondé claffe renferme les crimes qui font
contre les moeurs j tels font la violation de la
continence publique ou particulière, c’eft-à-dire , '
des loix établies fur la manière de jouir des plai-
firs attachés à l’ufage des Cens & à l’union des
corps. Les peines de c e s crimes doivent être encore
tirées de la nature de la chofe : la privation
des avantages que la fociété a attachés à la pureté
des moeurs, les amendes, la honte, la contrainte
de fe cacher, l’infamie publique, Texpulfion hors
de la ville & du territoire} enfin toutes les peines
qui font du reffort de la jurifdiérion correctionnelle
, fuflfifent pour réprimer la témérité des deux
fexes } témérité qui eft fondée fur les paflions du
tempérament , fur l’oubli ou le mépris de foi-
même.
Les crimes de la troifième claffe font ceux qui
choquent la tranquillité des citoyens > les peines
en doivent être tirées de la nature de la chofe &
fe rapporter à cette tranquillité, comme la pri-
fon , l’ ex il, les corrections & autres peines qui
ramènent les efprits inquiets, & les font rentrer
dans Tordre établi.
Les crimes de la quatrième claffe font ceux qui
troublent la tranquillité , attaquent en même-tems
la sûreté des citoyens : tels font le rapt, le v io l,
le meurtre , l’affaffmat, l’empoifonnement, &c.
Les bons efprits examinent depuis long-temps fi- la
peine de ces derniers crimes doit être la mort j ceux qui
foutiennent qu’ou i, difent que cette peine eft tirée
(Scon, polit. & diplomatique. Tom, I.
de la nature de la chofe, puifée dans la raifon &
les fources du bien &~du mal $ qu'un citoyen mérite
la mort, lorfqu’il a violé la sûreté au point
qu’ il a ôté la v ie , ou même qu’ il a entrepris,
par des voies de fa it, de l’ôter à un autre citoyen :
cette peine de mort eft comme le remède de la fociété
malade.
Nous obferverons que l’auteur de YEfprzt des
loix généralife trop la queftion, & qu’en admettant
la néceflité ou l’utilité de la peine de mort
pour Taffaffinat & Tempoifonnement , il y a des
raifons affez fortes de prétendre que le rapt & le
viol pouvoient être punis d’une autre manière.
Voici les principes les plus importans, qu’il eft
bon d’établir fur cette matière.
i° . Le? légiflateurs ne peuvent pas déterminer à
leur fantaifîe la nature des crimes.
20. Il ne faut pas confondre les crimes avec les
erreurs fpéculatives & chimériques qui demandent
plus de pitié que d’indignation, telles que Ja magie
, le convulfionifme, &c.
30. La févérité des fupplices n’eft pas le moyen
le plus efficace pour arrêter le cours des crimes.
40. Les crimes contre lefquels il eft le plus difficile
de fe précautionner, méritent plus de rigueur
que d’autres de même efpèce.
50. Les crimes anciennement commis, ne doivent
pas être punis avec la même févérité que ceux
qui font récens.
6Q. On ne doit pas être puni pour le crime
d’autrui.
70. Il feroit très-injufte de rendre refponfable
du crime d’autrui, une perfonne qui n’ayant aucune
connoiffance de l’avenir, & ne pouvant ni
ne devant empêcher ce crime, n’entreroit d’ailleurs
pour rien dans Taéfcion de celui qui le doit
commettre.
8°. Les mêmes crimes ne méritent pas toujours
la même peine, & la même peine ne doit pas avoir
lieu pour des crimes inégaux.
9°. Les aéles purement intérieurs ne fauroient
être affujettis aux peines humaines j ces a£ e s , connus
de Dieu feul, ont Dieu pour juge & pour
vengeur.
io°. Le sa&es extérieurs, quoique criminels ,
mais qui dépendent uniquement de la fragilité de
notre nature, exigent de la modération dans les
peines.
i i ° . Il n’eft pas toujours néceffaire de punir les
crimes d’ ailleurs puniffables 5 & quelquefois il fe-
! roit dangereux de divulguer des crimes cachés,
par des punitions publiques.
12°. Il feroit de la dernière abfurditéde violer
les règles de la pudeur dans la punition des crimes,
qui doit toujours avoir pour objet le rétabliffement
de Tordre.
1 30. Un principe qu’on ne peut trop répéter ,
eft que, dans le jugement des crimes 3 il vaut mieux
rifquer de laiffer échapper un criminel, que de
punir un innocent. C ’eft la maxime des meilleurs
Z z z z.