
■ tète. Tous les rois qui afliftoient à cette cérémonie
, étoiènt placés indiftinôtement au milieu
des cardinaux, & paroiffoient comme autant de
fujets du pape.
Couronnement de F empereur d'occident. 1/empereur
d'occident fe rendoit autrefois à Rome, pour
y recevoir, des mains du pape, la couronne impériale.
Avant d'entrer dans la capitale du monde
chrétien, il s'engageoit, par le ferment le plus fo-
lemnel, à obferver les coutumes des romains. Il
iuroit, par la trinité, par le bois de la croix &
par les reliques des faints, de protéger, félon fon
pouvoir, la fainte églife romaine & le pape fon
chef ; il faifoit enfuite fon entrée dans Rome. Le
clergé venoit à fa rencontre, & lui préfentoit la
croix à baifer. Le pape, allîs fur un trône devant
le premier portique de l'églife de S. Pierre , at-
tendoit l'empereur. En paroiftant devant le vicaire
de Jefus-Chrift, fa majefté impériale fléchiflbit le
genou > & dans cette pofture , s'approchant de
plus près, elle parvenoit aux pieds du pontife
qu'elle baifoit dévotement. Le pape relevoit ordinairement
l'empereur & l'embraffoit, puis ils; entroient
enfemble dans l'églife. Là , on lui faifoit
jurer de nouveau de ne jamais rien faire contre
les intérêts de l'églife, ou plutôt du pape j puis
le pontife mettoit fur la tète de l'empereur la couronne
d'or. On revêtiffoit le nouvel empereur de
l'aumufle & du furplis, & les chanoines de faint
Pierre l'admettoient dans leur corps. Ce jour-là ,
l'empereur donnoit à laver au pape lorfqu'il fe
mettoit à table, & lui fer voit le premier plat. Le
couronnement étoitfuivi d’uneprocefiion folemnelle.
L'empereur s'y montroit d'abord avec les marques
de fa dignité, la couronne fur la tête, le fceptre
dans une main & le globe dans l'autre j mais,
au fortir de l'églife, il quittôit les ornemerts impériaux
, alloit tenir l’étrier du pape quand celui-ci
montoit à cheval ; &, prenant en main la bride, il
conduifoit ainfi refpe&ueufement le vicaire de Jefus-
Chrift. Il eft vrai que le cérémonial prefcrivoit au
pape de refufer d’abord par modeftie un pareil
fervice, & de ne l'accepter qu'au nom de Jefus-
Chrift dont il tenoit la place.
COURTISAN , on donne ce nom à l'homme
qui a des charges à la cour & qui y va fouvent.
Un écrivain de beaucoup d’efprit peint ainfi les
courtijans de fon fiècle : « n'efpérez plus de can-
» deur , de frarichife, d'équité, de bons offices,
» de fervice, de bienveillance, de générofité, de
» fermeté dans un homme qui depuis quelque
*» temps s'eft livré à la cour, 8<r qui fecrétement
33 veut fa fortune. Reconnoiflez un nouveau cour-
» tifan à fon vifage, à fes. entretiens. Il ne non>
?3 me plus chaque chofe par fon nom : il n'y a
» plus pour lui de fripons, de bourbes, defots
& d'impertinens. Celui dont il lui échapperoit
» de dire ce qu'il en penfe, eft celui - là même
»3 qui, venant à le favoir , l'empêcheroit dç che-
» min£r- Pépiant mal de tout le monde , il n'en
* dit de perfonne 5 ne voulant du bien qu'à lui
33 feul, il veut perfuader qu'il en veut à tous ,
,33 afin que tous lui en fanent, ou que nul j du
’» moins lui foit contraire. Non content de n'etre
>3 pas fincère, il ne fouffre pas que perfonne le
» foit j la vérité blefle fon oreille > il eft froid &
33 indifférent fur les obfervations que l'on fait fur
m la cour & fur le courtifan j & , parce qu'il les
»3 a entendues, il s’en croit complice & refpon-
33 fable. Tyran de la fociété & martyr de fon am»
33 bidon, il a une trifte circonfpeétion dans fa
»3 conduite & dans fes difcours, une raillerie in-
» nocente mais froide & contrainte , un ris force,
3» des careffes contrefaites , une converfation in-
’3 terrompue & des diftra&ions fréquentes : il a
» une profufion, le dirai-je , des torrens de louan*
33 ges pour ce qu'a fait ou ce qu'a dit un homme
.*> place & qui eft en faveur, & pour tout autre
» une fechereffe de pulmonique : il a des formu-
" les de complimens différens pour l'entrée & pour
» la fortie, a l'égard de ceux qu'il vifîte ou dont
33 il eft vifité } & il n’y a perfonne de ceux qui fe
33 paient de mines & de façons de parler, qui
» ne forte d'avec lui fort fatisfait. Il vife égalç-
»3 ment à fe faire des patrons. & des créatures : il
33 eft médiateur, confident, entremetteur j il veut
33 gouverner : il a une ferveur de novice pour
33 toutes les pratiques de cour : il fait où il faut
33 fe placer pour être vu : il fait vous embrafîer,
33 prendre part à votre joie, vous faire coup fur
»3 coup des queftions empreflees fur votre fanté,
33 fur vos affaires î & , pendant que vous lui ré-
’3 pondez, il perd le fil de fa curiofité, vous in-
33 terrompt, entame un autre fujet 5 o u , s'il fur-
33 vient quelqu'un à qui il doive un difcours tout
33 différent, il fait, en achevant de vous congra-
>3 tuler, lui faire un compliment de condoléance 5
33 il pleure d'un oe i l , & il rit de l'autre. Se for-
33 mant quelquefois fur les miniftres ou fur le fa-
33 v o r i, il parle en public dechofes frivoles, du
»3 v ent, de la gelée : il fe tait au contraire & fait
33 le myftérieux fur ce qu'il fait de plus important,
33 & plus volontiers encore fur ce qu'il ne fait
33 point 33. .
Ce portrait qui fans doute étoit reflemblant à
une autre époque, ne l'eft plus aujourd'hui 5 & il"
feroit au moins inutile ici d'efquiffer le.même portrait
d'après les moeurs actuelles. •
L'hiftoriette fuivante renferme ce qu'on peut
dire de plus utile dans cet article.
Le calife Mahadi, de la race des abbaffides ,
aimoit les lettres, les arts & les plaifirs. Il avôit
attaché à fa perfonne un courtifan 3 nommé ïacoub>
amateur comme lui des beaux arts. La voix agréable
d'Iacoub & fes faillies ingénieufes faifoient les
délices des feftins de fon maître $ il l'admettoit
même dans fon harçm ; car les califes n'étoient pas
aufli jaloux que les autres princes orientaux l'ont été
dans la fuite : cette foiblefle n’a fait que croître
chez les mufulmans.
Un jour Iacoub, fortant de la table du prince ,
montoit à cheval pour retourner chez lui } il fit
une chûte & fe cafta la jambe. Le calife, inftruit
de cet accident, 'témoigna tant d’inquiétude ,
donna tant de foins au blefle, qu'il excita la ja-
loufîe de tous ceux qui n'avoient pas, comme îa-
coub , le bonheur de plaire à leur maître. Plufieurs
entreprirent de perdre ce favori> ils s'entendirent
entr'eux, pour exciter des foupçons dans le coeur
de Mahüdi : tandis que la jambe d'Iacoub guérif-
foit, il perdoit la faveur & la confiance du
prince> car à la cour, plus qu'ailleurs, les abfens
ont toujours tort.
Le calife avôit oui dire fouvent qu'Iacoub
fervôit la race des Alides , ennemis & rivaux
de fa maifon : lorfque fon ancien favori fut
guéri, loin de lui laifler appercevoir de l'inquiétude
, il affe&a de lui donner des témoignages de
confiance. L'ayant appelle un jour en particulier :
«Iacoub, lui dit-il, je veux vous avouer ma foi-
»3 blefle j je détefte & je crains Mehemet, cet
»3 Alide qui eft demeure malgré moi dans Bagdad 5
» Il faut abfolument que je m'en défafle ».
Le favori voulut repréfenter à fon maître que
cet homme, fans pouvoir, fans amis, fans crédit,
n'étoit digne que de pitié : « n'importe, re-
» prit le calife, fon exiftence m'inquiété, & je
33 dois le facrifier à ma sûreté : il ne faut pas
33 le faire mourir en public , cela exciteroit la
33 compaflion générale. Je me repofe fur vous
» du foin de m'en délivrer j il eft ici , je
33 vais le mettre dans vos mains : fongez que
33 la tranquillité de votre maître dépend de vous 5
93 mais un fi grand facrifice ne doit pas demeurer
33 fans récompenfe ’• je vous donne l'efclave qui
33 foupà hier avec nous & qui parut vous plaire,
•33 & j'ajoute à ce bienfait vingt mille drachmes
*> d’or 33.
iacoub, comprenant qu'il ne falloit pas répliquer
, ne parla que de fa reconnoiflance. Le calife
ordonna qu'on lui remît à l'inftant l'efclave, la
viétime qui lui étoit confiée, & le prix du fang
qu’il devoir répandre. Iacoub , plus embarralfé de
Mehemet que flatté de la pofteflion de la belle enclave,
les mena tous deux à foa palais : il y étoit
à peine que Mehemet ± à qui le deflein du calife
n'avoit pu échapper , tomba aux pieds de celui
qu'il croyoit déjà fon bourreau. «Nepenfez pas ,
33 lui dit alors Iacoub, que mon maître veuille
3> votre mort, encore moins qu'il ait pu me choi-
33 fir pour un tel crime i mais vos prétentions doi-
33 vent l'inquiéter $ il faut que vous me juriez ,
33 fur la tête du prophète, fur celle du refpe&a-
33 ble Ali dont vous defcendez, que jamais vous'
33 ne fongerez à détrôner Mahadi, ni à former
33 aucun parti contre lui »>.
Le pauvre Mehemet , heureux d'en être
quitte à ce prix, promit, tout ce qu'on voulut.
« Allez, lui dit fon libérateur, je. vous irripofe
« encore cette J-pi de ne pas reparoître à Bagdad *
33 mais, eomme il faut que vous viviez, voilà
» une fomme. que mon maitre vous donne 33. Il lui
remit aufli-tôt les vingt mille drachmes d'or qu’il
venoit de recevoir.
Cette aêlion fut bientôt fue du calife 5 car la
belle efclave, • abandonnée fi généreufement à Ia-
coub , n'étoit qu'un efpion que le défiant Mahadi
avoit attaché à fes pas. Le-calife irrité fit venir le
prétendu traître. «Comment vous êtes-vous ac-
33 quitté, lui dit-il avec colère, de la commiftion
33 dont je vous ai chargé ? Prince, lui répond Ia-
33 coub, je m'en fuis acquitté avec la fidélité d’un fu-
»3 jet & l'intérêt d'un ferviteur zélé. Malheureux ,
33 répliqua le calife,vous avez fait échapper ma viéti-
3» me ! bans doute, reprend Iacoub, j'ai dû vous épar-
33 gner un crime dont vous vouliez que je ftift®-
33 complice, plutôt que de fervir votre inquiétude
33 & votre cruauté. Mehemet, gagné par ce dou-
33 ble bienfait, la vie & l'argent que je lui ai re~
33 mis de votre part, eft devenu votre ami. Vous
>3 êtes fouverain pour protéger les foibles, & la
>3 vie d'un- homme n'eft pas plus à vous qu'au
33 refte de vos fujets. Vous devez punir les
33 coupables., & nefn pas égorger les innocens
Le calife , frappé de cette vérité , rendit fa
faveur à cet homme jufte. « Je ne te croyois
33 qu’un courtifan aimable, lui dit-il 5 mais je vois
33. que tu es un véritable ami, un ami vertueux.
33 Je compte trop fur la promefle que t’a fait Me-
33 hemet, pour qu'il puifle déformais-me donner
>3 aucune inquiétude 33.
C O U TUM E . Voye-{ ce mot, fous toutes fes
acceptions, dans le Dictionnaire de Jurifprud.
CRABES , ( ifle des ) une des Antilles appartenant
au Danemarck.
Cette ifle, qui peut avoir huit ou dix lieues de
circonférence, offre un afîez grand nombre de
montagnes 5 mais elles ne font ni arides, ni efear-
pées, ni fort élevées. Le fol des plaines & des
vallées qui les féparent paroît très-fertile , & il eft
arrofé par de nombreufes four ces dont l'eau pafîe
pour excellente. La nature , en lui refufant un
port, lui a prodigué les meilleures rades que l'on
connoifle. On trouve à chaque pas des reftes d'habitations
, des allées d'orangers & de citronniers
qui prouvent que les efpagnols de Porto - Rico ,
qui n'en font éloignés que de cinq ou fix lieues,
y ont été fixés autrefois.
Les anglois voyant qu'une fi bonne ifle étroit
déferte, y commencèrent quelques plantations vers
la fin du dernier fiècle. On ne leur laifla pas le
temps de recueillir le fruit de leur travail. Ils furent
furpris par les efpagnols, qui maflacrèrent
impitoyablement tous les hommes faits , & qui
emmenèrent à Porto-Rico les femmes 8e les enfan«v
Cet événement n’empêcha pas les danois de faire
quelques arrangemens pour s'y établir en 1717..
Mais les fujets de la Grande-Bretagne „ réclamant
leurs anciens droits , y envoyèrent quelques aventuriers
q,uî furent d'abord pillés-, & bientôt apres